Et la joie éclaboussée par son sourire me transperce et rejaillit au fond de moi Ø Moana

La violente réaction de Liam dépassait tout ce que Moana avait pu imaginer. Merde. Une gaffe, encore. Quand allait-elle enfin se décider à fermer sa gueule ? Sans rétorquer quoi que ce soit, elle se prit cette gifle métaphorique sans même broncher, se contentant de baisser légèrement le regard, en mordillant ses lèvres. Elle ne savait pas pourquoi il pétait un plomb ainsi mais lorsqu’il menaça de retourner au comptoir, elle saisit brusquement son bras, dans un geste réflexe qu’elle ne contrôla même pas au départ. « D’où j’me suis défoulée ? » tenta-t-elle néanmoins, sans brutalité, avant de le lâcher et se mettre devant lui histoire de l’arrêter au moins quelques instants. Quelque chose lui disait qu’en colère comme il l’était, Liam ne resterait pas longtemps là où il se trouvait, et Moana avait un peu un gabarit de crevette, assez facile à maîtriser. « Je disais juste que je t’ai embrassé sans prendre en compte le type, c’est tout » reprit-elle en déglutissant avec difficulté. Toucher un point sensible n’avait pas été son envie, ni son but. Ce fut sans doute pourquoi elle le serra quelques secondes contre elle, avant de s’écarter - craignant le revers de la médaille - se contentant de frôler la joue du jeune homme du bout des doigts. « J’suis pas ton ennemie, Liam. Apparemment t’as des démons, comme moi, mais sûrement pas les mêmes et plus graves. Tu seras un super doc, j’en ai jamais douté et j’en douterais jamais. Je sais juste… pas fermer ma gueule ! J’suis italienne, j’ai le sang chaud, c’est pas vraiment ma faute… c’était pas le doc que je voulais faire réagir mais le mec. Parce que ouais, t’es super intelligent mais t’es aveugle pour d’autres trucs, bah tant pis pour moi ! » continua-t-elle, haussant les épaules sur la fin. « Si un jour t’as envie d’exorciser tes démons… tu saurais m’trouver. Je fais des supers bons massages et mes bisous magiques sont radicaux ! Désolée d’avoir gâché ta soirée avec mes conneries, et… t’as pas besoin d’être plus sexy, crois-moi. » Moana tourna les talons, sortant du bar. Mais peu vêtue comme elle l’était, si elle ne chopait pas la crève ou qu’un mec ne l’emmerdait pas, ce serait un miracle. Au moins, le froid apaisait le sang chaud tapant dans ses veines.

Le pire dans tout ça ? C’est que la colère de Moana avait fondu comme neige au soleil. Désormais, elle ressentait surtout de la culpabilité vis-à-vis de son tempérament impulsif, lui ayant encore une fois porté préjudice. Bah… peut-être qu’en lui envoyant des chocolats avec une photo débile d’elle aiderait à le détendre ? La jolie sicilienne était perdue, n’ayant pas l’habitude de ce genre de situation ambigüe et si peu claire… mais la clarté vint bientôt éclairer ses pas. La voix de Liam s’éleva à nouveau dans l’atmosphère, à quelques mètres, et la demoiselle se figea aussitôt. Apparemment, sa colère était passée, et elle découvrait une sorte de nouvelle fierté chez lui : celle de ne pas s’excuser. Quelque chose qu’il n’avait pas totalement en commun car elle, de son côté, lui avait demandé pardon. Si Liam restait sur le pas de la porte, Moana tourna les talons pour se rapprocher de lui, restant néanmoins à bonne distance. Craignait-elle un mauvais coup ? Peut-être. Disons que le jeune homme ne connaissait pas non plus tout de sa vie. « Mmh… ça dépend ! Faut avoir été gentil trèèèès gentil ou être trèèèès beaucoup blessé de son p’tit cœur pour mériter un de mes bisous ! » s’amusa-t-elle avant de laisser échapper un éclat de rire. Elle devait être la personne la moins rancunière de la planète, et heureusement. « Par contre faudra aller dans un endroit où on s’caille moins les miches et je fais pas mes bisous dans un bar blindé, c’est en privé, ouais m’sieur ! » reprit-elle sur un ton des plus légers, avant qu’un tout petit sérieux ne revienne sur le devant de la scène. « Mais j’pensais que tu voudrais jamais plus voir ma tronche… »

« J’te fous même pas vraiment un vent ! » lui tira-t-elle la langue, bien loin du climat délétère dans lequel ils avaient été plongé l’un comme l’autre. « Ouais ben… toi t’es pas en robe courte à te cailler le cul, j’ai même pas les jambes ni les épaules couvertes ! » éclata-t-elle de rire en enlevant quelques secondes à peine ses mains de contre ses bras, pour bien que Liam ait conscience de la petite tenue qu’elle portait - même si elle n’avait aucun doute sur le fait qu’il en ait déjà pleinement eut un aperçu. En revanche, ce que la sicilienne pouvait tenir pour acquis, c’est le fait qu’il ait compris qu’effectivement, après ce petit échauffement entre eux, il lui faudrait attendre pour un autre baiser. Le mériter, en quelque sorte. Il ne fallait pas en vouloir à la piquante brunette, elle aussi avait quelques craintes vis-à-vis de tout ça, de ses propres sentiments, et préférait de loin ne pas avoir la désagréable impression de toujours marcher sur des œufs, elle qui ne maîtrisait, en prime, pas toujours ce qu’elle disait. « Oh t’inquiètes j’ai toujours dans un coin de ma tête le fait que je dois être à l’heure en cours… j’ai jamais loupé un seul cours en trois ans, c’est te dire ! Mais plus sérieusement ouais, j’suis un peu crevée, j’veux juste faire des bisous à mon pieux pour le moment… faudra que t’attendes juste un peu ! » Une façon à elle de lui faire comprendre qu’elle ne ressentait aucune rancune… juste de la fatigue après tant d'émotions fortes.