Should i stay or should i go ? (Alaska)

Je me traine. Encore. Cette fois en pleine journée. Je n’ai pas tellement envie de m’amuser avec les gens de mon équipe, pas tellement envie de me mélanger. Ces derniers temps, c’est plutôt lourd, plutôt dur. Dur à encaisser parce que j’ai l’impression que tout est entrain de s’écrouler. Je me sens adolescent, rebelle attardée, et je ne sais plus quoi faire pour calmer la colère puissance qui m’éviscère. Alors, je suis là, dans le salon de l’hôtel. Je bois un cocktail avec un parasol et une paille. Je regarde les gens qui passent depuis mon coin, là, au bout de la salle, caché. Et je réfléchis sans réfléchir. Je pense sans penser. Je suis assez dégouté, presque entrain de regretter d’avoir mis les pieds au Summer Camp. D’avoir mis les pieds à Harvard. Et en même temps, rien de mieux ne m’attend à Amsterdam. Ma mère malade, mon père qui redouble de violence à mon égard depuis mes quelques heures d’incarcération à cause de Sage. Je suis blasé. La soirée Cole-Girls était une jolie parenthèse dans ce capharnaüm, mais ce n’est pas assez. J’ai besoin de plus, bien plus. Ana me manque et je n’ose pas lui écrire. Trop orgueilleux pour admettre que je me sens mal, que j’ai envie de pleurer, que j’en ai assez. Alors je me traine. Je joue la carte de l’hypocrisie, faisant semblant de sourire, de taquiner, de narguer, comme j’ai toujours fais. Je finis mon cocktail et m’en vais, mains dans les poches. Je traverse le hall, la porte d’entrée. Je suis là dans le parc devant et je marche. Sans savoir où aller, ni quoi faire. Je marche et j’essaye de respirer. J’attrape mon paquet de clope dans la poche, en porte une à mes lèvres et m’apprête à l’allumer quand des bruits suspects derrière m’interpelle. Je fronce les sourcils, je ne vois rien. J’avance de quelques pas. Une fille de dos semble en mauvais état. Elle est entrain de vomir ? J’ai un mouvement de recul, du dégout, quand je me rends compte que ça ne serait vraiment pas très gentleman de passer à côté, faire comme si de rien n’était : « Est-ce que ça va ? », dis-je à voix haute, dans sa direction.

La soirée Cole-Girls a été certes une jolie parenthèse dans mon capharnaüm ordinaire – au moins j’ai pu me concentrer sur autre chose – mais également un beau fiasco. Gros fiasco. Et j’en veux à peu prés à tout le monde, une des raisons pour laquelle j’évite d’envoyer des messages et de voir mes camarades. Tous ont eu une attitude déplorable, à part Channing. Je me casse les reins à monter quelque chose qui sort de l’ordinaire, dans le secret, allant à l’encontre des règles, pour faire plaisir à ma famille de sang bleu. Et finalement je me retrouve au milieu de tirs croisés, en pleine guerre d’égo. Entre deux filles qui ne se supportent pas et qui semblent se battre pour le même homme, entre mes affinités de part et d’autre dans chacun des camps. Clou de la soirée, l’autre enfoiré de Wade a fait son apparition avec la précieuse Alaska. J’ai dû demander son prénom à Sage après la Mather Party pour m’en souvenir, sinon, elle restait labélisée « la garce aux muffins », et j’avoue, ce n’est pas très correct. Je vais vraiment finir par exploser le crâne de ce bâtard qui se la joue insolent, tout en lui me débecte. Et j’ai bien la haine, je suis certain qu’il est responsable de la descente de flics. Et aussi par rapport à Maëlys. Moi qui pensais que nous partagions une belle relation, elle n’a pas hésité une seule seconde avant de sauver au secours de ce mother wader. Comme si j’étais le paria, le diable incarné. Alors que sérieux, c’est lui qui s’est invité là où il n’était absolument pas du tout attendu. Et je vais pour allumer ma clope quand des bruits étranges me sortent de ces ruminements internes. Je me concentre dans le moment, fait face à la réalité et demande d’une voix assuré si tout va bien à la jeune fille qui semble être entrain de vomir ses tripes : « Je n’ai pas l’impression que ce soit le cas », dis-je avant de me décider à avancer vers elle, attrapant un foulard en soie dans la poche de mon pantalon de costume et lui tendant : « Tiens ! ». Levant mes yeux à son visage, je la vois me faire face et la reconnait. C’est une blague ! Un rire narquois s’échappe de mes lèvres : « Quoi, mon champagne a du mal à passer ? », pour bien lui faire comprendre que j’ai la haine contre sa venue hier à ma soirée.

« Des mouchoirs en … papier ? ». Ok, je vois le genre de personnage. Je range mon mouchoir en soie dans la poche de mon veston. Et, surprise bitch, devinez de qui il s’agit ? De toutes les filles qui auraient pu vomir ici aujourd’hui, il fallait nécessairement que je tombe sur elle. La détestable petite Mather, meilleure amie de Wade, passionnée de muffins, peaux de bananes, et autres aliments à me tartiner sur la gueule. Je suis bien trop énervé par la soirée d’hier et la nuit que j’ai dû passer au poste pour me montrer gentleman à cent pour cent. Tant pis les bonnes manières, et tant pis la décence, je sors mon téléphone et la photographie, la flaque de vomis bien en évidence : « Encore une Mather en plein sevrage, ça a du bon de se défoncer au crack ». Et en rangeant mon téléphone dans la poche de mon pantalon j’ajoutais, hautain : « Comme ça, ton meilleur ami et moi on est quitte. Il s’amuse à prendre des photos de Cole en posture délicate, j’en fais de même avec toi ». Et elle reprenait ses airs froids que je déteste, elle porte vraiment bien son prénom : « Grâce à vous, j’ai eu la joie de passer une nuit en cellule, ça m’a largement passé l’envie de jouer les caïds », plein de reproche, le regard noir. Ouai, j’en voulais à la terre entière. Sauf que, j’étais incapable de la laisser dans cette posture et de partir comme ça. C’est plus fort que moi. Et puis, pour une fois au moins, c’est moi qui lui vient en aide : « Tu veux un verre d’eau, du jus de fruit, de la vodka, du sang, de l’alcool à bruler, ou n’importe quel liquide que vous avez l’habitude de boire vous autres ? ». Extrêmement maladroit et étrange comme façon de dire « est-ce que je peux t’aider en te ramenant un verre d’eau ? ». Mais je n’arrivais pas à être gentil sans lui lancer des pics. Après tout, elle n’a que ce qu’elle mérite.

Je la prends en photo sans aucune délicatesse, même pas le soin de me cacher ou de faire semblant de lire un message. Je commence à en avoir assez que tous les Mathers aient des photos de nous, Eliots, en mauvaises postures, sans contrepartie. C’est vrai quoi, Wade a des photos de Cole entrain de se faire danser dessus par Channing, des photos de Cole et moi entrain de nous faire embarquer, Sage a un nombre incalculable de photos de moi en mauvaise posture (étant donné que j’avais eu la merveilleuse idée de lui laisser mon portable le jour de notre rencontre). Alors non, j’en ai assez. Qu’on soit les seuls dindons de la farce. Et si là, tout de suite, ça ne la dérange pas, quand je ferais de toutes les photos que je prends une compile juteuse, détournée, et pas très catholique, peut-être qu’elle regrettera de se montrer aussi désobligeante : « Nous, bizarre ? Au moins, on ne passe pas notre temps à revomir tout ce qu’on avale.». Et je rangeais le téléphone dans ma poche avant de la regarder se tenir le ventre et se mettre à rire. Elle ouvre la bouche, une fois de plus, pour me narguer. Vous voyez mon regard noir là ? Si ça avait été des pistolets, elle serait morte sur les champs : « C’est bon, t’as finit de rire ? », dis-je en roulant les yeux au ciel avant de les reposer sur elle : « De toute façon, il faut carrément être stupide et manquer cruellement de discernement pour choisir Wade comme meilleur ami. Sérieux, ce mec est une putain de … plaie (bien prononcé, méprisant) ». Et elle devient un peu plus sèche en me demandant si j’avais l’intention de jouer les caïds. Je rétorque de manière sincère et sérieuse, la colère dans mes yeux : « Les idées en place ? Mais de quoi tu parles ? Tu peux là me dire concrètement ce que j’ai fais de mal ? A part organiser une soirée pour mon meilleur pote ? Si vous n’aviez pas débarqué rien de tout ça ne ce serait passé. Mais vous êtes tellement lamentables, tellement de mauvaise fois, que même en nous critiquant vous vous sentez obligés de venir gouter notre champagne ». Et je m’agaçais. Mais ne pouvais m’empêcher de lui venir en aide. Alors très maladroitement, je lui proposais de l’amener boire quelque chose. Elle finit par répondre en un sourire, et moi je lui fis mon air faussement méprisant avant d’ouvrir la marche : « Il y a un stand de boisson juste là, mais ne marche pas trop prés de moi, tu ternis mon image ». Puéril et sarcastique jusqu’au bout, je ne peux pas m’en empêcher.

Ce qu'elle pouvait m'agacer avec son sarcasme et ses allures glacières. Elle me faisait penser à un mélange entre Daria et Kat Stratford. Et moi, évidemment, comme un con, je ne pouvais pas m'empêcher de surenchérir parce que ... parce que merde, je déteste ne pas avoir le dernier mot, je déteste ne pas avoir le dessus. Et techniquement, cette fille a un truc que je n'ai pas : le sang froid. Alors, bien sure qu'à chaque fois, je me fais avoir. Un seul regard et je déguerpis, comme la dernière fois à la Mather Party Hard. Mais là, à l'inverse, il y avait un peu plus de hargne dans mes yeux, je lui en voulais vraiment d'être venu à ma soirée et d'avoir cherché à causer du tord à Tate et Cole. Alors, évidemment, jamais on n'allait se mettre d'accord sur nos désaccord, elle déteste les Eliots, je déteste les Mather, c'est un principe. Mais bon sang, soutenir Wade c'est ... à gerber : « Pardon ? Moi, jalouser ce … eugh (onomatopée de dégout), non merci, je sais encore ce que je vaux ». Rah, je déteste son petit sourire et la manière presque douce qu’elle a de me rabaisser. Jalouser Wade ? Non mais sérieusement, ce mec est absolument tout ce que je méprise, dans son entièreté. On dirait qu’il a été conçu exprès pour que je le déteste : « Pour commencer, c’est moi qui suis ici à admirer ton vomis depuis cinq bonnes minutes et à te demander si tout va bien. + 1 pour Noah dans le rôle de meilleur ami », je lève le poing comme un supporter de foot, bien sarcastique, les lèvres pincées qui n’empêchent cependant pas mon sourire amusé de s’exprimer. Et puis je lui demander, de manière sincère, presque en colère tant non, ça ne m’avait pas du tout amuser de passer la nuit au poste, ce que j’avais bien pu faire pour mériter ses réprimandes. C’est vrai quoi, pour une fois que j’emmerde personne et fait ma vie dans mon coin, voilà que tout le monde me tombe dessus et que c’est moi qui comme un con, me retrouve à avoir les plus gros problèmes. Je me stop aussi net de parler, même si j’étais prés à continuer avec plus de rage, quand j’entends son désolé. Je la dévisage un instant, ferme la bouche et soupir. Je ne vais pas dire merci non plus, ça va. Mais je le pense. Un tout petit peu. Juste un tout petit peu : « Dans ce cas, la prochaine fois, règle tes affaires avec Cole loin de moi ». Et je la laissais poursuivre, roulais des yeux au ciel quand elle prononçait le nom de Wade, reportait mon attention sur elle avec un léger haussement de sourcil quand j’entendis la fin de sa phrase : « Amusant ? Je ne suis pas une poupée barbie ! » Ouai, je le prenais à peine mal. De manière exagérée. Avant de lâcher un petit rire narquois : « Je vais finir par croire que tu m’aime vraiment bien Muffin ». Et je soupire exaspéré quand elle parle du champagne : « Tu parle, on a mélangé de la limonade dans ton vin blanc et t’as pris ça pour du champagne. Ton palais n’est pas apte à reconnaitre les bonnes choses ». Et nous prenions la marche vers le stand de boisson. Et quand elle effleure mon bras, j’ai un mouvement de replis, je déteste la promiscuité, déteste qu’on me touche, alors là, c’est pire : « Rajoute quelques trois mille kilomètres et ça sera parfait ». Je tourne le visage vers elle, et sans aucune délicatesse, je lance : « C'est marrant, vues d'ici, tes joues ressemblent à celle d'un hamster qui aurait fait des réserve de carottes » On arrive au stand de boisson, vraiment tout à côté, et je prends deux bouteilles d’eau fraiche que j’offre à Alaska : « Tiens, tu pourras te rincer la bouche et te rafraichir le visage ».  J’attendais qu’elle les attrape puis enfonçait mes poings dans les poches de mon pantalon. Et amusé, je repris : « Tu crois que je peux avoir une remise d’impôt ? Ce n’est pas un don humanitaire ce que je viens de faire ? ».