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WHO THE FUCK DO YOU THINK I IS ?
✖ ambitieuse ✖ cachottière ✖ active ✖ excentrique ✖ amusante ✖ souriante ✖ libérée ✖ bavarde ✖ câline ✖ charmeuse ✖ curieuse ✖ joueuse ✖ débrouillarde ✖ petit génie ✖ enjouée ✖ dynamique ✖ instable ✖ énergique ✖ déterminée ✖ audacieuse ✖ loyale ✖ maline ✖ arrogante ✖ passionnée ✖ pétillante ✖ séduisante ✖ franche ✖ agressive ✖ désorganisée ✖ menteuse ✖ sûre de soi ✖ insouciante (ou presque) ✖
- never heard of me?:
- Le 12 février 2011
La caméra était installée sur ton bureau. Toi, t’étais dans ta chaise, en train de jouer avec une de tes tresses : un signe de nervosité, rare chez toi. Tu regardais le retour de la caméra. Tu étais pâle. Tu n’en revenais pas, tu allais le faire. Mais tu en avais besoin. Lâcher tout ce que tu avais sur le coeur. Ton histoire. Ton passé. Pour mieux aller de l’avant, tu te disais. Avant d’aller à Harvard. Mais c’était juste pour te sentir moins coupable, au fond. Tu ne pouvais pas le dire à une personne vivante. Mais une caméra -selon toi- ça ne cause pas. Alors elle risquait pas d’aller balancer tout tes secrets, si ? T’as posé une main sur ton coeur, les yeux fermés et t’as inspiré profondément. Tu peux le faire. Tu as fixé la caméra, et tu as commencé à parler.
« Salut. J’m’appelle Kehlani Ortiz, j’vais sur mes 18 ans et je suis Américo-Jamaïcaine. » Ça avait l’air ridicule de dire ça, mais si jamais un jour, t’avais Alzheimer, au moins, tu saurai qui tu étais. « J’fais ça, parce que je dois tout dire. J’peux plus continuer comme ça. J’arrive plus à dormir sur mes deux oreilles. » Sur la petite table qui était à côté toi, il y avait un joint, que tu avais pris le soin de préparer avant. Au cas où. Tu l’as porté à ta bouche et tu l’as allumé. La fumée s’échappait de tes narines tandis que tu t’enfonçais un peu plus dans ta chaise. « J’avais tout pour moi. Une famille, de l’argent, des amis. Papa était à la tête d’une multinationale. On avait une belle villa, en plein centre de Kingston. Le seul truc qui pouvait faire chier, c’était que ma mère était morte, quelques mois après ma naissance. Mais Papa a vite fait de la remplacer par une poupée gonflable blonde. Une vraie pimbêche, cette fille. » T’as roulé les yeux en pensant à Ella, la chère et tendre de mon père. T’étais à peu près certaine d’une chose : elle était là pour le fric qu’on avait. C’était pas possible autrement. Ella n’en avait rien à foutre de toi et c’était réciproque. Tant qu’elle faisait pas de mal à ta famille, tu la tolérais. « Mais mes soupçons se sont confirmés. Elle n’était là que pour l’argent. Elle est partie quand Papa est décédé, et qu’elle s’est rendue qu’il m’avait tout légué, et rien à elle. » T’as eu un petit sourire en coin, en te remémorant la tête qu’elle avait fait lorsque le notaire avait lu le testament de ton père. Elle avait hurlé et sortit de la pièce. Ce jour-là, malgré la tragédie qui venait de surgir, t’avais explosé de rire. « Bref, j’suis pas là pour parler de la bimbo. J’en étais où encore… » Une autre taff et tu étais repartie. « Ah, oui. J’ai toujours été une petite-fille à papa. Un modèle exemplaire de gosse dans la haute société. Polie, jolie, intelligente. Tout ce que des parents pourraient rêver d’avoir. Seulement… » T’as posé tes coudes sur tes genoux, approchant ta tête de l’objectif. « C’était pas ce que je suis vraiment. On m’avait conditionné à être comme ça. Un peu comme les stormtroopers, dans Star Wars. À jouer les petites filles parfaites. Vous allez me dire 'elle est difficile, elle a tout ce qu'elle veut dans la vie, et elle se plaint, la meuf.' Ouais, je sais, mais pour moi, ça devenait une vraie torture. Alors, évidemment, un jour, j’ai commencé à me ‘rebeller’. J’ai fait le mur quoi. Vers mes 14 ou 15 ans, je pense. J’étais assez maligne pour croire à mon père que je m’enfermais dans ma chambre parce que j’étais de mauvaise humeur. Comme toute personne qui me connait bien, il ne faut pas me déranger dans ces moments-là. Mais à partir de ce soir-là, tout s’est enchainé, super vite. » T’as passé ta langue sur tes lèvres, tu souriais. T’as tiré sur le bédo, et pendant le temps d’une seconde, tu te revoyais en Jamaïque, avec eux. « J’ai rencontré trois jeunes, ce soir-là. J’étais sur le point de me faire agresser. J’étais jeune et faible. Et ils ont débarqués de nul part pour m’aider. Y’avait deux garçons et une fille. Ils avaient entre deux et trois ans de plus que moi. Et dans le groupe, y’avait Priam. J’crois que c’est inutile de vous dire que j’ai directement craqué pour lui. » Priam, c’était vraiment le type de garçon dont tu étais folle. Dont tu avais des milliers de photos sur ton téléphone. Grand. Musclé. Le teint hâlé. Les cheveux et les yeux noirs comme le jais. Une barbe de trois jours. Un regard perçant. Aucune fille ne pouvait résister devant tant de… charme. Tu te souviens très bien de la première fois où tu l’as vu. Ton coeur a raté un battement. Dans ta tête, tu n’aurais jamais pensé qu’un type comme lui puisse s’intéresser à une fille… comme toi. « J’ai tout de suite sympathisé avec eux. J’ai jamais compris comment ils ont la patience de rester avec moi, au tout début. J’faisais encore partie de le ‘haute’. Puis au fur et à mesures des semaines, des soirées que je passais avec eux -parce que oui, mon père ne s’en rendait pas compte, il pensait que j’étais juste en crise d’adolescence- j’ai commencé à faire ressortir le vrai moi. Quelqu’un d’excentrique, d’amusant, dynamique. Je chantais, je dansais tout le temps. Je faisais la fête h24. Je profitais de ma vie, c'était le rêve. Mais ça, c’était juste les bons côtés de la choses. Mais y’en avait des moins bons. » T’as regardé ton joint, que tu avais déjà presque fini de fumer. Putain…Ça part vraiment vite, cette merde. Pour le prix que ça coute, il devrait être un peu plus fort. « J’ai commencé à boire. Je rentrais bourrée à la maison, je n’avais que 15 ans. Puis à fumer des cigarettes. Et j’ai fini par rouler des joints. » Tu t’es rappuyée dans le fond de la chaise et t’as écrasé le bédo dans le cendrier. T’as repris quelques tresses et t’as joué avec, les sourcils froncés. « Mais le pire là-dedans, c’est que personne ne s’en rendait compte. Ni mon père, ni les nounous. Personne. Tant que j’étais première de classe -ce que j’ai été toute ma vie-, c’était bon. Papa voulait que j’aille étudier à Harvard, donc fallait que je le sois. Bref, c’est pas ça l’histoire. Alors, j’me suis raccrochée à ces trois jeunes là. J’me suis raccrochée à Priam. On était tous les deux de plus en plus ensemble. On se collait. On s’aimait, on sortait ensemble, sans vraiment rendre la chose officielle. Et puis le mois de juillet qui a suivi, le drame est arrivé. J’avais 16 ans. » Tu revois encore l’écran de ton téléphone s’allumer. Le numéro était inconnu. C’était ta belle-doche. Ouais, t’avais pas trouvé nécessaire de l’enregistrer dans ton téléphone. T’as baissé la tête, les mains liées ensemble. « J’me souviendrai toujours de cette soirée. On était tous dans un squat, j’étais sur les genoux de Priam qui était occupé à m’embrasser le cou, alors que je fumais du shit. Et Ella, ma belle-mère, m’a appelé pour dire que mon père était à l’hôpital.» T’as réprimé un sanglot avant de fixer la caméra. « Il avait pas survécu à l’attaque cardiaque. » T’as marqué une pause en regardant les vagues s’écraser sur la plage, par la fenêtre. Il n’avait clairement pas été le père dont tu rêvais. Mais il restait tout de même ton Papa, ta seule famille de sang. Et il venait de t’abandonner. Le regard dans le vide, t’as continué ton histoire. « J’ai pas eu le courage d’aller à l’hôpital. J’ai juste pleuré à chaudes larmes pendant une dizaine de minutes, je savais que plus jamais, ma vie ne serait la même. J’me suis piquée pour la première fois, cette nuit-là. C’était de l’héroïne. Et j’ai fait ma première fois avec Priam, complètement défoncée. Comme jamais. » Malgré tout, tu te souviens de cette sensation. Et parfois, t’aimerais bien la revivre. « Malheureusement, ça n’a pas été qu’une fois. J’supportais pas le fait de ne plus avoir de famille, alors j’en prenais de plus en plus. J’étais au lit tous les jours avec Priam. J’suis devenue accro aux deux, en très peu de temps. C’était ça le plus dangereux. » Et là, t’as failli vomir. C’était cette partie-là, que tu avais peur de raconter. C’était cette partie-là, qui te pesait sur la conscience. C’était à cause de cette partie-là, que tu n’arrivais plus à te regarder dans un miroir. « Quand… » T’as dégluti, tu faisais une drôle de grimace. Dire ce qu’il s’était passé, à voix haute, était une chose, extrêmement, extrêmement dur. « Quand j’étais sous héroïne -et qu’en plus, je buvais de l’alcool-, j’étais incontrôlable. Je n’avais plus le sens de la réalité. Mais c’était ça que j’aimais. » Ta respiration commençait à devenir rapide. Trop. Tu ne voulais plus. Tu n’y arriverais pas. À le dire. T’es vite partie chercher une bouteille de rhum dans le frigo et t’en a avalé quelques bonnes gorgées d’un coup. T’as attendu une minute ou deux, histoire que ça fasse effet, et t’es revenue t’asseoir face à la caméra. Tu devais le dire d’un coup, ou jamais tu ne le ferais. Alors t’as fermé les yeux, et t’as tout déballé. « C’était quelques mois après la mort de Papa. Le meilleur ami de Priam -Nolan-, il amenait à chaque fois avec lui. Il le posait sur la commode. J’ai toujours pensé qu’il était vide, qu’il le prenait juste pour impressionner d’éventuels agresseurs. Et j’ai joué avec. Je faisais la maline, comme à mon habitude. J’l’ai pointé sur Priam, le flingue, et j’ai appuyé sur la détente. Sauf qu’au lieu de faire silence, il y a bien eu une détonation. » T’as pas pu t’en empêcher. T’as commencé à pleurer. Toutes les larmes de ton corps. Tu pensais pas que t’en étais encore capable. Tu t’étais rejouée la scène, en même temps que tu la contais. Ça t’avait fait mal, évidemment. Tu avais accidentellement tué ton petit copain. T’avais que 16 ans quand ça s’est passé, t’étais qu’une gosse. T’avais foutu ta vie en l’air, pile à ce moment-là. Mais… l’avoir dit tout haut, ça t’avait soulagé. Plus d’un an et demi que tu trimballais ce secret. Et ça te faisait mal, de penser ça. Comme si tu n’étais plus coupable de ce que tu venais de faire. T’avais l’impression de manquer de respect à Priam. Mais tu ne pouvais plus modifier le passé, tu devais vivre avec ça. Vivre avec ce que tu avais fait. « Évidemment que les autres savaient que c’était un accident. Mais ils n’ont quand même plus voulu me voir -ce que je comprends-. Ils se sont débarrassés du corps, sans rien dire, à personne. Il n’y a qu’eux et moi, qui savent ce qui lui est arrivé. Priam n’avait aucune famille. Mais je leur fais confiance. Jamais ils ne me balanceront… Je les ai payés pour ne pas le faire. » Il fallait que tu sois certaine qu’ils ne disent rien. Sinon, ton avenir était bel et bien fichu. Et t’étais quelqu’un de beaucoup trop ambitieux pour le gâcher. C’était une chose de te bourrer la gueule et de te défoncer, mais personne n’en savait rien. Ça ne figurait pas sur ton dossier scolaire, qui était impeccable. T’avais réussi à cacher jusque là que tu te droguais, en étant toujours impeccable au lycée et à tes cours de danse. Tes lettres de recommandations, tu les avais déjà. Ça faisait des années que tu préparais ce dossier. Si jamais quelqu’un venait à l’apprendre -ou à le dire-, tu pouvais dire adieu à Harvard. Or, Harvard, c’était le rêve de ton père et le tiens. Il t’avait dit que tu pouvais choisir les cursus que tu voulais. Mais il souhaitait que tu y ailles. Et c’était la dernière chose que tu voulais faire pour honorer sa mémoire. « Comprenez-moi. Il faut que j’entre à Harvard. C’est une question de principe. De vie ou de mort. Si j’y vais, ça veut dire que je peux aller de l’avant. Que je peux démarrer une nouvelle vie, loin d’ici. Et je ne pouvais laisser personne, oh non, personne, le dire à la police. Même si au pire, je ne risquais que quelques années de prison, en étant involontaire -d’accord, avec circonstances aggravantes-, je pouvais dire au revoir à l’école de la Ivy League. Dire au revoir à un rêve de gosse. J’ai bossé pour y arriver. J’peux pas prendre ça à la légère. Tiens, d’ailleurs… » Tu t’es penchée sur une pile de lettres. Sur le dessus, il y en avait une, cachetée avec l’emblème d’Harvard. Tu l’as prise dans tes mains frêles et brandis devant la caméra. Une grande inspiration, et tu l’as déchirée. Après avoir lu les quelques premières lignes, tu as re-déposé lentement la lettre sur la table. « J’suis reprise. »
T’as coupé la caméra, encore sous le choc de ce qu’il venait de se produire. D’une part, tu avais enfin exprimé tout haut ce qui te hantait depuis plus d’un an. Et de l’autre, tu venais d’être acceptée à Harvard. Tu l’espérais si fort, tu étais presque certaine d’y aller, vu ton excellent dossier. Mais ces dernières années, tu avais caché un secret très lourd. Tu l’avais caché du mieux que tu pouvais. T’avais payé des pots-de-vins. Au fond, tu avais peur qu’ils le découvrent et te refusent. Mais non. Tu allais suivre des études danse/musique à Harvard. Tu allais changer de vie. Doucement, tu as retiré la carte mémoire de l’appareil. Tu as regardé ce petit bout de plastique, qui à présent, détenait une bombe. Instinctivement, tu as touché le pendentif que tu as hérité de ta mère, qu’en presque 18 ans, tu n’as jamais quitté. Tu l’as ouvert. Tu y as glissé la carte mémoire. Et tu l’as refermé.
Ça fait maintenant un petit bout de temps que tu es arrivée à Boston. Tu as des amis, là-bas. Des amis qui sont devenu ta famille. Tes études, tu les réussis brillamment. Tu aimes ce que tu fais. Mais, tu ne peux pas dire que tu es devenue un ange, loin de là. Tu baignes toujours dans la connerie. T’en as fait, avec des potes. Avec Koby. Vous avez cambriolé une petite bijouterie. Après que le chef de meute aie brisé la vitre, t’as été la première à sauter à l’intérieure, à motiver les autres et à voler. T’as pas fait ça pour les sous, les sous, t’en as. Non, c’était juste pour le fun. Seulement, tes potes te reproche d’être un peu trop à l’aise avec ce que tu avais fait. T’étais la seule de la bande à encore dormir sur tes deux oreilles. Tu t’en foutais, par rapport à ce que tu avais fait avant, c’était rien pour toi, un cambriolage. Comme un jeu. Un truth or dare. Mais bon, tes amis t’aiment comme tu es, ils ne t’en veulent pas. Ils t’acceptent comme ça. Tu continues à boire, tu continues à fumer, et pas que de la cigarette. La seule chose que tu peux vraiment affirmer, c’est que t’as arrêté l’héroïne. Tu fais tout le temps la fête, t’en as besoin. T’enchaîne les conquête, c’est comme ça que t’as remplacé l’héroïne. Par le sexe. L’amour, ça n’existe plus pour toi. Mais bon. Après tout, tout ce qui compte, c’est le moment présent.
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