Le temps des reproches (Nina)

 Je spéculais, tout prenait des proportions monstres et la moindre de ses paroles était interprétée comme un aveu de culpabilité de mon côté. Si elle lâcha l’affaire sur mes mensonges, elle renchérit néanmoins sur mes accusations suivantes. « Ha donc tu avoues ? C’est quoi ton problème avec moi ? C’est parce que j’ai gagné notre pari de cet été ? T’as pas supporté de devoir me servir des cocktails au bord de la piscine ? » De plus en plus absurdes dans mes accusations. On aurait pu en rire, si j’avais pas eu cet air sérieux, furieux, si y’avait pas cette lueur démente dans mes yeux. Elle voudrait que ce soit une blague, m’accusant de manipulations. « Je te dirais rien sur Feryel et moi, je sais très bien que la moindre info sera amplifiée, déformée et retournée contre moi. Tu veux me faire tomber, c’est bon je l’ai compris. Vous ne m’aurez pas comme ça Nina. » J’entrevis même la potentialité qu’elle visait ma place, que c’était son mobile pour agir contre moi dans ce complot. Elle s’en défendit, sans me convaincre, me soufflant ensuite que j’allais la perdre. « Me prends pas par les sentiments… » Mon regard accrocha le sien un instant, un voile de tristesse apparut alors dans mes yeux. « De toute façon, je t’ai déjà perdue. » Je fis d’ailleurs un pas en arrière : « Je repousse personne, c’est vous tous qui m’y obligez… Je peux pas m’entourer de gens en qui je ne peux avoir confiance, des traites qui complotent contre moi… T’as choisi ton camp Nina. » Ca sonnerait presque comme un au revoir et c’était horriblement douloureux. Un peu comme quand j’avais du quitté Lucky dans cette ruelle. Y’avait ce truc dans ma tête qui me criait de les éviter, tous, mes ennemis, et inexplicablement, ça me tordait le bide de devoir le faire…

Je cherchais, je décortiquais, me repassant mentalement les évènements qui avaient précédé sa trahison. Etait-ce mon attitude estivale ? Lorsqu’en bon tyran j’avais profité et abusé du gage qu’elle avait écopé ; être à mes ordres. Etait-ce ça qui l’avait poussé à me planter un couteau dans le dos de la sorte ? Elle objecta, elle nia, agacée… Peut être mentait-elle. Peut être aussi qu’il n’y avait pas de raison. Peut être qu’elle ne m’avait jamais aimé. Que je n’avais jamais été son ami… Je remettais tout en cause, tout en question…  Sa main claqua alors contre ma joue. J’avais dépassé les bornes, je l’avais poussé à bout. Et pourtant, son geste qui aurait du me remettre les pendules à l’heure ne fit que me conforter une chose : ma Nina n’était plus là. J’avais perdu ma meilleure amie.  Sous le coup des absurdités de Cole, Nina ne peut s'empêcher de.. lui donner une gifle. Mes doigts se posèrent un instant sur la peau échauffée par la baffe regardant Nina avec un air blessé, trahi. Terriblement déçu. Un pas en arrière, n’imprimant pas ses nouvelles paroles, ne retenant que mes certitudes sur sa trahison. « Je ne veux plus jamais te voir Nina. Sinon je te préviens, c’est aux flics que t’auras à faire. » soufflai-je menaçant, lui laissant malgré tout le libre arbitre de disparaître de ma vue, de ma vie, continuant à reculer avant de faire volte face pour accélérer le pas, mettre le plus de distance possible entre nous.