4,5,6 Cueillir des cerises || (Haiwee)

Elle préfère prendre des pincettes, parce qu’elle ne veut pas vexer, loin de désirer raviver ou rouvrir l’une de ses plaies. Elle ne le sait que trop bien, que le cœur est une chose fragile, lorsqu’il est maltraité, ce n’est jamais complètement qu’il s’en remet. Alors elle tente de se montrer désintéressée, de ne pas le brusquer, de se concentrer sur ses câpres et sur le soleil qui tape, commence à lui filer la nausée. Peut-être qu’elle aurait dû déjeuner. Sur cette pensée maladive, Lyssandre reprend, « T'inquiète. » Mais c’est toujours que pour les autres, Haiwee le fait, « J'suis pas du genre à faire des tabous. » il pourrait, ils ne se connaissent pas après tout, « Mon histoire est ce qu'elle est, et il faudra bien l'exorciser un jour. J'envie juste ta naïveté. » L’espace d’une seconde, la brune reste estomaquée. Le mot renforçant son haut le cœur, elle ne sait plus qui blâmer, ce qu’elle n’a pas mangé aujourd’hui, ce qu’elle a avalé hier, ou ce qu’il lui a dit. « C’est bien la première fois qu’on me l’envie ! » c’est plus souvent envers elle, une moquerie.

Il sent bien que la brune a des réserves Lyssandre, et il ne peut pas la blâmer pour cela. Après tout, ils ne se connaissent pas, et si le New-yorkais à bien compris que la timidité ne lui servirait à rien, à lui, dans cette vie, il ne peut s’offusquer que certaines personnes présentent ce trait de caractère. Après tout, il restait un inconnu pour elle, un étranger. Ils apprenaient doucement à se connaître, comme toute l’équipe, au fil de leurs épreuves et des activités annexes que proposaient l’organisation mais peut-être qu’il ne serait jamais rien de plus qu’un coéquipier pour elle. Mais malgré cette pensée, il n’avait pas de regret. L’ambiance dans l’équipe était bonne, la solidarité était présente, et c’était probablement le souvenir qu’il en garderait pour les années à venir Lyssandre. A la confession de Haiwee, il sourit Lyssandre alors qu’il dépose de nouveaux condiments dans son panier. Il sait qu’à son époque, l’adjectif se veut souvent péjoratif, mais lui, il ne juge pas ceux qui continuent de voir le monde avec optimisme. Lui aussi aimerait en être capable. « Les enfants le sont, et pourtant ce sont des êtres géniaux et incroyables. » Il en savait quelque chose, lui qui est tonton de deux petits monstres qu’il voit grandir chaque jours ou presque et qui ne cessaient de radoucir son coeur et sa vision du monde.

Réussite : 2/3

Mais plus que la conversation et les câpres à ramasser, l'esprit de l'amérindienne reste bloqué sur le fait qu'elle a la sensation que son estomac s'est retourné. Elle s'en veut de ne pas avoir apporté avec elle de l'eau, quelque chose pour faire passer la nausée - comme si elle avait pu prévoir que ça lui arriverait - elle soupire, perturbée par des sueurs froides, tandis que Lyssandre vient s'expliquer. « Les enfants le sont, et pourtant ce sont des êtres géniaux et incroyables. » Ce n'est pas Haiwee qui pourrait rechigner au sujet des enfants, elle les apprécie bien plus que la plupart des adultes, elle doit l'avouer. Cela dit pour la forme, elle feint de s'offusquer. " Je suis donc une gamine naïve ? " tout ça parce qu'elle a choisi de croire en l'amour, quelque part, elle espère que Lyssandre aussi, un jour, voudra bien y croire encore une fois. Puis épuisée, et toujours en train de lutter contre le mal inconnu, elle s'assoit. " Je crois que j'en ai assez. " tentée lui dire qu'elle a un tantinet envie de vomir.

Sans vraiment prêter attention à Haiwee, il continue sa cueillette Lyssandre, tout en essayant de ne pas perdre le fil de leur conversation. Quand il lui fait remarquer sa naïveté, ce n'est pas pour l'insulter. Au contraire. Lyssandre, il aimerait retrouver une partie de son innocence, son insouciance. Il aimerait pouvoir être naïf sans que cela se retourne contre lui. Malheureusement, il avait perdu cette possibilité. Alors oui, il l'envie un peu, elle d'avoir su la préserver malgré les épreuves de la vie. Il ne sait pas ce qu'elle a traversé, mais des épreuves, on en affrontait tous. Penser qu'il était le seul des deux à en avoir subi ferait de lui un être très égocentrique. A sa question, il ne peut s'empêcher de sourire, retient même un clin d'oeil -il lui a promis de faire un effort - avant de s'exprimer. " C'est toi qui l'a dit, pas moi ! " Il remarque alors qu'elle s'assoit, là où la végétation le permet. Il la trouve un peu palote malgré pourtant la chaleur locale. " Ca va ? T'as chaud ? Tu veux de l'eau ? "

Réussite : 3/3

Ce n'est plus une simple impression de haut le coeur à présent, elle est malade, elle le sait. Il y a un truc qui ne tourne pas rond en son intérieur, qui donne a son gorge un goût d'aigreur. Et même si Lyssandre plaisante encore sur son côté crédule, " C'est toi qui l'a dit, pas moi ! " elle n'a plus la force de répliquer. Elle est naïve, elle le sait, mais elle a conscience que c'est une force, une qualité. Ou peut-être qu'elle n'a juste pas été assez désillusionnée.

Cela dit, assise sur le sol, à tenter de garder le peu de contenance qui lui reste, elle grimace lorsqu'il vient lui demander,  " Ca va ? T'as chaud ? Tu veux de l'eau ? " Elle n'arrive plus à s'exprimer, le peu de salive qu'elle possède, elle tente de l'avaler, persuader que si elle ouvre la bouche, son repas de la veille va ressortir. Mal à l'aise de se retrouver dans cet état avec un garçon qu'elle ne connaît pas vraiment. Elle relève le regard vers le sien, et articule un " J'sais pas. " ça la tue et pas qu'un peu de penser qu'elle était enceinte, la dernière fois qu'elle a ressenti une envie de tout rejeter comme celle-là.

Son panier bien rempli de câpres, il délaisse la cueillette un moment pour faire face à Haiwee. La jeune femme lui parait pâle, moins dynamique que d’habitude. Les traits de son visage s’affaissent, laissant place à une fatigue évidente. Il la met sur le compte de la chaleur, de ces longues heures passées dehors, partiellement au soleil. De quoi assommer n’importe qui, ou n’importe quoi vu les températures extérieures. Il espère d’ailleurs que la brune ne va pas faire de malaise. Il ne sait pas si les secours locaux sont familiers avec leur langue, si ça ne rendrait pas plus difficile sa prise en charge. Il n’a pas non plus envie d’être celui qui devra appeler Sheng pour le prévenir, ou l’équipe pour déclarer qu’une de leur membre serait peut-être forfait quelques jours. Néanmoins, il sait qu’il ne peut pas la laisser là très longtemps, au chaud, encore soumise à la puissance des rayons du soleil. « Ca m’aide pas beaucoup comme réponse… » Pour ne pas dire pas du tout. Car si elle ne sait pas, Lyssandre lui ne pourrait deviner pour elle. « Est ce que tu peux te lever ? On va retourner vers l’entrée pour que tu puisses te mettre un peu au frais. Si ça se trouve tu fais une insolation. Tu devrais boire un petit peu quand même. » Il s’adresse à elle presque avec un ton paternel, insistant pour qu’elle prenne une gorgée ou deux dans sa gourde. Si c’était un coup de chaud, s’hydrater lui ferait du bien.

Réussite : 3/3

E plus de se sentir mal physiquement, elle réalise que son mental n’est pas au beau fixe non plus, elle qui tente du mieux qu’elle le peut de mettre de côté ses ressentiments au sujet de cette grossesse qui s’est mal terminée, ici et maintenant, en compagnie de Lyssandre, elle en a presque l’envie de pleurer, d’y repenser. En une fraction de seconde, c’est dans une autre dimension qu’elle a basculé. Le tout à cause d’un repas qu’elle n’a pas digéré. « Ca m’aide pas beaucoup comme réponse… » Et elle culpabilise d’être comme ça, de ne pas l’aider et de le mettre dans cette position-là. Un instant parfait de complicité pour commencer une amitié. Les fondations sont posées. « Est ce que tu peux te lever ? » Elle ne sait pas trop, mais elle ne va pas reste assise ici, dans tous les cas, alors elle va forcer, ne veut pas les coincer, « On va retourner vers l’entrée pour que tu puisses te mettre un peu au frais. » ce n’est pas une mauvaise idée, « Si ça se trouve tu fais une insolation. » peut-être oui, un coup de chaud, une cuisine douteuse, quelque chose comme ça, « Tu devrais boire un petit peu quand même. » Mais avant de regarder la gourde qu’il lui tend, ce qu’elle observe, ce sont les capres, parce qu’elle est elle, et que même en étant malade, elle veut toujours exceller, dans tout ce qu’elle fait, et elle déteste se dire qu’elle pourrait abandonner… « On a assez de câpres ? » pour remplir la mission qu’on leur avait donné ? Un désir un peu trop grand de réussir, pour secouer le visage, face à sa propre idiotie et se décider à se relever afin de partir… A peine accrochée à Lyssandre pour retourner d’où ils viennent, et luttant contre son envie de vomir. « Désolée. » qu’elle murmure, honteuse de ce qu’elle vient de lui faire subir. Enfin, elle tente de se rassurer en se disant que ça aurait pu être pire. Ils ont eu le temps de finir.