I'll build a wall, give you a ball and chain ○ tenenspoon

T'as une heure à tuer entre deux cours sur le campus. Alors tu décides d'aller te prendre un café et sûrement un donuts parce que t'es un gros goinfre et que tu vas pas te priver de manger. Surtout qu'avec le froid qui règne t'as l'impression que c'est encore pire. T'as encore plus froid et tu grossis pas. Faut que tu doubles les rations pour tenir. Tu mets ton manteau, ton bonnet et tes gants et tu sors en direction du café où tu veux te rendre. Tu vois Marla au loin, elle est toute seule et tu sais pas ce qu'elle fout. Cette fille elle est super timide et t'adores l'embêter. Les petites timides, c'est carrément ton truc. Le seul truc c'est qu'elle flippe vraiment quand elle et voit et toi en bon crétin que t'es, tu aimes encore plus en jouer. Tu l'approches et tu te penches vers elle alors qu'elle semble pas te voir. « Alors c'est moi que t'attend. » Tu lui offres un grand sourire et un regard un brin allumé. Elle va sans doute trouver un prétexte et se barrer en courant et toi ça te fait marrer d'avance.

Quelque peu perdu ces derniers temps, je m'enfermais dans mes cours, comme à mon habitude. L'école, ça avait toujours été mon échappatoire pour survivre et même au fond du gouffre, dans ma solitude, j'avais toujours le nez dans mes bouquins. Si je voulais préserver ma place au top de classement des meilleurs élèves de ma promo, je devais redoubler d'effort pour intégrer tout ce que j'avais à savoir. Si en temps normal, c'était tout à fait banal pour moi, en ce moment, j'étais tellement ailleurs qu'il me fallait m'y reprendre à plusieurs reprises pour intégrer le plus important. Emmitouflée dans mes habits d'hiver, je décide de m'installer à l’extérieur, là où personne n'a envie de se poser, pour être tranquille. Mes cicatrices sur le bras me saisissent avec le froid et je prends sur moi pour ne pas les regarder en public, essayant au mieux de me concentrer sur autre chose. Si bien que je ne remarquais même pas Maverick s'approcher au loin et dieu sait que si ça avait été le cas, je serais déjà partie à l'opposé. « Alors c'est moi que t'attend. » Je sursaute et mon visage fatigué fait face au sien un peu trop en forme pour moi. « Je... Non » J'avais justement envie qu'on me laisse tranquille. Je déglutis, referme mon livre et glisse la lanière de mon sac sur mon épaule. « J'dois y aller » que je bredouille en le laissant en plan là où il se trouvait.

Tu t'attends à jouer ton numéro, comme d'habitude. T'es le chat, elle est la souris. Tu lui fais peur, elle se barre en courant, et vous jouez un petit comme ça. Mais là lorsqu'elle se retourne son visage te saisit. Elle a vraiment une sale gueule. La tête de j'ai des problèmes plus importants qu'avoir peur de toi. Et elle a même pas peur en fait. Tu peux pas t'empêcher d'être déçu parce que t'es égoïste Mav'. T'es pas doué pour t'intéresser aux gens. Mais là y'a quelque chose qui t'inquiète. « Attends ! » Que tu lui dis en lui prenant le bras. Elle va pas se barrer comme ça. Pas cette fois. « Qu'est-ce que t'as ? » Oui tu demandes, pas tu exiges. Parce que t'es comme ça. T'es toujours comme un espèce de volcan prêt à exploser et quand quelque chose ou quelqu'un t'interpelle, tu t'accroches et tu lâches pas. C'était une fille timide et douce que t'aimais faire chier. C'était pas cette espèce de femme brisée et absente que tu contemples en ce moment. Tu détestes qu'on casse tes jouets. T'es qu'un gros connard Mav', mais un connard inquiet tout de même.

Je ne voulais voir personne. Je préférais amplement la solitude ainsi que la fraicheur hivernale plutôt que la chaleur de mes amis. C'était à ce point que je me trouvais complètement à côté de la plaque ces derniers temps. Je ne trouvais plus aucun plaisir, ni aucun goût à quoi que ce soit. Ma seule occupation était mes cours que je chérissais toujours autant et afin d'être certaine de ne pas être dérangée, je m'étais trouvée un petit coin tranquille là où personne n'aurait envie de braver le froid. Personne sauf ce fou de Maverick bien sûr. Il arrivait à ma hauteur, me faisant sursauter de surprise. Aussitôt je croisais son regard que je décidais de remballer mes affaires pour m'échapper. Je n'étais pas d'humeur, je n'étais pas assez en état pour supporter ça. Je m'éloigne rapidement, à la hâte en imaginant naïvement qu'il n'allait pas chercher plus loin. « Attends ! » il attrape mon bras, mais je le retire aussitôt, saisie par la douleur. Rien d'insurmontable, mais depuis que j'avais commencé à déchirer mes chairs, je ne voulais plus que l'on me touche. « Qu'est-ce que t'as ? » - « Pas aujourd'hui. S'il te plait... » que je réponds simplement en le regardant dans les yeux. J'en avais trop du le cœur pour le supporter.

Tu observes sa grimace quand tu la retiens par le bras. Elle est presque imperceptible mais faut pas croire t'es un fin observateur Maverick. T'habilles ton esprit de ses couches superficielles mais tu captes très bien ce qui passe au fond des prunelles que tu contemples. Les sentiments, tu les ressens pleinement et c'est bien pour ça que tu les évites. « Pas aujourd'hui. » Qu'elle te dit. Et sa voix est presque suppliante si elle n'est pas éteinte. « Putain Marla... » que tu jures entre tes dents. Elle doit contempler un autre visage de toi, tes yeux sont bien plus sombres, tes traits plus fermés. T'es jamais aussi beau que quand t'es sérieux Maverick. Et c'est tellement rare que ça doit se compter sur le bout de tes dix doigts ces fois là. Tu rattrapes son bras violemment. Parce que tu ménages pas les Autres, comme tu le fais avec toi. Parce que t'as aussi ce drôle d'instinct qui te dit de pas la lâcher. Parce que si tu le fais, elle va se briser. Tu le sens. Tu remontes le tissu jusqu'au coude et tu vois les plaies. Tu les connais bien ces plaies, toi c'est pas exprès qu'elles sont venues lacérer ta peau, c'est le verre de ta bécane qu'est venu se loger un peu partout dans ton corps. Mais elle. « Putain, c'est quoi ça ? » Tu demandes d'une voix inquiète. Elle est belle, elle est intelligente, elle est fragile, elle est précieuse. Qu'est-ce qu'elle fout putain ? Tu viens de te prendre sa détresse en plein visage et tu le détourneras pas non.

Sa poigne sur mon bras me fait mal, d'autant plus avec le froid hivernal, ma peau est bien plus sensible qu'habituellement. Je fais en sorte de ne pas le montrer, mais je ne suis pas la meilleure comédienne qu'il soit. Avec son regard fixé sur moi, il ne me reste plus qu'à prier pour que Maverick ne s'aperçoive de rien. En attendant, je le supplie de ne pas m'embêter aujourd'hui. Je ne suis pas d'humeur, clairement. Un autre jour peut-être, si je suis toujours là. « Putain Marla... » Je m'échappe, mais pas assez rapidement. Maverick attrape mon bras de nouveau, trop vite pour que je réalise ce qui va se produire. Quelques secondes plus tard, ma manche est remontée, me faisant grimacer de douleur au passage. Mes scarifications sont apparentes, à vif pour certaine d'entre elles. Je n'avais pas honte, loin de là, j'étais simplement en colère de la tournure des événements. « Putain, c'est quoi ça ? » - « Rien. Rien qui ne te regarde » que je réponds sur le même ton. Je tirais sur mon bras pour qu'il le lâche, abaissant la manche malgré son étau. Je ne voulais pas qu'il les regarde. Pas les cicatrices.

Elle veut pas que tu saches. Elle s'emmure là dans sa bulle solidement à l'abri. Mais elle te connaît pas Maverick. « Pourquoi tu fais ça ? » Parce que tu souffres, parce que tu penses que tu vaux rien. Et ça t'énerve qu'elle puisse penser ça. Elle ne se voit pas ou quoi ? C'est ça , elle doit être aveugle. « Je peux t'emmener voir une amie médecin, si tu veux, elle pourra t'aider. » Oui tu avais tes entrées dans le milieu médical à force de le cotoyer et tu savais qu'Elisee s'occuperait d'elle avec toute la bonne volonté du monde. Alors tu pouvais pas la laisser comme ça. « viens on y va. » Que tu dis en lui attrapant la main, mais elle va vouloir s'échapper, c'est certain. Tu la regardes quelques instants en silence, c'est rare que tu saches pas quoi dire Maverick. Et elle dresse ce mur là entre vous, t'as beau avoir des poings solides, il est difficile à péter. « Je veux pas que tu te fasses du mal Marla. » Comme si ton ordre aurait une quelconque conséquence sur ses actes. C'est stupide mais tu es stupide Maverick.

Je détestais la situation. J'avais l'impression d'avoir une figure paternel prête à me sauter à la gorge pour avoir toutes les réponses qu'elle attend. Le problème c'est que je n'avais jamais eu de peur, ni même de grand frère et qu'à aucun moment je n'avais éprouvé de l'affection envers Maverick. Autant vous dire qu'on partait d'un mauvais pied pour se laisser aller aux confidences. « Pourquoi tu fais ça ? » - « Ça ne te regarde pas » que je lui dis avec hargne en espérant que cette fois, il en comprenne chaque mots. « Je peux t'emmener voir une amie médecin, si tu veux, elle pourra t'aider. » Mes yeux s'horrifièrent aussitôt. Bien sûr qu'il n'allait pas comprendre, il était une véritable tête à claques ce type. « viens on y va. » Il attrapait ma main, mais il ne bougeait pas, restant silencieux et stoïque. Ma main, je profitais qu'il ne soit pas en train de tirer dessus pour la récupérer. « Je veux pas que tu te fasses du mal Marla. » Je me mettais à rire, comme une folle qui vient de voir un truc drôle défiler dans son imagination. J'étais bien loin de mes réactions habituelles en tout cas. « Depuis quand tu t’intéresses à mon bien être ? Toi, le bourreau.. » que je lui demande en le regardant droit dans les yeux. C'est pas comme s'il passait son temps à me faire chier habituellement. « Va te faire foutre Maverick ».

Elle t'envoie chier c'est naturel, tu as passé ton temps à l'effrayer, la pousser à bout. A te faire rire de ce que tu peux inspirer aux autres. T'es trop imprévisible Maverick et ça peut faire peur à certaines personnes. Mais t'aimes pas quand on se fait du mal à soi-même. « J'en ai rien à foutre. » Que ça ne te regarde pas. C'est toi qui choisit ce qui te concerne ou non, et elle peut pas t'empêcher de t'inquiéter d'elle si tu en as envie. Tu prends sa main, prêt à l'emmener à l'hôpital si il le faut. Parce que tu veux pas avoir quelque chose sur la conscience. Parce que tu veux pas qu'elle se gâche. Ça t'énerve, ça éveille une violence froide en toi. « Depuis que tu t'intéresses pas au tien. » Puisqu'elle ne le fait pas, tu t'en occuperas. T'es comme ça, t’adopte les causes désespérées et tu t'occupes pas de celles qu'on te demande. Tu fais tout le contraire de ce qu'on attend de toi. « Essaie pour voir. » que tu lances avec un sourire en coin. Parce que si elle veut se débarrasser de toi faudra utiliser la force. Autrement tu la colleras telle une ombre non désirée, tu la harcèleras jusqu'à ce qu'elle accepte de parler ou de faire quelque chose. Et si la violence l'appelle, ce sera toujours mieux que ce désespoir étrange qui semble s'être saisit d'elle. Mieux vaut la violence que l'indifférence.

« J'en ai rien à foutre. » Alors ça, c'était une grosse blague quand même. Maverick en avait jamais rien eu à faire de moi, tout ce qui l’intéressait, c'était de m'emmerder et se moquer de moi continuellement. Il avait toujours été sur mon dos à me faire la misère et là.. là quoi ? Il voulait jouer les héros ? Il voulait être celui qui allait sauver la pauvre et chétive petite Marla. Laissez-moi rire. Tout ça, ça ne le regardait aucunement. Il n'avait aucun droit pour venir fourrer son nez dans mes affaires. « Depuis que tu t'intéresses pas au tien. » Super. Génial. Alors vas-y Maverick, va sauver le monde. Je ricane parce que clairement, la situation est plus que risible. « Essaie pour voir. » Au moins, il avait le don de me faire ressentir quelque chose. Il avait tout ce qu'il faut en lui pour faire ressortir le pire en moi. J'étais tellement énervée, mais incapable de faire preuve de violence. « Lâche-moi, t'as compris. On peut pas passer son temps à faire du mal à quelqu'un pour essayer de le réparer ensuite. VA VOIR AILLEURS » Et je tirais fort sur mon bras pour qu'il le lâche et pour prendre la fuite ensuite.