HAPPASIYA ► the best birthday ever !

Il aurait vraiment fallu qu'il lui offre un collier horrible pour qu'elle ne soit pas satisfaite. Elle n'était pas difficile et, à ses yeux, ce qui donnait toute sa beauté et sa valeur à un cadeau, notamment un bijou, c'était les sentiments qui poussaient à l'offrir, or elle ne doutait pas un instant de la sincérité de l'amour de Happy. Lorsqu'il lui eut mis le collier au cou, le contact de ses doigts ne manquant pas de la faire frissonner et d'exacerber son contentement, elle se retourna pour lui faire face, toujours souriante et nullement mutique.

-Ce n'était pas la peine de t'angoisser, tu vois.

Elle posa alors ses mains à sa taille et l'embrassa tendrement.

-Je ne souhaite faire que des choses qui te plaisent autant qu'à moi, tu n'es pas mon esclave, pas question que je t'impose des activités que tu n'aimes pas, pas d'exaction entre nous ! Par exemple, tu ne risques pas de manger des cucurbitacées ce soir, j'ai horreur de ça. Et je ne compte pas non plus te prendre la tête avec des choses saoulantes comme la préparation d'une agrégation en philosophie antique avec étude des idéologistes hétérodoxes de l'époque à travers des anthologies ou encore sur les thèses jansénistes. A moins de privilégier le droit et l'analyse du caractère putatif de certaines choses... J'ai une petite idée de ce que l'on peut faire, tout un tas de petites choses agréables, promis, ce ne sera pas rébarbatif !

Exemple un peu idiot, soit, mais, d'après ce qu'elle avait pu lire dans des magazines, ces aliments étaient parmi les moins appréciés sur un panel de personnes lambda. En somme, l'idée était de suivre une prescription toute simple : profiter de l'instant présent, ne pas se montrer irascible pour un rien ! Après avoir décidé d'inventorier les endroits sympas dans le coin, elle avait pendant un temps penser aller faire un tour près du lac et s'installer dans un petit coin sympa déserté par les passants mais en s'y rendant elle-même, elle s'était rendu compte des causes de l'abandon de cet endroit : une odeur putride causées par l'humidité ambiante (ou bien des coprolithes moisis) flottait dans l'air et rien ne semblait pouvoir l'endiguer. Cela lui rappelait par ailleurs un cauchemar anxiogène fait plusieurs années auparavant : elle se noyait dans du liquide amniotique. La demoiselle avait aussi pensé suivre un cheminement labirynthique au beau milieu de la nature mais elle avait trop peur de se perdre et par analogie de passer la nuit dans la forêt. Alors que faire avec cet adorable énergumène qu'était Happy ? Heureusement, la juxtaposition d'idées toutes simples qui leur plairaient à tous deux lui avait permis de prévoir un planning sympathique pour la journée rien que tous les deux. Et dire que quelques semaines auparavant elle était encore à la limite de l'androphobie, elle aurait désormais pu multiplier les anaphores au début de chaque phrase pour appeler son ange de manière explicite ! Non, vraiment, Happy était pour son coeur le plus efficace traitement vulnénaire.
Pour en revenir aux activités prévues, elle avait notamment pensé à la construction d'une petite cabane dans la forêt où il pourrait passer du bon temps, mais pour construire leur refuge, ils devraient trouver des branchages plus grands que ceux servant à des soliveaux or il n'y avait que des petites pièces de bois dans cette forêt trop bien entretenue ! Si ils avaient eu plus de temps devant eux, elle aurait volontiers voulu aller au zoo pour saluer ses amis proboscidés et découvrir des espèces cénobites acclimatées à la Nouvelle-Ecosse. Toutefois, compte tenu de la chaleur qui régnait, et puisqu'elle détestait péguer, il faudrait opter pour une activité relativement calme.
En bref, beaucoup de mots pour dire simplement qu'elle ne manquait pas d'idées pour passer cette après-midi et cette soirée en compagnie de son cher et tendre.

Effectivement, ce n’était pas la peine de s’empoisonner la vie ou même de s’angoisser puisque Anastasiya semblait ravie de son cadeau, et l’embrassa tendrement pour le lui faire comprendre. « J’aime ta façon de me rassurer en tout cas… » murmura-t-il d’un ton taquin, avant que sa belle ne se lance dans un exemple assez saugrenu, chose qui lui arracha un petit rire. « Je sais bien que je ne suis pas ton esclave ! Mais j’ai envie de te faire plaisir. Puis, il n’y a pas grand-chose que je n’aime pas, alors tu peux guider la danse, c’est ta journée. »

La jeune femme se doutait bien que sa tirade allait amuser Happy, à moins qu'il ne la prenne pour une folle, ce qui n'était aussi une possibilité. Mais il opta pour la première possibilité, chose qui la rassura et l'encouragea à le prendre dans ses bras.

-Saperlipopette heureusement que tu n'es pas pantouflard parce que j'ai tout un tas d'idées ! Je ne sais pas par où on peut commencer mais sache déjà que j'ai réservé un restaurant rien que pour nous deux. On aura un apéritif offert avec jus de papaye et cacahuètes. Ce n'est pas de la grande gastronomie, je n'en ai pas les moyens malheureusement, mais on aura mieux qu'un simple ragout ! Je n'ai pas non plus réservé la table dans un des trucs les moins chers rempli d'acariens qui ne font que proliférer, je n'ai pas envie qu'on se retrouve sous antibiotique ! Et ne te fais pas de souci, même si c'est mon anniversaire et que je compte en profiter, je n'ai pas envie de finir en sac à vin et passer la soirée à zozoter au point qu'on se fasse congédier de l'établissement parce que j'aurai semer la zizanie ! Ce n'est pas mon genre.

La jeune femme disait tout cela sur le ton de la plaisanterie, bien entendu. Et Happy la connaissait suffisamment pour ne pas faire d'amalgame. Jamais elle n'avait bu au point de déambuler comme un spectre et elle ne voulait pas parvenir à cette déshonorante consécration le jour de ses 22 ans. Parmi l'hétérogénéité de ses idées pour se distraire avec son chéri, son esprit suivait un véritable lacis afin de savoir pour quel choix opter puisqu'il lui avait donné quartier libre. Pour se donner un peu plus de courage dans cette besogne, elle retira l'opercule de sa boisson et en prit une rasade, proposant également à Happy de prendre une boisson parmi celles qu'elle avait ramenées.

-Déjà, pas question de faire un tour dans la forêt, j'ai une forte et indéfectible arachnophobie et j'ai horreur des amphibiens or je sais qu'il y en a plein autour du lac. Si je m'y aventure, je risque de me mettre à beugler et créer un vrai charivari.

Son regard se porta alors sur l'eau, face à eux, qui ne faisait que chatoyer. Un peu plus loin, un saltimbanque dodu mais fortement laideron essayant d'improviser une sérénade à la guitare mais il n'avait pas l'air de maîtriser le protocole pour utiliser efficacement cet instrument.

[b]-Ah, au fait, désolée de m'être comportée comme une cagole et d'avoir été si peu laconique et de parler si bizarrement par artefacts, j'ai fait un pari avec une amie de placer un certain nombre de mots dans une conversation, je me suis enregistrée, elle me doit un apéritif et une place pour aller voir un blockbuster !

Pour mettre fin à son délire, la jeune femme coupa l'enregistreur et fit face à son chéri. Avant qu'elle ne puisse lui parler sérieusement, l'un des organisateurs du concours de châteaux de sable les interpella.

-Dites donc les tourtereaux, ça vous dirait de participer au concours de châteaux de sable avec les gamins de la colo ?

Happy sourit de façon amusée face à cette longue tirade dont le gratifia Anastasiya. « On s’en fout que ce ne soit pas de la grande gastronomie, je suis certain que ce sera bon ! » Il savait d’ors et déjà que ce n’était pas le genre de sa belle de finir beurrée comme un p’tit lu. Il n’avait donc aucune espèce d’inquiétude là-dessus. « Je vois ! Je me disais aussi que c’était bizarre de te lancer dans de telles tirades ! » éclata-t-il de rire en la voyant arrêter son petit enregistreur. « Bon au moins t’as réussi ton pari, c’est ce qui compte mon ange » fit-il en déposant un frêle baiser contre ses lèvres. L’américain s’apprêtait à dire autre chose lorsqu’une voix au loin attira subitement son attention. Il n’était pas franchement fringué pour un château de sable avec son costume, mais il laissait néanmoins le choix à sa chère et tendre, si cela l’amusait, d’accepter de donner un coup de main.

La demoiselle en avait fini avec son "délire" et se sentait bien plus légère désormais, prête pour attaquer la journée dignement. Du moins jusqu'à ce qu'une personne les interpelle. Elle regarda alors Happy pour essayer d'avoir son avis sur la chose. Certes ils n'étaient pas habillés comme il fallait mais tant qu'ils ne se roulaient pas dans le sable, ce n'était pas bien gênant. Et puis la miss avait prévu le coup.

-Je suis partante ! J'ai prévu de quoi barboter même ! Pas toi ?

Pour le coup, Happy n’avait aucunement prévu devoir aller directement dans le sable, s’y frotter ou encore s’y agenouiller. Il se traita de crétin intérieurement, car après tout Anastasiya lui avait donné rendez-vous sur la place… ce n’était donc pas forcément pour jouer aux cartes sur un morceau de béton ! « Mmh… pour le coup non, mais au pire je resterai un peu en boxer, surtout si on reste proches de l’eau. Pas si grave ! »

La situation fit rire la jeune femme. Elle comprenait dans le fond qu'il ne veuille pas risquer d'abîmer son costume, qui lui allait comme un gant d'ailleurs. Contrairement à certains, Anastasiya et lui ne roulaient pas sur l'or.

-Je ne sais pas si c'est la meilleure solution, tu vas éblouir les concurrents !

Tout en échappant un petit rire, elle-même retira sa robe pour se retrouver en maillot de bain, prête à se lancer dans la construction d'un château de sable.

Happy ne souhaitait d’autant pas abîmer ce costume qu’il s’agissait d’une location faite spécialement pour l’occasion. S’il pouvait faire nettoyer une tache ou ce genre de petit incident, il aurait grande peine à effacer les traces blanches inévitables dues au sel de mer, si jamais il s’approchait trop de l’eau. L’américain préférait ôter son costume plutôt que de risquer de le ruiner. « Bah peut-être que ça sera utile si ça nous permet de gagner ? » fit-il valoir en ôtant veste, chemise, pantalon, chaussures et chaussettes pour les plier soigneusement et les ranger dans un endroit sans danger. Effectivement, Happy brillait par sa plastique, véritable ‘outil de travail’ qu’il travaillait par le biais de nombreux joggings matinaux.

La jeune femme rit à sa remarque, ce n'était pas faux. Du moins dans une certaine mesure...

-Le problème c'est que tu risques aussi de m'éblouir ! Et dans ce cas ce n'est pas un château de sable que je vais faire mais juste un pâté !

Son petit ami était magnifique, elle en était bien consciente et si cela la rendait fière, elle pouvait en éprouver aussi une certaine crainte. Happy n'était-il pas un séducteur aguerri ?! Elle oublia cependant ces idées pour s'agenouiller dans le sable face à une étendue libre.

Tandis qu’il finissait de se déshabiller, la remarque de sa belle lui arracha un rire amusé. Effectivement, vu sous cet angle, Happy pouvait tout aussi bien la déconcentrer. « Qui te dis que je ne vais pas être ébloui en premier et donc complètement déconcentré ? » fit-il valoir en lui volant un baiser, avant de la suivre jusqu’à ladite étendue de sable. N’ayant jamais fait ce genre de chose, ce n’était pas dit qu’il soit bon… les châteaux de sable, c’était précis comme truc !