Please ensure Javascript is enabled for purposes of website accessibility« La vie c’est comme une boîte de chocolats ... » Pv Lawrie.
-29%
Le deal à ne pas rater :
DYSON V8 Origin – Aspirateur balai sans fil
269.99 € 379.99 €
Voir le deal


« La vie c’est comme une boîte de chocolats ... » Pv Lawrie.

Anonymous

Préférences de jeu
veritas
Invité
est en ligne
Invité

     
« La vie c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber. »
      lawrie & lily
     
     


     
Lentement, avec une précision quasi chirurgicale, le regard de la rouquine allait et venait entre son sujet et la surface de sa toile. En ce moment, en cours, ils travaillaient sur la nature morte. Un sujet qu’elle appréciait mais sans plus. Le seul type de nature morte qu’elle appréciait un tant soit peu étaient les Vanités. Vanité des vanités, tout est vanité … Oui ce sujet lui plaisait. Raison pour laquelle elle se montrait si docile, assidue, et concentrée. La fin du cours était proche, et pourtant, elle serait bien restée ici quelques heures encore, à scruter cette vieille pomme fripée, et ce crâne posé sur une reliure en cuir usée. Mais la fatigue se faisait ressentir. Ses doigts, à chaque minute qui passait, se faisaient moins agiles et plus imprécis, ratant des contours, faussant des ombres ou esquivant des traits. Ses affaires rassemblées, ce jour-là, la Lowell était vraiment chargée comme un mulet. Entre le chariot d’oxygène, le sac à dos, et la grande pochette remplies de feuilles volantes de travaux en cours, s’était une organisation mécanique, voire même un Tétris corporel pour tout caser sans s’emmêler les crayons. Et ça, s’était sans compter les éléments perturbateurs extérieurs.

Dans les couloirs, concentrée pour arriver d’un point A à un point B sans se casser la margoulette, étant d’un esprit très rêveur, elle oublia bientôt de faire attention, de se concentrer sur son objectif, et de prendre en compte les gens aux alentours. C’est surement pourquoi, lorsqu’elle crut entendre quelqu’un l’appeler dans son dos, elle se retourna, continuant d’avancer mais en marche arrière. Marche arrière qui fut interrompu par un croche-patte de maître venu d’un inconnu. Sa chevelure rousse fut la première chose qu’on vit partir en arrière, avant qu’un fracas plus bruyant que douloureux ne se fasse entendre à son tour, suivit d’une nuée de feuilles qui volèrent en tous sens. Un peu comme un champignon atomique créatif. Heureusement, ses fesses amortirent largement la chute –remercions gras et cellulite --. Mais sur le dos, un brin sonnée, elle poussa un juron en russe, avant d’ouvrir les yeux un à un, au début éblouie par le néon au plafond. Contre toute attente, plutôt que de râler, ou d’injurier le malandrin (alors que c’était de sa faute au fond), elle se mit à rire. Amusée de voir tous ses dessins retomber et voler alentours comme une neige volatile. Ce n’est qu’après que son regard se posa sur son interlocuteur, pétillant, quoiqu’un peu à l’ouest (bigre, elle avait vraiment mal au derrière). « Je t’ai pas fait mal ? » demanda-t-elle en ayant pas vraiment vu au début qu’il s’agissait d’un adulte.  Quand sa vision s’éclaircit enfin, et surtout, quand son visage cessa d’être en contre-jour, elle put se rendre compte qu’elle aurait peut-être dû le vouvoyer. « Désolée. Je voulais faire une cascade de l’extrême, mais j’ai encore un peu de mal avec la réception. Heureusement que j’ai un peu de rembourrage. » La bonne blague. Lily était une crevette. Elle allait avoir un bleu gros comme une planète sur l’arrière train.


     
© ACIDBRAIN
(Invité)
Anonymous

Préférences de jeu
veritas
Invité
est en ligne
Invité

« La vie c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber. »
lawrie & lily





Deuxième jour.


Les étudiants et leurs bêtises. Sans doute mon futur sujet de doctorant. J’en avais vu tellement en un jour que je n’étais pas certain de réussir à survivre dans cet environnement empli de rumeurs, non-dits et provocations à tout va. Le pire étant que le personnage que j’avais choisi d’incarner, s’il était plutôt doué pour délier les langues puisque nul n’a besoin de se méfier d’un crétin, n’en était pas moins par son aspect le premier à se faire des ennemis. Encore que je n’avais pas à me plaindre pour le moment. Je n’étais arrivé qu’hier à Harvard, en plein milieu d’année scolaire, ce qui était encore plus compliqué à gérer, et je n’avais eu l’occasion de faire connaissance qu’avec deux ou trois étudiants qui avaient bien voulu m’écouter jusqu’au bout sans me balancer leurs livres, leurs paumes de main ou leurs pieds dans une partie ou une autre de mon corps. Bref, j’étais plutôt bien parti. Naviguant dans les couloirs à la recherche de ma prochaine victime innocente, je repérais aujourd’hui une jeune femme pour le moins singulière. Tirant une bouteille d’oxygène, le visage à moitié dissimulé sous une masse de feuilles encrées, une tignasse rousse, je n’en croyais pas mes yeux et subitement, mon sourire faussement niais laissa place à un regard où perçait franchement de l’inquiétude. Lily-Rose. Comment avais-pu oublier ce détail ? Son père et moi étions de proches amis, et travaillons ensemble. Bien que je n’avais pas donné de nouvelles depuis longtemps, le simple fait de l’avoir revue venait de me rappeler que son père l’avait envoyé ici depuis quelques années. Un détail qui, si je m’en étais souvenu, ne m’aurait pas placé dans cette situation délicate. J’aurais pris mes dispositions. Là, maintenant, que faire si la jeune femme me reconnaissait ? Il est vrai qu’elle m’avait connu alors qu’elle n’était encore qu’une enfant, et rien ne pouvait supposer qu’elle se souvint encore de l’homme qui aimait à la faire voltiger dans les airs ou à la prendre sur ses genoux pour lui raconter des contes assis sur un rocking-chair, mais c’était un risque que je ne pouvais pas prendre. Aussi, refermant bien vite mon casier, je me dirigeais d’un pas vif vers Lily-Rose dans l’espoir de pouvoir l’attirer ailleurs afin de lui parler, lorsque je sentis un courant d’air me passer sous le nez, dévier mon élan jusqu’à ce que je sois complètement arrêté. Le temps pour la jeune femme de venir s’affaler contre mes jambes, et l’idiot qui l’avait fait chavirer, de s’empresser de quitter les couloirs dans la direction inverse, peu fier de son geste mais pas suffisamment courageux visiblement pour lui présenter des excuses. Ceci, évidemment, sous les rires gras et stupides de la horde d’étudiants alors présente dans les couloirs. Gardant mon calme, même si ce n’était pas l’envie qui me manquait de donner une leçon de savoir-vivre à ce jeune mal élevé, je m’empresse de tendre la main à la jeune femme, l’aidant à ramasser au passage les feuilles, visiblement de l’art, qui se sont dispersées à ses pieds dans sa chute. « A moi ? » l’interrogeai-je sans comprendre. C’était elle qui était tombée, et c’était à moi qu’elle posait la question ? « Non non, je n’ai rien, merci. Et toi, ça va ? Attends, je vais t’aider …à te relever. » Visiblement, elle ne gardait pas de rancune contre le malandrin. Je la reconnaissais bien là. La même petite frimousse curieuse et adorable que j’avais connue. Un sourire lui répond, tandis que le couloir se vide peu à peu pour ne laisser que nous, l’un en face de l’autre. Parfait pour une conversation discrète. Toutefois, un doute était en train de m’assaillir. M’avait-elle reconnu ? Si ce n’était pas le cas, à quoi bon l’en informer ? C’était un risque que je ne voulais pas lui faire prendre, ni à elle, ni à moi. « Tu es certaine de ne pas t’être foulée un membre ? Je peux t’accompagner à l’infirmerie si tu le souhaites. J’ai appris les plans du campus par cœur. » énonçai-je sur un ton presque guilleret en lui montrant dans une main la carte du campus avec tous ses points clés.

© ACIDBRAIN
(Invité)
Anonymous

Préférences de jeu
veritas
Invité
est en ligne
Invité

« La vie c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber. »
lawrie & lily



Sa main fraîche se referme doucement autour de celle de l’inconnu, tandis qu’elle se sent tirée vers le haut avec légèreté. Elle esquissa une grimace de mamy dont le lumbago la fait souffrir, se frotte le bas du dos quelques instants, avant d’épousseter son chemiser et son pantalon. Elle ne pensait déjà plus au mal élevé qui avait décampé, toute focalisée sur son nouvel interlocuteur dont la voix … ne lui était pas inconnue. Impossible en revanche de mettre un souvenir dessus pour l’instant. Tout au plus avait-elle la sensation de l’avoir entendue régulièrement quelque part. Mais où ? « Merci ! Je vais bien. C’est pas une petite chute théâtrale comme celle-ci qui va me mettre par terre, aucun risque. » Entreprise de ramassage en cours, elle entreprenait à présent de rassembler ses effets qui s’étaient éparpillés un peu partout. Certains élèves, probablement pressés de rentrer chez eux, n’avaient pas trouvé utile de les ramasser et avaient visiblement préféré simplement marcher dessus, laissant leurs magnifiques traces de crampons. La belle affaire. Elle n’aurait plus qu’à recommencer certains d’entre eux. Un brin dépitée, poussant un petit soupire en soulevant délicatement une feuille par le coin entre deux doigts, elle prit enfin le temps d’observer l’homme en face d’elle avec plus d’attention. « Tu as appris le plan … » répéta-t-elle, comme si elle avait mal entendu, avant d’arborer un sourire amusé. « Oh et dans ce cas, j’imagine que tu sais où se trouve la planque secrète à glucose du professeur Watson ? Il a toujours des miettes de gâteaux sur son costume avant de faire son cours. Je le soupçonne de camoufler une addiction. » Voyant sa mine inquiète, elle jugea préférable de le rassurer sur son état plutôt que de déblatérer des âneries dans un humour plus que douteux. « Je vais bien, ne t’en fais pas. » Réajustant son sac sur son épaule, les prunelles chocolat de la jeune femme examinèrent plus subtilement les traits de l’homme. Un sourire en demi-lune, proche de la nostalgie, éclaira son visage mutin. Il lui rappelait quelqu’un. Quelqu’un qu’elle pensait avoir oublié. Cela faisait si longtemps, ce n’était pas possible. Et puis elle n’était qu’une enfant à l’époque, ces souvenirs n’étaient que des limbes à présent. « Tu vas trouver ça étrange, mais, tu me rappelles quelqu’un. » Sachant qu’il trouverait peut-être ça étrange, elle continua malgré tout avec aplomb en continuant de détailler les parcelles de son visage. « Quand j’étais toute petite, mon père avait un ami, assez jeune à l’époque, qui venait souvent à la maison … Il me racontait plein d’histoires, et surtout, j’avais l’habitude de lui faire plein de couettes, et de lui coller toutes mes barrettes papillons à paillettes ridicules dans les cheveux. Je pense qu’au fond ça devait l’énerver, mais, ça me faisait tellement rire … » Elle sembla se perdre un instant dans ses souvenirs, avant de réaliser que raconter une telle anecdote à un total inconnu n’était peut-être pas une bonne idée. « Il avait la même tignasse que toi. » Elle le scruta un instant, avant de sourire, ne sa raison ne semblant pas vouloir continuer de s’attacher à l’idée qu’il pouvait s’agir du même homme. Cela faisait tant d’années, c’était impossible. « Désolée je t’embête avec mes histoires. Je m’appelle Lily-Rose, mais tu peux m’appeler juste Lily. Je suis dans la Lowell house. Enchantée. » termina-t-elle en lui tendant sa main, arborant un sourire adorable et bienveillant.


© ACIDBRAIN
(Invité)
Anonymous

Préférences de jeu
veritas
Invité
est en ligne
Invité

     
« La vie c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber. »
     lawrie & lily
     
     


     


Deuxième jour.


Mon sourire s’agrandit en entendant pour la première fois depuis longtemps la petite fille que j’avais connue. Même si l’affaire dont je m’occupais m’empêchait d’être moi-même, la joie de la revoir dépassait largement le cadre du rôle que j’étais censé interpréter. « Je suis ravi de l’apprendre, mademoiselle. » L’aidant maintenant dans le ramassage de ses effets, je fronçais parfois les sourcils en découvrant les dégâts que certains étudiants, peu soucieux du matériel et du respect dû à autrui, avaient causés à certaines pages de sa collection. Bien que je n’y connaisse rien à l’art, sous toutes ces formes, il ne fallait pas être un grand spécialiste pour s’apercevoir que certains de ses croquis étaient irrémédiablement fichus. « Je suis navré pour tes esquisses, sincèrement. » énonçai-je en me sentant quelque peu responsable du désastre. Fort heureusement, cela ne semblait pas avoir entaché la bonne humeur de Lily-Rose. La faute à mon accoutrement peut-être ? « La… ? » Oh, c’était de l’humour. Fort bien. Je n’y étais plus habitué depuis un bail. Ma vie se résumait généralement par un café noir le matin, un journal ou un livre dans la journée, du sport pour combler les trous et le travail ensuite. En bref, je n’avais pas de relations suffisamment épanouies avec le monde extérieur pour avoir pu affiner mes sens en matière d’humour, depuis près de 5 ans maintenant. « Très bien, je n’insiste pas. » lui dis-je en riant, levant les deux mains en l’air comme pour me dépénaliser à ses yeux.

Sa façon soudaine de m’observer, de me contempler même devrais-je dire, eut le don de me mettre mal à l’aise. Evidemment, ce n’était pas le fait qu’elle m’observa qui me dérangeait, mais la lueur que je lisais dans son regard. Comme si…elle venait de comprendre. Mais elle était si jeune à l’époque… « Oh, vraiment ? » répondis-je avec un fort accent écossais, feignant de sourire malgré le coup d’œil discret que je venais de jeter à droite puis à gauche du couloir dans lequel nous nous trouvions. « Et qui donc, puis-je savoir ? » lui demandai-je malgré tout, ma curiosité dépassant de loin mon souci de discrétion maintenant que j’avais l’assurance que nous étions seuls dans ce couloir désert. Le récit qu’elle me fit de notre histoire me troubla plus que je ne l’avais souhaité. Ainsi donc, sa mémoire s’était rappelée. Quant à ce qu’elle me faisait subir à l’époque, mes lèvres se muèrent en un indéfinissable sourire à l’entendre relater nos aventures passées. Elle était adorable comme petite fille, et j’avais toujours conservé précieusement en moi les souvenirs que nous avions construit ensembles. « Je suis persuadé que cela ne l’énervait pas du tout. Tu n’étais qu’une enfant, après tout. Et il n’était pas si adulte qu’il aurait bien voulu le faire croire. » la rassurai-je en riant, nostalgique à mon tour. « Tu ne m’embêtes pas du tout, au contraire. Je suis heureux de voir que tu ne m’as pas oublié, Lily. » finis-je par lui souffler en prenant sa main dans la mienne, une douceur qu’elle seule était en droit d’espérer de moi au fond des yeux.

J’avais hésité, à peine quelques secondes. Que se passerait-il si, un jour, dans un contexte particulier mais pris au hasard, elle venait à faire le lien entre l’homme qu’elle avait rencontré aujourd’hui et celui qu’elle avait connu autrefois ? Ma couverture tomberait, mais pire encore, elle ne comprendrait pas le mensonge que j’avais tenu à créer sans l’en informer, alors même qu’elle connaissait ma profession véritable, alors même que son père et moi avions toujours été de grands amis. Voilà pourquoi j’avais décidé d’enlever mon masque. Elle avait le droit de savoir ce pourquoi j’étais venu dans ce pays. Et plus encore, de retrouver l’adolescent qui s’amusait autrefois, avec elle, à jouer à la poupée. « Viens, viens avec moi. Ici, nous sommes trop remarquables. Allons au gymnase. Il n’y a personne à cette heure. » Attrapant sa main comme l’aurait fait un étudiant lambda alors que j’aurais été davantage tenter de la passer autour de mon bras, je la conduisis alors au gymnase, afin que nous puissions êtres plus tranquilles pour discuter. Tout expliquer.  

     
© ACIDBRAIN
(Invité)
Anonymous

Préférences de jeu
veritas
Invité
est en ligne
Invité

   
« La vie c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber. »
    lawrie & lily
   
   


   
Pour les esquisses détruites, ce n’était pas bien grave. Il y avait pire que cela. Et puis comme leur nom l’indiquait, il ne s’agissait que d’esquisses … Des bribes d’idées qu’elle avait ici et là annotées sur les pages pour éventuellement les concrétiser un jour sur une toile. Des idées, elle en avait tout le temps en ce moment, il ne serait donc pas bien difficile d’en faire d’autres. Quant au reste, son esprit avait failli passer à autre chose. Il était trop inconcevable que cela soit possible. Ou alors le hasard était grand, et le monde vraiment minuscule. Au fond d’elle, une petite voix lui avait donné suffisamment de confiance pour s’épancher, et se remémorer cet inconnu oublié. Comme si intérieurement, cette confiance tenait au fait qu’elle savait … Qu’elle avait su dès le premier regard. Mais que la raison, indicible, avait calmé ses conclusions pour l’empêcher de tourmenter un homme qui aurait très bien pu être un parfait inconnu, sorti de nulle part. Mais sa dernière phrase ôta chez elle tout doute. Son sourire s’agrandit, ses fossettes se creusèrent, alors que, radieuse, ses yeux semblaient pétiller d’une lueur nouvelle. C’était comme une enfant qui redécouvre que les contes de fée existent. « Lawrie ? C'est toi ? » C’était comme ça qu’elle l’avait toujours appelé. Monsieur Lawrie. Ou Lawrie tout court. Elle ne se souvenait même pas de son nom de famille, n’ayant retenu que cela. Les présentations formelles étaient superflues à l’époque. Elle haussa un sourcil énigmatique, un brin taquin. « Au fond, j’en étais sure. » Son sourcil énigmatique, quoique toujours taquin, se fit désormais plus accusateur, tandis qu’une première question la taraudait à présent. « Je suis sure que tu ne m’aurais pas dit que c’était toi si je n’avais pas eu un doute. » C’est alors qu’une seconde question vint la tarauder. Et elle était loin d’être la dernière. « Mais … Qu’est-ce que tu fais ici ? »

Et en effet, une myriade de questions lui vinrent à l’esprit. Son père ne lui avait plus parlé de lui depuis des années, signe qu’ils n’étaient probablement plus en contact. Pour quelle raison sillonnait-il ainsi les couloirs d’une faculté, alors même qu’elle savait pertinemment qu’il n’était plus étudiant depuis longtemps ? Habitait-il dans le coin depuis longtemps ? Tout un tas de questionnement qui furent interrompus par sa volonté de s’isoler. A sa suggestion, elle acquiesça d’un geste, refermant sa main autour de la sienne en regardant ici et là autour d’eux, jusqu’à ce qu’ils arrivent au gymnase. Elle ne venait jamais dans cet endroit. Cela résonnait un peu. Et un ballon de basket traînait dans un coin, visiblement délaissé et mis à l’écart par ses concurrents.  « Tu es bien la dernière personne que je pensais croiser ici. » ses doigts se refermèrent autour du ballon, tandis qu’elle se plaçait en face du panier, à quelques mètres de distance. Un œil fermé, une visée plus ou moins aléatoire, le tire ne fut pas bien puissant (notons la circonférence de son biceps, oui oui) mais atterrit contre toute attente dans le panier. Une petite danse de la victoire plus tard, et Lily se reconcentrait sérieusement sur Lawrence. « Sans t’offenser, dans mon souvenir tu étais plus … Grand. » Surement parce qu’elle-même était à l’époque minuscule. D’accord elle n’était toujours pas une grande perche, mais quand même. « Si Papa apprend que tu es dans le coin, et que tu n’es pas passé vider quelques bières avec lui, il sera inconsolable. Tu en as conscience ? Tu vas devoir trouver d’excellents arguments pour monnayer mon silence. » le taquina t-elle en allant s’asseoir en tailleur sur un tatami.



   
© ACIDBRAIN
(Invité)
Anonymous

Préférences de jeu
veritas
Invité
est en ligne
Invité

     
« La vie c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber. »
     lawrie & lily
     
     


     


Deuxième jour.


Lorsqu’elle m’offrit son plus beau sourire, comme de ceux auxquels j’avais droit autrefois et qui me faisaient toujours chaud au cœur, je sus que j’avais pris la bonne décision et que je ne le regretterais pas. « C’est bien moi. » confirmai-je alors mon sourire s’agrandissait peu à peu. « Hum, j’ai hésité c’est vrai. Mais pas dans le but de te mentir, loin de là. J’ai des raisons qui m’ont poussées à… » Je baisse la tête, et tout en riant doucement, lui montre de mes mains la tenue que je porte. « …de telles extrémités. » Ne suis-je pas ridicule ? Franchement ? Après quoi, Lily accepta de me suivre dans un coin où nous pourrions discuter sans crainte d’être observés ou écoutés. Au gymnase, vide ce matin-là, je jetais rapidement un œil aux quatre angles de la grande salle au cas où un couple d’amoureux avait eu la même idée que nous pour pouvoir s’embrasser tranquillement et une fois certain que nous étions bel et bien seuls, je me posais là, les mains dans les poches de mon pantalon, le regard franc et sincèrement heureux de retrouver une amie de longue date – bien qu’elle serait avant tout toujours une enfant à mes yeux – avec qui parler sans détours. « Je t’avoue que si on m’avait dit qu’un jour je devrais endosser le rôle d’un étudiant, je ne l’aurais pas cru moi-même. » Pendant qu’elle s’amusait à faire des paniers, je ne pouvais m’empêcher de constater à quel point elle avait changé. Grandi, surtout, cela va de soit. Mais même au niveau de ses traits, ses expressions…et cette bombonne qu’elle continuait de traîner avec elle. Je ressentis un pincement au cœur en songeant à sa maladie et à ses chances de guérison. Il fallait que j’en parle à mon vieil ami, le plus tôt possible. Voilà trop longtemps que nous ne nous étions vus, il y a tellement de souvenirs à rattraper. Un panier plus tard, sous mon œil vigilant et fier de son lancer, quoique tout aussi amusé par sa danse de la victoire, je ne pus me retenir face au commentaire qu’elle venait tout juste de me signifier concernant ma taille. « Ah Ah. Je dois reconnaitre, sans vouloir t’offenser, que dans mon souvenir tu étais plus petite. » répliquai-je du tac au tac. Humour ne fait pas de mal quand il est pris sur le ton de la légèreté. « Je n’aime toujours pas les bières, à mon grand soulagement. » Même si j’avais parfaitement compris là où elle voulait en venir. D’ailleurs, mon regard s’était aussitôt assombri au souvenir de son père que j’avais pas revu depuis trop longtemps. « Ton père, ça me regarde, Lily. » lui dis-je gentiment en allant m’installer à ses côtés. Non pas que cela ne la regardait pas, mais nous avions nos habitudes de « vieux » auxquels nul, pas même nos enfants – la sienne uniquement aujourd’hui- ne devaient apprendre ou s’en mêler.  « Je peux te dire la raison de ma venue dans cette ville et au campus, pour commencer. » Je n’avais quoiqu’il en soit, pas l’intention de lui parler du décès de ma famille. Son père s’en chargerait lui-même si nous venions à en discuter un jour, ou si Lily elle-même s’en souvenait et osait me poser la question de son propre chef. « Comme tu as dû le deviner, je suis ici incognito. Je n’ai pas quarante mais trente-deux ans. La police pense que je suis un trafiquant de drogues et j’ai accepté de travailler sous infiltration pour elle, afin de coincer le chef du réseau qui serait étudiant ou membre du personnel de cette université. En vérité, ce n’est qu’un prétexte que je lui ai servi sur un plateau. Si je suis venu dans cette ville, c’est dans le but de rendre service et un peu de paix à un couple d’amis à moi qui a perdu sa fille, qui aurait ton âge aujourd’hui, dans de dramatiques circonstances. » lui expliquait, d'humeur plus sombre, en posant mes coudes sur mes genoux, l’esprit ailleurs, le regard fixant le plancher pendant de longues secondes.

     
© ACIDBRAIN
(Invité)
Anonymous

Préférences de jeu
veritas
Invité
est en ligne
Invité

   
« La vie c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber. »
   lawrie & lily
   
   


   
Lily recherchait des bribes de souvenirs qu’elle aurait pu garder de Lawrence depuis toutes ces années. En réalité, il y en avait peu. Il avait été de ces âmes qui viennent, qui imposent leur marque un temps, puis disparaissent. Elle se souvenait de ce que son père avait pu en dire. Des quelques photos qu’ils avaient pu avoir ensemble. Et encore. Avec l’âge, elle admettait avoir oublié son existence, n’éprouvant pas de réelle nostalgie dans la mesure où les souvenirs de lui n’avaient pas été suffisamment vivaces pour la marquer à jamais. Elle avait quoi, cinq ans à l’époque ? Six ans ? Lui une vingtaine d’années tout au plus ? Elle était alors trop jeune pour s’en souvenir tout à fait, et pour l’oublier totalement, faisant partie d’une enfance lointaine pour elle, et une jeunesse perdue pour lui auxquelles ils n’appartenaient plus  l’un et l’autre depuis longtemps. « Je suis persuadée que tu t’en sortiras mieux que tu ne le penses. Regarde, tu as déjà le look parfait !» Au final, entre l’image qu’elle en avait autrefois, et le statut qu’il devait jouer aujourd’hui, il n’y avait pas une grosse différence. Hormis quinze années peut-être. Souriant à cet humour bienvenu compte tenu des circonstances, elle remarqua à la dérobée ce regard qu’il portait sur elle. Un peu empathique. Un peu triste. De ces regards qu’elle voyait de plus en plus chez son paternel, et qui avaient le don, d’une de l’exaspérer, et ensuite de la rendre elle-même triste. Comme si malgré tous ces sourires bienveillants qu’elle se forçait parfois à mimer, rien ne pourrait franchir la barrière de la maladie apparente. On la condamnait du regard, sans jamais se rendre compte à quel point il lui était difficile de vivre cette différence sans trop d’amertume. Aussi, sans vraiment savoir pourquoi, elle prit al sa remarque. Sa tonalité, cette ponctuation, ce rythme. Sur le coup elle se sentit irritée. Comme mise à l’écart comme une enfant en bas âge que l’on veut préserver. Il lui fit penser à une figure tutélaire sur le coup, un peu comme son père. Sauf qu’il n’était pas son père, et ne le serait jamais, même de façon symbolique. Lily avait tendance à vouloir protéger son père depuis quelques temps. Comme si après avoir été couvée pendant des années, elle avait enfin la force mentale de lui rendre la pareille, et d’être solide pour deux, afin de la décharger d’un poids d’une part, et d’être enfin son rempart d’une autre, alors même qu’auparavant il avait toujours tenté de la protéger de beaucoup (trop) de choses. « Lawrence. Ça te regarde autant que moi. Tu ne peux pas prétendre entrer dans une vie et en disparaitre quand bon te chante en pensant que cela ne concerne que toi et lui. Dans l’équation, nous sommes trois à présent. » A présent plus sérieuse, moins souriante, elle gardait néanmoins un calme mature, ne voulant pas paraître offensive. Juste qu’elle avait de plus en plus de mal à ce qu’on la traite comme une gamine.

A présent attentive, presque songeuse quant à ses explications, elle ne put s’empêcher d’afficher une mine désolée à la fin de son discours. Si elle avait bien compris, il avait donc deux affaires à résoudre. L’une officielle : celle de drogues, l’autre officieuse : une affaire … Personnelle ? Haussant un sourcil, elle ne dit rien pendant quelques instants. « Je ne dirais rien sur ta couverture. » promis-t-elle sans qu’il ait eu besoin de demander. Cela tombait sous le sens. « Je suis sincèrement navrée … Pour tes amis. » Soudain, alors qu’elle le scrutait, un doute vint l’assaillir. Un souvenir, mais trop confus pour déterminer s’il lui appartenait ou non. N’avait-il pas une famille lui ? Elle ne se souvenait pas. Quand ils s’étaient vu pour la dernière fois, pas encore. Mais par la suite … Il lui semblait que son père avait reçu des nouvelles … A moins qu’il s’agisse de quelqu’un d’autre. N’osant mettre les pieds dans le plat pour l’instant et trop pleine d’incertitudes, elle balaya cette idée de son esprit pour le moment, se concentrant sur ses propos plutôt que sur leur véracité profonde. « C’est vrai que toi, trafiquant de drogues … C’est à peine crédible. » dit-elle dans le but de détendre un minimum l’atmosphère, esquissant un sourire en demi-lune. Le plus tragique dans tout cela, c’est qu’elle parlait en connaissance de cause. « Si tu veux trouver le leader, tu dois trouver en premier son convoyeur. » Elle se fichait que sa phrase paraisse étrange, elle savait de quoi elle parlait. « Ce n’est pas celui qui se salie le plus les mains, vu qu’il ne deal pas. Mais il transporte et rend des comptes … En général. » Elle se souvenait alors de cette boîte que lui avait laissé Wolfgang avant de mourir. Elle avait rarement pris le temps de se pencher dessus, c’était remplit de sortes de carnets de comptes, de plans, et de codages, et de disquettes de sauvegardes. Il lui avait juste demandé de planquer la boîte, de ne jamais en parler à personne, et surtout, qu’elle demeure introuvable. Même son père ignorait son existence pour l’instant. Mais peut-être que cela pourrait servir à Lawrence pour comprendre le mécanisme du trafic … Dans le fonds, de l’un à l’autre, il ne devait pas y avoir de réelle différence. Hésitante quant au fait de lui parler de cette boîte, elle ouvrit la bouche pour parler, regarda autour d’elle, puis se ravisa. Non, il ne valait mieux pas. Ni ici, ni maintenant. Elle n’était pas encore sure de pouvoir lui faire confiance. Plus tard, peut-être. « Que s’est-il passé, pour … Pour leur fille ? » osa-t-elle enfin, soucieuse, souhaitant avant tout comprendre dans quel histoire il s’était embarqué.

   
© ACIDBRAIN
(Invité)
Anonymous

Préférences de jeu
veritas
Invité
est en ligne
Invité

     
« La vie c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber. »
     lawrie & lily
     
     


     


Deuxième jour.


Parfait pour ce rôle, certes. Parfait tout court, certes non. J’avais tout l’air du génie de service, à la fois cultivé, intelligent quant aux faits d’actualité, aux devoirs à faire et aux cours à réviser, mais totalement ignorant, naïf même lorsqu’il s’agissait de l’apprentissage que vous enseignait la vie. Avec les femmes par exemple, j’étais celui qui était gauche, lourd, voyeur, dragueur compulsif qui se faisait éternellement jeter. Bref, un total paradoxe quand on connaissait à quel point dans ma vie d’autrefois, je n’éprouvais aucune difficulté à séduire le sexe opposé. Quoiqu’il en soit, heureux malgré tout de constater que ma côte vestimentaire était au plus haut niveau auprès de ce personnage que j’interprétais, je cessais soudain tout mouvement en entendant le ton coupable avec lequel la jeune femme venait de s’adresser à moi. Non, pas coupable, accusateur. Une touche de déception pour un zeste d’irritation. L’aurais-je vexé inconsciemment ? Les sourcils froncés, la bouche fermée, je préfère garder le silence le temps que Lily recouvre son calme, et par politesse, que je puisse prendre la parole sans craindre de l’interrompre. Mon prénom épelé, plutôt que le surnom qu’elle avait coutume de me donner, confirmait d’abord mes doutes. Finalement, il n’était question que de l’esprit de la famille. De cette sorte de famille d’adoption que nous avions été, son père, elle, ma famille et moi. Je comprenais ainsi où elle voulait en venir et en quoi je l’avais blessée. Sauf qu’elle m’avait peut-être mal compris. Tristement, un sourire prend place sur mes lèvres, l’espace de quelques minutes alors que je l’observe en silence, une main fourrée dans la poche de mon pantalon. « Pardonne-moi, Lily. Ce n’est pas ce que j’ai voulu dire, et ce n’est pas ainsi que tu devais le comprendre. » débutai-je pour apaiser ses craintes et rétablir une atmosphère plus chaleureuse dans le gymnase. Sans crier mes torts, je reconnaissais que je n’avais pas voulu la blesser, de quelques manières que ce soit. Surtout pas elle. « Je prendrais des nouvelles de ton père, Lily, je te le promets. Et je lui expliquerai tout, la raison de ma venue, et la cause de ma…disparition soudaine. » soufflai-je à demi-mot en ancrant mon regard au sien. « Je ne veux pas que tu penses que je suis parti comme un voleur. Vous comptiez autant pour moi que je sais compter pour vous. » continuai-je d’une voix calme et posée. « Mais ce que tu dois comprendre, Lily, c’est que ce n’est pas à toi d’en référer à ton père. Evidemment, je comprends que tu veuilles l’en avertir, tout comme je ne t’en empêcherai pas si tu le faisais. Mais il y a certains détails que je ne te dirais pas, et dont je ne peux, pour le moment, ne discuter qu’avec lui. Ne crois pas que je ne te fais pas confiance. » Lui aurais-je révélé ma présence si ça n’avait pas été le cas ? « C’est juste que je ne sais pas moi-même par où commencer, et que ton père sera sans doute la personne la plus…apte à te raconter ce qui s’est passé. » lui expliquai-je en m’avançant tranquillement dans sa direction. Un parent sait toujours mieux comment trouver les mots pour épargner son enfant, il le connait mieux que quiconque. Et puis, je craignais que de relater à Lily le décès de ma famille ne me fasse replonger vers mes anciens démons. Or, elle n’avait pas besoin de voir ça, ni moi qu’elle apprenne l’enfer que j’avais vécu et qui me torturait encore la nuit, depuis lors.

« Je t’en suis reconnaissant. » la remerciai-je après qu’elle m’ait fait la promesse de n’alerter quiconque quant à mon identité réelle. Evidemment, j’avais pas eu besoin de le lui demander, je savais d’ores et déjà que je pouvais lui faire confiance, et ce, depuis plus de vingt ans. « Merci. » Quant au trafic de drogues qui, je l’espère en un sens, n’existait peut-être pas mais auquel j’étais censé mettre fin, je retins un rire lorsqu’elle osa mettre en doute ma crédibilité de dealer. Ou pas. « A peine seulement ? » J’aurais préféré pas du tout ou complètement. Même si je suppose que c’était de l’humour déguisé de sa part. Après quoi, Lily me fournit de précieuses informations – étant agent, je n’avais jamais eu à m’occuper de trafiquant de drogues mais de criminels, le modus operandi n’étant pas exactement le même – sur la manière d’organiser mes recherches. Sur le moment, mes sourcils se froncèrent imperceptiblement alors que je m’interrogeais sur les causes qui faisaient qu’elle pouvait être au courant de ce type de manigances. « On suit la trace de son père, miss Hopkins ? » lui demandai-je mi amusé, mi sérieux. « Merci, je me renseignerai selon le profil que tu viens de me soumettre. » lui assurai-je alors en décidant de changer de sujet, pour éviter qu’elle ne comprenne ma suspicion à son attention.

« Oh, tu sais, une histoire vieille comme le monde. Un garçon rencontre une fille. Il cherche à la séduire. La fille n’est pas intéressée, elle refuse. Ca ne plait au garçon qui devient insistant. Le lendemain, le garçon a disparu et la fille est allée porter plainte au commissariat. Un an plus tard, elle ne parvient toujours pas, malgré l’aide de sa famille, de ses proches et des médecins à oublier ce qui s’est passé. Elle laisse une lettre à ses parents pour expliquer son geste et disparait à son tour. » expliquai-je d’une voix triste et rauque à la fois. Je n’avais pas envie d’entrer dans les détails, même si je connaissais toute l’histoire parce que racontée par ses parents, dans une lettre et par la police dans un témoignage. Le monde est parfois si moche qu’on se demande encore comment faire pour y vivre heureux. Ne serait-ce pas plutôt de la survie ? « Parlons de choses plus gaies, veux-tu ? Quelles études poursuis-tu ici ? En cours, ça se passe bien ? Tu as fait des rencontres ? Un petit-ami peut-être ? Promis, je ne dirais rien à ton père pour lui éviter de faire une syncope. » osai-je ajouter avec un sourire malicieux et l’œil taquin.


     
© ACIDBRAIN
(Invité)
Anonymous

Préférences de jeu
veritas
Invité
est en ligne
Invité

 
« La vie c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber. »
  lawrie & lily
 
 


 
Lily comprit mieux où il souhaitait en venir, ses traits cessèrent alors de se raidir, même si au fond, une bribe de mécontentement continuait de la troubler. Qu’avait-il de si important à cacher pour refuser de lui en parler, et pour préférer en parler expressément avec son paternel ? Elle comprenait l’esprit de discrétion, le fait qu’ils se connaissaient depuis longtemps et qu’il devait régner entre eux une estime professionnelle. Mais elle ne pouvait s’empêcher d’être agacée par le fait d’être mise à l’écart. Toute sa vie son père avait voulu la prémunir de dangers,  et cela ne l’avait jamais sauvée pour autant. Il l’avait compris récemment, et faisait désormais plus preuve de franchise qu’auparavant. Mais elle avait du mal à lui pardonner certains de ses silences, et de ses mensonges. Tentant de tempéré son caractère parfois trop … Revêche, elle ravala la réplique qu’elle avait en tête, lui préférant un silencieux instant durant lequel elle décida de se résigner. Oui il avait compté pour eux. Mais en toute honnêteté, son silence depuis quelques années avait dû davantage affecté son paternel qu’elle-même. Son souvenir était trop vague dans son esprit pour que son absence ait pu la faire souffrir d’une quelconque façon. Mais elle comprenait que l’inverse ne soit pas forcément réciproque. Il devait avoir un meilleur souvenir d’elle étant enfant, qu’elle de lui étant un jeune adulte. « Je ne lui dirais rien, tu feras comme bon te semble. » dit-elle avec un petit soupire de dépit. De toute façon, le côté relationnel fusionnel avec son paternel commençait à s’effriter, rendant les échanges plus courts, formels, et furtifs. S’accoudant sur son genou replié, sa joue dans sa main, et une moue sur le visage pendant quelques instants, elle finit par afficher un sourire entendu. « Mais sache que le samedi soir, on mange italien. Tu es le bienvenu quand tu le souhaites. » Il prendrait cette « invitation » comme il l’entendrait, au moins avait-elle eu le réflexe de le convier dans leur maison pour un repas. Ou deux. Ou … Comme il souhaiterait au fond. « Tu n’es pas assez tatoué pour être crédible en trafiquant. » continua-t-elle avec un rire amusé. Oui, non, le rôle d’étudiant lui allait à ravir à côté de celui de gros trafiquant à moustache, en veston en cuir. « Peut-être bien, qui sait ? Tu penses que je ferais un bon agent ? » Un sourire fin, et énigmatique s’étira le long de ses lèvres rosées, dissimulant derrière lui un souvenir douloureux, et l’idée que cet avenir n’était pas fait pour elle. Elle préférait qu’il pense qu’elle tenait ces informations d’un père pédagogue que d’un amour clandestin perdu. Cela éviterait les malentendus, les regards tristes, les cœurs lourds et les quiproquos. Elle ne voulait pas en parler pour le moment, à quiconque. Les morts n’étaient pas faits pour être déterrés … Leur souvenir, encore moins. Surtout lorsque ces souvenirs pouvaient représenter un danger insoupçonné. « Mais pour être agent, il me faudrait une meilleure résistance physique. » elle tapota sa bombonne avec amusement, une légèreté étrange compte tenu des circonstances, la considérant presque comme une vieille amie toujours là pour elle. « Pour l’instant c’est pas gagné. Mais bon, j’ai quand même quelques bases d’auto-défense. J’ai été à la bonne école. » Elle se souvenait des bagarres dont elle avait fait partie, et dont elle s’était plutôt bien tirée au final. Comme quoi, un père agent, des fois, ça peut être utile. Son récit lui fit en tout cas froid dans le dos, et un profond pincement au cœur. Elle ne savait comment elle aurait réagi, à la place de cette jeune femme … Probablement comme elle.

« C’est terrible … Si jamais tu as besoin d’aide, ou quoi que ce soit, n’hésite pas surtout. » Et elle le pensait. Même s’il lui était difficile d’envisager ce qu’il ressentait. C’est toujours différent lorsque cela arrivait à quelqu’un de votre entourage, et quand cela touchait quelqu’un que vous ne connaissiez pas du tout. L’empathie était la même, mais la souffrance elle, n’avait sans doutes rien à voir. Pour l’heure, elle n’insista pas, ne voulant pas non plus que leurs « retrouvailles » sombrent dans le glauque et le morbide. « Houla, trop de questions d’un seul coup ! … » dit-elle en riant, retrouvant joie de vivre et bonne humeur. « Aloors … Je suis en arts. Oui je gribouille toujours autant un peu partout, sauf que j’espère m’être améliorée un minimum depuis le temps … Pour l’instant ça se passe très bien. J’ai retrouvé ici un vieil ami d’enfance. Au final l’intégration n’est pas si mal, mais je ne suis là que depuis quelques semaines, donc, j’espère que cela s’améliorera encore dans les jours à venir. Quant au reste … » Elle hésita un instant. Lily avait conscience qu’elle était difficile, qu’elle ne sortait pas avec n’importe qui, et qu’elle devrait sans doutes en profiter. Mais elle ne pouvait pas … Elle ne pouvait plus. Si jeune, mais déjà si vieille au fond. Elle faisait en sorte, bien souvent, d’être la bonne amie à laquelle on s’attache un temps… Mais jamais à être une femme que l’on aime toute sa vie. C’était trop dur. Elle ne pouvait pas ajouter cela à la liste de ses fardeaux. Et puis de toute façon,  elle considérait l’amour comme une futilité dont on pouvait se passer. Une excuse sans doute. Mais une excuse légitime, lorsque le futur est incertain. « Je dois être un peu fleur bleue au fond, mais je ne suis pas prête à sortir avec les premiers venus sous prétexte qu’ils auraient un joli minois. Alors, pour l’heure, je suis bien toute seule. » Un fin sourire de nouveau. Même si ses paroles étaient presque tragiques, elle ne semblait pas malheureuse pour autant. Résignée depuis longtemps de ce côté-là. Affectée aussi par un amour perdu qui lui avait causé une souffrance qu’elle ne voulait pas revivre une seconde fois en s’attachant à quelqu’un d’autre. « Et puis, entre nous, je suis pas vraiment un bon parti. » Humour un peu sombre, de l’autodérision. Mais elle ne cherchait pas à se faire plaindre, pas du tout. « Ce serait égoïste de ma part d’aimer quelqu’un alors même que je ne suis pas sure de pouvoir faire vivre cet amour très longtemps. » Toujours à penser aux autres avant de songer à son propre bien être. Cela faisait partie de sa nature profonde. Ou alors était-ce en partie une excuse qu’elle se répétait pour n’avoir aucun regret. « Et toi ? Qu’es-tu devenu depuis toutes ces années ? A l’époque, tu venais toujours seul donc tu devais être trop jeune pour être marié … Mais depuis, tu as bien dû … Trouver un point d’encrage quelque part non ? Papa m’en avait peut-être parlé, mais, j’admets avoir oublié certains détails … Ca fait si longtemps … Et puis l’esprit est si sélectif quand on est enfant … »


 
© ACIDBRAIN
(Invité)
Anonymous

Préférences de jeu
veritas
Invité
est en ligne
Invité

     
« La vie c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber. »
     lawrie & lily
     
     


     


Au moins était-elle raisonnable. Sans doute que cela était dû à la bonne éducation anglaise que lui avait inculquée son père. Je voyais bien que mon silence la dérangeait. Et dans son esprit nul doute que mes secrets n’avaient pas à être gardés pour son seul géniteur mais qu’elle devait les partager aussi. Hélas, ce n’était pas ainsi que je voyais les choses. Lily avait beau connaître mon identité, et son père être un agent, cela ne faisait pas pour autant d’elle un jeune agent à son tour. Ni une jeune femme à même de pouvoir réagir comme nous l’aurions fait dans de telles circonstances. C’était non seulement une question de sexe, car oui les femmes réagissent de manière différente d’un homme, de profil puisque je n’imaginais pas que Lily puisse, un exemple parmi tant d’autres, presser la détente un jour en faisant preuve de sang-froid, juste parce qu’il s’agissait d’une mission de routine, enfin, parce qu’à mes yeux, bien qu’elle ne soit plus une enfant, je ne la considérais pas encore tout à fait comme une adulte accomplie non plus. Et donc à même d’avoir son mot à dire sur la question. « Je te remercie pour l’invitation, dès que j'aurai un créneau de libre, je n’y manquerai pas. » lui répondis-je, sincère et souriant. « Tatoué, dis-tu. Je ne savais pas que les tatouages étaient devenus à ce point un signe de gang. » ironisai-je en songeant à ceux qui ornaient mon corps, mais qu’elle ne pouvait, évidemment, pas voir là où ils étaient situés. Encore qu’elle avait employé le terme « assez » qui sous-entendait qu’un ou deux n’étaient pas suffisants pour faire partie de l’élite criminelle, visiblement. Je me demande où et qui, lui a appris ce genre de choses. « Hum, possible. Je ne suis pas celui qui recrute les agents alors je ne peux hélas pas affirmer que mes critères et ceux de l’agence sont égaux. » la taquinai-je. Bien que je supposais qu’elle plaisantait à ce sujet, j’espérais et je suppose qu’il en était de même pour son père, que Lily ne suivrait jamais la voie que nous avions prise. Ce n’était pas une question de sexisme en songeant que, parce qu’elle était une femme, elle saurait moins bien y faire dans cette profession. Je connaissais des agents de terrain féminins qui étaient plus féroces qu’un bulldog et bien plus douées que certains agents masculins. Appelons-ça l’étouffant besoin de surprotéger une jeune femme qui me tient particulièrement à cœur, comme si elle faisait partie de ma propre famille. « Hum, je suis d’accord. » murmurai-je pour moi-même. Avais-je bien entendu ? Peut-être avait-elle été sérieuse, finalement, en songeant à son futur en tant qu’agent ? Peut-être que son père en savait plus que moi sur ses aspirations. Encore une chose dont nous devrions discuter seul à seul, lorsque nous nous reverrons. « Oh ça, je veux bien te croire ! » lâchai-je en riant. Son père n’était peut-être pas agent de terrain comme moi, mais en tant que qu’agent du MI6, même derrière un bureau, l’agence vous apprend de toutes façons à savoir manier différentes armes et combattre sur la base de nombreuses techniques.

« Je reconnais là ton grand cœur, Lily, merci. » Mais non, je n’avais pas besoin de son aide pour l’instant. Et je me demande même si un jour j’en aurais besoin, ou si, dans le cas où ça se présenterait, je la lui demanderais. La peur qu’elle-même se fasse agressée pesait trop dans la balance pour prendre un tel risque. Mais nous verrons plus tard, pour le moment, je profite surtout de nos retrouvailles. « En arts, d’accord. » Pas de chance, je n’y connaissais rien en art. A part toucher un peu de piano et gratter ma guitare fut un temps – j’avais arrêté au décès de ma famille – la peinture, le dessin, l’art visuel, l’architecture, je trouvais ça tout à fait grandiose, mais je n’y comprenais rien du tout. « J’en suis persuadé. » Qui pourrait ne pas se lier d’amitié avec une jeune femme aussi attachante que l’était Lily, franchement ? Encore qu’à son âge, les garçons et les filles ne sont pas forcément très tendres entre eux, loin de là. C’est l’époque des incompréhensions, où l’on se cherche encore, où l’on découvre plus en détails, où l’on juge et l’on est jugé à son tour. L’heure des premières amours et des premiers chagrins. « Et bien je suis heureux de l’entendre. » Je n’en attendais pas moins d’une jeune fille qui avait reçu son éducation et avec un tempérament comme le sien. « Je suis certain que tu sauras faire le bon choix le moment venu. Même si j’ai du mal à croire qu’il n’y a que des « jolis minois » sans cervelle au sein de ce campus. » la taquinai-je à nouveau avec un sourire malicieux. « J’ai rencontré des jeunes gens très biens ici. Bon, un peu gauches parfois auprès de la gent féminine, mais avec un bon fond, de bonne famille, cultivés, et et et…célibataires ! » ajoutai-je en levant mon doigt en l’air comme si le simple fait qu’ils soient célibataires était une preuve en soi. Sauf que je n’avais pas compris. Et que je venais de le faire. Lorsque j’avais rencontré son regard hésitant, douloureux. Que j’avais dévié les miens sur cette bombonne qu’elle avait fixée quelques minutes auparavant. « Lily, ne dis pas ça. » murmurai-je en me rapprochant de la jeune femme pour poser ma main sur la sienne, reposant sur ses genoux. « Tu es une très belle jeune fille, avec d’innombrables qualités tu sais. Tu es généreuse, passionnée, curieuse, un peu trop peut-être… » soupirai-je avec humour avant de continuer. « …tu es intelligente, tu t’intéresses à tout et à tout le monde. Un jeune homme serait chanceux de t’avoir à son bras, crois-moi. » résumai-je en soulevant son menton de mon index pour l’obliger à me plonger ses yeux dans les miens. « Ce n’est pas parce que tu es malade que tu n’as pas le droit au bonheur toi aussi, Lily. Détrompe-toi. Et ce qui serait égoïste serait de prévaloir de la décision d’un homme à qui tu plairais sous prétexte que tu ne crois pas qu’il puisse t’aimer autant que toi tu l’aimerais. » Espérant qu’elle avait compris là où je voulais en venir, et prêt à me répéter aussi souvent que possible pour que Lily comprenne que son bonheur passait bien avant sa maladie, même si elle ne le croyait pas elle-même, mes traits se figent et se crispent légèrement lorsque ses questions se ramènent à ma propre existence. Mon sourire s’évanouit sans disparaître totalement cependant. « Et bien, ma foi, j’ai beaucoup voyagé. L’Inde, la France, l’Irlande, la Russie. J’avais besoin de changer d’air. » Devais-je m’arrêter là ? Elle finirait forcément par me demander pourquoi. Et le secret n’était pas si grand finalement, elle méritait de savoir, de comprendre, même si tout ne pouvait être révélé ici. « Tu étais si jeune… oui, je me suis marié, Lily. C’était en 2009, je venais de fêter mes 33 ans à l’époque. Elle s’appelait Catherine. Un an plus tard, et je suis devenu le père d’une petite princesse. Nous l’avons appelée Jane, en hommage à sa grand-mère. » Peu à peu, ma voix s’éteignit. Je n’aurais pas cru que d’en parler feraient remonter les vieux souvenirs à la surface. Tout à coup, je me revoyais dans notre jardin, en train de courir derrière ma fille qui riait en cherchant à m’échapper. La première fois qu’elle a boudée parce que je l’avais piqué avec ma barbe en lui volant un baiser sur la joue. Ses premiers cours de natation. Le chaton qu’elle avait fini par faire acheter à sa mère avant de me convaincre avec ses grands yeux bleus lorsque j’avais voulu le ramener au chenil. Mes mains se croisent, mon cœur s’effrite et ma peine est toujours intacte. Il n’y a plus aucune trace de joie dans mon regard ni sur mes lèvres. Je ne la regarde même plus, les yeux fixant un point invisible au sol. « C’était il y a six ans. » prononçai-je à faible voix, l’air absent.


     
© ACIDBRAIN
(Invité)

Préférences de jeu
veritas
Contenu sponsorisé
est en ligne
(Contenu sponsorisé)