de l'art de ramasser des câpres (Benedikt)

De l'art de ramasser des câpres. , journée du huit août
à Salina, îles éoliennes - Sicile

Peut-être qu'il reste ce petit con éternel enfant parce qu'il n'a jamais été aimé par ses parents. Il faut dire qu'il a grandi sans qu'on prenne soin de lui, alors il n'avait pas le goût à rire ou s'amuser. Puis en plus, il se faisait malmener par son aîné, pas de quoi avoir l'envie de s'épanouir et de grandir. Plutôt celui de rester dans son coin pour comprendre la raison pour laquelle on n'est pas aimé. "Hm ?" Le blond redresse la tête et écoute Rainier. C'est vrai que ça l'est celle de se baigner le jour de l'An. "Ah non, ne me rappelle pas ça. On a failli y rester !" C'est sa gouvernante de l'époque qui prenait soin de lui, les visages de père et de mère n'ayant même pas passé l'embrasure de la porte. "Mais c'était amusant à faire, mine de rien. On a vécu un sacré moment avant d'attraper la crève." Poussant un long soupir, Benedikt pense lui aussi que Lilia devrait être présente. Après tout, ils forment un beau trio depuis un certain temps et même s'ils discutent ensemble, ils n'ont pas été réunis depuis trop de temps au goût du Marlowe. "J'en reviens pas que toi, tu puisses galérer dans une langue." Bien sûr, Ben sait qu'il en parle près d'une dizaine, alors ça le surprend. "Tu devrais apprendre en quoi, un mois facile, nan ?" Puis il est ici alors, il peut s'essayer avec les locaux. "En tout cas, je suis heureux pour Lilia. C'est bien qu'elle soit si amoureuse." Mais en même temps, si Jay lui fait du mal, Rainier et Benedikt devront agir. "J'espère qu'il ne gâchera pas tout, sinon on devra se charger de lui." Il n'en a pas envie, mais ce sera inévitable. En tout cas, ils finissent par arriver à l'activité des câpres et ils commencent à en cueillir. "Beaucoup de choses insolites, c'est-à-dire ?" Il est curieux, toujours, lorsqu'il s'agit des siens.



@Rainier de Danemark

Quand on était jeune on était un peu con, on faisait des expériences pas toujours heureuses. La baignade du jour de l'an dans une eau glaciale en faisait partie. Autant dire qu'après cette fois là où vous êtes bêtement tombés malades vous n'avez plus jamais recommencé. "On l'a appris dans la douleur, que c'était une idée de merde." Tu ricanas, encore amusé par ce souvenir. Après tout, ne disait-on pas qu'on apprenait de ses erreurs? Les adultes avaient beau vouloir bien faire, exiger la perfection, il fallait laisser la possibilité de se tromper, de se rendre compte soi-même des choses parce que l'échec faisait forcément partie de la vie, il ne fallait pas s'en prémunir à tout prix mais plutôt apprendre à rebondir, toujours. La vie n'était pas toujours un fleuve tranquille. Quand Bene te dit ne pas en revenir que tu galérais dans une langue, tu haussas les épaules, en profitas pour éponger ton front luisant de sueur avec la manche de ta chemise en lin blanche. "Et pourtant..." Tu fis une légère moue. "J'ai bloqué aussi avec l'espagnol l'année dernière, en Amérique du Sud. Heureusement que j'ai terminé mes études et que j'ai décroché mon diplôme parce que j'ai l'impression de ne plus rien imprimer." Il paraît que c'était un des symptômes de la dépression. On pouvait voir qu'une personne allait mal quand elle rencontrait des difficultés dans un domaine dans lequel elle excellait habituellement. "Avant il suffisait que j'aille dans un pays quelconque pour apprendre sur le tas, directement au contact des gens, ouais." Tu confirmas en hochant la tête. "Mais là, il semblerait que j'ai perdu mon mojo." Et pourtant il y avait des gens qui parlaient deux fois plus de langues que toi. L'essentiel était que tu avais appris les principales, qui allaient beaucoup te servir dans ton métier de journaliste. Tu approuvas doucement les paroles de Benedikt lorsque Lilia fut évoquée. "Pour l'avoir rencontré plusieurs fois il m'a l'air d'être un chouette gars, loyal et droit. Il sait ce qu'il veut et se donne les moyens d'y arriver, il revient de loin." Tu connaissais un peu son histoire pour en avoir échangé avec lui, et tu étais d'avis que certaines personnes avaient un destin hors du commun. C'était ton cas à toi aussi dans un tout autre registre parce que étant né second de ta fratrie, rien ne te prédisposait à monter sur le trône un jour et pourtant...Tu haussas encore une fois les épaules quand Benedikt t'interrogea sur les dingueries que tu avais vécues jusqu'à présent. "Des trucs vraiment bizarres, comme des touristes qui te demandent de prendre dix mille photos, ou des curés qui te font participer à la visite d'une cathédrale, ce genre de chose." Tu te penchas pour attraper un bouton et tirer dessus. "Et maintenant, un inconnu nous demande de ramasser des câpres. À ce tarif là j'espère que notre karma sera au max." Toi qui étais d'une nature très altruiste tu avais l'impression que depuis ton arrivée en Sicile tu ne faisais que ça, aider les gens.

De l'art de ramasser des câpres. , journée du huit août
à Salina, îles éoliennes - Sicile

Ne plus être des gosses pouvant faire des conneries qui sont normalement pardonnées. Seulement, à lui, on lui a toujours rappelé afin de lui faire comprendre qu'on ne peut pas avoir confiance. Pourquoi le pourrait-on ? Après tout, on lui a toujours fait comprendre qu'il n'était pas désiré. "J'ai cru que j'allais cracher mes poumons et tout le reste." N'empêche, il en sourit. Avec Rainier et Lilia, il n'a que de bons moments. Ils lui ont permis de prendre de grandes bouffées d'air frais avant de retrouver la demeure dans laquelle il a toujours étouffé. "Ah ?" Le blond ne sait que penser face à cette déclaration. Est-ce normal alors qu'il a constamment eu cette faculté de tout apprendre rapidement ? "Ça va ? J'veux dire c'est étrange, c'est sans doute l'épuisement psychologique." Mais ses mots ne font que faire croitre cette angoisse pour son ami. "Tu finiras par le ravoir ton mojo ne t'en fais pas." Il lui offre une tape réconfortante sur son épaule. Ensuite, il la lui presse tendrement pour écouter ce qu'il pense de ce fameux Jay. "Je suppose que je devrais attendre à le connaitre." Et aussi lui faire savoir qu'il risque sa vie s'il rend malheureux leur douce Lilia. "Moi aussi, j'ai pris des photos pour des touristes. On a même fait tourner cela en compétition avec Mala." Une Adams, Rainier la connait, ils ont fait la présidence l'année passée. "Pour le curé va falloir que tu en dises davantage." Il est vraiment curieux à ce propos le Marlowe. "J'ai cru que tu allais dire que tu espérais qu'on soit payé." Ben rit de bon cœur en cueillant ses câpres.



@Rainier de Danemark

Vous étiez tellement occupés à papoter que votre panier ne se remplissait pas des masses. Force est de constater que vous n'étiez pas capables de faire aller vos bras et votre langue en même temps. En même temps ce n'était pas nouveau que tu n'arrivais pas à faire plus d'une chose à la fois. Le pire c'est que vous étiez deux pour ramasser ces fichus câpres et ce n'est pas pour autant que ça avançait. Cela ne t'empêcha pas ricaner au commentaire de Benedikt concernant le fait de cracher ses poumons. "C'est vrai que c'est mieux de regarder les autres y aller." Parce que les malheureux ne savaient pas à quoi ils se frottaient alors que vous oui, en dehors des habitués bien entendu. La conversation dévia vers tes compétences linguistiques, tout du moins ton absence de compétences linguistiques ces derniers temps. "Ouais, peut-être." Tu acquiesças quand Bene évoqua ton possible épuisement psychologique. "J'ai déjà des troubles de l'attention en temps normal mais depuis la naissance du bébé c'est encore pire." Autre fait notable que tu allais mal, tu n'appelais jamais ton fils par son prénom, c'était toujours mon fils, le bébé ou encore le petit, comme si inconsciemment tu cherchais à mettre de la distance. Pour toute réponse, tu souris à Benedikt et tu essayas de t'y remettre, mais c'était difficile pour toi de focus sur ta tâche en cet instant précis tant tes pensées partaient tous azimuts. "J'ai une idée." Tu dis alors soudainement, en jetant à Bene un regard conspirateur. "Lilia nous a dit qu'elle viendra éventuellement en Sicile, non? Pourquoi on ne l'inviterait pas à rester chez ma grand-mère et on invite Jay par la même occasion." Lilia ne dirait sans doute pas non, elle qui disait qu'il faudra qu'on se retrouve quelque part cet été. Le mois d'août étant bien entamé vous n'aviez plus beaucoup de marge de manœuvre. Tu te frottas la nuque. Ah oui, les câpres. Tu plongeas la main dans le buisson à la recherche des petites baies. "Oh, c'est vrai, tu es avec Mala. Comment elle va? Je n'ai plus eu de nouvelles depuis le bal, il faut dire qu'on était vraiment dégoutés que tout ait été...saccagé." Ton visage se ferma en te remémorant ce souvenir pénible de votre présidence à la maison bleue. Focus Rainier, focus. Tu soupiras. "Quant au curé, il voulait qu'on l'aide pour faire la visite, ce qui est un peu compliqué quand on n'y connaît rien alors on a improvisé et on s'est lamentablement vautrés." C'était un assez bon résumé de la situation, en réalité, mais aujourd'hui ça vous faisait rire plus qu'autre chose.

De l'art de ramasser des câpres. , journée du huit août
à Salina, îles éoliennes - Sicile

Sa cueillette n'était pas évidente. Déjà parce qu'on ne leur a pas dit comment se saisir de ses boutons de fleurs et évidemment le blond ne souhaitait pas abîmer les arbustes. "C'est vrai que maintenant, je préfère observer les pauvres courageux qui poussent des cris en entrant dans l'eau." Une câpre de plus, à ce rythme, ils y seraient encore ce soir. "Il n'y a rien qui pourrait t'aider ? Est-ce que tu en as parlé à d'autres que moi ?" Bien sûr, il s'inquiète Ben. "C'est quoi cette idée ?" L'écoutant en prenant une nouvelle, il acquiesce dans un hochement de tête. "Pourquoi pas, mais ça ne va pas déranger ta famille ?" Loin de lui l'envie de s'imposer. "Mala va bien. Je veux dire, on passe de bons moments ensemble." Le bal, Benedikt ne souhaite pas se le rappeler. "Mais comment pouviez-vous l'aider sans connaitre l'endroit ?" Le blond rit à en faire tomber son panier.



@Rainier de Danemark