Appel de Capucine vers Isaiha

Capucine tripotait nerveusement le fil du téléphone, regardant parfois autour d'elle. « Pourtant, je t'ai trouvé bien... » L'étudiante se racla doucement la gorge, pas vraiment à l'aise. Elle soupira doucement mais assez fort pour qu'il l'entende. « Tout le monde change Isaiha ! Tu n'es pas une exception. Tu changeras aussi. J'ai changé tu sais... » Mais la question qui suivit la mettait au pied du mur. Elle ne se voyait pas répondre qu'elle était jalouse. Mais qu'est ce qu'elle pouvait lui répondre là maintenant ? Elle n'avait pas réfléchit à ça. Elle devait absolument détourner la conversation. « … Je... T... Tu ne m'as rien dit !! » Capucine grimaça. Mon dieu, c'était si puérile ! « T'as couché avec ?? » Elle parlait de la fille de la pub bien sur.

« Ah oui ? Tu trouves ? » demanda-t-il avec un petit sourire tandis qu’il rejetait la couette pour s’asseoir sur le lit et se lever afin d’aller regarder par la fenêtre. « Je sais que tout le monde change mais il y a des choses que j’espère, resteront inchangées chez moi » soupire-t-il à son tour, délaissant la vue sur la rue pour marcher dans sa chambre. L’appartement était désert depuis que Casey l’avait quitté. Isaiha n’en ressentait que plus ce sentiment de solitude -qui s’effaçait par miracle rien qu’en entendant la voix de son amie. « Tu m’en veux juste parce que je t’ai pas dit qu’il s’agissait d’une publicité pour un parfum ? » lâcha-t-il un peu perplexe. Pour le coup, c’était un peu facile. « Mais non ! C’était un travail Capucine, je m’amuse pas à toucher toutes les femmes que je cotoie… » s’exclama-t-il. « Et puis, je ne vois pas en quoi c’est important de savoir si oui ou non… Oh… J’ai compris, tu es encore en train de te demander si j’arrive à oublier Amanda, n’est-ce pas ? Tu t’inquiètes ? » fit-il en étant totalement à côté de la plaque. Pour lui, Capucine souhaitait s’assurer qu’il était passé à autre chose d’où le fait qu’elle joue les curieuses quant à la nature de ses relations avec cette mannequin.

« Oui, je trouve... » Capucine déglutit nerveusement. Elle crevait d'envie de le taquiner mais elle ne s'en sentait le courage. Enfin, pas tant qu'elle n'avait pas réglé ça. Capucine écoutait Isaiha, se passant une main sur le visage. En l'entendant, elle eut une furieuse envie de l'étrangler avec le câble du téléphone tellement il était à côté de la plaque. Et elle avait envie de raccrocher. « Oui... C'est ça. Je m'inquiète. Je suis morte d'inquiétude... J'espère que tu prends du bon temps... » Lança t-elle d'un ton monotone et blasé. Elle leva les yeux au ciel en secouant la tête. Vraiment, il était tellement à des années lumières d'elle. Capucine se demandait même si un panneau lumineux servirait à lui remettre les idées en place.

Prendre du bon temps, le Lowell ne savait pas trop ce que cela signifiait. Il n’était pas du genre à coucher à droite ou à gauche. Il avait besoin de se sentir bien avec la personne du coup… Depuis Amanda, il n’avait été intime qu’avec une seule femme. « Tu sais bien que ce n’est pas mon genre » dit-il en marchant dans le salon, comme si rester statique lui peinait. « Depuis Amanda, je n’ai connu qu’une seule femme, on ne peut pas vraiment dire que je prends du bon temps » reprit-il sans se douter de la jalousie de sa meilleure amie. « Je dois être un cas désespéré mais j’ai peur de retomber amoureux » soupira-t-il en se passant une main sur le visage. « Mais ça, tu sais déjà tout ça… »

Capucine en resta interdite. Elle n'écoutait même plus ce qu'il lui disait. Elle sentait une bouffée de chaleur l'envahir, agrémentée d'une horrible sueur froide. Son cœur battait à tout rompre dans ses tempes, lui donnant mal au crâne à force. Sa poitrine se serra et sa gorge se noua. Elle avait envie de violemment raccrocher ce foutu téléphone et de ne plus entendre parler de lui. Se mordant la lèvre à en saigner, Capucine inspira pour tenter de rester calme. « Ah oui ? » Sa voix s'étrangla si bien qu'elle dut se racler la gorge. « Et qui est cette... femme ? » Elle n'avait envie de savoir uniquement pour connaître sa nouvelle rivale.

Inconscient de creuser sa propre tombe, Isaiha ne doutait pas, parlant de tout et de rien avec sa meilleure amie. « Euh.. » commença-t-il comme pris d’un doute. Est-ce que c’était une bonne idée que de révéler le nom de Lily à Capucine ? Il avait l’impression de commettre une bêtise mais en même temps, il n’avait jamais rien caché à cette femme. « Elle s’appelle Lily-Rose, c’est une Lowell » termine-t-il par répondre en osant pas lui avouer que ce n’était pas une histoire sérieuse, juste celle d’une nuit. Or, le problème c’est qu’Isaiha était honteux à l’idée d’avouer à son amie qu’il avait pu simplement coucher avec une femme. « Et du coup, vous allez visiter quoi demain ? » demande-t-il pour changer de sujet… ouais pas très subtil.

Isaiha avait tenté maladroitement de changer de sujet. Il ne voulait pas parler de sa vie sexuelle avec Capucine, non pas qu’il ait des choses à dire mais c’est juste qu’il se sentait toujours honteux, comme s’il avait un contrat moral vis-à-vis de la jolie Dunster. Dès les premiers mots de cette dernière, une certaine tension s’installa en lui, le faisant froncer les sourcils. « Capucine » commença-t-il comme pour l’interrompre, comme pour lui dire qu’il ne voulait rien entendre. La surprise se jouait de la colère, lui faisant presque lâcher le téléphone quand elle commença à lui décrire ce rêve. « Arrête » marmonna-t-il en fermant les yeux. Il ne voulait rien savoir, il ne voulait rien entendre et pourtant, il l’écoutait quand même mais le problème c’est que ce n’était pas ce type qu’il imaginait mais bel et bien lui. Il se sentait misérable, en colère et… excité. « Pourquoi tu me dis ça… » lui demande-t-il à la fois triste et énervé. « J’ai pas envie qu’il te touche… je veux dire, j’ai pas envie de savoir… Ce type ne pourra pas te rendre heureuse » tenta-t-il de trouver une raison à cette colère, à cette tension. Le Lowell en vint même à jurer dans sa langue natale comme pour évacuer ses émotions négatives. « Ne recommence plus… je veux pas… Tu n’as pas besoin de lui » reprit-il en se massant le menton. Il avait envie de l’étrangler et en même temps… Mon dieu, il avait envie de l’embrasser jusqu’à ce qu’elle oublie ce type.

Capucine inspira profondément. Mon dieu, elle était tellement minable de faire ça. Ce n'était pas elle. Pourtant... Si, c'était bien elle. Elle ne pouvait pas supporter de voir l'homme de ses pensées être heureux avec une autre. Maintenant, elle en avait conscience. S'il y avait bien une personne capable de lui faire oublier Jorah, c'était Isaiha. Mais, comment lui dire ? Comment essayer de ne pas gâcher cette amitié qui lui tenait tant à cœur ? Elle prendrait un gros risque à lui dire la vérité. Elle prendrait un risque énorme parce que leur relation ne serait plus jamais la même. Elle savait parfaitement que si Isaiha s'en allait avec une autre en sachant ce que Capucine ressentait pour lui, elle le perdrait définitivement. Elle ne pourrait pas le voir en se disant qu'elle n'aurait jamais rien d'autre que son amitié. Là, Loin de lui, à des centaines de kilomètres, des milliers même, Capucine comprenait qu'elle était tombée amoureuse du Lowell. Et peut être le premier jour. Mais Amanda avait été le frein, refoulant les sentiments de Capucine au rang du déni. Mais elle n'était plus là et Capucine voulait prendre sa place. « Maintenant tu sais ce que ça fait... Je te souhaite d'être heureux avec ta nouvelle copine. Je t'envoie le sms pour te dire quand je rentre... Bye... » Et elle raccrocha brutalement le combiné sur son socle avant de s'éloigner pour regagner sa chambre. Elle avait besoin de Sofia maintenant. Et d'un whisky.

Tout s’embrouillait dans sa tête : Capucine et lui… cet homme… C’était l’enfer qui se déchainait sous son crâne. « Mais… » tenta-t-il de l’arrêter avec l’envie de lui crier qu’elle n’avait pas intérêt à retrouver cet homme. « Je n’ai pas de copine » murmura-t-il alors que déjà, la tonalité résonnait à son oreille. Isaiha jura à nouveau avant de balancer son téléphone portable dans le canapé. Il était en colère et en même temps troublé. Capucine, sa voix, ses propos… Il ne comprenait pas pourquoi cela le troublait autant mais une chose était certaine : il ne supportait pas l’idée qu’un autre homme la touche, l’embrasse, puisse la caresser, lui donner du plaisir. « Pourquoi est-ce que j’ai envie d’être à sa place… » souffla-t-il avant de prendre à nouveau son téléphone. Il devait l’en empêcher, il ne supportait pas l’idée qu’elle puisse se donner à cet inconnu.

FIN DE L'APPEL