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« When the darkness covers the light. »
25 août 2017.
Pleinement conscient de sa détresse causée en partie par ma réaction qui devait l'avoir, outre le choc de découvrir que mes compétences professionnelles me servaient encore, ébranlé dans la confiance qu'elle m'accordait, je demeure immobile, attendant ses confidences presque comme un condamné ferait les frais des ultimes accusations du juge. Sa première interrogation, posée sur un ton trop indifférent pour l'être véritablement me fait pourtant douter. Tendu, devant le dilemme qui se dressait devant moi, dire la vérité au risque de faire souffrir ou mentir et s'enfoncer dans la brèche, je ne réponds pas tout de suite, ne captant que dans son regard voilé par les larmes la cause de son désarroi informulé encore. Confiance brisée. Le couperet tombe, j'acquiesce sans sourciller. Certes. Elle avait raison et j'avais tort, au moins sur ce point-ci. Et lorsqu'elle poursuit, associant à des interrogations que je peine de prime abord à entendre, je ne peux contenir mon incompréhension face à la sienne. Ses explications n'ont pour objectif que d'amener au point suivant. Un instant, j'hésite à l'interrompre, usé par l'amertume et la colère, de lui demander le rapport qu'elle trouvait entre mon ancienne profession et l'acte perpétué la veille au soir. Je doute, mais peu à peu les incertitudes s'estompent pour ne laisser qu'une forme latente de lassitude. Car si une partie de moi, la plus humaine des deux sans doute, comprenait ses craintes et ses reproches, l'autre en revanche la fustigeait intérieurement de se montrer aussi prompte à juger son homme.
Ainsi à ses yeux aurais-je perdu un droit acquis du fait de mon métier passé. Absolument pas. Car si paradoxalement je ne pensais pas qu'un homme avait le moindre droit sur la vie d'un autre, quelle que fusse sa profession, il avait en revanche le droit et même le devoir de protéger sa famille si celle-ci était menacée, employant n'importe quel moyen mis à sa disposition pour se faire. Et puis, une phrase...juste quelques mots, suffirent à m'embraser. Jusqu'alors calme ou en tous cas tentant de me contenir, Lily était parvenue en moins de deux secondes à ranimer la fureur dans mon regard et dans mon cœur. « Que Peter Schumer ait brutalisé, torturé, ou même violé ton propre fils, cela ne change rien. » En ce instant, mon regard changea du tout au tout. Passant du lagon le plus pur à un océan dont les vagues déchainées réclamaient la vie du pêcheur imprudent. « En démissionnant de l’Agence, tu as fait le choix de devenir comme tous ces pères de famille dont les enfants ont été tués, ou même traumatisés, et qui sont impuissants face à cela. Emplis de haine, de désir de vengeance sans doute … Mais impuissants. » Un feu gronde à l'intérieur de moi tandis que je l'observe sans la quitter des yeux. Si Lily n'avait pas été celle-là même qui faisait vibrer mon cœur, qui portait mes enfants, jamais je ne l'aurais laissé poursuivre après de tels propos. Comment osait-elle ? L'incrédulité m'engagerait presque à fuir, ou à me demander si c'était bien celle à qui j'avais choisi d'offrir mon cœur, si une enchanteresse n'avait pas usurpé son identité pour mieux me duper. Non, impossible. « Même la vengeance légitime d’un père pour laver l’honneur et les craintes d’un fils. » « Tu crois que c'est ce dont il s'agit ? » finis-je par l'interrompre d'une voix rauque trop calme pour ne rien vouloir sous-entendre. Comme la lame d'un rasoir qui ne demandait qu'à s'abattre, je me risque plus loin, me fichant pour une fois des réactions que je pouvais aussitôt déclencher chez la jeune femme. « D'honneur et de craintes ? Tu n'as rien compris. Rien du tout. Et je te défends de penser que je suis « comme tous ces pères de famille » comme tu l'as dit bien mentionné, Lily, « impuissants ». Je ne suis pas et ne serai JAMAIS impuissant, tu m'entends ? Je ferai n'importe quoi pour protéger les miens, tout comme je suis fermement convaincu que si ces pères avaient cette possibilité, l'occasion de faire ce que j'ai fait, aucun ne s'en serait privé. » la grondais-je, irrité. « Que se serait-il passé si j'avais remis cet homme aux autorités ? Que crois-tu qu'il se serait passé au juste si je n'avais pas retrouvé mon fils à temps ? Tu crois qu'il aurait éprouvé le moindre regret ? Tu crois que de savoir qu'il était à nouveau enfermé suffirait à effacer ce qu'il a commis, à protéger d'autres enfants le jour où il serait ressorti pour bonne conduite ? Ou pire, en prétextant sa maladie comme excuse pour amenuir sa peine, que les juges le libèrent par bonté d'âme et qu'il s'en prenne à Ashlynn ; est-ce que tu y as pensé ? » continuais-je, les mains tremblantes. Je m'arrête enfin, tandis que son discours reprend. « Ils ne le sauront jamais. » maugréai-je dans un murmure. Amoun avait couvert mes traces. Et je savais mieux que quiconque combien l'Egyptien était méticuleux. Non, jamais personne ne découvrirait quoique ce soit, sur ce point, Lily n'avait aucunement matière à s'inquiéter. « Et moi … je devrais expliquer à deux fillettes orphelines de père que leur papa est absent parce qu’il a abattu un homme de sang-froid comme un animal par vengeance, et qu’il doit désormais assumer les conséquences de ses actes en purgeant une peine qui l’exclura de leur enfance … Voire de leur vie. » Elle avait fait mouche. Touché dans ma fierté, dans ma colère et dans la peur que se reproduise un jour la disparition d'une famille au profit de l'incarcération ou de la mort, je lui jette un sombre regard, me demandant sur le moment si elle n'avait cherché qu'à me blesser ou était sincère dans sa volonté de m'inquiéter des conséquences à venir, pour nous. Pour nous tous.
« C’est ça que tu veux ? » « Je n'ai pas l'intention d'être exclue de vos vies, Lily. Ni de la tienne, ni des leurs. » Plus posée que quelques minutes auparavant, ma voix se perd dans l'obsercurité de la grande pièce, alors que je reprends, pensif. « Je te le répète, je n'ai aucune inquiétude à avoir. Nul ne saura jamais ce qui s'est passé. » A part toi, aurais-je presque été tenté de préciser. « Mais, dans le cas où cette éventualité se produirait, soit sûre que j'assumerai mes responsabilités jusqu'au bout. » Car oui, au delà de « l'animal » qu'elle venait d'évoquer, il y avait un homme qui tentait sincèrement de lui faire comprendre sa prise de décision, dût-il en payer le prix plus tard, il ne regrettait rien mais payerait dans cette vie ou dans une autre, celle qu'il avait prise vis à vis du père adoptif de Paris. « Permets-moi à mon tour de te poser une question, Lily. Toi qui penses que j'ai mal agi, que j'aurais dû livrer cet homme aux autorités. » M'engageant sur un terrain boueux, horrifiant et intolérable, je m'avance jusqu'à ne plus être que debout devant elle à quelques centimètres à peine, m'agenouillant devant elle pour ne plus avoir à élever la voix. Je sais déjà que ce que je m'apprête à énoncer lui sera inacceptable, qu'elle me haira pour de telles pensées, mais tant pis. Peut-être allait-elle mieux comprendre mon état d'esprit lorsque je m'étais retrouvé nez à nez avec Peter Schumer. « Si...s'il avait s'agi de ta fille, Lily, de NOTRE fille...imagine...elle n'a que 6 ans...elle joue à la poupée comme toutes les petites filles de son âge. Elle porte une jolie robe rose et un ruban dans les cheveux. Elle ne se méfie pas, elle s'amuse en toute innocence, lorsqu'un homme l'attrape. Imagine ce qu'elle ressent lorsqu'il pose ses mains sur son corps d'enfant, lorsqu'il soulève sa jupe... » Je m'arrête, j'aurais presque la nausée si une telle image n'avait jamais hanté mes nuits. Si je n'avais jamais été face à de telles monstruosités des années auparavant. « Je ne veux pas te faire peur, je sais que ce que je te raconte te dégoûte au plus haut point. Mais imagine simplement la scène, Lily...et dis-toi que c'est ce que mon fils a enduré pendant des années. Pas une mais plusieurs fois. Qu'il avait confiance en cet homme, qu'il l'appelait « papa », que personne n'était là pour le protéger. Est-ce que tu aurais pu le faire toi ? Sincèrement, Lily, si ça avait été ta fille, est-ce que tu aurais appelé la police ou tu aurais voulu être certaine que plus jamais cet homme ne s'attaque à ton enfant ? » soufflais-je, les yeux voilés de tristesse. « Je voulais lui faire mal, tu n'imagines pas à quel point. Je voulais qu'il endure les mêmes souffrances qu'il lui avait imposées, mais je n'ai rien fait. Je l'ai tué, c'est vrai, et je ne le regrette pas. Mais il était malade, condamné par son cancer. Ce que j'ai vu devant moi n'était plus Peter Schumer, le pédophile et père indigne de mon enfant. Ce n'était qu'un infirme qui cherchait à perpétuer le mal. Je suis désolé que tu ne le comprennes pas Lily, mais à mes yeux, je n'avais pas d'autres alternatives que celle de l'éliminer. Si je ne l'avais pas fait, je n'aurais pas pu me regarder dans un miroir en sachant que par ma faute, ce monstre respirait encore et pouvait à tous moments recommencer. Pas plus que je n'aurais su quoi répondre à Paris lorsqu'il m'aurait demandé ce pourquoi je n'avais rien fait de plus que refiler la bête à d'autres pour qu'ils s'en chargent à ma place. »
Pleinement conscient de sa détresse causée en partie par ma réaction qui devait l'avoir, outre le choc de découvrir que mes compétences professionnelles me servaient encore, ébranlé dans la confiance qu'elle m'accordait, je demeure immobile, attendant ses confidences presque comme un condamné ferait les frais des ultimes accusations du juge. Sa première interrogation, posée sur un ton trop indifférent pour l'être véritablement me fait pourtant douter. Tendu, devant le dilemme qui se dressait devant moi, dire la vérité au risque de faire souffrir ou mentir et s'enfoncer dans la brèche, je ne réponds pas tout de suite, ne captant que dans son regard voilé par les larmes la cause de son désarroi informulé encore. Confiance brisée. Le couperet tombe, j'acquiesce sans sourciller. Certes. Elle avait raison et j'avais tort, au moins sur ce point-ci. Et lorsqu'elle poursuit, associant à des interrogations que je peine de prime abord à entendre, je ne peux contenir mon incompréhension face à la sienne. Ses explications n'ont pour objectif que d'amener au point suivant. Un instant, j'hésite à l'interrompre, usé par l'amertume et la colère, de lui demander le rapport qu'elle trouvait entre mon ancienne profession et l'acte perpétué la veille au soir. Je doute, mais peu à peu les incertitudes s'estompent pour ne laisser qu'une forme latente de lassitude. Car si une partie de moi, la plus humaine des deux sans doute, comprenait ses craintes et ses reproches, l'autre en revanche la fustigeait intérieurement de se montrer aussi prompte à juger son homme.
Ainsi à ses yeux aurais-je perdu un droit acquis du fait de mon métier passé. Absolument pas. Car si paradoxalement je ne pensais pas qu'un homme avait le moindre droit sur la vie d'un autre, quelle que fusse sa profession, il avait en revanche le droit et même le devoir de protéger sa famille si celle-ci était menacée, employant n'importe quel moyen mis à sa disposition pour se faire. Et puis, une phrase...juste quelques mots, suffirent à m'embraser. Jusqu'alors calme ou en tous cas tentant de me contenir, Lily était parvenue en moins de deux secondes à ranimer la fureur dans mon regard et dans mon cœur. « Que Peter Schumer ait brutalisé, torturé, ou même violé ton propre fils, cela ne change rien. » En ce instant, mon regard changea du tout au tout. Passant du lagon le plus pur à un océan dont les vagues déchainées réclamaient la vie du pêcheur imprudent. « En démissionnant de l’Agence, tu as fait le choix de devenir comme tous ces pères de famille dont les enfants ont été tués, ou même traumatisés, et qui sont impuissants face à cela. Emplis de haine, de désir de vengeance sans doute … Mais impuissants. » Un feu gronde à l'intérieur de moi tandis que je l'observe sans la quitter des yeux. Si Lily n'avait pas été celle-là même qui faisait vibrer mon cœur, qui portait mes enfants, jamais je ne l'aurais laissé poursuivre après de tels propos. Comment osait-elle ? L'incrédulité m'engagerait presque à fuir, ou à me demander si c'était bien celle à qui j'avais choisi d'offrir mon cœur, si une enchanteresse n'avait pas usurpé son identité pour mieux me duper. Non, impossible. « Même la vengeance légitime d’un père pour laver l’honneur et les craintes d’un fils. » « Tu crois que c'est ce dont il s'agit ? » finis-je par l'interrompre d'une voix rauque trop calme pour ne rien vouloir sous-entendre. Comme la lame d'un rasoir qui ne demandait qu'à s'abattre, je me risque plus loin, me fichant pour une fois des réactions que je pouvais aussitôt déclencher chez la jeune femme. « D'honneur et de craintes ? Tu n'as rien compris. Rien du tout. Et je te défends de penser que je suis « comme tous ces pères de famille » comme tu l'as dit bien mentionné, Lily, « impuissants ». Je ne suis pas et ne serai JAMAIS impuissant, tu m'entends ? Je ferai n'importe quoi pour protéger les miens, tout comme je suis fermement convaincu que si ces pères avaient cette possibilité, l'occasion de faire ce que j'ai fait, aucun ne s'en serait privé. » la grondais-je, irrité. « Que se serait-il passé si j'avais remis cet homme aux autorités ? Que crois-tu qu'il se serait passé au juste si je n'avais pas retrouvé mon fils à temps ? Tu crois qu'il aurait éprouvé le moindre regret ? Tu crois que de savoir qu'il était à nouveau enfermé suffirait à effacer ce qu'il a commis, à protéger d'autres enfants le jour où il serait ressorti pour bonne conduite ? Ou pire, en prétextant sa maladie comme excuse pour amenuir sa peine, que les juges le libèrent par bonté d'âme et qu'il s'en prenne à Ashlynn ; est-ce que tu y as pensé ? » continuais-je, les mains tremblantes. Je m'arrête enfin, tandis que son discours reprend. « Ils ne le sauront jamais. » maugréai-je dans un murmure. Amoun avait couvert mes traces. Et je savais mieux que quiconque combien l'Egyptien était méticuleux. Non, jamais personne ne découvrirait quoique ce soit, sur ce point, Lily n'avait aucunement matière à s'inquiéter. « Et moi … je devrais expliquer à deux fillettes orphelines de père que leur papa est absent parce qu’il a abattu un homme de sang-froid comme un animal par vengeance, et qu’il doit désormais assumer les conséquences de ses actes en purgeant une peine qui l’exclura de leur enfance … Voire de leur vie. » Elle avait fait mouche. Touché dans ma fierté, dans ma colère et dans la peur que se reproduise un jour la disparition d'une famille au profit de l'incarcération ou de la mort, je lui jette un sombre regard, me demandant sur le moment si elle n'avait cherché qu'à me blesser ou était sincère dans sa volonté de m'inquiéter des conséquences à venir, pour nous. Pour nous tous.
« C’est ça que tu veux ? » « Je n'ai pas l'intention d'être exclue de vos vies, Lily. Ni de la tienne, ni des leurs. » Plus posée que quelques minutes auparavant, ma voix se perd dans l'obsercurité de la grande pièce, alors que je reprends, pensif. « Je te le répète, je n'ai aucune inquiétude à avoir. Nul ne saura jamais ce qui s'est passé. » A part toi, aurais-je presque été tenté de préciser. « Mais, dans le cas où cette éventualité se produirait, soit sûre que j'assumerai mes responsabilités jusqu'au bout. » Car oui, au delà de « l'animal » qu'elle venait d'évoquer, il y avait un homme qui tentait sincèrement de lui faire comprendre sa prise de décision, dût-il en payer le prix plus tard, il ne regrettait rien mais payerait dans cette vie ou dans une autre, celle qu'il avait prise vis à vis du père adoptif de Paris. « Permets-moi à mon tour de te poser une question, Lily. Toi qui penses que j'ai mal agi, que j'aurais dû livrer cet homme aux autorités. » M'engageant sur un terrain boueux, horrifiant et intolérable, je m'avance jusqu'à ne plus être que debout devant elle à quelques centimètres à peine, m'agenouillant devant elle pour ne plus avoir à élever la voix. Je sais déjà que ce que je m'apprête à énoncer lui sera inacceptable, qu'elle me haira pour de telles pensées, mais tant pis. Peut-être allait-elle mieux comprendre mon état d'esprit lorsque je m'étais retrouvé nez à nez avec Peter Schumer. « Si...s'il avait s'agi de ta fille, Lily, de NOTRE fille...imagine...elle n'a que 6 ans...elle joue à la poupée comme toutes les petites filles de son âge. Elle porte une jolie robe rose et un ruban dans les cheveux. Elle ne se méfie pas, elle s'amuse en toute innocence, lorsqu'un homme l'attrape. Imagine ce qu'elle ressent lorsqu'il pose ses mains sur son corps d'enfant, lorsqu'il soulève sa jupe... » Je m'arrête, j'aurais presque la nausée si une telle image n'avait jamais hanté mes nuits. Si je n'avais jamais été face à de telles monstruosités des années auparavant. « Je ne veux pas te faire peur, je sais que ce que je te raconte te dégoûte au plus haut point. Mais imagine simplement la scène, Lily...et dis-toi que c'est ce que mon fils a enduré pendant des années. Pas une mais plusieurs fois. Qu'il avait confiance en cet homme, qu'il l'appelait « papa », que personne n'était là pour le protéger. Est-ce que tu aurais pu le faire toi ? Sincèrement, Lily, si ça avait été ta fille, est-ce que tu aurais appelé la police ou tu aurais voulu être certaine que plus jamais cet homme ne s'attaque à ton enfant ? » soufflais-je, les yeux voilés de tristesse. « Je voulais lui faire mal, tu n'imagines pas à quel point. Je voulais qu'il endure les mêmes souffrances qu'il lui avait imposées, mais je n'ai rien fait. Je l'ai tué, c'est vrai, et je ne le regrette pas. Mais il était malade, condamné par son cancer. Ce que j'ai vu devant moi n'était plus Peter Schumer, le pédophile et père indigne de mon enfant. Ce n'était qu'un infirme qui cherchait à perpétuer le mal. Je suis désolé que tu ne le comprennes pas Lily, mais à mes yeux, je n'avais pas d'autres alternatives que celle de l'éliminer. Si je ne l'avais pas fait, je n'aurais pas pu me regarder dans un miroir en sachant que par ma faute, ce monstre respirait encore et pouvait à tous moments recommencer. Pas plus que je n'aurais su quoi répondre à Paris lorsqu'il m'aurait demandé ce pourquoi je n'avais rien fait de plus que refiler la bête à d'autres pour qu'ils s'en chargent à ma place. »
@Lily-Rose S. Hopkins
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when the darkness
covers the light
lawrie & lily
covers the light
lawrie & lily
Il avait compris où elle souhaitait en venir. Le sens général du moins, car colère et indignation semblaient vaciller dans son regard, alors qu’il la tançait avec sévérité. Mais cela ne l’atteignit pas plus que cela. Pourquoi ? Parce qu’il avait perdu ce droit de l’impressionner quand il avait rompu la promesse qu’il lui avait faite. D’une loyauté inébranlable, les serments avaient toujours eu à ses yeux une valeur singulière. Elle leur accordait une importance unique, presque pure. Il le savait, et consciencieusement, il avait bafoué sa confiance à plusieurs reprises. La blessure infligée était trop profonde désormais pour passer outre. Comment pourrait-elle lui faire confiance à nouveau après cela ? Comment le croire sur parole désormais ? Comme être sure ? De le voir s’indigner, comme si c’était elle, au final, le bourreau de l’équation qui ne comprenait rien, une colère sourde monta peu à peu dans sa poitrine, accélérant le rythme des battants de son cœur. Il n’y avait aucune excuse qui pourrait justifier l’acte monstrueux qu’il avait commis. Il avait tué un homme. Odieux certes. Mauvais. Pourvu de tous les vices détestables imaginables. Mais un homme malgré tout. Elle-même n’était même pas sure qu’elle aurait la force morale pour agir comme il l’avait fait. C’était un acte brutal, et froid. Non, elle ne pourrait pas. « Quoi d’autre Lawrence ? A quel moment t’es-tu dit que tu pouvais t’octroyer le droit suprême d’être à la fois juge et bourreau ?! » répliqua-t-elle, en commençant à hausser le ton, le timbre éraillé par les larmes éteintes au fond de sa gorge. « Aucun ne s’en serait privé, non, c’est vrai. Mais parmi eux, il y en a qui ont encore un sens moral, ou qui simplement n’auraient pas la force de tuer un homme. Tuer un homme Lawrence, est-ce que tu te rends toujours compte de ce que cela représente ?! Même avec la plus sourde des rages, ou des chagrins, il faut une force considérable pour briser un être humain. Il n’y a rien de plus violent que de donner la mort. Certains ne pourraient simplement pas vivre avec ce poids sur la conscience. Même si l’homme le méritait. Tu crois que le monde serait plus équilibré, et tournerait mieux si tout le monde agissait comme tu l’as fait ? Si toutes les familles qui ont vécu un drame, ou les assauts d’un taré, pouvaient sciemment assassiner leur bourreau sans impunité ? Qui vaudrait mieux que l’autre alors ?! Hein ?! Ce serait le chaos … » survoltée au début, elle s’était même levée pour lui faire face. Mais à la fin de ses propos, toute chamboulée, elle sentit des fourmillements traverser ses jambes. Comme si elles allaient se dérober sous ses pieds. Et une douleur lancinante au creux de son dos la fit se rasseoir, lentement, pour éviter de tomber. La grossesse ne lui permettait normalement pas de tels écarts. Ils devaient en passer par là cependant. « Avec tous les réseaux dont tu disposes, ne va pas me fait croire que tu n’avais pas moyen de trouver un endroit où l’enfermer jusqu’à ce qu’il meurt. Ou de t’assurer qu’il ne mettrait plus jamais un pied dehors. Surtout s’il était malade … Cela n’aurait pas duré une éternité avant d’en finir. » Qu’il n’aille pas lui faire croire qu’aucune solution n’était envisageable, n’impliquant pas la mort brutale de Peter Schumer. Elle connaissait les moyens dont son père avait déjà disposé pour faire disparaître un homme sans pour autant le tuer. Il ne pourrait pas lui mentir à ce sujet. Il avait agi sur une impulsion de haine. Une haine qu’elle comprenait, et imaginait sans peine. Mais son acte avait été inconsidéré. Et puis cette certitude qu’il avait. Comme si … Comme s’il n’avait pas été seul. « Tu le dis avec un tel aplomb, une telle certitude. Pourquoi ? Parce que c’est toi qui a fait disparaître le corps c’est ça ? Et tes méthodes sont infaillibles ? Mais cela ne t’a pas empêché pourtant de revenir ici avec une chemise tâchée d’un sang qui n’était pas le tien. C’est d’une négligence absolue. » lâcha-t-elle avec aigreur, se demandant comment il pouvait faire preuve d’un tel aplomb, et d’autant de certitudes dans une situation aussi complexe. « A moins que … » Peu à peu les hypothèses s’installaient. Et une, en particulier. « Ne me dis pas que tu as laissé Montou s’occuper du cadavre ?! » Si c’était vrai, une négligence de plus.
Enfin elle semble le heurter sur un point, mais elle ne crie pas victoire trop vite. Lily ne sait que trop bien comment est l’animal. Or, le voilà qui sort déjà les crocs et les arguments contraires. Au fil de ses mots, son esprit naturellement créatif se met en marche. Dessine les contours de l’horreur qu’il lui dépeint avec une tonalité aussi malsaine que le contenu de ses phrases. Horrifiée elle blêmit, imagine, aperçoit ce qu’elle avait déjà compris auparavant. « Arrête. Arrête ça … » sa langue claque contre son palais, sa main se posant sur son front pour masquer les idées intolérables qui la traversèrent. « Le seul fait de l’avoir tué devrait être une inquiétude constante … Je … je ne pourrais jamais dormir sur mes deux oreilles en sachant que j’aurais abattu un homme froidement. Je … Je ne pourrais pas vivre avec ça. » lui confia-t-elle, sa tête entre ses deux mains à présent. Il fallait qu’il comprenne. Qu’elle ne raisonnait pas comme lui. Qu’elle n’avait jamais eu à tuer un homme, et espérait n’avoir jamais à le faire. Jamais au cours de son existence la question ne s’était posée, comme elle s’était posée pour lui. Alors il devait comprendre. Envisager que pour elle, c’était intolérable, dans la mesure où jamais elle n’avait été confrontée à cette expérience. Une fois elle avait appréhendé la mort dans ce qu’elle a de plus terrible, lorsque Sergueï avait été abattu sous ses yeux, et cela l’avait brisée. Brisée à un point qu’il ignorait encore … Dont elle n’avait jamais parlé avec lui. « Je ne sais pas comment j’aurais agi Lawrence … Je ne sais pas. » souffla-t-elle en secouant la tête de droite à gauche, ses yeux embués par les larmes camouflées par ses mains. « Mais quoique tu dises, tu avais le choix. Tu as fait le choix de le tuer. Que ta conscience t’ait poussé à agir, je comprends. Que tu n’aies pas vu d’autres alternatives censées, je l’imagine aussi. Mais ne me dis pas que tu n’avais pas le choix … Parce que ce n’est pas vrai. » Maintenant, est-ce qu’elle-même pouvait vivre, avec ce choix consciencieux qu’il avait été prompt à faire, et qu’il referait sans doutes si l’occasion devait se présenter ? Elle ne savait pas encore. Elle était sous le choc. Mais au moins, il n’y avait plus de reproche dans sa voix. Elle comprenait les raisons profondes qui l’avaient poussé à agir, les entendait, voire pourrait presque les soutenir si seulement il lui laissait le temps d’encaisser le coup porté. « Tu ne peux pas juste me dire : « dans le cas où je serais pris, j’assumerai mes responsabilités jusqu’au bout » … tu n’es pas tout seul. Qu’en est-il des petites ? De moi aussi ? Je devrais faire quoi ? Les laisser sur les bancs de l’école être associées au nom d’un homme condamné pour meurtres ? Les laisser grandir avec cette idée-là ? Excuse-moi mais ce n’est pas le modèle de père que j’envisageais pour nos enfants … Et j’espère que toi non plus. Tu auras beau assumer les conséquences detes actes, nous devront les assumer aussi de notre côté, c'est inévitable. » Termina-t-elle enfin, vidée de toute son énergie, n’ayant même plus le courage de se lever. Un long silence s’installa, pesant, où seules leurs respirations se croisaient. Un profond soupire la traversa de part en part, et lentement, Lily se hissa sur ses jambes, contourna sa silhouette, fit quelques pas dans la pièce exiguës avant de revenir vers lui. Là elle se posta devant sa silhouette, en contrebas, son visage si proche du sien qu’elle pourrait presque le toucher. « Tu m’as fait une promesse un jour. Tant que tu l’honoreras, je serais toujours là pour toi. Je te soutiendrais comme je peux. Je porterai avec toi tous les fardeaux possibles. J’encaisserai s’il le faut d’autres blessures. J’essaierai d’être digne de ton amour, du mieux que je peux. Et je t’aimerais, de tout mon cœur … de toute mon âme aussi. Mais … Laisse-moi te faire une promesse à mon tour. » Son regard se plongea dans le sien, les pupilles totalement noires à cause de leur dilation dans l’obscurité. Elle paraissait dix ans de plus tout à coup, et aucun instant quelqu’un aurait songé mettre en doute de la sincérité de ses paroles, voire de leur aspect inébranlable. C’était la première fois qu’elle faisait preuve d’une telle volonté, froide, presque singulière à observer. « Je te promets que si tu me trahis encore une fois de cette façon, de manière aussi inconsidérée, je partirai. Je partirai avec les petites, tu ne nous reverras plus. Et je leur offrirais un père sans cadavre sur la conscience, ou susceptibles d’être déterrés pour l’emprisonner toute sa vie. Et ça je le ferais, tu sais pourquoi ? Pour protéger ma famille, et mes enfants. Même si ça doit me briser et tout me coûter, même si je n’aimerais jamais aucun homme comme je t’aime … Je le ferais. » Elle se recula d’un pas, baissa un instant son regard vers le sol avant de relever son visage vers lui. « Je sais pourquoi tu as tué Peter Schumer. Je l’ai compris, sache-le. J’ai entendu ce que tu disais. Et c’est peut-être mieux ainsi. Ce n’était qu’un monstre. Et j’espère que Paris retrouvera un semblant de paix un jour. Mais cela ne change rien au fait que … J’avais confiance en toi. Et tu m’as trahie. »
FRIMELDA
@Lawrence H. Austen
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« When the darkness covers the light. »
25 août 2017.
Enième soupir de désespoir, décidément Lily était aussi bornée que moi, si ce n'est plus. Comment pouvait-on ne pas prendre conscience d'une chose aussi limpide ? Depuis quand avais-je acquis ce droit ? Depuis toujours. Depuis la naissance de mon enfant. « Si certains ne le font pas, ce n'est pas par sens moral mais par peur des représailles qu'entrainerait leur acte. Justice et moralité n'ont rien à voir malheureusement Lily. Les juges ne sont pas là pour faire respecter la morale, ils ont été conçus pour faire respecter les lois. Et certaines lois ne sont pas justes, je le regrette, mais c'est ainsi. » argumentais-je en fronçant les sourcils. Quant à l'opinion qu'elle possédait de la mort elle-même, je manquais presque une hilarité alors qu'un sourire cynique faisait aussitôt une apparition circonspecte sur mes traits. « Il y a bien pire que la mort, au contraire. Il y a la souffrance. » Ce que j'avais dans ma bonté d'âme, négligé de faire subir à ce monstre de Schumer, bien que ce ne fut pas l'envie qui m'en avait manqué. A sa question, je reste pensif, songeur même, comme si je réfléchissais sincèrement à une réponse évidente à ses yeux. « Non, je ne pense pas que la solution soit de laisser aux familles le soin de rendre justice à leurs victimes. Pas plus à dire vrai que je ne pense qu'un juge ou que tout autre avocat qui ne se fie que sur les lois, aisément détournables ou modulables selon son degré de connaissance et de mise en scène, ne devraient avoir le droit de concocter un semblant de verdict juste pour amenuir les excès d'une famille brisée. A mes yeux, certains hommes devraient avoir pour tâche d'aider ces familles à obtenir une véritable justice. Ou vengeance, si tu préfères. C'est un terme peut-être rude, qui laisse entendre une partialité et une forme de barbarie animale, mais soyons honnête, lorsque tu apprends dans les journaux qu'une enfant de onze ans qui s'est faite agressée sexuellement par un homme de deux fois son aîné, que celui-ci n'est pas condamné car selon les juges, l'acte sexuel fut consenti, explique-moi en quoi cette décision est juste ? En quoi cette décision n'a rien de comparable à de la barbarie animale ? Certes, je ne prétendrais pas que tous les procès sont immoraux, pas plus que tous les suspects sont coupables, mais lorsque c'est le cas, lorsque la preuve existe, je regrette Lily, il serait immoral voire complètement irresponsable de ne pas tenter d'y faire obstacle par tous les moyens, même sans être un professionnel, c'est un droit, logique à mes yeux, que de protéger sa personne ainsi que les siens lorsque leurs vies sont menacées. » Pourtant prêt à poursuivre dans ce débat, je m'arrête net lorsqu'elle s'affaisse devant moi, une lueur inquiète traversant mes iris glacées pour se fondre sur ses frêles épaules et son ventre plus rond à mesure que les jours passent. « Si, j'aurais pu trouver un moyen de le tenir éloigné de Paris, certainement. Mais il l'a agressé à nouveau. C'est lui qui a scellé son destin à partir du moment où il a repris la chasse. S'il s'était évadé, je n'aurais pas fait ce que j'ai fait, même si tu ne crois peut-être plus aujourd'hui, c'est la vérité. » S'attaquer à Paris, pire lui laisser de nouvelles séquelles physiques et psychologiques et lui permettre de manger, dormir, vivre comme si rien ne s'était passé jusqu'à ce que la mort ne vienne le cueillir ? Non, trop facile. Trop long. Quoiqu'il en soit, la réaction de Lily me surprenait. Après l'effroi et la surprise, la tristesse se muait en cynisme alors qu'elle me reprochait ma négligence dans le but évident de me blesser. A défaut, au moins était-elle parvenue à ce que je détourne les yeux sitôt que le nom de famille de mon associé fut évoqué. Ni oui, ni non, elle avait deviné de toutes façons. Sauf que pour ma part, je ne prononcerai pas ces mots-là. Je ne trahirai pas Amoun, comme lui ne l'avait jamais fait. En revanche, je peinais à comprendre d'où provenait le problème. N'avait-elle pas confiance en lui ? Non, non biensûr que non. Et pourtant, je ne connaissais aucun homme plus digne de confiance lorsqu'il s'agissait de tenir sa langue et ses proches loin du danger. Des méthodes peu orthodoxes, trop violentes certainement, mais au moins avaient-elles toujours obtenu le résultat escompté.
« Tu n'auras jamais à le faire. » affirmais-je en baissant les yeux, comprenant par là qu'elle se demandait de quelles manières, moi, je pouvais dormir sur mes deux oreilles sans être hanté par des cauchemars sur les vies que j'avais sans conteste volées au fil du temps. Une bonne maitrise de soi, de savoir que ces disparus eurent tous mérité leur sort, et un certain penchant, je ne vais pas mentir, pour l'ombre et la noirceur. « Voilà, c'est que je dis. Tu ne sais pas. Personne ne sait comment il réagira avant d'être obligé d'agir. » Mon timbre diminuant en volume, ma colère s'est définitivement éclipsé au profit de la lassitude et d'un sérieux inébranlable. Malgré l'instabilité émotionnelle de Lily, je demeure immobile, la fixant sans en perdre une miette mais décidé à ne plus me défendre sur ce point. Elle savait au fond d'elle-même, j'en étais persuadé, que je ne craignais rien. Après tout, si un ancien agent du MI6 ne savait plus dissimuler des preuves, où va le monde ? Le problème était ailleurs. Dans sa détresse, ma culpabilité, la confiance mise à mal. Lorsqu'elle revient vers moi, je l'observe avec attention, désarmé par la matûrité que je lis dans son regard. L'absence de clémence aussi. Sa menace me touche, plus qu'elle ne pouvait le voir. Un brin d'inquiétude, non de peur, obscurcit un moment mes prunelles, avant que l'océan ne recouvre son calme. Lentement, je me relève sur ses derniers mots. La dévisageant intensément, comme pour marquer au fer rouge les promesses non tenues, les menaces explicites et un avenir orageux. « C'était toi ou lui, Lily. » protestais-je faiblement avant de m'éloigner de l'atelier, en lui jetant un ultime regard derrière moi. Un choix que je savais maintenant être lourd de conséquences, mais que jamais je ne regretterai. Un choix impossible, au fond.
Enième soupir de désespoir, décidément Lily était aussi bornée que moi, si ce n'est plus. Comment pouvait-on ne pas prendre conscience d'une chose aussi limpide ? Depuis quand avais-je acquis ce droit ? Depuis toujours. Depuis la naissance de mon enfant. « Si certains ne le font pas, ce n'est pas par sens moral mais par peur des représailles qu'entrainerait leur acte. Justice et moralité n'ont rien à voir malheureusement Lily. Les juges ne sont pas là pour faire respecter la morale, ils ont été conçus pour faire respecter les lois. Et certaines lois ne sont pas justes, je le regrette, mais c'est ainsi. » argumentais-je en fronçant les sourcils. Quant à l'opinion qu'elle possédait de la mort elle-même, je manquais presque une hilarité alors qu'un sourire cynique faisait aussitôt une apparition circonspecte sur mes traits. « Il y a bien pire que la mort, au contraire. Il y a la souffrance. » Ce que j'avais dans ma bonté d'âme, négligé de faire subir à ce monstre de Schumer, bien que ce ne fut pas l'envie qui m'en avait manqué. A sa question, je reste pensif, songeur même, comme si je réfléchissais sincèrement à une réponse évidente à ses yeux. « Non, je ne pense pas que la solution soit de laisser aux familles le soin de rendre justice à leurs victimes. Pas plus à dire vrai que je ne pense qu'un juge ou que tout autre avocat qui ne se fie que sur les lois, aisément détournables ou modulables selon son degré de connaissance et de mise en scène, ne devraient avoir le droit de concocter un semblant de verdict juste pour amenuir les excès d'une famille brisée. A mes yeux, certains hommes devraient avoir pour tâche d'aider ces familles à obtenir une véritable justice. Ou vengeance, si tu préfères. C'est un terme peut-être rude, qui laisse entendre une partialité et une forme de barbarie animale, mais soyons honnête, lorsque tu apprends dans les journaux qu'une enfant de onze ans qui s'est faite agressée sexuellement par un homme de deux fois son aîné, que celui-ci n'est pas condamné car selon les juges, l'acte sexuel fut consenti, explique-moi en quoi cette décision est juste ? En quoi cette décision n'a rien de comparable à de la barbarie animale ? Certes, je ne prétendrais pas que tous les procès sont immoraux, pas plus que tous les suspects sont coupables, mais lorsque c'est le cas, lorsque la preuve existe, je regrette Lily, il serait immoral voire complètement irresponsable de ne pas tenter d'y faire obstacle par tous les moyens, même sans être un professionnel, c'est un droit, logique à mes yeux, que de protéger sa personne ainsi que les siens lorsque leurs vies sont menacées. » Pourtant prêt à poursuivre dans ce débat, je m'arrête net lorsqu'elle s'affaisse devant moi, une lueur inquiète traversant mes iris glacées pour se fondre sur ses frêles épaules et son ventre plus rond à mesure que les jours passent. « Si, j'aurais pu trouver un moyen de le tenir éloigné de Paris, certainement. Mais il l'a agressé à nouveau. C'est lui qui a scellé son destin à partir du moment où il a repris la chasse. S'il s'était évadé, je n'aurais pas fait ce que j'ai fait, même si tu ne crois peut-être plus aujourd'hui, c'est la vérité. » S'attaquer à Paris, pire lui laisser de nouvelles séquelles physiques et psychologiques et lui permettre de manger, dormir, vivre comme si rien ne s'était passé jusqu'à ce que la mort ne vienne le cueillir ? Non, trop facile. Trop long. Quoiqu'il en soit, la réaction de Lily me surprenait. Après l'effroi et la surprise, la tristesse se muait en cynisme alors qu'elle me reprochait ma négligence dans le but évident de me blesser. A défaut, au moins était-elle parvenue à ce que je détourne les yeux sitôt que le nom de famille de mon associé fut évoqué. Ni oui, ni non, elle avait deviné de toutes façons. Sauf que pour ma part, je ne prononcerai pas ces mots-là. Je ne trahirai pas Amoun, comme lui ne l'avait jamais fait. En revanche, je peinais à comprendre d'où provenait le problème. N'avait-elle pas confiance en lui ? Non, non biensûr que non. Et pourtant, je ne connaissais aucun homme plus digne de confiance lorsqu'il s'agissait de tenir sa langue et ses proches loin du danger. Des méthodes peu orthodoxes, trop violentes certainement, mais au moins avaient-elles toujours obtenu le résultat escompté.
« Tu n'auras jamais à le faire. » affirmais-je en baissant les yeux, comprenant par là qu'elle se demandait de quelles manières, moi, je pouvais dormir sur mes deux oreilles sans être hanté par des cauchemars sur les vies que j'avais sans conteste volées au fil du temps. Une bonne maitrise de soi, de savoir que ces disparus eurent tous mérité leur sort, et un certain penchant, je ne vais pas mentir, pour l'ombre et la noirceur. « Voilà, c'est que je dis. Tu ne sais pas. Personne ne sait comment il réagira avant d'être obligé d'agir. » Mon timbre diminuant en volume, ma colère s'est définitivement éclipsé au profit de la lassitude et d'un sérieux inébranlable. Malgré l'instabilité émotionnelle de Lily, je demeure immobile, la fixant sans en perdre une miette mais décidé à ne plus me défendre sur ce point. Elle savait au fond d'elle-même, j'en étais persuadé, que je ne craignais rien. Après tout, si un ancien agent du MI6 ne savait plus dissimuler des preuves, où va le monde ? Le problème était ailleurs. Dans sa détresse, ma culpabilité, la confiance mise à mal. Lorsqu'elle revient vers moi, je l'observe avec attention, désarmé par la matûrité que je lis dans son regard. L'absence de clémence aussi. Sa menace me touche, plus qu'elle ne pouvait le voir. Un brin d'inquiétude, non de peur, obscurcit un moment mes prunelles, avant que l'océan ne recouvre son calme. Lentement, je me relève sur ses derniers mots. La dévisageant intensément, comme pour marquer au fer rouge les promesses non tenues, les menaces explicites et un avenir orageux. « C'était toi ou lui, Lily. » protestais-je faiblement avant de m'éloigner de l'atelier, en lui jetant un ultime regard derrière moi. Un choix que je savais maintenant être lourd de conséquences, mais que jamais je ne regretterai. Un choix impossible, au fond.
@Lily-Rose S. Hopkins
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when the darkness
covers the light
lawrie & lily
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Sur certains principes fondamentaux, ils n’étaient pas d’accord. Mais comment le pourraient-ils ? Lui avait baigné dans un univers qui ne tient pas compte des règles les plus élémentaires. Il avait navigué si longtemps dans les eaux sombres qu’il semblait complètement en dehors des réalités. Comment pouvait-il émettre l’idée que quiconque pourrait agir comme bon lui semble sous prétexte qu’une règle lui semblerait injuste ? Ce qu’il prônait, c’était le chaos, ou l’anarchie. En donnant la vie, on n’acquérait pas le droit d’ôter celle qu’un autre individu qui ferait du mal à notre progéniture. Non, cela ne fonctionnait pas ainsi. A quoi bon avoir lutté pendant des années, d’un combat acharné contre la peine de mort si c’était pour en arriver à de telles conclusions ? « Et tu crois que je ne le sais pas ?! » exulta-t-elle en écho de son cynisme, en colère tout à coup face à cette tonalité qu’il employait. Comme si elle était une idiote, ou une ignorante. Puis l’indignation passée, une fraction de secondes plus tard, elle comprit où il avait voulu en venir, entraperçu la noirceur qui un jour, l’avait effrayée. « Es-tu entrain d’insinuer que Schumer devrait saluer ta grandeur d’âme, d’avoir bien voulu daigner l’abattre sans le torturer avant ?! » De le dire à voix haute, elle était simplement horrifiée. D’ailleurs cela se lisait sur ses traits, qui avaient blêmis plus encore. « Oh, donc selon toi, il faudrait une milice d’hommes qui se chargeraient d’abattre sommairement tous les bourreaux de ces familles brisées ? Et ces hommes, qui abattent des êtres humains, seraient « meilleurs » que ceux qu’ils tuent, selon toi ? Ce serait un service rendu à la population, d’éliminer les nuisibles ? Et ceux si prompts à tuer d’autres êtres humains, sont-ils plus honorables selon toi ? En quoi sont-ils différents ? Tu estimes qu’il y a un degré dans l’horreur c’est ça ? Que torturer un salopard jusqu’à le tuer, c’est plus honorable que de toucher une fillette ? Excuse-moi, mais je vois de la brutalité malsaine dans les deux. » Plus ils avançaient, plus le débat lui échappait. Il avançait dans une radicalité qui lui faisait peur. « Justice et vengeance n’ont rien à voir, Lawrence. Les deux font même rarement bon ménage. » dit-elle, écoutant ses arguments. Mais sans la perdre, il était déjà allé trop loin pour qu’elle puisse le suivre tout à fait dans son raisonnement. Trop de raccourcis, de phrases brutales. Bien sur que l’idée que l’on puisse s’en prendre à des enfants innocents l’horrifiait. Bien sûr qu’elle comprenait ce qui l’avait poussé à agir, dans le cas de Paris. Mais elle ne tolérait pas sa radicalité. Comme si cette dernière était le témoignage d’une noirceur intrinsèque qu’une partie d’elle redoutait, car elle ne saurait pas tout à fait comment y faire face.
« Je vois … » soupira-t-elle, alors qu’il lui parlait du destin que Schumer avait scellé lui-même. Une douleur lancinante la parcourue, se terminant par des fourmillements au bout de ses doigts. Elle prit le temps de respirer calmement, encaissant chaque phrase comme des coups portés. Elle avait envie de pleurer encore, pourvu que cela la soulage. Mais à la place des larmes, c’est une résolution qui lui vint, et qu’elle ne mit pas longtemps à formuler. A son regard, elle vit qu’il avait compris. Que cette promesse-là, plus que toutes les autres, elle la tiendrait. La seule idée de devoir en arriver là la rendait malade, et elle espérait pouvoir le croire encore, pouvoir imaginer qu’il disait vrai en affirmant qu’ils n’en arriveraient pas là, qu’elle n’aurait pas à le faire. Jamais elle n’aurait cru déjà en arriver là, et devoir lui faire pareil serment. Avait-elle le choix, cependant ? Promesse qui se referma derrière lui, sur ce « C'était toi ou lui, Lily. », qui la laissa vidée de toute son énergie. Les bras abandonnés le long du corps, scrutant un point invisible sur la porte derrière laquelle il venait de disparaître, un hoquet la traversa. Et tout d’un coup, Lily eut terriblement froid. Elle rêva pendant un court instant de retrouver l’homme qu’elle aimait. Celui qui ne la fuyait pas, lui souriait sans honte, la prenait dans ses bras avec une vigueur qui le faisait paraître plus jeune qu’il n’était en réalité. Car aujourd’hui, elle sentait sa propre jeunesse filer entre ses doigts, brisée, lui échapper sans qu’elle ne puisse la rattraper. Un long soupire la traversa de part en part. Elle ne savait même pas combien de temps elle était restée immobile, là, scrutant le vide, en rêvant de retrouver un cœur léger. Cette grossesse aurait dû être l’une des plus belles expériences de leur vie de couple, et depuis le début elle s’avérait une épreuve redoutable. Les éléments étaient contre eux aussi, avouons-le. Ces événements impromptus surtout, qui l’avaient éloigné d’elle, et dont elle espérait pouvoir le regarder revenir. Laisser du temps peut-être ? Mais elle avait si peur de s’éloigner, et de le perdre au final … Elle en avait besoin pourtant. Pas longtemps. Juste assez pour faire le vide, et repartir, quelque part. Assimiler les actes qu’il avait décidé de commettre, et les conséquences qu’elle déciderait que cela aurait sur eux, ou non. Faire le vide encore.
Lily arpenta un couloir alors, puis un autre. Dans la pénombre elle retrouva le chemin de la chambre à coucher, l’aperçu d’ores et déjà étendu, sans doute épuisé. Quelques lueurs se reflétaient sur son dos. Une image qui se grava contre sa rétine, l’inspira, sans qu’elle ne sache pourquoi. Elle aurait peut-être dû le rejoindre, s’allonger là, se blottir contre lui, l’enserrer de ses bras pour veiller sur son sommeil, le préserver de l’image de ce fils brutalisé, de la haine, de l’horreur aussi. Puis elle se souvint de la lassitude dans son regard, de cette façon dont il lui avait répondu … Et elle eut l’impression lourde de ne pas être la bienvenue. Voire, d’être ce soir un fardeau plus qu’un baume. De devoir le laisser seul aussi ce soir, comme si sa présence était superflue. Alors sans bruit, pour ne pas le réveiller s’il dormait déjà, le visage triste mais néanmoins d’un calme absolu, elle se saisit de son oreiller, puis ressortit à pas feutrés de la chambre. Elle aurait pu choisir l’une des chambres inoccupées, mais les trouvait toutes si austères et froides qu’elle leur préféra le large divan du salon. Pas très confortable, mais néanmoins acceptable. Elle s’allongea en travers, calant son oreiller sous sa nuque, remontant un plaid sur ses jambes. Sans réelle conviction, elle alluma la télévision en sourdine, regardant défiler les images sans réellement leur accorder de l’attention. Et puis elle finit par s’assoupir, rompue par la fatigue, bercée par les tressautements sous sa paume.
FRIMELDA
@Lawrence H. Austen
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