ALYS BUSHNELL ►odeya rush

C’est bien connu, lorsqu’on est petit, on ne comprend rien. Et personne ne prend la peine de vous expliquer. Vous êtes mis de côté. Délaissé. Ce fut le cas d’Alys. Certes, elle n’avait que trois ans lorsque son père est décédé, mais lorsqu’elle a commencé à se poser des questions quelques années plus tard, on aurait pu lui apporter des réponses. Mais non. Sa mère a préféré l’endormir avec des mensonges pensant qu’elle était trop jeune. Surtout qu’Alys était son bébé. Si elle pouvait éviter qu’elle soit touchée par tant de drames, de malheurs, elle faisait en sorte que la gamine ne soit au courant de rien. En somme, ne soit même pas un brin touchée par la mort de l’homme qui fut son père. Au début, Alys a arrêté de se questionner. Elle s’est laissée bercée dans le monde bisounours que sa mère lui créait. Mais Alys est du genre à se laisser dépasser par ses pensées. Des questions, elle en a toujours. Et de plus en plus. Elle se tourne alors vers l’autre figure de sa famille, son frère. Lui, il est plus honnête. Bon, il est également trop protecteur, mais il ne lui ment pas. Du coup Alys s’est mise à suivre son frère partout où il allait. Par moment dans des endroits peu fréquentables. Mais elle s’en foutait. Au contraire, c’était excitant à ses yeux. Souvent seule, dans ses pensées à rêvasser, elle s’ouvrait enfin aux autres par l’intermédiaire de son frangin. Elle sortait de sa bulle, de son cocon. Et même si c’était pour le suivre dans ses conneries. Ça, c’est parce que Alys a toujours été influençable. Influençable et curieuse. Du coup elle résiste difficilement à la tentation. Mais ça ne l’embêtait pas, au contraire. Elle passait du temps avec son frangin qui lui est devenu très vite indispensable. Si indispensable que lorsqu’il est parti en France, le petit monde d’Alys s’est écroulé. Elle s’est retrouvée seule avec sa mère et les difficultés ont commencé. Se sentant abandonnée par sa moitié, elle a tellement mal vécu ce départ, que la jeune ados s’est totalement repliée sur elle-même. Devenue une totale énigme pour sa mère, celle-ci s’est vite retrouvée dépasser par l’attitude de sa fille. Et les choses ne sont pas allées en s’arrangeant lorsqu’elle a rencontré un nouvel homme. Les évènements se sont vite enchaînés. Trop vite au goût d’Alys. Du jour au lendemain elle devait partager son espace privé avec un inconnu. Un inconnu qu’elle devait appeler beau-papa. Un inconnu aux revenus aisés qui changea du tout au tout le quotidien de la famille. L’avis et les besoins de la gamine n’ont pas été pris en compte. Déjà assez introvertie, l’adolescente a commencé à connaître des états dépressifs du fait de son hyperémotivité. Fuyant l’affrontement et la réalité, ses intérêts se sont tournés vers la mort, la noirceur de l’âme. Toujours vêtue de noir, on peut clairement dire qu’elle est devenue gothique. Un gothique glauque et angoissant pour sa famille qui avait du mal à retrouver la gamine qu’elle était. Une période où l’ados n’avait que des pensées sombres, et à certains moments, suicidaires. Finalement le retour de son frère aux Etats-Unis fit office de lumière dans le tunnel sombre dans lequel elle était enfermée. Elle a consulté quelques psychologues pour tenter de comprendre ses états âmes. Finalement la jeune fille a cessé de se morfondre et a lâché sa lubie pour la mort, le monde spirituel. Elle s’est à la place tournée vers les sciences, son autre centre d’intérêt. Fascinée par les nouvelles technologiques scientifiques, elle a reporté son attention vers ce domaine, beaucoup plus sein pour elle. Petit à petit elle a essayé de s’intégrer au sein de sa nouvelle famille. Malgré de nombreux efforts, la communication reste difficile. Alys reste une fille difficile à cerner. Bien qu’ayant repris le droit chemin en excellant au niveau scolaire, son comportement est toujours aussi imprévisible. Incomprise par la société, sauf peut-être son frère, elle reste très secrète, mystérieuse. Pour certains, hypnotique. Elle attire de plus en plus le regard avec les années qui passent et l’évolution de son corps. Elle ne le cherche pas, ne le désire pas. Pourtant elle en joue aujourd’hui. Ce n’est pas une garce manipulatrice séductrice. Au contraire, elle a ce côté sage, bouille d’ange, réservée. Cependant, il lui arrive souvent de se laisser surprendre et de satisfaire ses besoins en empruntant des routes plus sinueuses. Elle a le goût du risque, résiste difficilement à la tentation et il est facile de l’influencer pour l’emmener voguer vers d’autres bords. Acceptée au MIT, étudiante modèle, elle laisse entrevoir cette image toute lisse de sa personne. Au fond, elle a toujours cette noirceur en elle. Vite angoissée, perturbée, il ne faut pas la bousculer. Encore moins la harceler, sinon elle se montrera impulsive. Ce côté d'elle est devenu plus accru au décès de sa mère. Elle n'était pas physiquement proche d'elle, les deux femmes se disputaient souvent, n'étaient jamais d'accord et n'arrivaient pas à communiquer. Mais elle restait sa mère. Bien qu'elle n'ait jamais su le dire, Alys l'aimait. C'est juste qu'au niveau émotionnel, elle a toujours eu des blocages qui l'ont empêché de l'exprimer ouvertement. Du coup face à ce regret, Alys est plus sensible. Elle n'a pas réussi à pleurer lors de l'enterrement. Pas par envie, mais parce qu'elle a préféré refouler ses sentiments plutôt de les affronter. Aujourd'hui, elle doit vivre avec cette douleur, ce deuil qu'elle n'a pas pu faire. Elle est retournée l'université où elle se fait discrète le jour, plus sauvage la nuit, mais tout en restant une personne solitaire. Elle n'a pas beaucoup d'amis, mais le peu qu'elle en possède, ils sont fidèles. Elle tente de s'épanouir, de profiter de sa vie d'étudiante. Mais sa beauté intrigue, sa personnalité aussi. Un soir, elle va en payer les frais. Se sentant sale, coupable, fautive de ce qui lui est arrivé, elle préfère fuir les problèmes plutôt que de les affronter. Heureusement pour elle, son dossier est accepté à Harvard. Elle va y retrouver son pilier, son frère. De quoi la rassurer. Mais lui aussi a ses propres problèmes, ses troubles, ses démons. Il faut croire qu'en appartenant à la famille Bushnell, on est forcément un être hors-norme. Mais ça n'empêche pas Alys de vivre. Etre différente, ça n'a jamais été une tare pour elle. Plutôt une force.