Invité
est en ligne
Invité
« Underwater. »
bonaventure & lily
Confortablement installée dans une torpeur docile, se jetant dans la souricière de l’asthénie, ses paupières closes profitaient de la brise fraîche qui se lève parfois avec la fin d’après-midi, et l’annoncée de l’ère nocturne. Le soleil était encore bien présent, réchauffant sa peau albâtre, glissant sur son cœur un baume qui lui faisait oublier toute notion du temps. Solitaire sur la rive, étendue sur le sol, entre ses cils parfois elle dessinait les contours des nuages. Elle y voyait des formes et des rivages inconnus, trouvant à celui-ci un côté duveteux qui rappelle le goût de certaines friandises sur le palais, et à d’autres des aspects plus diffus et anguleux qui pouvaient faire penser à des visages, ou des silhouettes animalières. Plongée dans son imaginaire comme le faisaient parfois les enfants pour échapper au monde adulte, elle y trouvait un refuge plaisant et maniable, dans lequel souvenirs, mensonges, trahisons et questionnements étaient trop encombrants pour se trouver une place. A quelques mètres de là, des familles, ou même des groupes d’amis, s’appropriaient le lac pour en faire leur terrain de jeux. Leurs rires la berçaient, et, tandis que ses doigts effleuraient rêveusement le sol, elle se forçait à imprimer chaque détail, chaque sensation, pour se rappeler toujours quel goût avait la douceur de l’après-midi. Caressée par l’idée de rester ici pour toujours, rêvant qu’à force d’immobilisme elle pourrait disparaitre comme les grains de sables se faisant balayer par le vent, la rouquine avait fini par s’assoupir, happée par le sommeil.
Les pieds nus, libérée du poids de la maladie grâce à l’espace onirique, elle se sentait flotter dans un espace aux contours, et aux contrastes confus. Ses mains cherchaient à s’agripper à quelque chose, en vain. Mais malgré cette impression étrange d’apesanteur, elle se sentait bien, bercée par une quiétude qui lui rappelait la tendresse des premiers émois et l’incertitude de leur aboutissement. Le rêve, vieille amie aux traits parfois tendres qui vous prend par la main et vous emmène ici et là sans vous demander votre avis, avait à ce moment-là décidé d’être clément. Sans s’en rendre compte, dans son sommeil, elle souriait légèrement. Peut-être avait-elle rencontré quelqu’un, ou peut-être pas. Le fait est que l’endormie sentait sous ses cotes un fil invisible se tisser entre son inconscient, et celui d’un autre. Allez comprendre. Et alors qu’elle essayait de marcher dans la direction de la compréhension, une voix résonnait dans sa tête, et l’appelait. Au début confuse, puis de plus en plus claire, elle fut bientôt assez limpide pour forcer ses paupières à tressaillir, et lutter contre l‘hostilité des rayons de lumières qui lui brûlèrent la rétine. Un battement de cil plus tard, et la jeune femme y voyait enfin clair, distinguant au-dessus de ses sourcils froncés un visage familier. Un visage dont elle se rappelait chaque contour pour les avoir observés et apprivoisés à la fois, même si cela avait été pour un temps très éphémère. La gorge sèche, la voix légèrement rauque, la surprise l’avait faite toussoter une fois. « Bo … Bonny ? » Elle préférait ce surnom que Bonaventure. Plus court. Plus efficace. Plus facile à prononcer aussi pour son accent russe et son anglais parfois imparfait.© ACIDBRAIN
(Invité)