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Le numéro de Den' s'affichant sur ton portable, tu souriais, mais à la fois tu avais ce goût amer. Tu te revoyais, des mois auparavant, attendant chaque coup de fil qu'il pourrait te passer. Lui en prison, toi à Boston. Et quelque part, pour les jours précédents, ça revenait au même. Lui encore bloquer, à Athènes pour le coup, toi toujours à Boston. Et encore une fois, tu avais ce sentiment de déjà vu quant à ce que tu ressens. Tristesse, amertume, manque. Enfin, là il n'était que questions de quelques jours avant de le retrouver, pas des semaines... Ca fait du bien de t'entendre, même s'il n'avait encore rien dit. Le savoir derrière le combiné ça te faisait déjà un bien fou. Ca s'est passé comment ? Tu priais pour une bonne nouvelle, au moins ça, avant de devoir parler de tes soeurs et de la raison de ton retour sur le sol américain.
Sorti fraîchement de l'ambassade, j'étais un peu abasourdi... complètement abasourdi même. J'avais peut-être été trop naïf, à minimiser les conséquences de mon incarcération, de mon renvoi d'Harvard. A penser qu'en quelques jours, cette histoire de visa serait réglée. Et la descente aujourd'hui n'en faisait que plus mal... Alors forcément, c'était à Ash que j'écrivais. Perdu dans le fil des heures, le décalage horaire entre nous, est-ce qu'elle dormait ? Est-ce qu'elle était réveillée ? L'opération de sa soeur avait eu lieu ? À la minute suivante où elle me répondit par sms, je composais son numéro. Sa voix retentit rapidement m'arrachant un sourire éphémère qui s'effaca à l'instant où elle prononça sa question. "Hey... Bah écoute... raconte moi plutôt pour Cléo, ça a été ? "
Tu n'avais jamais eut besoin d'un décodeur pour savoir quand Denys allait bien ou non. Quand il mentait ou disait la vérité. Tu savais, à sa voix, à sa façon de plaisanter, de se comporter. Qu'il soit face à toi, comme à des kilomètres, dans un autre pays, autre continent, tu savais que ça n'allait pas. Alors si ça pouvait l'aider, dans un premier temps tu n'insistais pas, répondant à sa question : je crois... j'ai as encore pu la voir. C'était une opération éprouvante et pas sans risque. Fallait que tu prennes beaucoup sur toi, l'une comme l'autre de tes soeurs pouvaient courir un danger. Puis Ayma pouvait rejeter le rein, rien n'était gagné encore, seuls les jours/semaines à venir serait décisifs. Met la caméra que tu lui demandes, appuyant sur l'icone vidéo afin d'afficher ta caméra à toi. T'avais pas une bonne mine mais t'avais envie de le voir. De comme le sentir plus proche de toi, plus réel. Ne pas te contenter juste de sa voix, mais lire chaque expression de son visage. Te plonger dans ses yeux bleus, dans son sourire, et y trouver un peu plus de force, de courage.
J'esquivais assez clairement le sujet de mon visa. Peut-être parce que je voulais déjà m'assurer que ça allait du côté de ses soeurs. Que si y'avait eu un quack à l'opération, ça me pousserait à reporter mon annonce ; histoire de pas accabler Ashleigh davantage. Je sentis à son ton peu assuré qu'elle était loin d'être sereine pour ses frangines. Et je pouvais bien la comprendre. Ma sainte horreur des hôpitaux venait bien du fait que j'y avais perdu ma petite soeur. J'aurais voulu être là pour Ash, la serrer dans mes bras, la soutenir... Et au lieu de ça... Elle me réclama la caméra. "Je sais pas si c'est une bonne idée. Je dors mal depuis que t'es partie." Commentai je en appuyant quand même sur le bouton. Sa bouille à elle apparut sur l'écran, mon visage défait n'allait pas tarder à apparaître sur le sien... Je tentais une feinte de sourire peu convaincant avant de souffler : "Tu me manques. " Et ma voix se brisa un peu, songeant que ce n'était que le début..
Tu ne t’attendais pas à le voir au meilleur de sa forme, souriant, joyeux et pétillant. Juste le voir. S’il t... Pas le temps de finir que tu voyais son visage à l’écran et qu’un sourire t’illumina aussitôt. Son ‘tu me manques’ confirmait tout ce que tu pensais. Et tu ne pus te retenir plus longuement. Ca c’est si mal passé ? Si y avait eut du positif il l’aurait dit depuis un moment. Hélas non. Et être à distance, ne rien pouvoir faire pour lui, ni être au moins à ses côtés ca te tué.
ébauche de sourire raté et un 'tu me manques' sûrement trop poignant lui permirent vite de conclure à l'issue catastrophique de ma visite à l'ambassade pour faire bouger les choses. Je soupirai. "Bah..." J'avais ce noeud au bide d'un coup. Entendre l'employée me l'annoncer avait été une chose, me charger de le dire à Ashleigh désormais en était une autre... Pire encore peut être. Parce que ça me faisait d'autant plus prendre conscience de la réalité de la chose. "Je vais pas rentrer Ash." Soufflai-je finalement. "Pas cette semaine. Pas ce mois ci... Probablement même pas cette année. Mon visa est refusé. "
Ça avait été mauvais son rendez vous. La visio te le confirmait mais y avait juste eut besoin d’entendre sa façon de parler, de prononcer ces mots remplis d’affection. Tu devais donc poser la question fatidique, sans t’attendre à une réponse aussi... fatale. Hein ? C’est une plaisanterie ? Il avait plutôt l’air sérieux pourtant. Tu te sens finalement bien et tu veux plus rentrer ? T’as retrouvé une ancienne ex et c’est reparti ? Y a des caméras cachées ? Rien de tout ça n’était la raison de son refus de visa. Tu préférais pourtant voir une autre raison qui le faisait dire ça, plutôt qu’admettre qu’il allait être coincé la bas et que c’était pas juste son monde à lui qui basculé, mais le tien également... Tu ne pouvais pas vivre sans lui. Comme tu ne pouvais pas tout lâcher à Boston. C’est ton visage qui se décomposa devant cette réalité qui te frappait de plein fouet.
Tu préférais n’importe quoi comme raison de te dire que tu n’allais plus le voir, plutôt que celle du refus de son visa. Vous veniez de traverser une passe assez compliqué, pourquoi il fallait que ça tombe là ? Au moment où vous aviez besoin de vous retrouver, d’être à nouveau unis, soudés ? Et s’il tentait d’expliquer que pas d’ex puisqu’il était bien trop jeune quand il était partit de son pays natal, que son humour avait le don de te faire rire comme jamais, ce ne fut pas le cas. Pas avec ce qui suivait. On va faire comment Denys ? C’était pas juste lui, c’était vous. Ce pronom était sorti automatiquement de ta bouche. S’il n’avait plus accès a l’Amerique, comment vous alliez faire ? Parce que tu concevais pas de ne pas l’avoir à tes côtés. Il était ton oxygène, ta bouffée d’air, et la tristesse te gagnait au fil de la discussion, venant à penser le pire.