NOT TODAY | XIVER

Et là ça connecte, hein, dans ton esprit ? Tu vois où elle veut en venir, pas vrai ? Soudainement, elle n’a plus l’air si dingue et tout son comportement est justifié. Puis son cœur qui bat plus lentement, tu l’entends ? Tu les aperçois les maux qui vont avec tes actes ? « Putain… » c’est l’adjectif qu’elle aurait pu accoler au prénom de ladite rousse, si elle avait bu un verre de plus avant ton arrivée, « j’étais sûr que c’était un piège. » il persifle pour lui-même, rumine au sujet de l’événement reconnu bien que pas tout à fait cité, elle imagine en tout cas, parce qu’Haiwee ne piège personne, n’est pas comme ça. C’est la spécialité de sa deuxième femme, il le sait.  

Ce n’est pas même un peu surprenant, le fait qu’il ne commence pas directement à plaider sa cause. Non, il choisit d’abord de stopper ses envies, se donner le droit de lui retirer le contrôle. « J’vous l’dit tout d’suite, elle n’a pas de quoi payer, » Risible à défaut d’être drôle. Mais elle l’a dit, elle a pris la décision de suivre les règles de son monde. « En nature… » ça devrait passer, articulé comme si elle y réfléchissait. Mais c’est l’univers tout entier qui a conscience que même alcoolisée, elle, jamais elle ne le trahirait. Ridicule, c’est elle qui l’est.

Alors, oui, elle ne passera pas à l’acte, elle n’en éprouve aucune envie, au contraire, ça la débecte de s’imaginer avec une autre que lui. Mais ça, c’est une énième preuve de sa stupidité. Des femmes, Sheng en a eu des tas avant elle, c’est une chose dont elle a toujours conscience, seulement lorsqu’il s’agit de Wendy, elle sombre dans la folie. Surtout qu’il est censé être son petit ami. « Si tu veux que je vous laisse la chambre ce soir, dis-le directement. » Elle lui sert une moue indécise, un pour ou contre qui balance en même temps que sa tête dodeline. Mais c’est la suite qui la termine ; « Je n’ai rien demandé. Elle est venue par surprise. » Une indéniable victime.

Une fois encore, elle a le rire mauvais, et malgré ce qu’il vient de lui intimer à elle ainsi qu’au serveur, elle termine son verre d’un trait avant d’en commander un autre, d’un mouvement de doigts directif, comme si elle l’avait toujours fait. Une piètre habituée. Et parce qu’il s’est lancé sur ce chemin, elle se fait exécrable afin de l’emprunter aussi, les mots malins, « Ose me dire que tu ne lui as pas rendu ? » Ce fameux contact. Risque-toi à lui souffler que tu n’as pas apprécié. « Ne serait-ce qu’une putain de seconde. » La tension palpable. Les nerfs prêts à craquer.

« Tu devrais t’arrêter. » Et plus il va lui dire de le faire, plus elle va avoir envie d’en boire un autre. Parce que ce soir, elle ne désire pas se plier à ses quatre volontés. Son rôle de la petite amie parfaite et dévouée, elle veut bien le laisser tomber quelques heures pour une fois. Elle estime, tout de même, qu’elle en a le droit. Si lui peut fourrer sa langue dans la bouche de Wendy, elle peut boire plus que de raison, n’est-ce pas ?

Mais c’est la suite, qui la saigne, la vérité ou presque qui la crève. « Elle m’a demandé de l’aide et je l’ai aidée. Et ça s’est arrêté là. » De l’aide… Comme si Wendy pouvait avoir besoin de qui que ce soit. D’un battement de paupière, elle le jauge encore une fois. Cette relation malsaine qu’ils entretiennent, ce n’est jamais qu’elle disparaîtra. « Quel altruiste… » railleuse, baisse le regard, blessée avant de demander, l’interrogation tremblante de colère. « Et t’as pensé à moi ? » Au moment où ses lèvres ont touché les tiennes ? Ou l’inverse, qu’importe l’ordre, c’est le même résultat. T’as pensé à ce que ça lui ferait de l’apprendre ? De passer pour l’idiote qui ne bronche pas. Qui accepte tout et n’importe quoi. Qui pardonne, à chaque fois.

Elle connait déjà la réponse à sa question, elle sait pertinemment que c’est non. Et ça rend le tout encore un peu plus douloureux. « Ca ne représentait rien. » C’est intéressant comme ça ne représente jamais rien mais surtout comme c’est récurrent. Il effectue des gestes, les garde secrets, mais ce n’est pas important. On se fiche même de son manque d’honnêteté.

Alors elle crache un soupir, entre le dégoût et le dépit, tandis qu’en désignant le serveur, il poursuit ; « Mais toi, tu ouvres tes cuisses au premier venu, » encore elle rit nerveusement, c’est donc tout ce qu’il retient de tout ça. Comme à son habitude, ne s’excuse pas de l’avoir heurtée. De fait, elle explose, le ton de la voix élevée, une scène de ménage prête à déborder. « Je l’ai fait ?! » Non, son tableau de chasse ne contient toujours qu’un seul prénom. « Je suis en train de le faire ?! » Non, plus. Elle est en train de chouiner parce que le seul qu’elle veut, c’est lui. Voilà toute la différence. Elle a cherché à le piquer pour lui rendre la monnaie de sa pièce, mais elle n’est pas comme ça. Le seul lit qu’elle va rejoindre plus tard, c’est celui qu’elle partage avec toi.

Le regarde de l’homme qu’elle aime est soutenu quelques secondes, juste après avoir quasiment crié, mais c’est son verre qu’il lève et termine qui retient son attention. Elle en sursaute presque lorsqu’il le fait claquer sur le bar. « C’est proposé. » Indirectement, elle se mord la langue pour éviter de le préciser. « Hey. » qu’il interpelle l’employé pour parfaire le scénario pornographique que dans sa tête il se fait. « Il n’a plus qu’à accepter. » Elle secoue le visage par la négative, « Et il serait con de refuser. » elle ne comprend pas comment il peut autant s’énerver, pour quelque chose qui n’existera jamais.

Forte d’un soupir, sa paume vient malaxer son visage, tente de dérider ses traits, avant de concéder, artificiellement. « T’as raison, Sheng. » L’énervement est toujours présent, mais les décibels de sa voix ont baissé, accusant le coup d’être blasée, « Je suis la fautive, ne te remets surtout pas en question. » Balayant l’air de ses doigts maintenant, entre eux, comme pour reléguer la véritable raison de leur dispute au second plan. « Et pour le fait de me l’avoir caché, » Car cela pourrait t’écorcher la bouche, si tu le faisais. « ne t’excuse pas. » Une nouvelle fois.