(Neasar) Can't stop thinking of you

Une énième soirée de boulot. Le cœur n’y était pas. La tête déraillait. La fatigue pulsait. Pourtant, j’étais là à servir avec entrain le sourire aux lèvres. La porte s’ouvrait me poussant à lever les yeux priant pour que ce ne soit pas un groupe d’étudiants alcoolisés. Mes yeux se posaient sur lui. Caesar. Automatiquement, mon regard balayait la pièce à la recherche d’une personne seule. Une personne avec qui il aurait un rencard en profitant pour me narguer de ces nouveaux amants. Personne ne semblait seul et je fronçais les sourcils. Était-ce moi qu’il venait voir ? Mon cœur cognait plus fort dans ma poitrine et j’aurai préféré le groupe d’étudiants saoul au final. Mon Sweetheart s’approchait m’interrogeant sur la possibilité de se parler. Avant que je ne puisse offrir une réelle réponse, il se dirigeait dehors comme s’il savait déjà que j’allais accepter. Que je ne lui dirai jamais non. Les mains tremblantes, je soufflais à mon collègue que je prenais ma pause et je me faufilais hors du bar. Passant la porte, je fis un signe de tête à Caesar pour lui demander de me suivre dans la ruelle calme longeant le Lord Hobo. Moins de passage. Moins de bruit. Nous serions plus tranquilles. Je le détaillais de haut en bas mordillant ma lèvre avant de m’appuyer contre un mur. Sortant une clope que je glissais entre mes lèvres, je l’allumais et tirais une fois dessus avec l’espoir de me calmer. Relevant les yeux sur Caesar, je soufflais un « J’t’écoute… »

Les mots tombaient. Caesar ne perdait pas de temps. Il ne tournait pas autour du pot attaquant le dangereux sujet. Il se lançait sur ce terrain que j'appréhendais. Je ne pensais pas qu'il reviendrait si vite après m'avoir demandé du temps. Pourtant il était là et il avait réfléchi. J'haussais un sourcil feignant l'indifférence en le regardant tandis que mon cœur pulsait beaucoup trop fort dans ma poitrine. J'attendais que la suite tombe m'efforçant de contrôler ma respiration. J'attendais que sa décision résonne dans la ruelle sombre. Mes doigts tremblaient tellement que je manquais d'échapper ma cigarette à chaque mouvement. Les autres mots tombaient. Bien loin d'être une décision. Un soupir glissait entre mes lèvres et le silence s'installait. Quelques secondes. Tirant sur ma clope, je fixais Caesar en soufflant « J’sais pas ce qu'on est... Je... J'pense pas qu'on puisse se mettre d'étiquettes... Je... On... On est juste nous... Neasar... Des amis... Des confidents... Des amants... Des amoureux... J'en sais rien Cae'… » Haussant les épaules, je portais de nouveau ma clope à mes lèvres avant de baisser les yeux conscient que ma réponse n'était peut-être pas la bonne. Alors, fixant le sol, je rajoutais « J’sais juste que j'peux pas continuer sans toi Honey... Je... J'besoin de toi... »

Les yeux rivés au sol, je marmonnais « Besoin de te rassurer ? » parce que je ne parvenais pas à comprendre sur quoi il avait besoin de se rassurer, pourquoi il avait besoin d'être rassuré. Est-ce que j'avais fait quelque chose qui avait pu lui faire penser que je ne tenais pas suffisamment à lui ? Est-ce que c'était sur ça qu'il avait besoin d'être rassuré ? Ou peut-être que c'était sur ma façon de nous voir lui et moi ? Oh bordel, je ne savais pas. Mordillant nerveusement ma lèvre, je me plongeais dans le silence et l'observation du sol tirant sur ma cigarette de mes doigts toujours tremblants. Et soudainement, les mots tombaient. Caesar ne pouvait pas se passer de moi, mais il ne voulait pas de ça. Mes prunelles se fermaient. Je sentais mon cœur se craqueler un peu trop. Je n'osais pas le regarder. Je terminais ma clope avant de la laisser tomber au sol. Consumée comme mon cœur. Soupirant, j'ouvrais les premiers boutons de ma chemise. J'avais trop chaud. Mon cœur cognait trop fort. Mon ventre se tordait. Je ne me sentais pas bien. Relevant les yeux sur Caesar, j'osais demander « T'peux pas te passer d'moi, mais t'veux pas ça... Alors quoi Honey ? T'es là pour quoi ? Me dire adieu en face ? Me dire que tu veux que je reste loin de toi ? Me dire que tu veux que je disparaisse de ta vie ? » Mes prunelles défiaient Caesar d'oser parler. D'oser me donner sa décision.

Incapable de me retenir, je levais les yeux au ciel en entendant Caesar. C’était comme ça qu’il me percevait ? Je recevais un couteau en plein cœur sentant mon organe vital se déchiquetait sous ces mots douloureux. Je baissais les yeux et je répondais « Tu n’es pas juste un pote non… Et je… F*ck… Caesar… Tu n’es pas un jouet. Tu n’en as jamais été un. J’suis pas comme ça. J’suis p’tetre un connard infidèle, accro au sexe et toxique, mais je… J’suis pas du genre à considérer les gens comme des paris ou des putains de numéros. Je… Je joue pas. C’pas une blague. C’pas un amusement. Bordel… J’arrive pas à croire que tu puisses penser ça d’moi… » Je relevais mes yeux emplis de larmes parce que là ça faisait trop pour cette semaine. Trop de mots déchirants. Trop à encaisser. Soupirant, je glissais une main dans mes cheveux avant de terminer ma clope. Le mal-être s’emparait de moi et je me crevais de chaud. Ouvrant les premiers boutons de ma chemise pour ne pas étouffer, je questionnais Caesar sur ce qu’il voulait faire et me dire. Mon regard le défiait de continuer à parler. S’il désirait me blesser autant arracher le pansement en une fois. Ce qu’il voulait glissait entre ses lèvres et je rétorquais « J’ai jamais cherché à t’priver de liberté Cae’… T’peux baiser avec tous les mecs ou toutes les filles que tu veux… T’fais ce que tu veux… Avec qui t’veux… Quand t’le veux… Viens juste pas l’faire sous mes yeux parce que, même si t’veux pas de jalousie, j’la contrôle pas. J’sais me tenir et j’ferai pas d’esclandre, mais t’me blesseras à faire ça sous mes yeux… J’veux pas être au courant d’ce que tu fais de ton corps… Parce que ouais t’as raison. Tu ne m’appartiens pas. Je ne t’appartiens pas. Et nous n’avons pas de relation exclusive. » Haussant les épaules, je relevais les yeux sur un Caesar déboutonnant sa chemise et s’appuyant sur le mur en face. Mes prunelles se perdaient sur ses dents mordillant sa lèvre inférieure. Je m’empressais de détourner le regard en me raclant la gorge. Ne pas céder. Ne pas craquer. Sans le regarder, je soufflais « Autre chose ? » comme pressé à l’idée de retourner travailler. Pressé à l’idée de m’éloigner de lui. Le vil tentateur.

Le monologue tombait. Il m’écorchait. Il me foutait la tête à l’envers. Il faisait pulser plus fort mon cœur pour Caesar. Peut-être bien que je m’accrochais encore plus à lui avec ces mots. J’étais perdu. Je ne comprenais plus rien. Je ne voulais plus me perdre dans cette espèce de boucle de dispute incessante. J’avais envie de souffler à Caesar que je l’aimais et que je ne voulais pas le perdre. Je désirais lui confier que je voulais continuer à lui parler, continuer à le voir parce qu’il m’était essentiel. Tout se mélangeait dans ma tête et lorsque le silence tombait, je babillais « J’me sens pas bien sans toi non plus Cae’… Je… J’veux pas que tu vives loin de moi… Tu… Non… T’es pas destiné à ça… Je… Non… Tu… Tu peux pas avoir mal quand j’ai mal… Je… J’veux pas que t’aies mal… Et je… J’avais pas honte putain… Non ! Je… J’osais… J’osais pas te regarder parce que, merde, t’sais m’allumer Honey et je… J’avais… J’avais peur de finir par venir te trouver pour te sauter dessus bordel !!! » Je m’emportais. Je déraillais. Je voulais m’éloignais. Alors, détournant le regard, je tentais de savoir s’il en avait fini déjà prêt à repartir au boulot. Caesar me disait d’attendre et la voix défaillante me pousser à relever rapidement les yeux sur lui. Lui qui se pliait en deux serrant sa poitrine. Lui qui tombait au sol. Me décollant du mur, je ne le quittais pas des yeux « Hé, hé Honey… Qu’est-ce qui se passe ? » Je tentais de capter son attention pour obtenir une réponse et comprendre. Les larmes de douleur glissaient sur les joues du jeune homme qui me soufflait ne pas se sentir bien. La panique s’invitait en moi et Caesar tombait dans cette ruelle. Je me précipitais à ses côtés venant vérifier les battements de son cœur. Ce cœur qui battait beaucoup trop vite. Il était vivant. Mais, pour combien de temps ? Qu’avait-il fait ? Marmonnant un « Bordel Honey, qu’est-ce que t’as foutu ?! » dans ma barbe, je tentais de réfléchir calmement malgré la panique qui cognait. Je fouillais ses poches trouvant rapidement la drogue. Les mains tremblantes, le cœur battant à tout rompre, j’agissais avec méthode malgré cette angoisse. Vieux réflexe de la Mafia que je remerciais exceptionnellement aujourd’hui. Après avoir mis Caesar en position latérale de sécurité, je dégainais mon téléphone pour joindre les secours. J’étais précis dans mes propos. Une overdose. Des acides. Ruelle à côté du Lord Hobo. Se dépêcher. Et, attendant que les secours arrivent, je surveillais le cœur de mon Honey priant pour qu’il ne lâche pas. Priant pour qu’il s’accroche. Parce que, malgré tout, Neasar ne pouvait pas se terminer comme ça.