Qu'importe le flacon... ♠ Nicholas

Finalement, le bar de cet hôtel était relativement sympa. A partir d'une certaine heure, ils passaient un peu de musique, histoire que les plus fêtards puissent tenter quelques pas de danse, sans pour autant que la fiesta ne tourne à la beuverie, un genre de soirée d'entraînement entre deux grosses party. Cela convenait bien à la Solitaire, lui permettant de sortir l'air de rien, d'observer les gens, de prendre sa dose de société et de rentrer ensuite à l'abri de son cottage. Un verre aux lèvres, elle le repose sur le comptoir pour aller esquisser quelques pas en bonne compagnie. Juste le bonheur d'une compagnie éphémère qui ne promet rien, pour revenir ensuite aux sources de l'ivresse, voilà la soirée parfaite. La Demoiselle retourne donc au Calice de la félicité quand elle l'aperçoit enfin, aux lèvres d'un autre. « Hey, c'est mon verre ! » dit-elle en fronçant les sourcils vers le preneur d'otages. Il a beau être craquant, elle ne pardonnera pas si facilement cet affront.

Rien n'y fait, j'y pensais constamment. C'était une étrangeté qui se passait dans ma vie, moi qui était l'homme sans attache. Comment se faisait-il qu'une fille comme Jordan puisse m'atteindre à ce point. Un dommage collatéral, voilà ce qu'elle devait être. Et maintenant, elle hantait ma tête d'une façon qui m'était totalement incompréhensible. Pourquoi ? J'en savais trop rien. Et puis merde quoi, j'étais Nicholas Brewster. J'étais le don juan de ces dames, j'étais le séducteur né. Il me fallait une occupation ce soir, une occupation qui ne me ferait pas penser à la rousse. Alors j'étais descendu au bar de l'hôtel, où la soirée se passait relativement bien. Faut dire, il suffisait d'un peu de musique et d'alcool pour que tout se passe pour le mieux. Installé sur le comptoir, je demandais une boisson qui arrivait bien rapidement. Et une fois présente face à moi, je l'apportais à mes lèvres, sans m'attendre une seule seconde qu'on viendrait m'engueuler pour ça. « Mh, je crois pas non » Était-ce une façon comme une autre de m'approcher ? C'était pas forcément la bonne technique pour draguer. Mais bon, je prends quand même.

Elle dansait bien tranquille, inconsciente du risque qu'il pourrait y avoir à laisser traîner sa boisson et voilà qu'on lui vole, mais qu'en plus on déni le fait. Non mais sérieusement, c'est quoi ce mec ? Ses yeux s'écarquillent, incrédules face à sa réponse. Un sourire désabusée vient orner l'orgueil de son visage alors qu'elle redresse imperceptiblement le menton tout en baissant les yeux, indifférente aux mouvements de sa chevelure. « Mmh et moi je crois pas que tu portes du rouge à lèvres tu vois. » Puisque le verre qu'il tient entre ses mains en porte une trace, preuve formelle que c'est bien SON précieux. Son visage s'approche du sien alors qu'elle pose une main sur ses épaules. Viriles certes. « Définitivement pas. » Et elle profite de ce rapprochement pour lui reprendre le verre des mains. Elle s'empresse de porter sa bouche au contenant pour en boire une gorgée et le regarde désormais satisfaite. « Et maintenant, tu fais quoi, Monsieur le Verrepickpocket ? » Parce qu'il a beau être canon, on plaisante pas avec les minutions de la soirée, sérieusement !

J'avais pas conscience de l'erreur que je venais de commettre. Un verre en face de moi. Un deuxième. Forcément, je prenais le mauvais, tellement dans mes pensées, encore toutes dirigées vers la rousse au coeur brisé. Clairement, je ne savais pas pourquoi elle me hantait comme ça, elle n'avait rien de spécial cette fille. Alors ouais, je m'étais pointé au bar de l'hôtel, dans l'optique de me changer les idées, éloigner la jeune Lowell de ma tête et trouver peut-être une compagnie adéquate pour passer la soirée. Mais voilà, la tête dans les nuages, j'avais clairement pris le mauvais verre et on venait me le reprocher. « Mon erreur, faut croire que je suis un peu trop tête en l'air ce soir » .. et pas que ce soir, mais ça, elle ne le savait pas. Alors je lui laissais récupérer son verre alors que ma main venait s'agripper à celui qui m'appartenait. « Maintenant ? Je profite de cette mésaventure pour discuter avec une jolie fille qui est face à moi. Si ça te convient, évidemment » Et y'avait plutôt intérêt à ce que ça aille en fait, parce qu'elle me servirait de distraction pour ne pas penser à Jordan.

Tout ce qu'il me fallait, c'était une occupation qui me permettrait d'oublier un peu la rousse. Le temps d'une nuit, n'était-ce pas trop demandé ? Je comprenais pas vraiment pourquoi j'agissais comme ça avec elle, pourquoi je l'avais dans l'esprit nuit et jour. De toute manière, il allait bien falloir trouver une solution parce que je ne pourrai pas rester comme ça éternellement. A un moment donné, je devrai agir. Et je le ferai. « Pas vraiment non. Papillonnant et libre tel un électron, c'est plus mon genre à vrai dire » Sentimental ? On ne parlait pas de la même personne. Je n'étais pas sentimental, j'étais du genre à briser les coeurs. J'étais comme ça, un point c'est tout. Le romantisme me faisait vomir. « Elle s'appelle pas » Pour le coup, même si sa compagnie pouvait me faire du bien, j'avais pas tellement envie de parler de ce qui me préoccupait. Visiblement, elle avait le don de trouver ce qui pouvait clocher chez moi, maaais c'était pas une raison pour l'aborder. Donc j'évitais tout ça, préférant de loin redevenir celui que j'étais avant Jordan. « Enchanté Lyra, moi c'est .. un inconnu dans un bar » J'avais attrapé mon verre à moi se trouvant devant moi et je buvais quelques gorgées avant de tourner la tête vers elle. « L'identité c'est surfait, tu penses pas ? Après tout, tu dois te douter de mes motivations sur ma présence ici. Alors les banalités de rencontres, on peut s'en passer » confiais-je en arborant un sourire sur mes lèvres.

Elle le jauge de ses prunelles azurées comme pour vérifier la véracité de ses dires, comme si le simple fait de l'observer lui donnerait la réponse. Elle s'amuse de cela, parce qu'elle ne va sûrement pas s'en alarmer. Les connards, elle en a l'habitude et à l'occasion elle aime bien s'y frotter. « Oh c'est banal. » Et que le regard cyan le toise alors qu'elle trempe ses lèvres à nouveau dans le liquide alcoolisé. Il pousse le vice jusqu'au bout en ne donnant pas son prénom. « C'est vrai. » admet-elle tout à coup absorbée par cette considération philosophique. « C'est pas comme si on en avait quelque chose à foutre. » Son sourire s' élargit doucement, révélant ainsi la blancheur de ses dents et le narquois de sa moue. Elle qui s'était prêtée aux conventions et qui se faisait rappelée à l'ordre d'en avoir trop fait, c'était plutôt ironique en fait. Elle se lève finalement sous l'impulsion de ses dernières paroles. Elle ne va pas tergiverser, elle n'en a pas envie, pas ce soir, ni les autres en fait. « Viens. » dit-elle doucement en lui attrapant la main pour l'inviter à se lever, elle l'entraîne ainsi au milieu des autres, et se met à danser, lascive,  bien évidemment trop provocante, mais elle s'en contrefout. « Tu sais danser inconnu dans un bar ? Ou tu préfères me plaquer tout de suite contre un mur sombre dans le fond ? » s'amuse-t-elle en laissant son index remonter le long de sa pomme d'Adam pour s'arrêter à la naissance de ses lèvres.

Elle n'avait pas de nom, celle qui ne cessait de hanter mon esprit. Je préférais de loin parler d'autre chose que de ce qui se passait malheureusement dans ma vie. Pas grand bavard, la jeune femme à mes côtés venait de comprendre alors qu'il était préférable d'oublier ce sujet. Ouais ouais, on s'en fout de tout ça, on veut oublier tout ça. On veut s'amuser à la place, perdre la tête, perdre la notion du temps. Tout, pour oublier ce visage surplombé de cheveux roux. Glissant le verre entre mes lèvres, je finissais en quelques gorgées le contenu qui brûlait ma gorge, sans état d'âme. Mais très rapidement, la main de Lyra se trouvait dans la mienne et à peine avais-je eu le temps de reposer le verre sur le bar qu'elle se mit à me tirer au centre de la pièce, slalomant entre le peu de personnes présentes pour m'inviter à danser ici même. La voir danser là, contre moi, de manière si explicite m'arrachait un sourire. Ouais, là j'oubliais. « On peut danser, continue » Après tout, elle avait l'air d'apprécier ça, la danse. Alors autant la mettre dans de bonnes conditions avant de finalement l'attirer un peu plus tard contre ce mur sombre non loin de là. Ouais, ce plan était plutôt cool. Bougeant sur le rythme de la musique, je tentais de garder le même style qu'elle, non sans ratés. J'étais pas du genre à danser lascivement ou quoi, alors ça donnait quelque chose de... bizarre.

Enfin il se déridait un peu, et elle était fière d'avoir arraché ce sourire à ses lèvres. Elle ne sait pas bien pourquoi elle s'était fixée de changer les idées de ce mec, ou même pourquoi elle l'allumait de la sorte, mais c'était l'impulsion du moment et aussi subitement que ça pouvait y paraître, elle avait décidé que ce Ténébreux tourmenté serait sa nouvelle proie. De toute manière, cela n'engageait à rien, ils ne se connaissaient pas, et ils ne se connaîtraient pas plus après ça. Et c'est ce qui lui plaisait en fait. Elle lui lance un sourire complice tout en le regardant bouger quelques instants, on peut pas dire que c'était le plus doué mais il se débrouillait pas trop mal. La Blonde laisse ses doigts graciles s'accrocher au haut du jeune homme avant de les laisser glisser tout autour de sa taille, enfantine, elle fait le tour de sa nouvelle proie avant de se replacer face à lui. Ses bras s'accrochent à sa nuque tandis qu'elle approche dangereusement ses lèvres des siennes. « Quelque chose me dit que tu es plus doué pour les coins sombres que la danse. » Une moue ironique se dessine sur son visage alors qu'elle laisse ses lèvres purpurines venir embraser le creux de son cou. Sa main se pose à nouveau dans le dos masculin et se glisse sous le tissu pour venir caresser la cambrure de ses reins. « Je te propose qu'on oublie tout ce soir, comme une petite soirée bonus sans lendemain, ça te convient ? » Certains diraient qu'elle est facile, qu'elle était inconsciente ou même légère, mais elle s'en contrefoutait en fait, c'est ce dont elle avait envie et elle comptait bien l'assouvir aussi simplement qu'elle était apparue.

Un peu de distraction ne me ferait clairement pas de mal, c'était une certitude. C'était bien pour cette raison que je me laissais embarquer par la jeune femme accusatrice sur la piste de danse. J'étais pas un fervent amateur des mouvements lancinants, du moins en public comme ça. Je préférais de loin le faire dans l'intimité, à la vue que d'une seule personne. Et encore, si ça venait à tourner à la moquerie de mon manque de souplesse, ça me stoppait assez rapidement. Ouais bon, c'était totalement subjectif, certaines venaient dire que je dansais très bien et que ça leur faisait plutôt de l'effet. Je restais sur mon idée que je me mouvais comme un manche. Mais soit, je n'allais pas déblatérer pendant dix ans sur ma façon de danser. Je préférais clairement la regarder elle, celle qui m’envoûtait petit à petit. Il était clair que dans deux minutes, elle saurait faire de moi son jouet. « Je ne sais pas d'où tu tiens ça mais... il y a des chances ouais » disais-je en souriant, le regard baissé sur elle tandis que ses mains jouaient aux explorateurs sous mon t-shirt. Me mordant la lèvre inférieure, sans piper mot, je venais alors glisser mon visage dans son cou, y déposant à mon tour mes lèvres. Mes mains devenaient un peu plus tactiles au fur et à mesure que le temps passait. « Ton lieu est le mien » Je n'allais pas cracher sur ce moment qui semblait être l'aubaine de la soirée. Et puis merde quoi, c'était un coup tiré comme ça, qui n'engageait en rien, et c'était pile ce qu'il me fallait.