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Une ivresse sans nom m'embrume la tête, mélange de wiskhy, de vent et de paroles à double sens. C'est pas le genre d'ivresse que je connais, c'est autre chose, comme si j'avais traversé le chambranle d'une porte sans battant, passant d'un univers à un autre, une rivière à l'envers. Je suis perdue mais en haut du mur sur mon trône de pierre, j'ai l'impression qu'avec ce qui s'est passé, plus rien ne peut m'arriver. Plus rien que je puisse craindre. L'idée de me tromper complètement ne m'effleurait même pas l'esprit malgré Basile, son souffle, ses paroles. Maintenant, ici, sous le sourire de la Lune et les sourcils froncés de Mars je vivais l'instant présent. Si légère, libre, à la plus fine limite du grand lâché prise de ceux que j'admirais, rien du passé ou de l'avenir ne comptait. Est ce que c'était grâce à toi Basile, à ton mur, ton monde et ta bouteille que je me sentais si inconsciente ? C'était toi le diable qui m'avait injecté une dose de morphine en même tant qu'une dose de frissons interminables ? Je suis dans un réel état second, les yeux trop brillants, à ne presque plus sentir le froid. Non, non, je ne tomberais pas, je sais qu'il est là. N'est ce pas Basile ? Je suis l'équilibriste et tu es le filet ce soir ? Je ne suis pas encore prête à affronter la grande scène sans sécurité au dessous, j'ai besoin de lui sans le connaître. Qu'est ce qu'il craint ? Que je tombe ? Oh Basile, c'est dans la suite des choses. On finit toujours par me rappeler à l'ordre. Fais ça Jane, arrête Jane, grandis Jane. Va t'éteindre Jane, ne t'avises pas de te rallumer un jour. Rentre dans le rang Jane. Le carcan qui m'emprisonne est trop serré pour que je m'en échappe seule mais ce soir Basile, il l'a déchiré, comme on arrache la page d'un livre pour éliminer le poison des mots écrits dessus, comme on chiffonne la feuille d'un texte sur lequel on butte depuis des heures. Ma cage est en papier et lui de son briquet, il pourrait la brûler, l'enflammer d'un coup, que tout parte en fumée. Pourtant, même libre je ne sais pas si j'oserais sortir. La lumière des néons qui brillent la nuit est bien plus aveuglante que celle du soleil qui se reflète sur le desert...
Deux trois gouttes de mon sang se mélangent au carmin sombre des briques du mur. Elles sont pareilles à celle qui danse à la commissure des lèvres de Basile, il pleut des gouttes. Je vais me noyer, sans réussir à nager. Il a perdu son sourire, j'ai perdu la raison et tout s'enchaîne trop rapidement pour que je grave tout correctement sur ma rétine. Je sens ses mains saisir mes hanches, sans violence mais assurées, je m'envole. Retiens moi Basile, je vais quitter ton espace, entre le vide et les étoiles, sans toi je ne pourrai pas revenir. Mes talons claquent sur le sol, pire que le bruit d'un coup de feu tiré à bout portant et me ramènent à la réalité. La terre ferme a un goût d'alcool. Encore, toujours l'ivresse, j'abandonne et vacille. Il est là, je le sens plus que je le vois, m'accule au mur et replace une mèche de mes cheveux. Non, vas t-en, Basile, pars. Je veux pas savoir qui tu es, ta silhouette ressemble à celle du monstre une demie seconde de trop. Mon souffle s'accélère et mes mains, indépendantes de ma volonté, le poussent légèrement. « Non. » Mais à quoi je pensais ? Qu'est ce qui m'étais passé par la tête à le séduire sur une stupide application, à m'habiller dans l'idée de lui faire tourner la tête alors que je n'étais encore qu'une vierge effarouchée aimant jouer à un jeu que je savais perdu d'avance, de mon côté évidement. Il venait de me mettre échec et mat, bravo Basile, tu es le fou qui vient d'anihiler la reine. Je n'arrive pas à capter ses yeux, voir l'expression de son visage, il se recule trop rapidement dans l'ombre, bouteille à la main. Je fais quoi ? Il a le ton insolent des anges déchus ou des diables, je sais pas trop, qui me fait douter. J'ai ni envie de le perdre, ni envie qu'il m'oublie une fois la nuit partie. « C'est trop grand pour mon univers étriqué. » Je fond sur lui trop vite, mon corps contre le sien sans la terrifiante barrière du mur derrière mon dos, et lui pique le wiskhy des mains. Boire, boire pour oublier tout ce que je viens de dire.
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