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Perdre ses repères, comme si on ouvrait les yeux après un rêve qui avait duré trop longtemps, même comme à chaque fois qu’un rêve nous plait, pas assez. Aujourd’hui je me sentais à la fois décontenancée, et trahie, c’était tellement difficile de se rendre compte qu’on avait aucun contrôle sur les gens qui nous entoure que s’en devenait douloureux.
Mon frère, à qui j’avais donné les plus belles années de ma vie à m’occuper de le conserver un minimum dans un chemin qui avait été tracé pour nous depuis notre naissance, ce petit frère ingrat que je m’efforçais de protéger du haut de mon pouvoir limité de sœur ainé avait décidé de renier l’héritage sanguin qui était le sien.
L’entendre dire qu’il n’avait plus de sœur, c’était pire encore que de me rendre compte combien les choix de Milow étaient devenu hors de portée de mon champ d’action. J’aurais pu intervenir si on m’avait laissé faire, mais peut être que c’était pour cette raison que même mon propre père n’avait pas daigner me mettre au courant de la situation.
En rentrant dans ma chambre ce soir-là, j’ai pleuré, même si personne n’en saurait jamais rien, j’ai versé plus de larme sur mon oreiller que j’avais pu en verser durant ces dix dernières années. J’avais échoué en tant que sœur, en tant que fille, et qui sait en quoi d’autre encore je pouvais me voiler la face depuis trop longtemps ?
Le poing serré dans ma couverture, je me jurais de ne jamais abandonner. Si Milow se croyait débarrassé de sa sœur, c’était mal la connaitre. Je soupirais en m’endormant cette nuit-là, repassant chaque moment que j’avais pu vivre avec mon petit frère de sa naissance jusqu’à cette porte qu’il m’avait claqué au nez.
Les semaines ont passés, j’avais retourné chaque élément dans ma tête une centaine de fois, mais rien ne pourrait changer ce qui était déjà en marche. La seule influence que je pourrais encore avoir, c’était peut-être sur sa vie sexuelle, je passerais les semaines suivantes à essayer de trouver une fille pour mon idiot de frère, quelqu’un qui saurait lui faire découvrir les plaisirs de la chaire avant qu’il ne s’enfonce totalement dans des sables desquels il ne sortirait plus jamais.
Ce que je ne pourrais plus changer, c’était sa passion totalement absurde pour la musique. Si j’avais avoué à Milow que sa guitare était avec moi, je crois que ça n’avait pas arrangé ce lien fraternel unique qui nous liait l’un à l’autre. L’instrument dans mes mains, j’avais même essayé d’en frotter les cordes pour imaginer la sensation que ressentait le jeune Schäfer.
Quand je demandais à mon frère de me rejoindre aujourd’hui, je lui faisais comprendre dans un message solennel que c’était nécessaire. Je lui donnais rendez vous dans ce coin de la ville où jamais je n’aurais imaginé mettre les pieds un jour sans une copine cabot bourrée me trainant par les cheveux pour que je l’accompagne sur scène.
Ambiance dansante et karaoké tous les soirs, si je pouvais trouvé amusant que certain se ridiculise devant les autres, j’espérais que mon frère serait conscient de ce sacrifice énorme que ça me demandait pour être présente ici. Pendant au moins dix minutes je détaillais chaque recoin en laissant mon regard se perdre à la recherche d’autres étudiants qui me mettraient mal à l’aise.
Aprioris personne ne pourrait mettre ma réputation en défaut, pas pour l’instant, alors en attendant que Milow me rejoigne, je n’avais pas hésiter à m’échauffer un instant en prenant un quart de la scène avec un groupe de fille totalement démodée qui s’apprêtait à chanter une chanson de Madonna que j’aimais beaucoup.
Je n’y serais jamais arrivée seule, mais à quatre chanter Like à Virgin, je devais avouer que c’était presque amusant, et grisant de voir le regard des garçons de l’assemblée me dévorer. Je n’avais même pas remarqué que Milow était arrivé, j’étais prise dans ma chanson jusqu’à ce qu’on finisse par saluer la scène et que je le laisse distraire.
Un petit signe de la main à mon frère, j’allais le rejoindre à une table en écartant un gros lourd sur le passage qui avait certainement déjà un peu trop boire. Je m’étais préparée pendant un moment pour parler à Milow, je redoutais l’entrée en matière, on ne s’était pas revu depuis la chambre d’hôtel avec Bambi.
- Bonsoir Milow. Tu es en avance je crois, on avait dit 20h
@Milow Schäfer
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