Relax don't do it when you want to go to it!

Face à sa colère, l'agressivité et l'attaque prenaient la plus vile des formes. Porter un coup moral à un ami blessait plus que n'importe quelle blessure ou hématome. Consciente de cette réalité, la brunette n'en demeurait pas moins prête à mordre. La tension interne atteignait des sommets. Un battement de tambour incessant contre ses tempes l'empêchait de s'entendre penser ou réfléchir. Aucune solution ne saurait l'apaiser. La colère avait toujours été son point faible. Alors comme souvent, le silence la protégeait d'elle et des autres et les autres d'elle.

Il s'inquiétait. L'idée l'obligeait à une nouvelle gymnastique mentale. Son esprit se déplaçait de son point de vue vers celui de son ami et ce qu'il pouvait ressentir. Il avait beau jouer les Apolon de glace, Alysse ne s'y trompait pas. Une longue inspiration ouvrit la voie à une potentielle discussion. Zen. Leonidas n'était pas l'ennemi et peu importe s'il s'amusait comme tant d'autres proches à gouverner sa vie.

"Tu as dis que je ne devais pas me faire passer pour plus bête que je ne le suis mais c'est bien toi qui me prend pour une idiote là." Grinça Alysse malgré toutes ses tentatives pour apaiser et adoucir sa voix. "Tu t'es déjà inquiété pour moi sans être comme ça. Y a autre chose. Inutile de nous inquiéter à deux."

La froideur de Leonidas et elle se fréquentaient depuis de longues années. La familiarité qui s'instaurait entre elles facilitait leur relation. Il connaissait sa pudeur presque maladive et elle savait qu'il se plaisait à jouer les intouchables. L'un comme l'autre avait pris le meilleur de ce que chacun avait à offrir. Alysse se réjouissait de ne pas avoir à subir les assauts de tendresse dérangeant, les contacts stressants et la condescendance dont pouvaient faire preuve certains hommes dans le milieu. Sa main se décrispa finalement pour attraper un morceau de coussin entre deux doigts vierge d'hémoglobine et le jeter sur les genoux de Leonidas. Dans son état, impossible de viser plus haut.

"C'est ton grand-père qui t'emmerde?"

Le vieux se montrait hargneux! Habituellement, la blessée évitait d'aborder le sujet, sous peine de contrarier Leo ou pire encore. Une entente tacite s'était passée entre eux deux. Il ne parlait pas de Juan, elle en faisait de même pour le grand-père. Cependant, si la situation s'y prêtait ou l'imposait, l'un comme l'autre gardait un joker, la possibilité d'aborder n'importe quel sujet. Les choses se dessinaient ainsi dans son esprit à tord ou à raison. Après tout rien n'avait été dit alors, peut être que ces règles n'étaient que celles qu'elle avait imaginé.

Un petit rire presque mesquin échappa à Alysse lorsque la permission de coller une baffe ou deux à son ex lui fut accordée. Pour une fois qu'elle avait l'autorisation de cogner sur quelqu'un, elle ne s'en priverait pas ! Après tout, cette petite peste n’avait été qu’une vendue et le sort de cette espèce de femmes ne pesait pas lourd aux yeux d’Alysse. Mais la suite la poussa dans des retranchements moins glorieux.

"J'suis pas une pute, je fais pas de strip!" Grogna-t-elle en se débattant avec son haut. Si ses mains sortaient de là idem, elle risquait de faire comprendre à Leonidas qu'elle n'avait pas compris sa vanne ! Son cerveau manquait d'oxygène pour ça ! Puis au premier élan d'air frais contre sa peau, la petite remarque lui arracha un sourire. "C'était une tentative déguisée d’éborgement pour que tu me mates qu'avec un œil."

Son habitude d'inventer des mots ne perturbait en rien sa faculté à dire des âneries. Au contraire, toutes devenaient plus stupide à chaque fois. Surtout que le regard perçant de Leonidas passait en revu le moindre de ses hématomes, arrachant un soupir mécontent à la brunette. C'était fini ? L'envie de poser la question comme le font les gamins en voiture toutes les minutes lui pesa. Son index tapotait sa cuisse en rythme jusqu’à…

"QUOI ?!" Cria Alysse en se relevant d’un bond, ignorant douleur et bon sens. Des médicaments contre la douleur ! Et pourquoi pas quelques verres d'alcool ? Avaler des produits chimiques pour se calmer et ne pas déprimer lui demandait un effort si intense qu'elle frisait la crise d'angoisse en les avalant. Alors la seule perspective d'avaler des anti-douleurs la rendait dingue. "T'as dit que tu me botterais le cul si j'arrêtais pas les médocs dans quelques semaines et maintenant tu veux me droguer !" Son index se pointa sous le nez de Leonidas dans une menace particulièrement sincère cette fois. Son amitié lui importait et se basait sur une forme de sincérité qu’Alysse jugeait précieuse. Malgré ses protestations, le savoir menacer son petit postérieur d’un bon coup de pied si par malheur elle s’égarait dans un chemin qu’elle-même refusait la rassurait. Lui si droit et implacable lui cracherait à la gueule ses quatre vérités sans hésiter. Alysse avait été éduquée avec des mots crus et des coups, non par de doux câlins et de délicats discours. Cette fermeté, elle en avait besoin.
"Si t'es mon pote t'as intérêt à tenir parole. Je serai jamais une putain de Junkie, c'est bien clair." Le nez se redressa brutalement comme un chien reniflerait l'air pour chasser sa proie. "Y sont où ? Hein ? Hein ? Vire cette merde de chez toi !"

Un poil extrême avec les anti-douleur, Alysse se prenait pour un chien policier.