Le feu & la glace (Bambi)

Arrivée tout récemment sur le campus, je commençais tout juste à prendre mes marques. J’aurais pu aménager avec l’une de mes sœurs, mais ma bonne intégration passait aussi par la vie à la résidence. Rencontrer les filles de la confrérie. J’avais donc décidé d’habiter là bas. Il y avait des chambres de libres, Athéna, la présidente m’avait expliqué que le VP Eliot avait rappelé ses troupes et qu’il avait poussé ses membres, hébergés temporairement à la CH, à déménager précipitamment après Halloween. Donc, des places s’étaient libérées et c’était ainsi que je m’étais retrouvée avec Bambi. La demoiselle et moi apprenions donc peu à peu à nous connaître et c’est en rangeant quelques affaires dans le dressing que je restais scotché, découvrant avec stupéfaction l’originale garde robe de ma coloc. Lorsqu’elle sortit de la salle de bain, quelques minutes après, je pris un air grave : « Bambi, faut qu’on parle sérieusement toi et moi. » J’ouvris alors la penderie et je me plantais devant elle : « Tu m’expliques ça ? T’as des problèmes d’argent ? T’es obligée de vendre ton corps c’est ça ? » questionnai-je avec sérieux et inquiétude devant les tenues coquines suspendues à des cintres que je désignais d’un index accusateur.

Jusqu'ici, Bambi avait eu pour colocataire une nouvelle jolie Eliot du nom de Lisa-Rose mais cette dernière ayant récemment déménagé en ville, il y avait eu toute la place du monde pour accueillir une nouvelle membre de la Cabot House. Cassie et l'italienne apprenaient encore à se connaître et à trouver leurs rythmes respectifs, sachant que du côté de la brunette, elle bossait ses cours jusque tard dans la nuit, quand elle n'était pas en garde à l'hôpital pour ses stages obligatoires ou à son petit job étudiant dans un centre pour enfants. Pourtant, malgré leurs divergences de caractères et de rythmes la sicilienne restait confiante vis à vis de leur entente, car elle trouvait sa nouvelle roomate adorable... et ce même lorsqu'elle l'interpella au sujet du dressing dès sa sortie de la salle de bain. Encore vêtue d'une simple serviette, cheveux trempés, Bambi éclata de rire tant Cassie se faisait des films à propos de ses tenues. Choute, t'as jamais vu des costumes coquins ? Je fais pas le tapin j'te rassure de suite !! Moi jamais de la vie tu déconnes...

Ma question provoqua aussitôt l’hilarité de Bambi, ce qui me rassura un peu. Si elle avait été une vraie travailleuse de la nuit, ma coloc n’en aurait pas ri si facilement. D’ailleurs, lorsqu’elle me répondit ce fut pour finir de me rassurer sur ce point. Elle s’amusa néanmoins de ma surprise en évoquant ces tenues, qu’elle qualifia de costumes coquins. « Comment ça ? » fis-je avec un petit air innocent mon regard se reportant sur les déshabillés suspendus devant moi. Ma garde robe à moi était tellement plus austère. Trois ans au milieu de religieuses ça vous coupait complètement du monde de la mode et encore plus de la mode qui s’apparentait à la séduction alors j’avais beaucoup, beaucoup à apprendre sur ce domaine. « Tu portes vraiment ces choses ? » demandai-je en attrapant l’une des tenues, une mini blouse blanche de doc, version sexy et très décotée…

Règle numéro une : ne jamais oublier que Cassie et elle étaient définitivement différentes. Bambi le comprit rien qu'à sa première question, sans parler de la deuxième. L'italienne s'approcha, pas choquée pour trois ronds de serviettes, partant du principe que s'il fallait qu'elle l'éduque un peu à ce sujet, même si ce n'était qu'avec des mots, alors soit. Eh bien pour plaire des fois avoir juste une robe classe c'est pas... marrant on va dire. Faut que l'occasion s'y prête, que ce soit un jeu. Un jeu de rôles, voilà ! Ça plait vachement aux mecs j't'assure ! commença-t-elle petitement histoire de ne pas définitivement choquer sa roomate. Il valait mieux ne pas plaisanter avec ça, surtout si elle avait eu une éducation hyper stricte, ce qui ne faisait pas un pli. Et bien sûr que je les porte ! Ça te choque vraiment ? Pourtant y'a pas de cuir ou de fouet...

 Moi qui trouvais qu’une jupe qui remontait un peu trop au dessus du genou ou un chemisier dont les premiers boutons laissaient entrevoir un décolleté un peu trop plongeant, c’était indécent, là, avec le dressing de miss Bambi, j’étais servie. C’est la mini blouse blanche que j’avais attrapé, la scrutant sous toutes ses coutures en me demandant vraiment si ma coloc avait déjà porté ce truc. Elle s’approcha, presque amusée de ma candeur, m’expliquant combien ce genre de tenue était drôle, et combien les garçons appréciaient ce genre de chose. Quand elle évoqua le cuir ou les fouets, ma mâchoire tomba de surprise. J’en lâchais la tenue sur le lit de la jeune femme avant de soupirer : « En fait, je crois que je vais rester vierge jusqu’à la fin de mon existence… » S’il il fallait jouer au sado mado pour plaire, j’étais mal barrée, je pouvais faire vœux de chasteté pour le reste de ma scolarité.

Bambi ne donnerait jamais dans le cuir ou le fouet, fallait quand même pas déconner ! Mais les tenues coquines pour des jeux de rôles marrants, pourquoi pas. Cela permettait de sortir du quotidien, de mettre du piment. Non pas qu'elle ait eu de relation suffisamment longue pour connaître l'ennui mais justement l'italienne fuyait la routine et l'ennui. Apparemment, sa jolie colocataire allait la prendre pour une vile pécheresse et si elle laissa échapper un petit rire discret en voyait Cassie lâcher la tenue sur le lit, elle ne s'en moqua pas outre mesure. Ce n'est pas parce que moi ça m'arrive de me déguiser que tout le monde le fait OU que je le fais tout le temps. Ça doit rester un jeu occasionnel sinon c'est pas drôle expliqua-t-elle ensuite. Si tu m'expliquais plutôt ce qui te choques ?

 Je regardais un peu dépité la tenue, lâchée sur le matelas de ma coloc. En fait l’étalage des tenues de mon amie pour « jouer » cela me faisait prendre conscience de ma nullité dans le domaine. Trois ans avec des bonnes sœurs dans un pensionnat, et voilà mon sex appeal réduit à néant. J’étais la reine de –je vous salue Marie- mais à part ça… Mes prunelles se reportèrent sur Bambi qui reprit alors, assurant que ce n’était qu’occasionnel, que tout le monde ne se prêtait pas à se petit jeu de déguisement qui plus est. « T’as eu beaucoup de… partenaires qui aimaient ça ? » questionnai-je alors, me mordant la lèvre aussitôt, m’en voulant presque de me montrer curieuse sur ce sujet –tabou- Mais la jeune femme avait capté mon malaise, et elle me demandait ensuite de clarifier. « C’est pas que ça me choque c’est que… » J’hésitais sur les mots à employer pour ne pas vexer mon interlocutrice. « Ce n’est pas très catholique dirons nous. Et j’ai passé ces dernières années dans une pension tenue par des nonnes, alors autant te dire que je suis davantage habituée aux scapulaires qu’à ce genre de déguisements… »  

A la question de Cassie, l'italienne s'empressa de faire un "non" de la tête. C'était la pure vérité. Si quelques uns de ses amants avaient droit à ce genre de déguisement, Bambi en faisait pas une généralité. Ce ne serait aucunement drôle et la répétition n'était pas dans ses cordes justement, la routine l'ennuyant profondément. Si je suis en confiance avec la personne ouais ça peut arriver. Mais sinon, je n'offre pas ce spectacle au premier venu ! répondit elle sans l'ombre d'une gêne, ayant confiance en sa roomie pour garder ce genre d'information pour elle justement. La gêne venait surtout de Cassie justement, et l'explication ne tarda pas à tomber, nette comme le couperet de la guillotine sur la nuque de cette pauvre Marie-Antoinette. Cette fois ci, bien loin de rire, la brunette fut pensive, comme si elle comprenait où la blondinette voulait en venir. C'est sûr que ça ne l'est pas, mais je comprends pourquoi cela t'as surprise. Ma mère est très catholique et pratiquante alors je comprends... mais c'est sûrement à cause de sa dureté à ce niveau que j'ai envie parfois de me lâcher.

J’étais étonnée, et un peu mal à l’aise. Déjà que le sujet –sexualité- avait le don de me faire perdre mes moyens, mais alors là, devant ses costumes indécents, j’étais comme une gosse de cinq ans qui découvrait comment on faisait les bébés. Heureusement, ma roomie répondit à mes interrogations sans se vexer et avec patience. Elle m’expliqua que ses déguisements étaient une sorte de –privilège- pour ceux en qui elle avait confiance. « Je suis désolée Bambi… Je dois passée pour la petite coincée du coin… » m’excusai-je après lui avoir confié sortir d’une pension catholique tenue par les nonnes. « Je… Je suis vierge. » ajoutai-je alors, d’une toute petite voix, histoire que mon amie ne se sente pas juger par mon étonnement d’un rien. Même un string aurait pu me faire monter au plafond tellement mon expérience en la matière était limité. « Et toi, tu as souvent… Enfin je veux dire, tu as eu beaucoup de petits copains ? » demandai-je, en hésitant sur les mots adéquats pour désigner les potentiels conquêtes de ma jolie coloc.  

Sentant que la conversation était loin de mettre à l'aise Cassie, l'italienne eut la bonne idée de ranger soigneusement les deux costumes précédemment sortis par sa roomie adorée dans son dressing afin qu'elles puissent continuer à avoir cette conversation sans qu'un quelconque visuel gênant ne puisse interférer. Ceci étant, les excuses de la jolie blonde, une fois qu'elle fut à nouveau tournée vers elle, l'étonnèrent au plus au point. Pourquoi tu t'excuses ? Je veux pas que tu t'excuses moi, et surtout pas d'être vierge... au contraire, ça veut dire que t'as pas encore trouvé la bonne personne à qui donner ton trésor ! Faut pas croire... j'ai un côté coquin, mais je suis une indécrottable romantique avant tout confia-t-elle à son tour, s'emparant de la main de Cassie pour la rassurer. J'ai perdu ma virginité il y a trois ans... et avant, je n'avais eu aucun petit copain. Bon ça a été une histoire désastreuse et elle m'a détruite, ce qui fait qu'aujourd'hui j'ai du mal à faire confiance donc d'une certaine façon j'ai eu plus de partenaires d'une nuit, peut-être parce que je suis perdue. Parce qu'on m'a brisée. Tu vois ce que je veux dire ?