Cold heart ─ Pandaven

Cette journée aurait pu être bien banale et sans rebondissement, pour elle. Raven n'en doutait pas, sa venue chamboulait certainement ses plans, et il se délectait toujours de constater qu'il avait toujours cet ascendant sur elle. Il ne savait pas si elle partait rejoindre des amis, ou si elle avait prévu de faire quelques emplettes ; mais Raven s'imposait. Sorti de ce qui semblait être de nulle part, il était arrivé dans son dos, un bras passant derrière ses épaules pour venir se poser légèrement contre elle, et la saluer avec entrain. « Pandora ! Quelle surprise de te croiser ici. Alors, tu viens faire quelques emplettes ? T'as des plans ? » Des plans qu'il comptait bien évidement mettre sens dessus dessous, et comme à chaque fois, il allait l'embarquer dans ses caprices à lui. Le grand sourire aux lèvres, armé de sa fausse bienveillance à son égard, il la tenait avec force. Pour rappeler, encore, qu'elle n'était libre que parce qu'il la laissait l'être.

Pandora sursauta légèrement en sentant le bras de Raven autour de ses épaules. La familiarité de son contact ne la rassurait jamais, au contraire, elle ressentait toujours cette montée d'adrénaline, cette peur sourde qu'il lui rappelle qu'il n'était jamais loin, qu'il ne la lâcherait jamais. Elle le savait, Raven aimait ce jeu, ce pouvoir qu'il exerçait sur elle, et chaque rencontre n'était qu'une démonstration de force déguisée en amabilité. Elle força un sourire, comme elle le faisait toujours, dissimulant avec soin le mélange de colère et de résignation qui la consumait. Après tout, elle n'avait pas le choix. Ses mains se crispèrent légèrement autour du sac qu'elle tenait, essayant de ne pas laisser transparaître son inconfort. — Raven, quelle... surprise, dit-elle d’une voix qu’elle s’efforça de garder stable. — Oui, je... je devais juste faire quelques courses. Rien d'important. Elle pouvait sentir la pression de son bras contre elle, légère mais lourde de sens. Il ne se contentait jamais de simples salutations. Il devait toujours perturber, manipuler, rappeler qu’elle lui appartenait, d’une manière ou d’une autre. À chaque fois qu'elle pensait pouvoir passer une journée sans lui, il apparaissait, comme une ombre impossible à chasser. Pandora cherchait une échappatoire, une excuse pour s’enfuir, mais elle savait que ce serait vain. Raven ne l'aurait jamais laissée partir si facilement. Pas sans s’amuser d’abord. — Et toi ?. reprit-elle, essayant de maîtriser la situation, d'avoir l'air décontractée.  — Des projets en vue ou tu comptes juste... improviser comme d’habitude ? Elle savait déjà la réponse. Il n’avait jamais de plans qu'il partageait avec elle. Il se contentait de surgir, de bouleverser ses journées, ses semaines, parfois même sa vie entière, comme il l’avait fait ce jour-là, le jour où tout avait changé. Pandora leva les yeux vers lui, essayant de lire quelque chose dans son regard, mais ce qu’elle y vit n'était que ce masque jovial qu'il portait toujours en public, ce sourire qui cachait bien trop de noirceur. Elle ne savait jamais à quoi s'attendre avec lui, et c’était bien ça le pire.

Raven la rapprochait encore de lui, et il sentait Pandora se tendre sous sa prise. Elle le craignait toujours, et c'était bon signe. Il ne demandait que ça, pour s'assurer de son silence. Le regard vadrouillant sur les façades des magasins, il vérifiait un peu la zone et l'attention qu'on leur portait ─ aucune ─ avant de tourner la tête vers Pandora, lui adressant un grand sourire radieux. « Moi ? Juste content de te voir, et de fait, de pouvoir passer du temps en ta compagnie. Une aubaine n'est-ce pas ? » Pour elle, non ; pour lui, oui. Avec toute l'attention qu'il pouvait donner, comme replacer une mèche de cheveux d'un geste qui, de l'extérieur, pouvait sembler romantique, mais qui, pour lui, démontrait encore à son oiseau en cage qu'elle ne pouvait même pas causer une scène. Mais cruel comme il pouvait l'être, Raven ne se délectait pas nécessairement de ce qu'il faisait ; il s'agissait surtout de lui rappeler les mises en garde. Alors il se redressa, libérant doucement son épaule en lui faisant bien sentir la lente progression de son bras derrière ses épaules, et il regarda la boutique à côté d'eux. « Allez, je t'accompagne, je suis curieux de savoir ce dont tu as besoin. Tu me montres ? » Mais retirer son bras ne signifiait pas qu'il allait la laisser tranquille, car sa main vint attraper la sienne, avant de lui sourire et l'inviter à entrer. Plus il en apprenait sur elle, mieux il pouvait la surveiller, et surtout, la garder sous contrôle.

Pandora sentit son cœur s'accélérer alors que Raven la rapprochait encore. Cette proximité la déstabilisait, et malgré la peur qui montait en elle, elle ne pouvait ignorer cette étrange fascination qu'il exerçait sur elle. Une part d’elle détestait cette vulnérabilité, mais une autre, plus sombre, ne pouvait s’empêcher d’être attirée par l'aura de contrôle qu'il dégageait. Comme si, malgré la menace constante, il était devenu une figure incontournable de sa vie, un repère tordu dans son existence chaotique. Son sourire rayonnant, presque chaleureux, la rendait malade. Elle savait ce qu’il cachait, ce sourire. Chaque geste, chaque regard, tout était calculé. Lorsqu'il replaça une mèche de ses cheveux derrière son oreille, ce qui aurait pu être un geste tendre devint pour elle un rappel cruel de son emprise. Elle frissonna, luttant contre l'envie de se dégager, de lui montrer qu'elle ne se laisserait pas manipuler aussi facilement. Mais elle savait mieux que ça. Raven n’appréciait pas la résistance. — Une aubaine, oui... murmura-t-elle d’une voix presque imperceptible, un rictus sur les lèvres qu’elle espérait assez convaincant pour masquer la tempête intérieure qui grondait en elle. Elle baissa les yeux, incapable de soutenir son regard plus longtemps sans que la panique ne soit décelable. Quand il relâcha doucement son étreinte, elle pensa un instant pouvoir respirer, mais la main qu'il attrapa immédiatement après la ramena à la réalité : elle ne lui échapperait jamais vraiment. Chaque fois qu’elle pensait qu'il s’éloignerait, il revenait, encore plus présent, encore plus près. Il voulait tout savoir d’elle. Chaque détail, chaque habitude. Rien ne lui échappait, et elle se demandait jusqu’où il irait pour maintenir ce contrôle. L’invitation à entrer dans la boutique, même banale, prenait des allures d’ordre. Pandora n’avait pas vraiment le choix. Elle hocha légèrement la tête et le suivit à l’intérieur, sentant le poids de son regard sur elle, même s’il semblait s’intéresser à tout autre chose. Sa main dans la sienne était à la fois un ancrage et une chaîne, et elle ne savait plus où s’arrêterait la frontière entre sa peur et son étrange attirance pour lui. Car au-delà de la terreur, il y avait cette part d’elle qui se laissait captiver par lui. Par ce charisme sombre, cette présence imposante qui la faisait se sentir vivante, même si c’était dans la peur. — Tu vois quelque chose qui te plaît ? Peut être lui faire plaisir allait pouvoir le détendre un peu.

Si pour elle, toute cette oppression était un calvaire quotidien, pour Raven, c'était également complexe. Une situation forcée où il oscillait continuellement entre la sécurité ─ tu devrais te débarrasser d'elle ─ et le refus de faire une victime collatérale ─ elle était juste au mauvais endroit, au mauvais moment. Pourtant, il ne la violentait pas physiquement. Il n'avait jamais levé la main sur elle ─ juste pointé le flingue ─ et ne l'insultait pas. C'était juste... de la pression psychologique. Par sa présence, son contact, l'idée qu'il ne la lâchait jamais vraiment du regard. Il devait s'assurer qu'elle se faisait discrète, et ne se retournait pas contre lui.
La guidant à l'intérieur du magasin, il fit mine de s'intéresser à l'étalage. Une sorte de "tout à petit prix", avec plein des conneries plus ou moins utile. Tirant Pandora avec lui au travers des premiers rayons, il s'arrêtait à sa question et se tournait vers elle, interpelé par sa demande. Curieuse. Il ne savait pas si elle essayait de l'amadouer, d'en apprendre plus sur lui, alors il se rapprocha, légèrement penché sur le côté pour bloquer les potentiels regard curieux, et lui murmurait quelques mots, yeux dans les yeux. « Pourquoi ? Tu veux me l'offrir en cadeau ? Ou bien t'es curieuse ? » Et il n'allait pas bouger. Il allait obtenir sa réponse, planté devant elle de la sorte, sa main toujours captive de la sienne ; et si Raven n'était ni très grand, ni très costaud, il savait où placer ses doigts pour que sa prise demeure ferme. Son visage, même s'il demeurait amical, accompagnait les questions avec un sous-entendu hostile. Même s'il sourit, je suis capable du pire.

Pandora sentit un frisson glacial parcourir son échine alors que Raven se rapprochait encore, bloquant tout ce qui l’entourait. Son murmure, faussement doux, résonnait comme une menace sous-jacente dans ses oreilles. Ce sourire qu’il arborait, même amical en apparence, n’était qu’un masque. Un masque qu’elle connaissait trop bien, un rappel constant de la précarité de sa situation. Son cœur battait si fort qu’elle craignait qu’il ne l’entende. L’espace autour d’eux se rétrécissait, et la boutique elle-même, avec ses objets anodins et sans intérêt, devenait une cage où elle se retrouvait piégée, une fois de plus, avec lui comme geôlier. Pandora garda son regard baissé un instant, cherchant désespérément un moyen de s’échapper, même symboliquement. Elle savait qu’il n’était pas le plus fort physiquement, mais il n’avait pas besoin de l’être. C’était cette emprise psychologique, ce contrôle absolu sur chaque situation qui le rendait dangereux. La pression de sa main dans la sienne, ferme et déterminée, renforçait cette sensation d’impuissance. Elle inspira profondément, essayant de se calmer avant de lever les yeux vers lui, forçant un sourire qui ne parvenait pas à atteindre ses yeux. Il fallait qu’elle réponde, qu’elle joue son jeu. — Je suis juste curieuse, murmura-t-elle, tentant de donner un ton léger à sa voix, même si son cœur continuait de tambouriner dans sa poitrine. — Après tout, c’est rare que tu parles de toi… Alors, oui, ça m’intrigue. Ses mots flottaient entre eux, comme une tentative désespérée de reprendre un semblant de contrôle, d’afficher une façade d’indifférence face à la menace voilée qu’il faisait peser sur elle. Elle savait qu’il voulait une réponse, mais il voulait aussi sentir qu’elle cédait à sa pression, qu’elle était toujours sous sa coupe. Elle devait éviter de lui donner cette satisfaction, tout en évitant de le provoquer davantage. Mais derrière la peur, il y avait toujours cette étrange fascination. Ce regard intense qui capturait le sien, cette présence oppressante qui lui faisait sentir qu’elle comptait plus qu’elle ne le voulait. C’était toxique, elle le savait, mais il y avait une part d’elle qui se sentait vivante dans cette tension, même si c’était au bord du gouffre. — Alors, reprit-elle, essayant de maintenir son calme, — tu me dis ce qui t’intéresse ici, ou tu comptes garder le mystère ? Elle savait qu’il la testerait encore, qu’il pousserait ses limites, mais peut-être, juste peut-être, elle pourrait survivre à cette journée sans flancher davantage.

Curieuse, elle disait être. Curieuse de lui ? Certainement qu'elle devait l'être, parce que savoir qui il était pourrait lui donner des outils pour se défendre. Raven n'était pas stupide et était parfaitement conscient de la situation dans laquelle ils se trouvaient, alors il se redressa légèrement, lui redonnant un peu d'espace. Il savait qu'en la gardant en vie, il prenait des risques ; et elle savait qu'en étant en vie, elle représentait une menace. Alors le fait qu'elle soit toujours là, malgré la pression qu'il effectuait sur elle, signifiait bien qu'il y avait quelque chose d'autre. Mais quoi ? Raven lui relâcha alors la main, curieux de voir comment l'absence de son contact allait la faire réagir. Puis son regard dériva sur le rayon, et il fit quelques pas, la mine faussement pensive, laissant ses doigts pianoter sur la longueur de l'étagère qu'il frôlait distraitement. « Mmmh... » laissait-il entendre, avec une moue sur le visage. Puis il s'arrêta, et sa main piocha un objet au hasard d'un côté, et un autre objet au hasard de l'autre ; respectivement un porte-clé d'amanite tue-mouche, et une carte d'anniversaire pour des 60ans. Deux cadeaux au hasard, totalement irréfléchi, pour bien démontrer qu'il n'avait pas l'intention de lui donner ce qu'elle voulait, mais que puisqu'elle voulait jouer également, il allait entrer dans son jeu et raconter des bobards. « C'est mignon, tu trouves pas ? » fit-il en soulevant un peu plus le porte-clé du champignon. Puis il regarda la carte. « Et ça... J'ai mon oncle qui fête enfin ses soixante ans, même s'il n'en aura probablement pas conscience vu l'état végétatif dans lequel il se trouve. Mais bon, y'aura du gâteau, c'est ça de pris. » Son regard sombre revint sur Pandora, à qui il adressa un grand sourire. « Tu me les offres ? Quel couple parfait on forme, tu trouves pas ? » Ses bras s'abaissèrent, sans qu'il ne la lâche du regard, mais le sourire... changeait, un peu. Il fallait bien donner l'image, être convaincants.

Pandora observa attentivement Raven, sentant la tension se transformer subtilement. Il avait relâché sa main, ce qui aurait dû lui donner un certain soulagement, mais au lieu de cela, cela créa une nouvelle tension. Comme un test. Il attendait une réaction, une faiblesse, une faille à exploiter. Mais cette fois-ci, elle sentait qu'elle pouvait retourner la situation, juste un instant. — C’est vrai, c’est mignon, dit-elle doucement en prenant le porte-clé du champignon de ses mains. Elle tourna l’objet entre ses doigts, comme si c’était le plus précieux des cadeaux, avant de lever les yeux vers lui, avec un éclat dans le regard. — On pourrait en faire notre symbole, tu ne crois pas ? Ce petit champignon toxique. Une belle métaphore pour nous deux, tu ne trouves pas ? Elle maintenait son sourire, mais à l’intérieur, elle savait qu’elle s’aventurait en terrain miné. Jouer à son jeu était dangereux, mais il l’avait poussée à bout. Si Raven s’attendait à ce qu’elle tremble sous ses paroles cyniques, elle allait lui prouver qu’elle pouvait aussi jouer, et même renverser la situation. Pandora prit ensuite la carte d’anniversaire, feignant l’intérêt, avant de regarder Raven avec un éclat espiègle dans les yeux. — Soixante ans, hein ? Ça mérite bien plus qu’une simple carte. Je suis sûre qu’on pourrait organiser quelque chose de spécial pour ton oncle. Tu sais, en couple, on pourrait s’en sortir à merveille pour organiser des fêtes. Elle s’avança de quelques pas, réduisant l’espace entre eux, son regard planté dans le sien. Le sourire de Raven changeait, mais elle ne s’arrêta pas, elle appuya encore. — Tu as raison. On ferait un couple parfait. Une équipe imbattable, non ? Pandora posa doucement la carte sur l’étagère avant de se redresser face à lui, ses yeux accrochés aux siens. Elle savait qu’il ne s’attendait pas à ça. Leurs échanges, jusqu’à maintenant, avaient toujours été marqués par la peur, la tension, l'oppression. Mais aujourd’hui, elle voulait voir ce qui se passerait si elle poussait ses propres limites. — Alors, qu’est-ce que tu en dis, Raven ? On joue le jeu à fond, toi et moi ? Un vrai couple. Un vrai partenariat. Elle attendait, retenant son souffle. Elle savait qu'elle le déstabilisait, qu’elle changeait les règles, ne serait-ce qu’un instant. Le danger restait bien présent, mais elle savourait cet instant de contrôle, aussi fragile soit-il.

Elle osait, s'avançait, ne mettait pas un, mais bien deux pieds, dans l'arène où il oeuvrait habituellement seul. Pandora n'était pas une colombe en cage, et s'il s'en était toujours un peu douté, elle semblait pourtant s'attaquer trop doucement aux barreaux de sa cage. Et Raven, malgré son nom, ne se voyait pas comme un corbeau ─ plutôt comme une charogne. Il ne l'avait pas quittée du regard, et s'avançait d'un pas vers elle pour réduire encore la distance. Ils étaient maintenant bien plus proche, mais au lieu de lui répondre directement, il tourna la tête vers les porte-clés et changea celui de l'amanite par celui d'un petit diable. « Ça ne serait pas plutôt celui-là ? » Et alors qu'il reposait les yeux sur elle, deux doigts de sa main libre vinrent se presser contre Pandora, au niveau de ses côtes, mimant le canon d'une arme à feu ; et il lui murmurait au visage quelques mots empreints d'une menace sérieuse. « De quel jeu tu parles, Pandora ? Il me semblait pourtant avoir été clair. » Clair sur le fait que le jeu, c'était pour lui, pas pour elle ; qu'elle lui appartenait également, sa vie et son être dépendaient de son bon vouloir. Le jeu auquel elle voulait jouer, c'était pour mieux le lui arracher qu'il y participerait ─ et après de longues secondes à soutenir son regard sans ciller, il retira sa main et se détourna d'elle d'un air nonchalant. « Bah ! Il va bientôt mourir, ça ne sert à rien de faire la fête, ce serait de l'argent gaspillé et on aura certainement mieux à faire... Oh ? Ouuh, tu as vu ça ? Regarde ! » Il fit quelques pas en direction d'un objet caché par un autre, puis le tira pour le lui montrer ; une corde à sauter. « On peut en faire des choses avec des cordes. Beaucoup de choses, tu crois pas ? » Et si certains auraient tôt fait de penser à de l'érotisme, dans l'esprit de Raven rongé par les visions traumatiques, il n'y avait rien d'érotique à ça. Tout n'était que carnage, saleté, putréfaction ; la mort dans les pores et les songes.

Pandora sentit le souffle de Raven contre son visage, ses mots s'infiltrant dans ses pensées comme un poison lent. Le canon imaginaire de ses doigts pressé contre ses côtes fit monter une vague de terreur, mais elle la réprima aussi vite qu'elle était venue. Elle ne devait pas flancher. Pas maintenant. Pas après être allée si loin. Ses parents l’avaient déjà enfermée toute sa vie, bâtissant autour d’elle une cage dorée, invisible, mais impénétrable. L’empire familial était une prison aux barreaux polis, faits d’attentes irréalistes et d’obligations incessantes. Les apparences, le pouvoir, la perfection — tout était calculé. Ses parents lui avaient tout donné, sauf la liberté. Et maintenant, Raven l’avait enfermée dans une autre cage, plus brutale, plus oppressante. Sa prison n’était pas faite d’apparences, mais de menaces, de violence latente et de manipulation. Pourtant, dans le fond, c’était la même chose : un enfermement. Mais si elle avait appris quelque chose au fil des ans, c’est que les cages, quelles qu'elles soient, pouvaient être attaquées, même subtilement. C’est ce qu’elle faisait aujourd’hui. Alors qu’il se détournait d’elle pour se concentrer sur cette corde à sauter, Pandora sentit une vague de colère mêlée de résignation monter en elle. Des cages, elle en connaissait les moindres recoins. Elle savait ce que c'était de vivre sous contrôle, et si Raven croyait pouvoir la garder prisonnière éternellement, il se trompait. Elle prit une grande inspiration, le regardant manipuler la corde avec une indifférence calculée, comme si la menace venait de s’évaporer, remplacée par un simple jeu d’enfant. Mais elle savait que rien n’était innocent avec lui. Il n’y avait aucune légèreté dans ses gestes, rien de spontané dans ses paroles. Tout était calculé pour la maintenir sous contrôle. Pandora ne put s’empêcher de sourire intérieurement en observant la corde. Oui, ils étaient enfermés tous les deux, chacun dans leur propre cage, mais ce qu'il ne réalisait pas, c’était que sa propre cage à elle — celle construite par ses parents — l’avait rendue plus forte qu’il ne le croyait. Elle s’approcha lentement, réduisant la distance qu’il avait créée, et effleura du bout des doigts la corde qu’il tenait, plongeant son regard dans le sien. — Des cages... des cordes... on finit toujours par s’y habituer, tu sais ? Sa voix était douce, presque hypnotique, mais les mots portaient un poids caché. — Parfois, on se résigne à vivre dans une cage, parfois on apprend à la contourner... et parfois, on trouve un moyen de briser les barreaux. Elle soutint son regard, un mélange de défi et de résignation brillant dans ses yeux. Si ses parents n’avaient jamais réussi à la briser, Raven ne le ferait pas non plus. Il pensait avoir le contrôle, mais il ne savait rien de la véritable force qu’elle dissimulait derrière ses sourires forcés et ses gestes calculés.