JUNE AGLAE RAUDENFELD ► Emma Roberts

Pendant presque toute ma vie, je me suis faite appelée Αγλαέ Πετριδισ, ou Aglaé Petridis, si vous préférez. Je suis née le 21 juin 1997, quelques minutes après ma soeur jumelle, Δαναέ à l'époque, Jade aujourd'hui. Ma mère m'a mise au monde à Londres, dans sa résidence, mais je ne l'ai su que très récemment. Après notre naissance, Jade et moi avons été confiées à une famille grecque, les Petridis. Moïra et Athos étaient les parents les plus drôles, les plus doux, les plus généreux que cette Terre ait porté. J'avais une vie parfaite. Mes parents n'étaient pas les plus riches du pays, mais ils avaient assez pour que ma soeur et moi puissent être élevées correctement. J'ai toujours été très proches de mon père, au contraire de ma soeur qui, elle, était quasiment la meilleure amie de ma mère. J'avais des tas d'amis, une famille parfaite, un paysage de carte postale autour de moi, pourquoi changer de vie ? Je savais que j'allais devoir partir, un jour, pour poursuivre mes études à l'étranger, mais je pensais que, dès que j'en aurai fini avec les bancs de l'école, je pourrai revenir aux côtés de mes parents, et passer le reste de ma vie avec eux.

Jusqu'à la fin du Geniko Lykeio, le lycée en Grèce, Jade et moi avions réussi nos années brillamment. Nous étions les deux jumelles modèles de l'établissement, des filles discrètes, mais qui vivaient leurs jeunes années pleinement. Lorsque j'y repense, j'essaie de comprendre comment j'ai fait pour rester une jeune fille sage toutes ces années, alors que des tas de jeunes autour de moi passaient leur temps en boîte. Je pense que la présence omniprésente de ma soeur jumelle y est pour quelque chose : sans elle, j'aurai sûrement désobéit à mes parents dès la première occasion. Après l'obtention de nos diplômes, il était clair que nous devions continuer nos études grâce à nos notes qui étaient plus qu'encourageantes. Jade, elle, savait déjà ce qu'elle voulait faire : elle s'était inscrite en faculté d'arts. Je choisis de suivre ses pas, et de m'orienter vers une faculté de droit, qui me correspondait plus. Pour être totalement honnête la Belgique me déçut un peu. Je regrettais vraiment l'ambiance particulière de la Grèce. J'avais simplement choisit ce pays pour ne pas être séparée de Jade, à qui j'étais très attachée. Qu'aurais-je fait sans elle ?

L'année de nos 20 ans, une lettre de la part de Moïra et d'ethos arriva en Belgique. Ce fut Jade qui l'ouvrit en première et qui découvrit ces fichus papiers. Lorsqu'elle me les donna, mon monde s'écroula. Tout ce que j'avais cru vrai depuis ma naissance était faux, tout avait été orchestré par Moïra et Athos. Les certificats d'adoption que contenait l'enveloppe nous indiquaient que nos vrais parents étaient Mathis et Amalys Raudenfeld. Raudenfeld... Un nom qui sonnait si étranger à mes yeux, mais qui en réalité était le mien, celui que j'aurai dû porter toutes ces années. En faisant ses recherches, Jade apprit que cette famille habitait une maison gigantesque à Londres. Je ne parvint pas à comprendre son enthousiasme. Elle voulait rencontrer les personnes qui nous avaient abandonnées et refilées à une famille grecque, si loin d'eux. Lorsqu'elle m'expliqua que ça lui tenait à coeur de les rencontrer, je ne pu refuser de l'accompagner. Je pourrai tout faire pour ma soeur, il était donc clair que je ne pouvais pas la laisser affronter cela toute seule.

On prit donc le premier avion pour Londres. Etonnamment, lors de notre arrivée, les Raudenfeld se montrèrent plutôt accueillants, et nous offrirent tout ce dont on avait besoin. J'en vint à me demander si tout ça n'était pas un coup monté : pourquoi ce couple, qui nous avait rejeté lors de notre naissance et qui n'avait jamais cherché à nous retrouver se montrait-il si généreux avec nous, et nous traitait comme leur fils (qui lui avait élevé à Londres) ? Ils avaient sûrement pitié de nous, les deux pauvres grecques qui avaient vécu toutes leurs vies dans un milieu modeste, si inférieur au leur. Ils acceptèrent de nous payer Harvard si on le voulait, et c'est avec joie que je réussi à m'envoler vers Cambridge. Malgré le soutient de ma soeur, je n'ai jamais vraiment pu m'adapter à cette nouvelle vie. Tout cet argent tombant du ciel directement dans nos poches, l'absence de mes parents, l'apparition d'un frère dont j'ignorai l'existence... Ael. Il fut d'un grand soutient pour moi lorsque je me mis à sombrer, à sortir tout les soirs, à boire. Il agissait comme un grand frère le ferait, même si le lien l'unissant avec ma soeur est beaucoup plus fort. Nous décidions d'un commun accord, Jade et moi, de changer nos identités avant de rentrer à Harvard, et de se faire appeler par nos noms de naissance. Pour elle, ce fut un moyen de se rapprocher un peu plus de nos parents biologiques et d'Ael, mais pour moi un simple moyen de ne pas perdre ma soeur et de se fondre dans la masse...