Poppy ❀ On va bien s'amuser... à se détester

« Je ne suis pas un maître... Je suis un Dieu ma chérie ! Et je n'en ai pas qu'après ton joli cul. » dis-je avec un petit clin d'oeil malicieux. J'aime titiller cette blonde, la voir rager à ce point égaye franchement mes journées. Même si elle feint le contraire, elle a adoré ce petit moment que nous avons partagé. Mais j'aime trop la taquiner au final, parce qu'il n'y a pas ce jeu, ça ne serait pas drôle et comme elle me le rend bien, ben je ne peux que continuer jusqu'à ce qu'elle craque de nouveau. Je pouffe de rire à ses mots. « Si tu parles de mon état actuel... Je remercie juste la qualité de conduite de certains américains. J'ignorais qu'ici les feux rouges voulaient dire qu'on peut rouler sans problème. » ironisai-je avant de reprendre : « Faire chier le monde et jouer, sont mes punitions de la Providence. Il fut un temps où mon sérieux m'a coûté ce que j'avais de plus cher. Mais j'imagine que tu t'en fous donc je ne m'étalerais guère sur le sujet. »

Je ne répondrais même pas, vu que t'es comme tous les autres... un maître pour prendre les gens pour des cons ! Poppy ne croyait pas un traître mot de ce que disait Magnus. S'il n'en n'avait pas qu'après son divin séant magnifiquement galbé par des heures de sport, il ne jouerait pas à la titiller autant, cqfd. L'américaine arqua un sourcil de surprise alors qu'il racontait non seulement son accident - de ce qu'elle en comprenait - mais également quelque chose de plus grave. Curieusement, elle en rit. Mais pas de façon moqueuse, et pour une fois, pas dirigé contre lui... Tu parles à une ancienne femme battue qui se bat pour éviter au père de son fils de l'écraser... alors je ne dirais pas que je m'en fous, c'est la preuve que tu ne me connais pas haussa-t-elle les épaules en se mettant à regarder ailleurs. Et tu te punis tout seul, coco. Toi et toi seul.

« Si c'est ce que tu penses » dis-je avec un petit sourire malicieux. Ce genre de débat me fait rire parce qu'elle trouverait toujours un argument pour contrer etc. Et après, on deviendrait comme les Français quoi ! Ce sont les champions des débats interminables et souvent ça part directement en grève générale haha ! Bref, je lui explique que mon accident c'était du à une conduite pourrie d'un américain, puis je lui évoque sans le vouloir le sort que m'a réservé la Providence. Ah mais oui, je crois sincèrement en Dieu donc pour moi, le Destin, la Fatalité, la Providence et tout le tralala, ça existe totalement. « J'admire ton combat pour préserver l'intégrité de ton fils. » dis-je avec un sourire avant de rajouter : « Que ce soit une punition personnelle ou de la Providence, il n'empêche que ça soit mérité. Qui d'autre pourrait sacrifier la vie de ses soldats pour sauver des faux rescapés qui vous poignardent dans le dos ? Et en plus, parmi ces soldats, l'une d'eux c'est votre fiancée... » déclarai-je d'un ton faussement détaché, ne comprenant guère pourquoi je parlais de tout ça à la fille que je devrais détester.

Le sourire malicieux de Magnus laissait sous entendre des blessures plus profondes, dont Poppy n'avait aucune idée à dire vrai. Loin d'elle l'envie de le prendre en pitié, mais l'américaine n'étant pas sans cœur, difficile d'être de marbre face à une telle confession, aux antipodes de la sienne, qui paraissait presque telle une promenade de santé. N'admire rien, c'est la haine qui me pousse à agir ainsi... ce n'est en rien admirable lâcha-t-elle plus froidement, sachant éperdument pourquoi elle se comportait ainsi. Bien entendu, la lionne qu'elle était protègerait son fils jusqu'à la mort, et ne se refusait rien du fait qu'elle n'ait rien à perdre, mais de là à trouver cela admirable... il y avait un large gouffre. Tu vas sûrement m'envoyer bouler pour ce que je vais dire mais tant pis, disons que ce ne sera ni la première, ni la dernière fois : pourquoi te punir et jouer ainsi avec tout le monde alors que si ça se trouve... ta fiancée aimerait juste te voir heureux ?

Pourquoi diable étais-je en train de parler de tout ça ? Pourquoi est-ce que je parlais de mes soucis personnelles alors que la diablesse blonde à mes côtés n'en aurait cure. Fin elle disait clairement que non ! « Quelques soient tes raisons... Te battre bec et ongles pour ton fils c'est quelque chose de fort. » répondis-je sans vraiment la regarder surtout qu'elle avait parlé avec une grande froideur qui pourrait clairement donner des sueurs froides mais ce que j'avoue quelques instants plus tard, ça a un peu changé l'atmosphère. « Peut-être parce que je ne mérite tout simplement pas ça. Que j'apprenne de mes erreurs... Je ne suis peut-être qu'un lâche qui se cache derrière un super pompier. » je parlais d'un air complètement détaché mais en vrai, ce n'était pas du tout comme ça que j'étais. Au contraire, je n'aimais pas parler de cette histoire et là, j'en parle à Poppy... N'étions-nous pas en train de nous disputer normalement?

La froideur de Poppy pouvait paraître extrêmement étonnante et pourtant, il s'agissait là d'une façon comme une autre de se protéger. La protéger elle, mais également son fils, dont elle refusait de voir la moindre photo sur les réseaux sociaux - autre que le sien, certifié et protégé - ou dans les journaux people. Il n'a que moi. Et je n'ai que lui lâcha-t-elle sans hésiter, mâchoire serrée, alors qu'elle sentait que finalement, Magnus avait sa part de casseroles, qu'il traînait à la cheville. L'atmosphère s'en trouva diamétralement changée alors qu'ils s'avouaient mutuellement des choses. C'était sans doute plus facile que confier cela à de presque inconnus, plutôt qu'à des proches... Justement, apprendre de ses erreurs c'est aussi apprendre à être heureux, relever la tête, et continuer à ne pas qu'être un pompier pour les autres mais aussi pour soi. Tu te sauves quand, monsieur le super pompier ? Sans crier gare, elle avait posé sa main sur son épaule, douce, étonnante. C'est une mourante qui te parle. Tu peux la croire.

« Je comprends... » répondis-je d'un ton posé moins malicieux qu'au début, alors que je détournais la tête pour parler de mon passé difficile. Mais qu'est-ce que je fous ?! Pourquoi étais-je en train de parler de mon histoire personnelle à cette fille que je devrais détester ? Je n'arrive pas à le croire, suis-je en train de montrer l'un de ces rares moments de faiblesse que je me suis interdit d'avoir ? La question mérite des réponses concises mais pour l'heure, je n'ai pas la tête à y réfléchir... Si ça s'avère exacte, je vais devoir user d'une bien meilleure stratégie pour éviter la catastrophe... « Je ne sais pas pourquoi... Mais cela n'entre pas encore dans mes plans. Je me plais dans ma vie actuelle... Fin, c'est sûrement faux et je l'assume mais je me dis qu'au moins, je fais du mal à personne. » j'essaie de me persuader tout cela alors qu'en vrai, je n'y crois pas vraiment. Néanmoins, je n'ai pas trop le choix... J'assume mes actes et je ne peux pour le moment revenir en arrière. « Comment ça ? Tu es mourante ? » tiltai-je finalement en me retournant vivement vers elle, l'air complètement surpris.

LaPoppy était la première à détester Magnus, ses manières et tout ce qu'il pouvait bien représenter, du moins en apparence. Ceci étant dit, il suffisait de gratter un peu la surface pour se rendre compte qu'en fait, tout ceci n'était qu'un rôle qu'il se forçait à jouer, et que le premier à qui il devait faire du mal... c'était lui-même. Si je peux me permettre... en vérité si je ne peux pas je vais me le permettre quand même : si tu ne fais sûrement pas souffrir autrui, bien que ce soit discutable, c'est toi que tu punis. C'est ridicule... personne ne peut vivre éternellement ainsi sans devenir fou ajouta-t-elle, consciente de jouer ainsi avec le feu, tout en en ayant cure. L'américaine n'avait plus rien à perdre depuis longtemps, et le norvégien s'en rendait aujourd'hui compte. Tumeur au cerveau. Bientôt il te faudra une autre cible à qui chercher des poux ! Tu vas sûrement me dire que je l'ai cherché et que l'on a que ce que l'on mérite...

N'étions-nous pas censés nous détester ? Parce qu'à l'heure actuelle, on se parlait comme si on était très proches, au point de nous faire des confidences qu'on ne dirait que très peu à nos proches tellement c'était difficile à supporter. Je me mets à déglutir parce que je ne peux nier le fait que j'avais honte de mon propre comportement... Pourquoi étais-je en train de me dévoiler de la sorte ? Ce n'était guère dans mon tempérament d'habitude mais voilà... « En vérité, j'assume comme je peux mon erreur de jugement. Mais aussi parce que je suis un lâche qui n'est même pas allé à l'enterrement de sa bien-aîmée. » dis-je d'un ton faussement détaché, comme si cela n'avait guère d'importance maintenant mais en définitive, c'était bien plus compliqué que cela. Je n'arriverais jamais à oublier ce que j'ai fait... Ou surtout ce que je n'ai pas pu faire pour sauver mes hommes et ma future femme en particulier. Qu'importe, mon interlocutrice m'avouait qu'elle était mourante. « Pourquoi je dirais cela ? J'aime bien te taquiner, te mettre hors de toi mais jamais je ne voudrais ta mort... C'est triste que tu aies cette terrible maladie et je te souhaite de te rétablir vite. » réponds-je en la regardant longuement dans les yeux cette fois, avant de te détourner. Cette soirée changeait littéralement...

Le ton faussement détaché de Magnus ne trompait personne, et surtout pas lui-même. Certes, il n'était pas allé à l'enterrement de sa future et défunte femme mais curieusement, Poppy ne lui jetait pas la pierre. Tu es au courant que chacun gère la peine comme il peut ? Tu es un soldat, je suppose que montrer tes émotions n'est pas trop ton truc ? Ça ne fait pas de toi un lâche... je me doute que la parole d'une fille que tu détestes n'a probablement pas d'importance mais je ne te jette pas la pierre et tu sais pourquoi ? Parce que tu n'es pas dieu, Magnus. Tu es comme ces sept autres milliards d'êtres humains, tu fais comme tu peux pour garder la tête haute... Sa gentillesse apparente était véritable, sans doute était-ce ça le pire. Mais l'américaine avait eu besoin de dire cela, de faire cette sorte de bonne action sans désir de retour. Je ne me rétablirais pas, en fait. C'est incurable. Tout ce que je peux faire, c'est profiter du temps qu'il me reste. En me rendant compte qu'il y a plus triste que moi ?