DENITSA REYNOLDS ► marloes horst

Un soupir de fatigue vint s'échapper de ses lèvres entrouvertes alors qu'elle laissait sa tête se poser souplement entre ses bras croisés. Son regard bleuté tourné vers l'extérieur et ses lumières perpétuelles, elle ne put s'empêcher d'y superposer celles de sa ville natale. Aucune n'étaient comparables à Tokyo de nuit, ses néons, ses écrans publicitaires et la vie qui y bourdonne comme en plein jour. Saisissant son reflex dans la paume de sa main, Denitsa vint le caler sur son oeil avant d'immortaliser le moment. De son écran, son regard vint dériver vers les photos en tout genre qui ornaient le mur de sa chambre, des paysages - sauvages comme mondains - mais surtout des visages, des sourires, des instants capturés dans leur plus belle seconde. Si elle adorait Cambridge, le Japon lui manquait beaucoup, et ce malgré le fait qu'elle y retournait dès qu'elle en avait l'occasion. La jeune blonde n'avait pas encore réfléchi à ce qu'elle ferait et où elle irait après ses études. Au fond, c'était surement pour ça qu'elle avait recommencé un cursus en danse après son master d'astronomie, en plus de l'opportunité qu'elle avait eu d'intégrer le conservatoire de danse de Boston en parallèle de ses études à Harvard. Relevant l'heure sur le cadran de sa montre, elle vit avec résignation qu'il était déjà deux heures du matin passées et prit avec fatigue la direction de son lit.

Denitsa dit Dani est la première de la fratrie de trois que seront plus tard les filles Reynolds. Née dans la capitale japonaise d'un couple d'occidentaux, elle considère ce pays comme le sien malgré les difficultés d'intégration qu'elle a put subir au début à cause de ses origines. Baignée dans les deux cultures dès le début et fille d'une artiste, la blonde a toujours tendu vers l'art sous toutes ses formes, intéressée par la dimension subjective qui l'entoure. Dani était une enfant discrète, presque solitaire au début, loin de l'agitation de ce monde si grand dans lequel elle se trouvait. Mais au delà du masque se cachait une enfant aux milles curiosités, avide de découvertes, de nouveaux paysages, des petites beautés qu'on oublie parfois. Dani, elle voulait tout voir, tout comprendre, tout savoir. Puit insatiable, elle a finit par faire de cette envie une singularité. L'appétit devient obsession, l'obsession tourna en excellence qui elle-même vira au perfectionnisme. Denista finit par s'affirmer dans tout ce qu'elle entreprenait avec une perfection effarante. Mauvaise perdante, son caractère affirmé n'était pas à tester lorsqu'elle échouait. Quand elle échouait. Les arts restaient son seul exutoire à cette discipline qu'elle s'imposait. Qu'ils soient danse, étoiles, piano ou dessin. Même martiaux. Au final, ils n'étaient qu'un voile devant ses peurs du naufrage, de l'incompétence. Dani, au fond, n'a qu'une unique crainte : de ne pas être à la hauteur. Des espérances, d'elle-même, du monde.
Comme son père et son grand-père avant elle, elle quitte Tokyo à ses dix-huit ans pour Harvard avec un score remarquable. Si aujourd'hui elle n'en est toujours pas partie et a recommencé une licence cette année, c'est par hésitation. Flottement incertain face à ce futur arrivé trop vite qu'elle cache aux yeux des autres par une attitude assurée frôlant parfois l'arrogance. Et aussi surement un peu à cause de ses soeurs également sur le campus qu'elle aime plus que tout, malgré les conflits qui les confrontent souvent, particulièrement avec Ana avec laquelle elle semble de plus en plus en désaccord. La famille demeure une valeur inégalable et derrière ses paroles parfois un peu dures, elle ferait tout pour elles.