NEPHTHYS HASTINGS ► shanina shaik.

« Je n'ai pas envie de déménager, maman. » Depuis les trois derniers jours, Nephthys se répétait sans cesse. L'unique raison était l'annonce de ce déménagement dans un pays inconnu : les États-Unis. Ce qu'elle connaissait, c'était l'Égypte. Son pays natal. Celui qui l'avait vu naître, entendu pousser son premier cri et ses premiers pleurs. « Tu sais bien que nous n'avons pas le choix, ma puce. » Comme toujours, c'était ce que sa mère lui répondait. Ils n'avaient pas le choix. Pourtant, la vie était pleine de choix. Décider ou pas de quitter un lieu, c'était un choix. « Mais tous mes amis sont ici. » Sa mère devait en avoir marre de l'entendre se plaindre depuis trois jours. À répéter les mêmes mots sans arrêt. La première journée, Nephthys avait fait une crise brisant un vase sur son passage. La deuxième, elle avait donné le traitement du silence à ses parents, s'adressant à Osiris, sa petite sœur seulement. Le troisième jour, elle avait commencé à se plaindre et poser des questions à ses parents. « Et j'adore notre maison. » Sa mère comprendrait. L'Égytpe aussi était sa maison. Depuis toujours. « Je sais et moi aussi, Nephthys. Mais je te l'ai dit... » « Nous n'avons pas le choix, je sais. » dit-elle en coupant la parole à sa mère. Sauf qu'elle ne comprenait toujours pas. Si sa mère aimait cet endroit alors pourquoi devaient-ils déménager ? Pourquoi devaient-ils quitter cet endroit si cher à sa mère ? Et elle, par la même occasion. « Si tu sais pourquoi tu n'arrêtes pas de me poser la même question ? » Malgré son jeune âge, Nephytys lança un regard noir à sa mère. Visiblement, elle ne comprenait pas. « Si tu sais que ma vie est ici et mes amis pourquoi tu me poses la question ? » Cette remarque fit sourire sa mère. « Aide-moi à faire des boîtes, Nephthys. » Hors de question. La jeune fillette secoua la tête en regardant sa mère. C'était un gros non. Elle ne voulait pas l'aider. Elle ne voulait pas faire des boîtes. Elle ne voulait pas mettre ses affaires dans des boîtes. C'était un non catégorique. « J'en ai pas envie. » dit-elle d'une petite voix. Puis, sans laisser le temps à sa mère, Nephthys tourna les talons et quitta la maison. Une petite fillette l'attendait à l'extérieur. Shani. « C'est toujours en cours ce déménagement ? » Nephthys répondit en donnant un coup sur un ballon qui traînait en espérant que cela traduise ses paroles. Que cela fasse comprendre à Shani que oui, ce déménagement allait arriver. Peu importe les circonstances. Elle partait. « C'est pas grave. Je sais qu'on restera amis toi et moi. » Shani était naïve tout comme Nephthys à cette époque.

Des pleurs. De sa chambre, Nephthys pouvait les entendre. Ce n'était pas Osiris parce que sa petite sœur dormait puisqu'elles partageaient la même chambre. Qui pleurait alors ? Curieuse de nature, Nephthys se leva de son lit afin de s'aventurer dans cette maison encore inconnue à ses yeux. Cela faisait deux ans qu'elle y vivait et la jeune fillette considérait toujours celle-ci comme une inconnue. Il y avait des recoins de cette maison qu'elle n'aimait pas. Le grenier en était la raison première. Lorsque sa mère lui demandait de s'y rendre pour aller chercher un livre, Nephthys figeait sur place. Le grenier était le dernier endroit au monde où elle désirait se retrouver. Descendant les escaliers de la maison, elle constata un fuseau de lumière qui provenait du salon de la maison. Elle pouvait aussi entendre des voix. Celles de ses parents. La personne qui pleurait était sa mère tandis que son père regardait dans le vide, un verre à la main. Du scotch. Nephthys reconnaissait la couleur. Ses parents discutaient en voix basse. Ce qu'ils ne savaient pas était que Nephthys était là. À écouter à la porte. Elle savait. Savait que son père était malade. Un cancer du poumon. Il l'avait appris quelques heures avant de rentrer pour le repas. Son père ET cancer du poumon? Impossible. Nephthys ne l'avait jamais vu fumer. Pas la moindre cigarette ou même cigare. Son père était un homme en forme, du genre à passer deux heures dans une piscine à nager. Du genre à participer à des marathons. Désirant retourner à sa chambre, le plancher craqua sous son pied faisant figer la petite Nephthys. « Nephthys, tu n'es pas couché ? » demanda sa mère après s'être levé. Les larmes avaient séchées sous ses yeux. « J'avais soif. » Mensonge. Elle savait. Sauf qu'elle ne désirait pas le dire à ses parents maintenant. Demain lorsque Osiris jouerait à l'extérieur.

Les mots défilaient devant ses yeux tandis qu'elle répétait ceux-ci dans sa tête. Pour une raison inconnue, Nephthys voulait savoir si elle était en mesure de se rappeler un texte sans avoir les mots devant ses yeux. Depuis près de 24 heures, elle lisait la même page sans vraiment en avoir marre. C'était ce qui était bien avec les bouquins. Lorsqu'il était intéressant, ce n'était pas ennuyant de lire constamment la même page. « Tu lis encore la même page ? » La voix de sa mère interrompit la lecture de Nephthys. Pas grave. La jeune adolescente était certaine de l'avoir mémorisé au complet. « Maman, je crois avoir mémorisé la page complète. Prends le livre et je te dis. » Sa mère s'approcha de Nephthys qui lui tendait le livre pour prendre celui-ci tandis que Nephthys se préparait mentalement à tout lui dire. « If you are interested in stories with happy endings, you would be better off reading some other book. In this book, not only is there no happy ending, there is no happy beginning and very few happy things in the middle. This is because not very many happy things happened in the lives of the three Baudelaire youngsters. » Et elle continua jusqu'à la dernière phrase de la page. « Wow. Tu l'as vraiment fait ! Je suis fière de toi. » Sa mère, Jamila, appela son mari, Alistair pour qu'il puisse être témoin de cet exploit de leur première fille. Ce n'était pas n'importe quoi aux yeux de ses parents. C'était exceptionnel, dans un sens. Lorsque la silhouette de son père apparut dans l'encadrement de la pièce, Jamila demanda à Nephthys de recommencer. L'unique raison pour laquelle Nephthys le fit, c'était pour que ses parents soient fiers d'elle. Alors, elle recommença. Du début jusqu'au dernier point de la page. Ce qu'ils ignoraient était que Nephthys était doté d'une mémoire photographique.

30 minutes. Il arrivait dans une demi-heure. Tout allait bien. Elle n'aurait qu'à lui dire cette fameuse nouvelle et ils décideraient ensemble. « Tout va bien aller, Neph. Ce n'est pas la fin du monde. » disait-elle à répétition en regardant son reflet dans le miroir. Le seul problème était que Nephthys n'y croyait pas. Elle ne croyait pas en ses mots. Tout allait mal. Elle était enceinte après tout. Sa vie allait changer, mais l'envie n'était pas là. Avoir un enfant n'était pas dans ses plans. Sa carrière était plus importante. Son futur par la même occasion. Les bébés, il fallait s'en occuper jusqu'à l'âge adulte. Même après parce que, parfois, les enfants étaient incapables de couper le cordon ombilical. Plus elle y pensait, plus elle stressait. Sans réellement le vouloir, Nephthys éclata en sanglots. Elle était foutue. Nephthys ne voulait pas être maman. C'était son pire cauchemar, en réalité. Neph resta dans la salle de bain une bonne vingtaine de minutes jusqu'à annulé à la dernière minute son ''rendez-vous'' avec lui prétextant qu'elle ne se sentait pas bien. Il l'appela. Elle ne répondit pas. Le traitement du silence à partir de maintenant. C'est en panique qu'elle appela Billie. Sa cousine, son âme sœur. Elle devait l'aider. Lui faisant promettre de ne rien dire à personne. C'était sa première année à Harvard. Pourquoi devrait-elle gâcher son futur pour un enfant ? Nephthys savait qu'elle regretterait de ne rien dire, mais c'était mieux ainsi. Pour elle.