Invité
est en ligne
Invité
Read regardait son téléphone, sans broncher. Il était tombé sur les genoux, mais ne s'était pas fait mal. Merde alors, Nevada devait être inquiète, la conversation avait coupé si brutalement. Pourtant, il en bougeait pas, il restait prostré à même le sol, posant ses deux mains par terre. Il ne fit pas un mouvement dans le but de récupérer son cellulaire, de retenter de l'assembler ou quoi que ce soit... Non, il restait là, bêtement, à observer les gouttes emplir les flaques qui devenaient de plus en plus grandes. Les ronds qu'elles faisaient à la surface de celles-ci étaient presque poétiques, si seulement cette nuit n'était pas si marquée par la tristesse. Le jeune ambulancier avança cependant à quatre pattes, laissant son mobile là où il était tombé. Cela n'avait pas d'importance... Aucune importance. Les larmes recommençaient à ruisseler le long de ses joues pâles. Et si Edouard avait raison ? Et s'il était l'unique coupable de la mort de Mary ? Après tout, elle était si jeune et il l'avait poussée à devenir mère et à l'épouser... Oui, si cela se trouvait, elle était allé dans son sens sous l'effet de la manipulation qu'il avait entrepris sur elle...Manipulation dont il ne s'était pas rendu compte. Les yeux pleins de larmes et le visage rempli de pluie, Read ne voyait plus rien dans l'obscurité, et même les lampadaires de la ruelle n'y faisaient rien. Il rompait simplement tout droit, jusqu'à ce que ses mains viennent à tâter un mur. Il s'agrippa à celui-ci pour se relever fébrilement... Physiquement, il allait pourtant bien, mais toute la tristesse, le désespoir et le choc du décès de sa bien-aimée le rendaient faible tel une larve que l'on piétine. Tout ce qu'on avait dit s'abattait subitement sur lui, il entendait la voix des médecins, celle des parents de la toute jeune étudiante... « Les secours n'ont rien pu faire.... » Bon sang... Accablé par une douleur intestinale incompréhensible et sentant qu'il allait vaciller, il se rattrapa à quelque chose, une rampe d'escaliers.
« Vous allez bien, Monsieur ? » demanda une voix inconnue surgissant de nulle part. Sursautant, Read ne put rien formuler de suite, avant de s'exclamer, totalement perdu : « C'est moi les secours ! » Et oui. C'était un secouriste. Mais le jour où la femme qu'il aimait le plus au monde avait eu besoin d'aide, il n'avait pas été là. La personne le regarda, interloqué, songeant sans doute qu'il s'agissait là d'un fou, avant de quitter les lieux, tout bonnement. Et elle avait bien raison, pourquoi s'attarder avec cet espèce de mioche trempé par la pluie, ruisselant, les yeux cernés et l'air aussi pâle que le plus propre des murs de l'hôpital de Cambridge. Il avait besoin d'aide, mais pas de n'importe laquelle. Il avait besoin qu'on le calme. Oh oui, des calmants... il en prenait de temps en temps depuis sa terrible agression, mais il n'en avait pas sur lui cette fois-ci.
Après avoir repris son souffle, le regard perdu, Read aperçut une inscription. Le voilà par pur hasard devant le fameux motel « Le pingouin ». Déglutissant, il franchit la porte d'entrée, avant de se retrouver dans un hall étroit et vide. Il n'y avait personne à l'accueil... A cette heure-ci sans doute que le réceptionniste avait dû s'endormir à l'arrière. D'ailleurs, le panneau : « Me sonner en cas de besoin seulement. » déposé sur le comptoir prouvait cette hypothèse.
Read s'assit à côté du distributeur, contenant diverses produits, sucrés comme salés. Mais il n'avait pas faim... Plus jamais il n'aurait faim. Et puis, de toute manière, il n'avait pas d'argent sur lui. Notre jeune homme se contenta donc de regarder le mur face à lui, la lumière dans ses yeux parfaitement éteinte... Seul il était, seul il resterait.
(Invité)