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... young, foolish & happy.
1er Décembre 2006 ; Vendredi, 15:03:10.
- Je ...
Ma gorge se noua alors. J'avais du mal me concentrer. Du mal à rester calme. Posé. C'était ... nouveau, pour moi. Différent. Je ne m'étais pas attendu à ça, lorsque j'étais monté sur le train, ce matin. Ça aurait dû être une simple journée "shopping", sans prises de tête, sans problèmes ... Une simple journée où j'aurais pu profiter de ma solitude et de ma carte bleue. Et puis, je ne sais pas. J'avais aperçu un H&M ... Et tous mes amis savent à quel point mon affection pour cette marque suédoise s'est, avec le temps, développée en quelque chose de plus fort ... Une véritable fidelité à leurs vêtements, en quelque sorte.
J'avais aperçu un H&M, et je m'étais rué dedans. Ils venaient de recevoir une nouvelle collection, en plus. Manteaux, pantalons de velours, cardigans et pulls à manche longues, leur magasin regorgeait indéniablement des plus beaux vêtements d'hiver de l'année ... Ceux qu'évidemment, j'allais acheter, malgré les tentatives futiles de mon père à me faire réduire mon budget vestimentaire. Et puis, il ne fallait pas non plus oublier les gants ... J'adorais les gants. J'avais donc fait fumer ma carte de crédit - ou plutôt, celle de mes parents - une énième fois. Et évidemment, ce ne serait pas la dernière, si je me connaissais bien. Et je me connais bien.
Sortant du magasin, tel un aigle impérial, j'observais les alentours, me demandant sur quelle proie je jetterais à présent mon dévolu. Ayant aperçu un 'Dolce & Gabbana', je m'étais, lentement mais sûrement mis à avancer dans sa direction. Et puis, je ne saurais expliquer le pourquoi du comment, mais une soudaine et puissante envie de café me prit ; je me demande si celle-ci m'était apparue comme de par hasard, où si la présence du fameux 'Starbucks Coffee' y était pour quelque chose. En tous les cas, il ne fallut pas me le dire deux fois ; j'y pénétra, soulagé par la chaleur qui était répandue sur l'intégralité de la surface.
L'hiver en Angleterre était assez brutal, malgré mes années passées ici. On ne s'y faisait jamais, véritablement ... À moins d'y vivre depuis la naissance. Mais cela ne changeait pas le fait que cette saison était des plus magiques, sans doute à cause de la neige ainsi que de la bonne humeur que Noël avait le pouvoir de susciter en moi. Une fois entré, je fus cependant surpris par le nombre de gens se trouvant dans le café, ce jour là ... Je dirais même que j'en étais déçu. Maintenant que j'avais goûté à la chaleur, je n'avais aucune envie de repartir ... Enfin bon. On verrait bien une fois la commande passée. M'approchant du comptoir, je demandais ainsi poliment à la jeune serveuse :
- Bonjour, mademoiselle. Pourrais-je avoir un cappucino, s'il vous plait ?
Me répondant avec le sourire, elle se retourna pour s'occuper de ma commande. Pendant ce temps, je me mis à parcourir la salle de mes yeux, à la recherche d'une table disponible. À mon plus grand malheur, aucune ne l'était. Marmots, Marmottes et tourtereaux avaient toutes décidé d'en faire leurs propriété ... On se serait cru dans une véritable animalerie. Soupirant, je refis un deuxième tour de la salle en 80 secondes, cherchant désespérément un moyen de ne pas avoir à ressortir braver le froid et la tempête ... Façon de parler, évidemment.
Et c'est là que mon regard croisa le sien. Je suis persuadé que si j'avais eu la tasse entre les mains, celle-ci aurait fui mes doigts, afin de faire une chute libre avant d'éventuellement s'écraser dans un bruyant fracas contre le sol. Quelque chose dans son regard m'avait transpercé l'âme. Perplexé et troublé, j'avais l'impression d'avoir senti ses yeux me transpercer du regard afin de voir ce qui se cachait réellement en moi ; ce dont mon essence était réellement faite. La serveuse revint alors, me disant que ma commande était prête, me demandant de payer pour ma consommation. Tiré de ma 'rêverie', je lui fis un grand sourire gêné avant de fouiller dans ma poche, en ressortant quelques livres sterling en pièce.
- Gardez la monnaie. insistais-je d'abord.
Jetant un dernier coup d'oeil furtif derrière moi, regrettant déjà la chaleur et les fauteuils confortables du fond de la salle, je me mis à marcher, nonchalamment vers la porte vitrée qui servait d'entrée et de sortie. Mais au moment de traverser le seuil, mes pieds se refusèrent de m'obéïr. Appliquant une force des plus titanesques dans mes muscles, je ne pus m'empêcher de constater, avec déception, que si mon esprit s'était résolu à partir, mon corps, lui, n'était pas encore prêt. Soupirant, je me décidai finalement à rebrousser chemin. C'était assez drôle, tout compte fait, si l'on prenait en compte le fait que ça ne me dérangeait pas plus que ça, de rester ... Si seulement je savais où m'installer. Les tables me semblaient toutes soit trop bruyantes, soit pleines ... Et je me voyais mal squatter une table où des enfants étaient présents, cela risquait d'en effrayer plus d'un. Mais il y avait toujours cet inconnu dont le regard m'avait heurté de plein fouet, assis dans son coin, sa tête à présent inclinée vers la fenêtre. Le mystérieux inconnu qui avait sû me faire de l'effet. Et je parle bien de l'effet dans lequel votre coeur bat à deux cent à l'heure et où tout le reste semble flouté. Oui, je pourrais m'asseoir en face de lui ...
Mais non. Je ne voudrais pas m'imposer. Et encore moins le déranger.
Autant je me sentais contraint de le rejoindre afin de pouvoir tirer davantage sur le bout de sentiments qu'il avait su éveillé en moi, tenté à l'idée d'exploiter au maximum ce qu'il y avait, là, maintenant, autant j'avais peur. De quoi ? Je me le demande bien. Je ne le savais pas encore à l'époque, pour tout vous dire. Honnêtement, je ne me rapelle que du fait que je me sentais tiraillé vers lui, comme si une corde invisible nous nouait. Ou du moins, me nouait à lui. S'il claquait des doigts, je me sentirais forcé d'aller voir ce qu'il voulait ... Et puis finalement, je me suis décidé à tenter ma chance.
- Je ...
Sur le coup ... Je dois avouer m'être senti bête. Ridicule, même, avec ma voix enrouée d'émotion et ma difficulté à prononcer les mots qui se balladaient par millier dans mon esprit. Je savais ce que je voulais dire, mais mes pensées se projetant par millier ('qu'il est beau' ; 'et ce regard ...') me faisaient progressivement perdre de vue mes paroles, tant et si bien qu'éventuellement, les mots m'étaient otés de la bouche avant même que j'aie pu les prononer.
Gêné, je passais alors une main dans mes cheveux.
- Je veux dire ... Excuse moi de te déranger, déjà, oui, c'est un bon début. Et ensuite, je voulais savoir si cette place était libre.
Le regard fixé au sol, je n'osais pas river mes yeux dans les siens à nouveau. Il m'intriguait. Et c'était ça, ce qui m'inquiétait le plus.
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