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Heaven Leah
« Gemma » Tennessee-Wilde
fiche; en cours - terminée

C'est le dix septembre 1991 à Oxford, au Royaume-Uni, que la famille Tennessee-Wilde m'a accueillie dans leurs bras et m'a prénommée Heaven Leah. Je suis célibataire et fort heureusement ; mais si vous voulez tout savoir je suis bisexuelle, et j'en suis fière. Je viens d'une classe sociale très aisée. J'ai décidée de poursuive des études à Harvard en politique (majeure) et russe (mineure), et je suis maintenant en première année, après avoir perdu deux années à me chercher. Et pour terminer, je fais partie des Cabot House.

Études
Gemma est inscrite en Politique pour sa majeure, et Russe pour sa mineure. A la base, elle avait choisi ses option par dépit, la première parce qu’elle trouvait que cela sonnait bien, et la deuxième parce qu’elle possède un certain talent pour les langues étrangères. Aujourd’hui, si vous aviez à lui demander si elle aime ses études, elle se contenterait de vous rire au nez avant de clamer qu’elle sera, d’ici quelques années, la plus jeune présidente que les Etats-Unis aient connu (même si techniquement ce n’est pas possible). Vous l’aurez donc compris, elle adore ses études.
Si elle ne rate que très rarement un cours, Heaven passe son temps à courir à droite, à gauche sur le campus. Toujours dehors ou à errer quelque part, elle est présente à chaque évènement, ses vieux démons la hantant toujours de temps en temps.


Caractère
Heaven est quelqu’un d’adorable, en soit. Toujours heureuse, elle est du genre à voir le verre à moitié plein qu’à moitié vide ; elle est prête à aider les autres, et est bien souvent à se donner beaucoup de mal pour eux plutôt que pour elle. • Elle en demeure pas moins une petite princesse, et vit dans son monde, têtue et bornée, incapable d’admettre qu’elle peut un jour se tromper. • Adepte des Disney, elle les connait tous par cœur et voue un véritable culte, par la même occasion, à Hello Kitty. • Très littéraire, elle possède une bibliothèque à faire pâlir d’envie tout ceux qui sont accros aux bouquins. • Elle a honte de son passé. C’est étrange de dire cela, cependant, si elle pouvait tout recommencer, elle le ferait. • Son plus gros défaut serait son côté impulsif et dépensier. Quand elle fait du shopping, elle dépense bien trop d’argent.


Part. 1.
– Tu l’as entendu ? Tu as entendu son rire ?
10 septembre 1991, quelque part dans l’après midi. Clinique privée d’Oxford, chambre numéro deux cent quarante-deux, pièce située au fond d’un couloir, à droite, non loin du cinquième ascenseur de l’accueil. Le soleil inondait cette chambre accueillante aux couleurs douces et rares pour un endroit pareil, qui accueillait un lit simple, proche de l’unique fenêtre laissant percevoir d’immenses chênes couverts de feuilles encore vertes. Une femme brune et mince était assise dedans, les cernes sous les yeux, le regard fatigué, et serrait les doigts de son mari comme si c’était la seule chose à laquelle elle pouvait encore se raccrocher. Dans la folie des deux derniers jours, elle en avait oublié qu’elle n’était pas seule, qu’Aaron Tennessee était toujours là, à ses côtés, pour l’aider. Et elle s’était également souvenu qu’elle avait besoin de lui. Son monde venait de s’écrouler autour d’elle : sa fille, son bébé, cette nouvelle-née de quelques heures à peine, était une prématurée. Elle l’avait mise au monde bien trop vite, elle avait voulu voir la Terre bien trop tôt. Système respiratoire immature, tout comme son système immunitaire. Kathleen se tenait personnellement responsable de cela.
– Oui, je l’ai entendu. Elle est incroyable.
Incroyable. Le mot qu’avait choisi Aaron pour répondre à sa femme était pile celui qui convenait pour qualifier la petite Tennessee miniature, qui avait semblé rire le premier jour du reste de sa vie. Un véritable petit rayon de soleil, quelque part entre la vie et la mort, semblerait-il. Voyant qu’elle ne se déridait pas, l’homme finit par prendre sa femme dans ses bras, la serra aussi fort qu’il put contre lui, comme pour tenter de l’apaiser. Même si cela ne semblait pas faire grand-chose, et semblait même être vain. Il ne voyait pas, à ce moment là, comment apaiser les traits de sa femme, comment lui faire comprendre qu’elle n’y avait été pour rien, que cela avait été le destin qui en avait décidé ainsi. Il aurait souhaité lui dire tellement de choses. Seulement, le Tennessee n’était pas réputé pour dire ce qu’il pensait, et encore une fois, garda tout ce qu’il avait à dire pour lui. Il se contenta de caresser les cheveux d’un geste apaisant les cheveux de sa femme, et de tenter de lui faire comprendre si qu’avec ses mains qu’il était fière, qu’il était comblé malgré la peur. Et qu’il l’aimait. Profondément.
Ils avaient respectivement trente-cinq et trente-sept ans. Ils étaient tous deux épanouis dans leur profession, avaient déjà deux fils magnifiques âgés de quatre et six ans. La troisième et dernière grossesse de Kathleen avait été accueillie comme un miracle, une chose inespérée et absolument merveilleuse. La vie leur donnait tout ce qu’elle avait : beauté, argent, bonheur. Il fallait se l’avouer, cette famille semblait provenir tout droit d’un conte de fée, et d’une certaine manière, était écœurante à en faire vomir certains. Seulement, il y a toujours un élément perturbateur qui venait tout mettre en l’air, dans n’importe quelle histoire pour enfant. Et celui là n’était que le premier d’une longue série.
Toujours dans les bras de l’un et de l’autre, leur étreinte finit par prendre fin quand une infirmière pénétra dans la chambre de Kathleen. S’ils s’aimaient, ils tenaient bien à une chose ; l’honneur. Se bécoter en public faisait partie des choses interdites, dans le code que leurs familles avaient mis en place durant des générations entières. Tenue correcte, classe, distinction obligatoire, principes de base inflexibles. Les Tennessee, en d’autres termes.
Famille bien trop compliquée, bien trop stricte. De loin, les pleurs d'Heaven s'entendaient. Comme si elle avait déjà compris où est-ce qu'elle était tombée.

***
– Mèèèèère ! Heaven elle pleure encooore ! Faites quelque chose j’entends pas mon dessin animéé !
Domicile des Tennessee, le 13 octobre de la même année. Une petite voix s’élève dans les escaliers, tandis que Kathleen s’affère autour de sa fille à l’étage pour la calmer. Hurlant, pleurant, encore et encore. Elle se débattait avec ses petits poings dans les bras de sa maternelle, sans aucune raison apparente. Madame Tennessee-Wilde avait fini par sortir de l’hôpital après de longs jours, et sa fille avait fini par être hors de danger grâce aux excellents médecins qu’ils avaient exigé. Cependant, les nuits étaient dures, les cris fréquents, les pleurs toujours aussi nombreux. Si la petite demoiselle pouvait être un véritable ange, riant aux éclats à la moindre petite grimace d’un de ses frères, elle passait son temps à avoir des larmes de crocodiles qui coulaient le long de ses joues, sans raison apparemment. Pendant un moment, les deux jeunes parents avaient pensé qu’elle était bipolaire, déjà à cet âge. Mais il se révéla juste qu’elle était lunatique, extrêmement lunatique, et qu’elle pouvait facilement passer par toutes les émotions en un temps record. Il n’y avait pas d’explication à cela. C’était ainsi. Point.
Kathleen déposa soigneusement sa petite fille dans son berceau, et déclencha la petite musique que faisait le mobile installé au dessus quand il tournait. Cela devrait marcher. Cela marchait à chaque fois. Pendant un instant, la petite demoiselle continua à hurler à plein poumons, puis après avoir hoqueté à plusieurs reprises, elle finit par fixer les chevaux qui tournaient au dessus d’elle, dévoilant ainsi ses grands yeux verts. Bouche en O parfait, elle était littéralement émerveillée comme à son habitude, et elle suivit les sujets des yeux. Avec beaucoup de délicatesse, Kathleen vint caresser sa joue toute douce, comme pour l’encourager à fermer les paupières. C’était toujours un calvaire pour l’endormir, du moins, jusqu’à ce qu’ils entrent en possession de ce mobile : c’était comme si Heaven aimait la musique qu’il émettait, comme si elle trouvait l’apaisement en écoutant la douce mélodie qui s’échappait des jouets en peluche dansant au dessus d’elle.
Voyant qu’elle s’était doucement endormie, Kathleen quitta la chambre après avoir mis en marche l’interphone pour la surveiller. Elle descendit l’escalier sur la pointe des pieds, et finit par retrouver son mari dans le salon, lisant son journal comme à son habitude, en compagnie d’Andrew, leur fils de six ans. Elle ébouriffa les cheveux de son enfant, et soupira en s’asseyant avec grâce. Droite sur le canapé, elle observa son mari.
– Elle dort.
Aaron lui adressa un demi-sourire par dessus son quotidien scientifique, et se replongea dans sa lecture. Elle regarda alors son fils, et fronça les sourcils.
– Andrew Rudy Stefan Peter Tennessee, cela fait combien de temps que tu regardes la télévision ?
L’enfant se retourna vers elle, ses grands yeux bleus surpris s’agrandissant encore plus encore, alors qu’il commençait à prendre conscience de sa bêtise. Il se mit à rougir, et alla à la télécommande pour éteindre l’engin, docilement, espérant que cela couperait court à toutes les discussions possibles. Sa mère lui lança alors un regard glacial, et se leva pour lui prendre la lui prendre des mains. Elle lui avait pourtant dit, elle lui avait pourtant fait comprendre qu’elle ne voulait pas qu’il regarde trop longtemps la télévision. Combien de fois allait-elle le répéter ? Elle en profita pour lui donner une fessée, un coup à la fois sec et qui en disait long. Elle rangea la télécommande dans un petit tiroir à verrou non loin du canapé, et se retourna vers son ainé, les bras croisés, les sourcils toujours froncés, tandis qu’Andrew sentait les larmes lui monter aux yeux.
– Je te l’ai déjà dit cent fois Andrew ! Pas plus de trente minutes dans la journée ! File dans ta chambre. Privé pour une semaine. Il faut que tu apprennes à respecter les règles.
Le petit garçon la regarda pendant quelques secondes, et finit par baisser le regard, à la fois honteux et blessé. Il se retourna, avança dans le salon lentement dans l’espoir que son père vienne s’opposer à sa mère, mais rien ne vint. Comme d’habitude. Aaron n’eut aucun regard pour son fils. Il monta les escaliers, les larmes coulant le long de ses joues, pas encore habitué à ces punitions à répétition. C’était normal chez les Tennessee, assez fréquent d’ailleus. Les punitions fusaient et pour pas grand-chose souvent. Mais c’était la seule manière qu’ils trouvaient pour faire comprendre à leurs deux fils, et bientôt leur fille qu’il fallait respecter les règles à tout prix. Règle numéro un.
– Pourquoi tu pleures ?
– Laisse, Zach.
Règle numéro deux : ne jamais avoir besoin d’aide. Jamais.

2.
– Heaven, mets correctement ta robe !
– Mais mèèèèère ! Vous savez bien qu’elle tient pas en place !
1996. Une petite demoiselle blonde aux traits encore poupins, haute comme trois pommes, défiait du regard sa mère qui la rouspétait devant ses frères, comme si sa vie pouvait dépendre de la façon dont était habillée sa fille de cinq ans. Heaven Leah Meadow Emmanuelle Tennessee-Wilde avait grandi. Elle n’était plus ce petit bébé fragile, pleurant à la moindre occasion, et était encore moins celui qui avait frôlé la mort le jour de sa naissance. Si elle semblait être plus jeune que son âge réel, elle semblait bien mûre pour une petite fille de cinq ans. Elle avait vite compris comment ses parents fonctionnaient, encore plus vite que ses frères, et n’hésitait pas à battre des cils pour obtenir des choses venant d’eux, que cela aille de la poupée dans un magasin au grand caprice sur les vêtements. Elle réussissait à les mener par le bout du nez parfois, et profitait de son statut de benjamine de la famille. Cependant, les deux parents n’étaient plus beaucoup présents. S’ils s’étaient quand même débrouillés pour pouvoir assister à la première année de Heaven sur Terre, ils avaient quand même fini par reprendre chacun leur travail, et avait confié la tâche de les éduquer à une gouvernante, Mrs. Eastwood. Mégère encore pire que les géniteurs. Comme si cela fût été possible.
Cependant, bien que peu présents, les parents prenaient quand même le temps d’emmener leurs enfants à une synagogue de Londres, ville où ils ont emménagés deux années après la naissance de Heaven, ou alors les emmener à des déjeuners le dimanche, avec leurs amis au même rang social. C’est d’ailleurs à un de ceux là qu’ils se rendaient. Madame Yates et son mari organisaient un brunch.
Et Heaven détestait Madame Yates. Et les brunchs, aussi, puisqu’il n’y avait jamais de Nutella.
Ainsi, alors que la petite demoiselle tentait tant bien que mal de mettre sa robe blanche pleine de dentelle prévue pour cela, ses deux frères étaient chacun assis sur une chaise du salon, en train de la regarder se débattre parmi les rubans et la dentelle. Exaspérée, Kathleen s’approcha d’elle, et tout en ignorant ses plaintes, lui accrocha la ceinture blanche autour du ventre avec de petits coups brusques.
– Heavy t’es trop leeeente.
Heaven tira la langue à son frère pendant que celui ci mettait son manteau, et sa mère lui donna une petite tape sur la main.
– C’est quoi ces manières Heaven ?
– Excusez-moi, mère. Zacharie est méchant.
– T’es quand même trop lente, Heaven !
– C’est parce qu’elle est petite.
– Je ne suis pas petite !
– Ton excuse elle est pourrie Andy ! Arrête de toujours la déf...
Zacharie s’arrêta dans son élan quand il croisa le regard de son père, et se tut tout en se baissant pour faire ses lacets, mais aussi pour éviter toute main baladeuse qui serait venu le frapper. Heaven finit par mettre ses chaussures cirées avec une mine boudeuse, et enfila son manteau tout en faisant la moue et en fronçant les sourcils. Les disputes entre elle et ses frères étaient fréquentes, bien que généralement, Andrew – âgé de onze ans – prenait sa défense contre Zach, du haut de ses neuf ans. Elle vivait plutôt mal le fait d’être la petite dernière avec eux. Ils la charriaient tout le temps, étaient toujours à la critiquer et à la trainer de petite, dans tous les sens du terme. Elle aurait particulièrement adoré jouer la chef, les voir à ses pieds en esclaves, leur faire faire tout ce qu’elle désirait d’eux. Mais ce n’était pas le cas. Elle était forcée, en quelque sorte, de murir comme eux, et d’être plus grande que ses cinq ans. Si elle voulait suivre la course et participer à l’aventure, bien entendu.
Et puis, de toute manière, elle voulait absolument être avec eux. Elle n’aimait pas se sentir exclue.
Aaron, après avoir arrêté de fusiller du regard ses enfants, finit par ouvrir la porte de leur grande villa à la limite de Londres et déverrouilla sa voiture pour que sa famille puisse pénétrer à l’intérieur. Positionnée entre les deux garçons, Heaven regarda la voiture avec ses grands yeux, un sourire ineffaçable sur ses lèvres. Si elle avait gardé une chose de sa période bébé, c’était bien son sourire. Et son côté sensible. Mais cela, il fallait mieux ne pas le dire. Elle regarda le plafond, puis se mit à jouer avec les plis de sa robe toute blanche.
Mieux vaut paraître qu’être : Règle numéro trois.

***
– Comment tu t’appelles ?
– Riley. Et toi ?
– Moi c’est Heaven.
– Dis Heaven, tu veux bien être mon amie ?
Deux enfants étaient allongés par terre, contre un carrelage froid, et parlaient à voix basse pour ne pas se faire repérer par les personnes en train de prier et d’écouter ce qu’il se passe. Ils se regardaient bien droit dans les yeux, semblaient se comprendre en un seul regard. La petite blonde sourit en voyant le regard interrogateur du blond qui se trouvait en face d’elle, et hocha la tête avec beaucoup de ferveur : bien sûr qu’elle voulait être son amie. Quelle question idiote et sans intérêt. C’était la seule âme en peine dans cet endroit ennuyeux et ennuyant dans lequel elle était trainée régulièrement qui voulait bien jouer avec elle pour faire passer le temps. Cela faisait quelques semaines qu’ils avaient pour habitude de se retrouver à côté de la Chandelle Eternelle tandis que les parents Tennessee et la gouvernante de Riley étaient occupés à prier, sans observer où pouvait bien partir leur progéniture. Les parents Tennessee étaient des Juifs pratiquant, et ne laissaient jamais une occasion d’aller à la synagogue passée. Ainsi, ils espéraient donner à leurs enfants la foi qu’ils pouvaient avoir. Cela constituait la quatrième règle : croire en Dieu. Sauf que pour l’instant, Heaven avait encore du mal avec tout cela, et s’ennuyait à chaque fois. Puis elle avait rencontré Riley. Et ce n’était que maintenant qu’ils faisaient les présentations, entre deux bêtises.
– Tu sais quoi ? On a qu’à être meilleurs amis.
– Meilleurs amis pour la vie, alors.
– Oui. Meilleurs amis pour la vie.
Ils s’échangèrent un sourire étincelant avant de prendre chacun un feutre qu’Heaven avait pris dans sa poche avant de partir de chez elle, et ils entreprirent de dessiner sur le sol, comme si cela était la chose la plus normale du monde. S’ils avaient un an et demi de différence, leur âge mental était exactement le même en cet instant : ils adoraient provoquer en quelque sorte les gens présents, adoraient jouer ensemble et se prendre pour les rois du monde. Des amitiés comme cela, il en existe des milliers. Les enfants sont les maîtres dans l’art de se trouver des meilleurs amis tous les jours, voire même toutes les heures pour certains. Seulement, du haut de ses cinq ans, la petite demoiselle blonde avait l’étrange sensation que cela serait plus. Que cela durerait plus, que ce n’était pas comme avec les autres amis qu’elle avait pu avoir. Fronçant les sourcils, elle se pencha sur son dessin, légèrement énervée que celui-ci s’efface au fur et à mesure qu’elle le continuait. Le carrelage n’était pas un endroit propice à son expression artistique, donc. Elle se releva, soupira, puis regarda Riley, qui à son tour avait fait de même. Ils se sourirent, posèrent en même temps un doigt sur leur bouche, et se faufilèrent dans un coin.
Si Heaven était dans le genre sociale, elle avait beaucoup plus d’affinités avec les garçons qu’avec les filles. C’était simple : avec eux, elle se sentait chouchoutée, elle se sentait comme reine, et elle aimait ça. Elle préférait également l’esprit des garçons, plus joueurs, moins chochotte, beaucoup plus enclin à faire des bêtises avec elle. Cependant, Heaven était dans une école pour filles uniquement, avec l’uniforme, règlement intérieur stricte, et n’avait pas l’occasion de réellement voir des garçons pour jouer avec. Les seuls qu’elle voyait, c’était les amis de ses frères, bien trop vieux pour accepter de se rouler dans la terre avec elle. C’était donc au parc, avec sa gouvernante, qu’elle allait, qu’elle faisait du toboggan avec ses alter egos masculins.
Mais Riley restait de loin son ami préféré.
– Heaven ? Où es-tu ?
La demoiselle se redressa, lança un regard paniqué à Riley, puis se leva en dépoussiérant sa robe blanche. Elle lui fit un signe de la main comme pour lui dire ‘au revoir, et à la semaine prochaine !’ et mit ses feutres dans sa poche avant de se précipiter vers sa mère.
– Je suis là, mère !
Kathleen lui fit un pâle sourire, puis regarda derrière sa fille. Elle aperçut la tête blonde de Riley, et soupira, avant de remettre le manteau d’Heaven sur son dos, et de la pousser vers la sortie, tentant de l’empêcher de se retourner.
– Je n’aime pas trop quand tu restes avec ce garçon, Heaven. Pourquoi tu ne fais pas amie-amie avec les filles de madame Hendrick ?
– J’aime pas les filles de Madame Hendrick. Elles sont méchantes.
– C’est parce que tu leur tires les cheveux.
– En tout cas, Riley est mon meilleur ami.
– Je ne veux pas le voir à la maison.
Heaven leva la tête vers sa mère, et croisa son regard assassin, qui en disant long sur ce qu’elle pensait à propos de Riley. Instinctivement, elle baissa la tête, comme pour se protéger, comme aurait pu faire ses frères à sa place. Après tout, règle numéro cinq : ne jamais tenir le regard de Madame Tennessee. Au grand jamais.

the face behind
↬ PSEUDO/PRÉNOM - mythic curse.
↬ ÂGE - dix-huit ans.
↬ PAYS/RÉGIONS - île-de-france.
↬ OÙ AS-TU CONNU LE FORUM - bazzart de notre coeur (a).
↬ TES IMPRESSIONS - :coeurboum:
↬ CRÉDITS - miss volchock.
↬ AVATAR - autumn reeser.
↬ SCÉNARIO OU PI? - personnage inventé. *-*
↬ LE MOT DE LA FIN - GEMMA T.-WILDE ► a. reeser 2511619667

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Part. 2.
– Heaven, as-tu fait ton devoir d’histoire ?
– Oui.
– Tu as révisé tes mathématiques ?
– Aussi.
– Tu as révisé tes pièces de piano et de guitare ?
– Egalement.
Madame Tennessee savait que sa fille ne lui mentait pas. Règle numéro six, ne jamais mentir, quelque soit la situation. Kathleen regarda sa fille avec dédain, et finit par hausser les épaules, avant de reporter son attention sur ses dossiers. Avocate, elle n’avait guère le temps de consacrer quelques minutes à sa fille, rien que pour lui demander si sa journée s’était bien passée. Heaven resta à côté d’elle quelques minutes, attendant encore la réponse de sa question posée quelques instants avant l’interrogatoire de sa génitrice. Elle n’avait pas grand espoir, non. Mais elle trouvait que croire en l’impossible pouvait l’aider à avancer. Elle se leurrait, bien entendu. Mais c’était dans sa nature d’être ainsi : jeune, insouciante, souriante, croyante en des choses impossibles et ironiquement irréalisables.
Madame Tennessee finit par relever la tête vers sa fille, et soupira d’un air indigné. Elle retira ses lunettes, passa sa main sur ses yeux, et attendit encore quelques instants avant d’ouvrir la bouche.
– Qu’est ce que tu attends Heaven ?
– Et bien, vous savez bien, mère. Je vous ai demandé si je pouvais aller chez Riley cet après midi.
Regard assassin. Heaven baissa docilement les yeux, comme si cela allait attendrir sa mère.
– Il en est hors de question. File dans ta chambre.
La blonde resta figée là pendant un moment, n’en croyant pas ses oreilles. C’est seulement quand elle s’aperçut que sa mère la regardait avec agacement qu’elle fit volte face pour monter quatre par quatre les grands escaliers et se précipiter dans sa chambre. Elle passa devant Zacharie, jouant du violon, encore et encore, puis devant Andrew, casque sur les oreilles en train de lire un livre aussi gros que lui. En passant la porte de sa chambre encore toute rose, elle se mit à sentir sa gorge se serrer, puis se mit à sangloter bêtement sur son oreiller. 2003. Douze ans et quelques jours qu’elle était sur cette Terre, qu’elle était coincée dans cette famille à la fois rigide et soucieuse des apparences.
Douze ans, et elle n’en pouvait déjà plus.
Son regard embué de larmes se promena dans sa chambre, cherchant quelque chose contre lequel s’appuyer. Rien. Ses murs étaient blancs, comme ceux d’un hôpital, et rien ne laissait paraître qu’une adolescente vivait ici. Même dans sa chambre, même dans son territoire, Heaven n’avait rien le droit de faire, et était comme emprisonnée dans sa propre tête. Ce qu’elle faisait ? Travailler, travailler, encore et encore, tout cela rien que pour récolter un regard dédaigneux de sa mère, un soupire de son père presque jamais là. Elle faisait son possible pour faire tout ce qu’ils voulaient d’elle, jamais, pas un regard satisfait, pas une étreinte. Pour eux, c’était normal, l’excellence. Après tout, elle était une Tennessee, elle se devait de faire tout cela. Si Zacharie avait fini par aller en internat pour revenir que les week-ends comme ce jour là, Andrew avait quand même réussi à supporter cela. Et le supportait toujours.
Mais, elle, ne pouvait plus.
Elle s’affaissa sur son lit, caressa du doigt les dessins qu’elle avait pu laisser sur sa couette avant de descendre faire la requête à sa mère. Elle les observa, les larmes coulant encore contre ses joues. Monde cruel, mon injuste. D’un geste brusque, elle retira la cravate qui faisait partie de son uniforme, la jeta au loin dans sa chambre. La tristesse, dans sa tête, se transformait peu à peu en colère. Elle avait peur d’exploser, mais elle savait que cela arriverait. Fatalement. Cette famille ne lui correspondait plus, elle ne réussissait plus à se conformer à leurs règles. Elle en avait marre de n’être qu’une personne indigne d’intérêt à leurs yeux, de n’être qu’une bonne à rien. Elle était là, elle vivait à Londres, elle allait dans une école pour filles, travaillait deux heures et demi par soir pour avoir de bons résultats, était une fille modèle, rentrait toujours directement en revenant des cours, ne loupait aucune classe, avait des résultats excellents. Et au final, elle n’avait même pas le droit d’aller voir son meilleur ami que ses parents jugeaient sans importance et bien trop bas dans la société pour être fréquenté par une Tennessee…
Elle soupira. Ses doigts fins se posèrent sur un de ses dessins où elle avait tenté de dessiner sa mère, puis elle le saisit à pleine main, le déchira sans se contrôler. Encore. Encore. Encore. Des confettis, à l’image de l’amour qu’elle avait eu pour elle qui volait en éclat.
– Heaven, qu’est ce que tu fais ?
Zacharie se trouvait dans l’encadrement de la porte. Essuyant ses larmes, elle releva la tête pour le regarder en faisant paraître une façade pleine d’assurance. Elle respira plusieurs fois, compta jusqu’à dix dans sa tête. Elle cacha les morceaux de feuilles dans sa main. La révolution était en marche.
– Moi ? Rien du tout.
Règle numéro six des Tennessee : ne jamais mentir. Et pour la première fois de sa vie, Heaven venait de la transgresser, enfreignant en même temps la première. Ne jamais transgresser les règles.

***
– T’es pas sérieuse, là, Heaven ?
La Tennessee regarda sa meilleure amie avec de grands yeux, puis passa une main dans ses cheveux fraichement coupés. Lendemain du fameux jour où elle avait craqué, et qu’elle s’était sentie inutile dans sa famille. Juste après sa crise de larme, elle avait pris sa paire de ciseaux, l’avait approché de ses longs cheveux blonds lui arrivant jusqu’aux hanches, et d’un coup bien précis, les avait coupé au niveau de la nuque. Après avait suivit la coloration. Noir d'encre. Elle avait été satisfaite, au départ, par la symbolique de son geste, puis avait trouvé cela pas très jolie. Elle avait donc coupé de nouveau, de plus en plus court, pour se retrouver avec une coiffure identique à celle de son frère Andrew. Pas trop courts, pas rasé comme certains hommes, mais plus de longues boucles venant lui chatouiller le visage. Ce n’était pas grand-chose : après tout, dans les familles normales, les adolescents avaient souvent des réactions ainsi. Simplement, pour les Tennessee, cela voulait dire beaucoup. Beaucoup trop, certainement.
Autant dire que Kathleen avait poussé un cri horrifié quand elle avait débarqué dans la salle de bain et qu’elle avait vu les longues mèches de cheveux gisant dans le lavabo et la boîte de coloration pour cheveux. C’était simple, elle n’avait jamais voulu qu’elle se coupe trop court sa tignasse, considérant qu’une fille devait avoir les cheveux longs. Une gifle, même plusieurs. Mais cela n’avait rien changé. Sa fille allait demeurer avec les cheveux courts un temps.
Bien sûr qu’elle avait prit cela comme une attaque personnelle, qu’elle avait fusillé du regard sa fille aussi longtemps qu’elle avait pu. Mais elle avait vu dans les yeux d’Heaven que c’était fini. Qu’elle n’avait plus peur.
– T’aimes pas ?
Ton innocent, voix douce, alors qu’Heaven entreprenait de prendre ses affaire dans son casier. Elle, personnellement, trouvait que cela ne lui allait pas, mais par esprit de contradiction, elle préférait penser que sa nouvelle coupe était une pure merveille plutôt qu’accepter que sa mère eut raison. Elle posa sa main sur son livre d’allemand, puis se tourna vers Heather, le visage perplexe.
– Et puis, explique-moi en quoi je n’aurais pas le droit de me couper les cheveux ?
– Bah, je sais pas moi, ça te donne un côté…
– Garçon ? Et pourquoi pas, hein ?
– Bah…
– Bon, dégage Heather. T’es comme eux de toute manière.
Elle claqua la porte de son casier puis tourna les talons sans un seul regard pour sa meilleure amie. De toute manière, dans cette école, ils étaient tous ainsi. Tous pareils, autant qu’ils étaient. Trop bourgeois, trop à cheval sur les règles. C’était quoi au juste leurs problèmes, hein ? Ils ne pouvaient pas laisser les gens qui ne se plaisaient pas dans ce monde tranquillement ? Tout cela la rendait malade. Elle se mit à courir, ses affaires sous le bras, bien trop vite pour que sa jupe reste en place, et poussa violemment la porte des toilettes. Elle lâcha son sac de cours, laissa tomber ses livres de ses mains, et entra dans la première cabine qu’elle trouva. Sans plus attendre, elle pencha la tête au dessus des toilettes, s’enfonçant ses doigts dans la gorge.
Son petit déjeuner y passa. Mais c’était le seul moyen qu’elle avait trouvé pour dénouer le nœud qui s’était formé dans son ventre. Elle se sentait de plus en plus enfermée, de plus en plus oppressée.
Se couper les cheveux n’était que la première chose d’une longue série de bêtises, donc. C’est ce qu’elle conclut quand elle appuya avec énervement sur le bouton d’actionnement de la chasse d’eau.
Elle se regarda dans le miroir, se rinça plusieurs fois la bouche. Elle comprenait Zach mieux que n’importe qui. Elle comprenait pourquoi il s’était tué à vouloir aller en internat, pourquoi il n’avait pas pleuré quand il avait quitté l’école pour garçons dans laquelle il avait été scolarisé avec Andrew pour se rendre dans cet internat où il avait pu étudier la musique avec des passionnés comme lui. Maintenant, il était loin de tout ça. Mais il y avait été par la manière douce.
Et Heaven n’était pas résolue à être gentille à ce point là avec leurs parents. Certainement pas.

4.
– Bon, Heaven, ce n’est plus possible !
La voix d’Aaron Tennessee s’éleva dans la salle à manger, et la brune se concentra sur le contenu de son assiette. 2005. Cela faisait maintenant deux ans qu’elle garda les cheveux courts, certes un peu plus long que la fois où elle se les était coupés toute seule, mais ses boucles n’étaient pas réapparues. Elle finit par poser son assiette, relever la tête pour observer Andrew qui était assis en face d’elle et qui semblait être absorbé par le liquide contenu dans son verre. Mauviette. C’était la première fois qu’il ne faisait rien, qu’il laissait les parents la disputer. Et Zacharie qui n’était même pas là… Elle soupira d’un air indigné, et tourna la tête vers son père avec un air provocateur.
– Et tu vas me faire quoi au juste ? Lire ton journal comme à chaque fois que mère levait la main sur nous tout simplement parce qu’on avait la mauvaise idée de faire un pas de travers gosses ?
– Heaven, je ne te permets pas !
– Vous me permettez jamais rien.
Elle se leva de table, dans de grands gestes dramatiques, et lança sa serviette à terre avant de marcher dessus pour s’en aller. Elle monta les escaliers aussi vite qu’elle put, prit le sac qu’elle avait fait quelques heures plus tôt en prévision de ce moment fatal. Bien sûr qu’elle avait su que cela se passerait mal. Ca se passait toujours mal, avec eux, de toute manière. Quand elle était rentrée, ce soir là, ils l’avaient vu débarqué avec une mèche blonde parmi ses cheveux. Ils n’avaient pas apprécié, évidement. Ils avaient trouvé cela vulgaire, l’avait engueulé comme une chienne, en avait profité pour la priver de tout ce qu’ils pouvaient bien trouver. Elle était restée devant eux, ce regard arrogant qu’elle s’était forgée, guère démontée par leurs menaces. Mais le pire avait été après, quand ils avaient aperçue le tout nouveau piercing qu’elle s’était fait en compagnie de Riley, fraudant un peu pour pouvoir l’obtenir, au septum. Explosion à table. Scandale, bien entendu. Après tout, cela faisait très mauvais genre d’avoir une fille qui fait sa crise d’adolescence d’une telle manière.
Elle redescendit, sweat-shirt sur le dos, sac aux épaules, et mit ses chaussures aussi vite qu’elle le put. Bien entendu, ses parents étaient debout, la regardaient avec de grands yeux, trop choqués pour faire quoi que ce soit. Ils savaient menacer, mais ne passaient jamais à l’acte.
– Vous êtes que des cons.
Elle ouvrit la porte et la referma en la claquant, puis elle se mit à courir dans sa rue pleine de maisons grandissimes et de pauvres riches sans cœur. Si les larmes montaient à ses yeux, elles coulaient sans qu’elle sanglote comme une petite fille. Elle était en soi trop sensible pour que ce geste ne lui fasse rien, mais elle n’avait pas de peine pour eux. Non. Ce qu’elle pleurait, c’était son enfance gâchée. Elle avait peut être eu tout ce qu’elle désirait, mais pas de l’amour. A vrai dire, elle ne savait même pas ce que cela pouvait bien dire.
Elle descendit dans la première station de métro qu’elle trouva sur son chemin, s’orienta sans regarder un quelconque plan comme seuls les Anglais pouvaient le faire. Debout dans les longs serpents mécaniques, elle observa son reflet dans les vitres, détaillant chaque larme qui avait bien pu couler le long de sa joue. Ses cheveux étaient ébouriffés, ses yeux fatigués. Elle ne se reconnaissait plus dans cette adolescente à la fois mal dans sa peau, blessée, peu sûre de son lendemain. Doucement, elle descendit à un arrêt de la Picadilly Line, puis d’un pas mal assuré, s’avança dans la foule. Des gens normaux. Cela lui faisait bizarre. Pour une fois qu’elle côtoyait des gens qui étaient comme elle aurait voulu être.
Elle monta les marches pour se retrouver dehors, la pluie s’abatant sur ses cheveux courts. Elle mit sa capuche sur sa tête, regarda autour d’elle avant de se mêler à la masse. Elle connaissait le chemin par cœur. Tellement que les minutes semblaient se transformer en secondes. Porte bleue. Sonnette presque accueillante. Tête blonde reconnaissable.
– Ca te dérange si je couche là pendant quelques jours ?
Riley lui ouvrit les bras pour qu’elle puisse se réfugier contre lui. Elle se mit à pleurer contre lui, ce meilleur ami qu’elle avait rencontré neuf ans auparavant. Amitié de gamin ? Plus trop maintenant.
Il la fit rentrer. La fit dormir sur le canapé sans poser de questions, se contentant juste de la consoler du mieux qu’il pouvait. Après tout, ils étaient des meilleurs amis pour la vie.

***
– Central High School. Tiens, ça me dit rien. C’est pas une école pour riches ça, je me trompe ? Oooh, mais Monsieur et Madame Tennessee finissent par se rendre compte qu’il n’y a pas que des lycées qui coutent la peau du cul ?
– Tu iras en internat là-bas, et tu passeras tes vacances avec un éducateur.
– C’est la meilleure façon pour se débarrasser de moi, hum ? Fille indigne. Oh, la, la. Quelle honte.
Kathleen leva la main vers sa fille, puis finit par la baisser, le regard plus noir que jamais. C’était réellement fini entre Heaven et sa famille. Il n’y avait plus rien, tout du moins, entre ses parents et elle. Si, du vide, de l’incompréhension. Une barrière d’honte s’était forgée entre ces deux mondes si différents. Heaven n’aimait pas être méchante. Elle détestait son ton sarcastique, ses remarques aussi assassines que rancunières. Seulement, c’était le seul moyen qu’elle avait trouvé pour se défendre. Elle s’était forgée une carapace avec eux ; l’adolescente rebelle et chieuse à temps plein. Avec ses amis, c’était autre chose. Elle pouvait être la fille la plus adorable de la terre, en dessous de ses cheveux teints de toutes parts, sa coupe de garçon et son maquillage pot de peinture. Mais peu de personnes, dans son ancien collège, se donnait la peine de l’écouter, de la regarder, de lui donner du temps pour faire ses preuves. Coincée dans un endroit bourgeois qui la rendait presque allergique. Voilà ce qu’elle était.
Ils étaient assis à trois sur la table du salon. Elle d’un côté, eux deux de l’autre. Elle était revenue de chez Riley, l’été commençait tout juste. Bien entendu, elle avait fini ses années de collège, et la replacer était une obligation. Pendant longtemps, Heaven avait pensé que ses parents la destinaient à un lycée dans la même lignée que son ancienne école : exclusivement féminin, avec un encadrement spécialisée, beaucoup d’argent à investir, des locaux fabuleux, des filles à la fois bitch et sans scrupule.
Heaven finit par hocher la tête et monter à l’étage sans un seul regard pour eux. Après tout, la discussion était close. Elle se dirigea vers la chambre de Zacharie, où celui-ci était installé à jouer de la guitare, et il leva la tête dans sa direction quand elle s’affala sur son lit encore défait. Un silence s’installa, alors qu’il ne jouait plus et que leurs parents avaient cessé de marmonner en bas, et la demoiselle posa son regard sur la fenêtre pour observer les rayons du soleil. Toujours aucun bruit. Elle soupira, se releva lentement, et regarda son frère blond.
– A l’internat, je vais me faire pousser les cheveux. Ils me manquent.
– Pourquoi tu fais ça, Heavy ?
– Il fallait bien que quelqu’un le fasse.
– Et tu n’as pas peur de tout perdre ?
– Et perdre quoi ?
– Eux.
Il lui fit un petit sourire avant de se reconcentrer sur sa guitare. Elle se leva, ébouriffa les cheveux de son grand frère avant de sortir de sa chambre. Il l’avait vanné pendant des années. Il l’avait critiqué, rabaissé, lancé des paris stupides pour qu’elle se fasse gronder, et maintenant qu’ils étaient là, nus face à la vérité de leurs actes, ils avaient fait une sorte de paix. C’était peut être la perspective de ne plus se revoir avant les grandes vacances prochaines qui les rendaient aussi calme et pacifiques, mais Heaven s’avoua qu’elle aimait cela. Il partait à Paris faire ses études de musique. Elle, allait dans un lycée de Londres, en internat, les vacances avec un éducateur, elle ne savait pas où. Elle avança vers la sortie, et dans l’embrasure de la porte, se retourna pour poser ses yeux sur son instrument.
– Tu vas me manquer, Zach Tennessee. N’oublie pas de m’envoyer par la poste les partitions que tu composes.
– Ca risque pas. Comment oublier son hérisson préféré ?
Elle rit. Cela faisait des mois qu’elle ne l’avait pas fait dans cette maison.

5.
– Mademoiselle Tennessee, rappelez moi de quoi est composé l’uniforme féminin s’il vous plait.
2006. La demoiselle assise en face du proviseur leva les yeux au plafond, faisant mine de réfléchir, et laissa quelques secondes s’écouler le temps qu’elle réponde. Elle se redressa, joua lentement avec ses cheveux lui arrivant à l’épaule, et regarda l’homme avec ses grands yeux verts.
– Chemise blanche avec l’insigne de CHS, cravate bleue nouée autour du cou, veste bleu avec l’insigne de l’école toujours. Jupe plissée arrivant aux genoux bleue toujours, collant blanc ou chair, chaussures immondes bleue et blanche de l’école… Ruban dans les cheveux peut être ? Serre-tête. Je crois même qu’il y a un parapluie quand il pleut !
Fière, elle lui adressa un immense sourire, comme si elle sortait victorieuse de l’interrogatoire. Elle croisa les jambes, joignit ses mains sur ses genoux et continua à observer le proviseur avec ses grands yeux verts. Troisième fois ce mois ci qu’elle finissait par passer la porte de son bureau. Première, pour avoir fumé dans sa chambre d’internat. Deuxième, pour avoir fugué un soir pour aller dans un bar avec d’autres internes. Si elle n’avait pas été encore expulsée depuis son arrivée, c’était tout simplement parce que ses parents graissaient la patte du lycée. Le rénovement de la cafétéria n’avait pas été fait avec des fonds propres.
En cet instant, Heaven savait pourquoi elle était là. Simple. La veille, elle s’était amusée à prendre sa paire de ciseaux avec Andrea Williamson – une autre pensionnaire blonde comme les blés et pas sainte (du tout). Bien sûr, les profs l’avaient remarqué dès qu’elles avaient mis les pieds en classe. Ils n’étaient pas aveugles, non plus.
– Justement, mademoiselle Tennessee. Jupe arrivant aux genoux. Or, il me semble, la mi-cuisse n’est pas exactement située au même endroit que le genou. Je me trompe ?
– Monsieur le proviseur, si vous me le permettez, c’est mieux que rien du tout.
Heaven tourna la tête vers le brun qui était installé dans un fauteuil, au fond de la pièce. Elle sourit, puis se retourna vers le proviseur en souriant de plus belle. Ironisme à en vomir. Le proviseur fusilla du regard le garçon, puis la Tennessee, et se leva pour prendre dans un de ses tiroirs une chemise de chimie extrêmement longue. Il la mit dans les mains de la demoiselle, et soupira d’un air indigné.
– Vous deux, dehors. Steevens, je vous communiquerais les renseignements que vous souhaitez plus tard. Tennessee, je vous retiens.
– Au plaisir !
Elle se leva, se dirigea vers la porte. Le gars qui l’avait à moitié défendu lui tint la porte pour sortir, et une fois dans les couloirs, elle se tourna vers lui en enfilant la blouse de chimiste prévue pour cacher ses jambes un peu trop dévoilée. Elle ne l’avait encore jamais vu auparavant. Enfin, elle avait du le croiser à plusieurs reprises, mais n’avait pas retenu son visage. Après tout, il y avait tellement d’élève dans ce lycée, et elle n’était pas sur le même niveau que lui… elle lui adressa un sourire.
– Merci.
– Ya pas de quoi.
– C’est quoi ton prénom ?
– Jeff. Heaven, c’est ça ?
Elle hocha la tête, sans vraiment savoir comment il avait fait pour connaître son prénom. Après tout, tout le monde dans le lycée avait du finir par la connaitre. Heaven, la rebelle. Image complètement fausse, d’ailleurs, puisqu’elle était la première à pleurer dans son coin, la première à s’en vouloir dès qu’elle blessait quelqu’un avec ses paroles. Mais les élèves semblaient être beaucoup plus inspirés à colporter sa réputation de mauvaise fille.
Au final, ça ne la dérangeait pas. Elle savait ce qu’elle valait.

***
Domicile des Tennessee, matinée. Aaron et Kathleen assis d’un côté de la table du salon, Heaven de l’autre. Un service de thé était entre les deux camps, comme pour les séparer, marquant distinctement cette frontière qui s’était édifiée entre eux au fil des années, sans qu’ils ne le veuillent, au final. Ils ne se comprenaient plus, c’était fini. Elle les avait déçus, ils avaient été trop durs. La demoiselle avait conscience qu’elle ne pourrait pas revenir en arrière, qu’elle n’aurait plus qu’à s’en aller quelque part à Londres, vivre dans un appartement, vivant de ses propres ressources, et changer de trottoir quand elle les croiserait dans la rue, faire comme s’ils n’existaient pas. Si son esprit tentait de se persuader que c’était ce qu’elle attendait depuis des années, elle savait qu’au fond cela la frustrait, lui faisait du mal, la rongeait lentement comme de l’acide. Elle se sentait mal, comme si elle voyait son monde s’effondrer, alors qu’elle croisait leurs regards froids dénués de sentiments à son égard. Elle avait tenté de croire qu’elle s’était faite de nouvelles fondations, seule, mais tout était tout simplement en train de tomber en ruine. On l’obligeait à se détacher alors qu’elle n’était pas prête. Absolument pas prête.
Elle l’avait bien compris, elle n’était plus rien. Plus rien du tout.
– A+ en Littérature.
C’était Kathleen qui avait fini par briser ce silence pesant, puisque c’était elle et seulement elle qui se permettait d’encore lui adresser la parole. Heaven observa ses mains, contempla ses ongles rongés, couverts de vernis noir abimé, consciente des regards lourds de sens qui pesaient sur elle. Sa mère tenait ses résultats d’examen finaux de Lycée, et elle regardait ses notes, fatalement. Son ton avait été froid, tranchant, comme si avoir une fille aussi douée en Littérature à ce point là était comme une tare pour la famille. Ce n’était pas de sa faute s’ils avaient toujours nourri l’espoir qu’elle soit biologiste, chercheuse, une scientifique comme son père. Seulement, ses notes catastrophiques en Mathématiques et en Sciences Expérimentales pouvaient laisser perplexe certains, rendre fous de rage d’autres. Comme Aaron et Kathleen, par exemple.
– Pas de "félicitation, c’est bien ma fille !" ? Ca m’aurait étonné. Bon, j’peux y aller maintenant ?
Elle s’interrompit, tout en soupirant et en passant ses mains sur son visage. A quoi cela servait, sincèrement, de protester ? Elle connaissait ses parents. Ils allaient lui faire la même chose qu’avec Zacharie : l’obliger à prendre une décision qui sera au final sienne, l’éloigner du mieux qu’ils pouvaient. Une fille comme elle tachait bien trop l’image des Tennessee. C’était un fait.
– Finalement, tu sais dans quelle université tu vas aller ? Ca serait peut être bien que tu nous communiques ton choix, Heaven. Nous sommes tes parents.
Heaven eut un petit rire ironique, regarda son père comme s’il disait la connerie la plus grosse de sa vie. Comme s’ils avaient été des parents. Tout ce qu’ils avaient fait, c’était de ne plus lui parler une fois qu’elle s’était exprimée, une fois qu’elle leur avait fait comprendre qu’ils agissaient plus en tyran qu’autre chose. Elle posa sa tête sur la table, et réfléchit un instant. Elle connaissait la réponse. Depuis longtemps, même.
– Fordham.
– Très bien.
– 5 500 kilomètres, ça suffit pour votre honneur ?
Heaven se leva de table. Pas de protestation, pas de réponse. Elle savait qu’elle avait gagné. Sa valise était déjà faite. Ses affaires déjà prêtes. Ses billets déjà pris.
Le premier septembre, elle s’envola pour New York, ville qui la faisait rêver, sans se retourner. Elle laissa Andrea quelque part en Ecosse, ses frères dans leurs universités en Europe, et ses parents dans leur grande maison de riches. Ce qu’elle avait juste réclamé en échange de leur foutre la paix était une pension alimentaire pour pouvoir vivre. Somme bien grasse, mais elle n’avait plus aucun scrupule.
Le seul qui la suivit fût Riley, comme toujours.

6.
– Riley était mon meilleur ami, c’est vrai. Mais il était avant tout un frère pour moi.
Heaven leva les yeux vers les personnes qui l’observaient, là, dans le cimetière de New York. Elle déglutit, chercha le courage pour lire le discours qu’elle avait soigneusement préparé durant les trois jours qu’elle avait eu pour le faire. Ses mains s’accrochaient au papier froissé comme si c’était leur dernière prise avec le monde réel, une larme solitaire coula sur sa joue pour se réfugier contre sa mâchoire. Sa gorge demeura vide de tout son. La brune avait l’impression que prononcer ces mots allait tout changer ; que Riley allait être mort, pour de vrai.
Elle avait du mal à l’accepter… Elle ne pouvait pas le faire.
– Je me souviens de la première fois où je l’ai vu, dans une synagogue de Londres. J’avais cinq ans. Déjà à cet âge là, j’étais persuadée que nous finirions nos vies ensemble, que nous serions meilleurs amis, malgré le temps, malgré les problèmes, malgré nos familles. J’avais tord. Seulement, c’est la dernière chose à laquelle je pensais qui nous a séparé ; la mort.
La jeune femme avait l’impression d’être la seule dans sa douleur. Comme à chaque fois. Nerveusement, elle essuya ses joues du bout des doigts avant de poursuivre.
– Il a toujours été présent pour moi. Il a toujours su trouver les mots pour m’apaiser, pour me faire penser que finalement le lendemain ne serait pas si difficile, qu’il valait la peine d’être vécu. Il m’a fait avancer, il m’a soutenu, quoi que je fasse, quoi qu’il arrive. Sans lui, je serais encore emprisonnée dans ma propre tête, dans une brillante université de Londres, sans avoir soutient ni sourire de quiconque. Je le répète, il a été un frère. Bien plus que cela ; un guide, un mentor, une épaule. Jamais je ne pourrais le remercier assez pour la générosité dont il a fait preuve. Il m’a sauvé, comme il a sauvé beaucoup de personnes ici présentes. Sa simple présence suffisait pour calmer les tensions et les maux. Il ne vivait pas que sa vie ; il vivait celle de quiconque voulait bien de lui dans son existence. Aujourd’hui, il est parti, et c’est nous qui avons besoin de lui pour avancer.
Elle plia son bout de papier, puis se retira de l’estrade pour laisser place à un autre de ses proches, venu lui rendre un dernier hommage.
Ne supportant plus la vue de ce cortège funèbre, Heaven se faufila parmi les personnes toutes vêtues de noir, puis regagna le parking en courant à moitié, sa robe noir l’empêchant d’aller au rythme qu’elle aurait souhaité avoir. Retrouvant sa voiture, elle s’installa derrière le volant, puis fondit en larmes.
Elle s’était installée à New York il y a maintenant presque deux ans de cela. Tout avait été pour le mieux. Elle ne s’était jamais sentie aussi libre.
Il faut toujours quelque chose pour nous faire redescendre sur terre, apparemment.
Heaven avait passé sa première année à Fordham, avait obtenu son année en Littérature. Guère satisfaite par ces études là, elle avait enchainé la deuxième année sur des stages dans des maisons de couture, sans pour autant y trouver sa place. La demoiselle avait trouvé un rythme de vie sain, oubliant les écarts de son adolescence, posant de véritables fondations. Elle avait murit, Riley à ses côtés.
La vie ne tient qu’à un fils. Qu’à un accident de voiture. Observant ses égratignures, Heaven soupira, effaça ses larmes avec un mouchoir, et mit le contact.
The songs of the dead are the lamentations of the living.

***
– Heaven ouvre moi cette porte !
Un soupire résonna dans l’appartement presque vide, puis des pas. Un verrou. Heaven ouvrit la porte à Jeff, essoufflé d’avoir monté quatre étages pour venir jusqu’à son appartement. Elle leva les yeux au ciel puis retourna dans sa chambre – tout du moins, ce qui avait été sa chambre – pour finir d’emballer ses vêtements.
– Mon Dieu tu es blonde !
– Disons que j’ai retrouvé ma couleur de cheveux naturelle. Et oui, je suis blonde !
D’un geste agacé, elle entassa ses jupes dans un carton, puis alla chercher ses jeans dans son placard.
– Disons que… Tu vas quelque part, d’ailleurs ?
Heaven lança un regard à son ami, puis à son appartement, et ne répondit pas à la question. Jeff était venu de Londres rien que pour l’enterrement de Riley, et repartait le lendemain. La Tennessee ne souhaitait pas se battre avec lui. Elle n’était pas d’humeur. S’armant du scotch, elle ferma le carton avec plus de vigueur que nécessaire, et alla l’empiler avec les autres dans le salon.
Revenant dans la chambre, elle s’arrêta devant son ami, les mains sur les hanches.
– Je m’en vais. Nous sommes en juin, j’ai postulé dans plusieurs universités depuis janvier, j’ai été placée en liste d’attente un peu partout. J’ai appelé mon frère pour lui demander s’il pouvait pas m’héberger pendant un moment le temps que je sache quoi faire en septembre.
Il y eut un silence, mais Heaven ne bougea pas. Tout était prêt ; elle avait prétendu partir en vacances à la plupart de ses amis de New York, avait fait comme si elle se rendait au Warped Tour, ce qui n’était pas une première pour elle. La demoiselle n’avait pas eu le courage d’avouer qu’elle quittait la ville, ni même à son petit-ami actuel. C’était trop dur de s’avouer vaincu, de s’avouer incapable de… Vivre, ici, sans Riley. L’air lui était devenu trop difficile à respirer, malgré les trois mois qui s’étaient écoulés depuis l’accident de voiture où elle avait survécu et pas lui.
Elle avait dit la vérité à Jeff, parce qu’elle savait qu’il ne dirait rien et qu’il accepterait cette décision. De toutes manières, cela lui importait peu ; il retournait en Angleterre.
– Ton frère, celui qui s’est installé à San Francisco ?
– C’est bien ça.
Heaven croisa le regard de Jeff, et celui-ci soupira avant de l’attirer contre lui. Déposant un baiser sur le haut de son crâne, il fit durer leur étreinte.
Quelques semaines plus tôt, Heaven se serait mise à pleurer. Mais plus maintenant.
La demoiselle se dégagea avant d’aller reprendre ses cartons. Andrew l’avait appelé une semaine plus tôt pour prendre de ses nouvelles, et c’est comme cela qu’elle avait eu l’idée de se rendre chez lui. D’une manière ou d’une autre, elle aurait quitté New York ; il lui avait simplement donné une bonne excuse de le faire maintenant.
La demoiselle soupira, puis rangea une mèche de cheveux derrière ses oreilles. Elle n’était pas encore réhabituée au blond – cela faisait si longtemps qu’elle l’avait délaissé ! – mais cela avait été symbolique pour elle ; recommencer une nouvelle vie. Moins folklorique, plus posée.
– Tu vas me manquer, Tennessee.
– Je t’ai pas manqué, avant ? demanda-t-elle, taquine.
Ce fût au tour de Jeff de lever les yeux au ciel. Heaven le vit plonger sa main dans une de ses poches, puis en ressortir une photo, qu’il déposa sur le carton qu’elle était en train d’emballer.
– J’ai trouvé ça en partant de Londres. Je pense que tu en auras plus besoin que moi.
Heaven baissa les yeux sur le cliché.
– Appelle-moi, Heaven. Personne ne te manqué hormis Riley, mais n’oublie pas que tu es importante pour beaucoup de personne, ici.
La demoiselle vit la photo ; Jeff, Riley, elle, quelques jours avant d’être diplômés. Tout semblait si facile.
Elle releva la tête pour remercier son ami, mais il n’était plus là.


7.
– Punaise Andrew t’es pas sérieux quand tu me dis que nos parents sont dans le salon, j’espère ?
Rageusement, Heaven posant ses mains sur ses hanches, le regard assassin. Elle savait pertinemment qu’elle ressemblait de plus en plus à sa mère quand elle se mettait en colère, mais son frère avait réussi à la mettre hors d’elle. Voilà qu’il se permettait de les inviter pendant qu’elle était là et surtout pour qu’ils puissent discuter ! Comme si le couple Tennessee-Wilde savait le faire sans insulter ses enfants. Toujours sous le perron, son frère lui barrant le passage du bras, elle fronça les sourcils et croisa les bras.
– T’es au courant que j’ai passé toute ma vie à les éviter ?
Elle laissa un temps, puis soupira.
– Enfin presque. Mais tu devrais être très bien placé pour savoir que je ne veux pas les voir et qu’eux non plus ! Au moins un sentiment partagé, c’est pas mal tu ne trouves pas ? Demande-leur, je suis sûre que je suis raillée du testament depuis que je suis partie. Mais bon, visiblement, Monsieur Andrew Tennessee-Wilde est au dessus de tout ça ! Bordel je te croyais intelligent. Si je suis venue ici c’est juste pendant les vacances avant de retourner à l’université, t’aurais pu les inviter après non ?
N’obtenant aucune réponse, elle leva les yeux au ciel, puis respira profondément afin de se calmer. Des larmes de rage coulaient le long de ses joues, et elle les essuya d’un geste nerveux. C’était un coup bas. Le regard toujours assassin, Heaven relâcha cependant les bras, et soupira. Comprenant que c’était le feu vers, Andrew lui laissa le passage, et elle entra dans sa maison de San Francisco tout en priant que cela ne soit pas si horrible que ce qu’elle avait pu imaginer en l’espace de quelques secondes.
La blondie les aperçut dans le salon, comme Andrew lui avait précisé. Heaven se sentit presque défaillir. En l’espace d’un moment, elle retourna en enfance, quand elle avait peur de les affronter. Avant, elle avait eu le courage de leur dire ce qu’elle avait sur le cœur. Maintenant, elle n’était plus assez déterminée à prendre le dessus. Elle avait changé, elle avait muri, elle était devenue quelqu’un d’autre. Heaven était prête à recommencer une nouvelle vie ; laisser tout son passé, ses chagrins, ses ratés, tout cela derrière elle. Effacer l’ensemble d’une période d’un revers de la main.
Ils ne se levèrent pas, mais ne la regardèrent pas non plus comme ils avaient pu le faire durant la période où elle leur tenait tête. Timidement, préoccupée par ce qui allait se passer, elle s’assit en face d’eux, suivit de son frère.
Elle se sentait si petite, d’un seul coup. Si fragile, si vulnérable.
– J’ai toujours dit que le blond était la couleur de cheveux qui se sied le mieux à ton visage.
Comment briser la glace, par Kathleen Tennessee-Wilde.
– Le bleu était pas trop mal je trouve, lança Heaven, lançant un regard en coin à son frère.
Celui-ci comprit le message. Tout du moins, Heaven pensait que c’était le cas. Dans tous les cas, celui-ci prit la parole après s’être éclaircir la gorge.
– Donc, vous ne m’avez pas dit pourquoi vous teniez tant à venir en personne pour voir Heaven ? Je veux dire, vous auriez pu lui parler par téléphone, mais vous avez préféré vous déplacer ?
Le mari et la femme se regardèrent, puis leurs yeux se posèrent sur Heaven qui fit de son mieux pour soutenir leur regard. Elle se sentait fondre. Pourquoi faisait-il si chaud, tout d’un coup, dans cette pièce ? Ne pouvaient-ils pas regarder ailleurs ? Etait-elle donc la seule chose d’intéressante à regarder dans cette pièce ?
Ce fut Aaron qui prit la parole. Une première. A côté de lui, sa femme ne cessait de regarder Heaven d’une étrange manière. Fierté ? La demoiselle avait du mal à interpréter ses signaux.
– Nous avons une assez bonne nouvelle, pour tout dire.
Heaven leva les yeux au ciel. C’était parti. Ils en auraient pour des heures le temps qu’Aaron trouve x et y raisons d’expliquer une chose qu’il n’avait pas encore révélé, et sans importance une fois annoncée.
– J’ai un collègue qui travaille à Harvard, continua-t-il, guère troubler par l’attitude de sa fille. Enfin, je l’ai rencontré quand je suis allé dans l’université où il enseigne pour donner une conférence sur l’une de mes thèses.
Aaron Tennessee-Wilde, professeur dans l’enseignement supérieur en Sciences et Biologie, bonjour. Heaven avait presque oublié ce détail.
– Tout cela pour dire qu’il m’a appelé il y a une semaine pour m’annoncer que la benjamine de mes enfants avait été mise sur liste d’attente dans son université, et qu’il pouvait appuyer sa candidature si je le souhaitais.
Heaven releva les yeux, surprise.
– Dis moi maintenant Heaven, quand t’es-tu enfin rendue compte que tu n’étais pas qu’une bonne à rien ?


***
– J’arrive toujours pas à y croire !
Sourire aux lèvres, Andrew avait insisté pour porter le sac de Heaven, bien qu’ils aient déjà donné toutes ses valises à l’enregistrement des bagages. Aéroport de San Francisco, fin août, il était temps pour elle de lever les voiles, d’aller là où le vent l’emmenait. Sautillant presque, elle sourit.
– Moi non plus.
Son frère leva les yeux au ciel, puis ébouriffa ses cheveux, tandis qu’ils continuaient leur route.
– Sincèrement, Harvard ! Depuis quand ma petite soeur est-elle devenue plus brillante que moi ? C’est d’une injustice !
Heaven soupira, tandis qu’ils arrivèrent devant la douane. Elle s’en allait une nouvelle fois toute seule, cependant, elle se sentait beaucoup mieux qu’avant. La mort de Riley était toujours dans sa mémoire, sa douleur était toujours présente, cependant, passer deux mois en compagnie de son frère – et avec aussi toutes ses petites-copines successives – fût comme réparateur. Heaven avait l’impression d’avoir comme une nouvelle peau, une nouvelle vie.
Et puis, elle allait à Harvard. Si la rencontre avec ses parents avait fini en cris, Aaron Tennessee avait quand même rappelé son collègue pour appuyer la candidature de sa fille, et la demoiselle avait reçu un dossier de félicitations d’Harvard une semaine après.
Comme quoi, un jour peut-être horrible, mais cela ne signifie pas forcément que la vie l’est.
– J’ai toujours été intelligente. Je sais juste très bien le cacher ! répliqua-t-elle, souriante.
– Ouais c’est ce qu’on dit ! Je parie que tu ne tiendrais pas plus de deux mois avant de retourner pleurer dans mes jupes.
Heaven leva les yeux au ciel, et donna un coup dans les côtes de son frère.
Son vol fût annoncé, et Heaven regarda tristement la douane qui se trouvait juqte à côté d’eux. Andrew l’attira contre lui, et la serra dans ses bras, aussi fort qu’il put. Cela allait lui manquer. Mine de rien, se disputer avec son frère, regarder la télévision avec lui, se balader sur la plage en sa compagnie, étaient des choses qui lui avaient manqué. Finalement, sa famille n’était peut-être pas aussi pourrie que cela.
– Oh une dernière chose, Heaven.
Elle releva la tête, prête à l’écouter.
– Pourquoi Gemma Wilde, au fait ? Je veux bien comprendre que tu veuilles changer de nom toussa, Wilde je comprends, mais Gemma ?
La demoiselle sourit, puis se détacha lentement de lui. Oui, elle avait décidé de changer de nom. Balayer d’un revers de la main toute sa vie, tout son passé. Elle releva la tête pour mieux le regarder.
– Ca ne te rappelle rien ?
– Non.
– Tu te souviens quand on était petits, et qu’on regardait les étoiles avec Zacharie et notre père ? Il arrêtait pas de nous engueuler parce qu’on f…
– Je m’en souviens.
– Et bien, ta constellation préférée était l’Alpha Coronae Borealis. Sauf que tu ne réussissais jamais à retenir le nom, donc notre près t’a donné son surnom. Gemma. Puis après, quand tu as su qu’en Français cela avait pour équivalent « Pierre Précieuse », tu m’as appelé comme ça.
Heaven haussa les épaules.
– Tu as arrêté le jour où tu es parti en pensionnat.
Andrew se mit à sourire, et l’attira une nouvelle fois contre lui.
– Tu vas me manquer, Gemma.
– Toi aussi, Alpha Coronae Borealis ! répondit-elle, riant légèrement.
Joueur, il lui donna un coup dans les côtes à son tour, et leur étreinte prit fin. Heaven récupéra son sac, puis s’avança vers la douane, faisant un dernier signe à son frère avant de s‘enfoncer dans une nouvelle vie.
Recommencer. Finalement, elle avait fini par y arriver.

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okay, une voix pour karen, une voix pour autumn. GEMMA T.-WILDE ► a. reeser 2109348208 pendant ce temps là je fais ma fiche. GEMMA T.-WILDE ► a. reeser 73120010
extasy • mon personnage est une fille heureuse de vivre, qui malgré les obstacles a quand même réussi à se relever. Un peu princesse sur les bords, complètement marginale, originale, décalée. Elle a cette faculté à se détacher de tout et va et vient sur le globe, quand bon lui semble. GEMMA T.-WILDE ► a. reeser 2109348208
autrement, merci beaucoup vous trois, vous êtes cute. GEMMA T.-WILDE ► a. reeser 2511619667
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Il me semble que Autumn est déjà prise par un nouveau membre donc n'est pas dans le bottin !
Mais en tout cas je te conseille Karen ! GEMMA T.-WILDE ► a. reeser 3400909363

Bienvenue en tout cas GEMMA T.-WILDE ► a. reeser 2511619667
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KAREEEEEEEEEN hanwii GEMMA T.-WILDE ► a. reeser 3400909363 :sex1: :sex2: GEMMA T.-WILDE ► a. reeser 2727399354 :frenchkiss: GEMMA T.-WILDE ► a. reeser 1779901633
Bienvenue parmis nouuuus ! :dance:
Et bonne chance pour ta fichounette GEMMA T.-WILDE ► a. reeser 3850463188
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rose • c'est comme une personne a également commencé sa fiche avec karen. '-'
merci pour vos avis et vos bienvenues. GEMMA T.-WILDE ► a. reeser 73120010 GEMMA T.-WILDE ► a. reeser 2511619667
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Bienvenue parmi nous GEMMA T.-WILDE ► a. reeser 3400909363
Pour ma part je dirai Autumn hanwii
Bonne chance pour ta fiche and have fun GEMMA T.-WILDE ► a. reeser 1688815589
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