flirter avec les vagues. ((SCONA))

bloquée entre les murs de ferraille, myocarde prisonnier de sentiments partagés. partir ou rester. bonne ou mauvaise idée. aimer et haïr. soulagement et oppression. le tiraillement se ressent jusqu’aux tripes, jusqu’à mes doigts sur le levier d’ouverture. ongles qui grattent la matière caoutchouteuse, laissent transparaître la nervosité. les questions qui se pressent dans la tête, brouillard qui remplit le crâne déjà à moitié éteint. mais c’était plus facile avec toi, tu connaissais tout d’moi et j’connaissais tout d’toi. comme si on s’était amusé à se fabriquer. mal. pas besoin de trop parler, les regards en disaient plus que les mots. et j’avais pas besoin de m’armer de ma carapace, elle était pas efficace quand tes orbes l’a persécute. question restée en attente, ton bras qui s’étend au-dessus de mes cuisses. m’enfonce instinctivement au fond du siège, se crispe les muscles du fin contact. les doigts qui se calment quand ta reponse tombe. tendant le bâtonnet fumant sous mes yeux. hésitante, relève les yeux vers ton profil. - tu m’emmènes où scott ? bloque l’oxygène. j’étais pas prête, pour encaisser le temps avec toi. attrape le joint, laisse la fumée voler avant de le coincer entre mes lippes. tousse. grimace dans la gêne. pas encore habituée mais, l’effet était anesthésiant. - c’est vraiment degueulasse ton truc.. balaye la fumée, serpentine glisse sur les lippes sèches. - comment tu fais pour fumer ça ? comme une gamine intriguée, le regard accaparé par la feuille roulée que je détaille. comme un moyen de me détacher. de la situation. de toi. haussement d’épaules, tire une autre taffe qui brûle la gorge. les traits qui se déforment avant d’te rendre le joint. - j’sais pas. il m’a appelé mais j’ai pas répondu..

Il la ressent. Quand elle se colle au siège comme s’il le moindre contact pouvait la rendre malade. Il pourrait être vexé, mais ce n’est pas le cas. Parce qu’elle réagit. Et ça veut tout dire. Se renfonçant dans son siège, l’ombre allume son joint. Finit par le tendre à la brune. Il s’était attendu à ce qu’elle le refuse, mais à la place, elle s’en empare. Entoure le bâton de ses doigts fins. La question qui traverse ses lippes, ne trouvent aucune réponse, parce qu’elle s’étouffe avec la fumée. Sourire arraché. « T’as pas l’habitude. C’pour ça. » Enfoncé contre le velours, il la regarde. Détail ses traits fatigués. Ses cernes légèrement marqué, mais surtout, il voit ses pupilles rougies. Comme si elle avait pleuré. « T’as pleuré. » Marque le constat. La main levé dans sa direction, il s’apprête à toucher le dessous de ses yeux, mais finalement, il se ravise. A temps. Parce qu’il a plus ce droit Scott. Plus d’appartenance. Juste deux entités bien distinct. Il croit gérer, mais quand il se retrouve face à elle, tout se mélange. Devient flou. Absence. Trajectoire dévié, il reprend le bâtonnet. Fait rougir sont bout, tout en fixant son regard sur l’océan. Géant plongé dans l’obscurité. « J’voulais rentrer sur l’campus, mais j’suis claqué. J’vais nous prendre un motel. » Nouveau regard dans sa direction. « Si ça t’vas. J’te prendrais une seconde chambre. » S’il y en avait une de dispo. « T’es arrivé comment ici ? »

on a beau se cracher à la gueule. dire tout c’qu’on voudra, feindre le détachement, tenir l’ignorance. le corps, lui, ne trahit pas. gestes qui se déclenchent instantanément, lapsus révélateurs qui pointe du doigt. qu’on a toujours pas oublié. qu’on oubliera sûrement jamais. vivre avec, te laisser vivre en fantôme dans mes sombres nuits. léger sourire quand j’entends le tient. subconscient qui s’agite, pense à quel point il est beau quand il marque tes lèvres. - et si j’fume trop, j’ressentirais quoi ? dis moi. si son effet pourra m’sauver ce soir. si ça me fera planer au point d’quitter le monde c’soir. si c’est meilleur que tes bras pour ça. ailleurs. l’ombre ta main qui se lève, les histoires qui se mélangent, la peur qui estomaque d’un seul coup sans prévenir. les yeux qui se ferment brutalement, le visage qui se déforme dans l’appréhension d’un coup qui pourrait retomber. et tout s’apaise d’un seul coup, réalise que c’est qu’toi. qu’il n’est pas encore là. respire fort, les ongles s’enfoncent dans le cuir du siège. l’angoisse qui redescends pour laisser place à la gêne. - pardon.. sans savoir quoi dire d’autres, le seul mot qui parviens à franchir les lèvres. laisse le myocarde tambourinant à foison. t’écoutes à peine pour le motel, la scène qui tourne en boucle et rends les mains moites. je détestais ça, que tu m’vois comme ça. que tu m’connaisses comme ça. pas l’habitude de faire vivre mes peurs. pas devant les autres, y’a que lui qui l’es vois. perdue, j’mets du temps à te répondre. - euh.. elle est garée là bas.. index qui se colle à la vitre, pointant du doigt un endroit vaste. - ma voiture. regard fuyant, faisant semblant de la chercher des yeux. tout, sauf la pitié ou le jugement dans tes yeux.

Paupière close. Sous ses opales, se dévoile le trauma. Enfin personnifié. Blanchit son visage, la peur. Tétanisée. Elle ne l’a jamais montré Lena. A quel point elle est abimée. Enfant martyr. Elle n’en avait jamais eu l’occasion, parce qu’il était loin d’elle. Loin de sa vie, mais pas ce soir. Ni les autres soirs. Et elle vie avec cette appréhension. Pardon. L’excuse qu’il envoie chier. « T’as pas à t’excuser. » Tranchant est le timbre. Inutile qu’elle le contredise. « On la récupèrera demain. » Rendant le joint à la brune, il finit par allumer le contact. La main en arrêt sur la clé, il hésite. Cogite sa tête. Et puis, il le fait. Pose son regard sur son profil. Elle qui refuse de le regarder. Surement dégouté par elle. Sa vulnérabilité.   « J’sais pourquoi tu restes. Tu crois que t’es rien sans ce qu’il te donne, mais c’est faux. L’jour où tu seras prête à le dégager de ta vie, j’serais là. Même si tu m’déteste. Ça changera pas. » Reprend le contrôle du volant. La main sur le frein à main, il l’abaisse. Quitte le parking pour trouver un motel. Un qui se trouve pas loin de la plage. Et il finit par le dénicher. La pancarte oscillante à cause du vent. L’apparence défraichie, mais étrangement moins sordide qu’il l’aurait imaginé avec sa façade blanche. « Attends-moi la. » Descend de la voiture l’homme. « Verrouille derrière moi. » Quitte la gamine pour s’engouffrer dans la réception. Les minutes qui s’écoulent Il revient à elle. Une seule clé en main. Tapant un coup sur la vitre, il attend qu’elle lui ouvre, avant de lui annoncer la nouvelle. « Ils avaient plus qu’une chambre… T’inquiète pas, j’te laisse le lit. »

respiration lourde, frôle les lippes, les fais trembloter. vague d’émotions éclate, toutes explosent une par une dans l’estomac. la peur, la honte, l’embarras, l’humiliation et la tristesse. toutes se fracassent dans l’abdomen, rendant le souffle presque impossible à suivre. les yeux dans le vide, encore sous le choc de la scène qui vient de se dérouler. sors de ma zone de confort, celle dans laquelle je m’étais voilée la face. rendant invisibles les séquelles, les fautes, les sales manies. - d’accord.. acquiesce dans le vent. encore trop préoccupé par le reste. m’accroche à n’importe quelle discussion pour ne pas avoir à affronter les explications. récupère le joint tendu, le garde loin des pulpeuses quelques secondes. le froid et la nervosité font danser le baton entre les doigts. et mes rétines se soulèvent, trouvent les tiennes dans ton monologue. la voix trop franche, comme une promesse qui sera sans doute jamais tenue. parce que tu partiras, parce que je partirais. ailleurs, on ne nous acceptera pas ensemble. pas après tout ce qu’ils savent de nous. - tu seras pas toujours là.. doucement, les lippes bougent. - parce qu’un jour, tu devras choisir. entre le passé et l’présent.. et c’est pas de mon côté que penchera la balance. elle a jamais penchée, pour moi. mais peu importe, c’soir ça fait du bien d’faire semblant de te croire. défile la route le long de la mer, jusqu’à la bâtisse blanchâtre qui se dévoile du coté opposé. t’écoute, patiente à l’intérieur sans un bruit. jusqu’à ce que tes phalanges m’alertent, me font sortir de ta caisse pour me retrouver debout face à toi. - attends.. tu vas dormir où ? c’est à cause d’moi si t’es dans c’coin paumé.. regard qui dérive autour de nous. place quasiment désertique. - prends le lit au moins. t’façon j’vais pas réussir à dormir.

Ailleurs l’unseelie. L’écoute sans l’écouter. Répond machinalement. Et il laisse couler, parce qu’il préfère combler les silences plutôt que s’y confronter. « Même si j’le suis plus. T’peux toujours en arracher un pan. » Fonctionne par métaphore. Clos la conversation pour fuir vers le motel. Et quand il revient, c’est la Lena du trauma qui l’attend. Vide. « Tu prendras le lit. C’non négociable. » Sur ses mots, il retire la clé du contact. « C’est à l’étage. » L’ombre attend qu’elle descende pour verrouiller. Alors seulement, il prend la directive de la marche. S’approche du motel pour en monter les escaliers. Eux qui de près, ont une peinture écaillée. Enfin, il y arrive. Devant cette porte. Ignore le battement de son pulsant. De l’ignorance de ce qui l’attendait. Plusieurs heures enfermées avec elle. Baigne dans un stand-by. Ni rire. Ni crise. Un entre deux. Irréelle. Ouvrant la porte, il s’arrache à ses pensées. Contemple le lit standard. La télé. La commode défraichie. Pas de canapé. Pénétrant les lieux, il se débarrasse de sa veste.

sans rebondir, parce que ça servait à rien. parce que j’savais d’avance ce qu’on allait devenir. on finira par s’effacer petit à petit, pour ne laisser que des bribes de souvenirs encore battants. jusqu’à ce qu’eux aussi, deviennent silencieux. on disparaîtra, l’un de l’autre, comme si tout ce qu’on avait vécu n’existait pas. ignorance face à la fatalité qui dérange. l’évidence. l’autre, celle qui malmène le coeur. - joue pas les mecs autoritaires avec moi ! la voix qui se hausse pour t’atteindre quand tu contournes la caisse pour en retirer les clés. - t’sais à quel point j’peux être têtue et on va finir par terre. parce qu’aucun de nous deux lâchera l’affaire. dans l’entrée, prête peu d’attention au décor, suis seulement ton regard qui pointe l’escalier. le pas lourd, grince le bois sous la semelle légère. un coup d’œil en arrière, le besoin de me rassurer que t’es encore derrière moi. te laisses passer devant dans le couloir qui mène jusqu’à la porte. enfer ou paradis ? j’savais pas où j’allais mettre les pieds avec toi. si le calme allait durer encore longtemps. palpitant au ralentit, découvre le lieu. simple. presque ancien. fais quelques pas qui me ramène au milieu de la pièce, lève les yeux vers le plafond avant de pivoter sur moi même. ta veste que tu fais tomber, le regard qui suit sa trajectoire avant de les redresser vers toi. - tu vois.. pas d’canapé. j’t’avais dis qu’on dormirait par terre. lève les paumes vers le ciel. tente l’ironie pour cacher le malaise. à croire qu’on s’était jamais retrouvé seul toi et moi. comme une nouvelle première fois. - tu veux prendre ta douche avant ?

Retrouve une partie d’elle dans le ton de sa réponse. En esquisse un sourire. « ouais ouais. » Guerre des mots. Caractère trop similaire. Lui qui a participé à cette fin. Miroir. Ricoche le reflet. L’unseelie devant lui. Il fait en sorte de ne pas s’attarder sur ses courbes. D’oublier l’effet qu’elle peut avoir. S’ouvre la porte. Découvre l’endroit désuet, mais propre. L’ironie de la chose le fait sourire. Voilà ce à quoi ils ont droit quand ils sont ensemble. Un motel merdique. « T’auras moins envie d’y dormir quand t’sentiras toutes les odeurs d’la moquette. » Effluves passés. De ceux qui ont marché sur ce sol. Leur énergie imprégnée dans les murs. Rien ne pourra l’effacer ça. « Honneur aux dames. » Phrase bidon. Balancé dans un soupir. L’ombre attend qu’elle disparaisse pour s’allonger sur le lit. Les pieds dans le vide. Il croire les bras derrière la tête. Le regard rivé au plafond, il attend. L’esprit vagabond. S’écoule l’eau. Il l’entend. Le robinet qu’on ouvre. Le rai de lumière sous la porte, attire son œil. Hypnotique dans la pénombre. L’imagination trop essoufflé pour devenir intense. Il finit par s’en détacher. Revenant au plafond miteux. Il est incapable de mettre des mots sur ce qu’il ressent. Là tout de suite. De la confusion ? De l’inquiétude pour elle ? Un mélange surement. Un bric à brac impossible à démêler.

le dégoût qui traverse le visage. pense à ces autres, ceux qui se sont perdus ici avant nous. pense aux antécédents de cette chambre, aux états d’âmes qui se sont défoulés ici avant le brouhaha des nôtres. - t’en auras pas envie non plus.. se fige le regard, trouve le tient. ne s’en défait pas tout de suite, prends le temps de s’y égarer. encore un peu avant de décrocher. prends les devants, avance en directement de la salle de bain en face. passe près de toi, les cils se hissent pour afficher les azurs. main sur la poignet, marque une pause. - t’es du genre galant toi maintenant ? tout sauf toi. t’es de ceux que la fougue emporte, qui se fout des bonnes manières. pris au piège de cette adrénaline sans foi ni loi. celle qui t’anime, dévastatrice. l’ouragan invincible, celui qui, dans son passage, sème les conséquences. t’as ce feu dans les yeux, celui qui décrit tes dangers. pousse finalement la porte pour m’immiscer dans la mince ouverture. fais couler l’eau de longues minutes, brûlante, elle réchauffe le derme. détends les muscles qui sont restés trop longtemps crispés. par le froid. la crainte. par le passé qui vit encore ce soir. silence de mots quand l’eau termine sa dernière chute, enfile cette même robe sans prendre le temps de sécher la crinière dégoulinante. ouvre la porte, découvre le corps étendu sur le lit. le regard vide, sans vie, accroché au plafond. l’esprit capture l’instant, celui où tu es juste toi. l’armure devenue lointaine. ose le pas, jusqu’au rebord du lit que mon genou chevauche. approche mon visage du tient, regarde dans la même direction. là-haut. gouttelettes tombent sur les draps, juste au-dessus de ton épaule.- t’aimes la peinture ? la voix basse, retombe le regard sur toi.

Vapeur étouffante. Percute l’atmosphère tiède de la pièce. Pas feutrés. Il la devine. Lena. Plisse le matelas. Le poids de sa silhouette. Sur les draps, goutte l’eau. En ressent l’humidité le brun. Parfum léger. Se dégage d’elle. Les visages voisins, elle l’imite. Comble le silence. Sa voix s’élève. S’infiltre en lui. Simplicité de l’instant. La colère égarée. A des années lumières de cette chambre. Le chagrin trop fort pour en extirper une vive émotion. « J’suis admiratif carrément. » Lame froide. Sur son ovale, se balade le regard de son interlocutrice. A son tour, il la regarde. S’immerge dans ses opalines. Tourmentées par leur passé. Entravé par leur lien. Quoi qu’il fasse, elle sera toujours là. Quelque part. Même quand ils ne s’appartiennent plus. Il y aura toujours une part d’eux qui subsistera. Pupilles vides. Il ne dit rien. Se contente de la regarder. Bruit du ressac. Vibre derrière les vitres du motel. Empli la pièce. Accompagné du rayon d’un lampadaire, elle confère au lieu, une aura particulière. Purgatoire. « Tu m’déteste. » Envole de l’affirmation. Energie impactante. Lourde. Dans son sillage, délaisse son goudron dans la trachée.