Narlie ▲ Un nuage de lait

J'avais été de garde cette nuit, j'avais donc bossé de dix-neuf heures jusqu'à cinq heures du matin, puis j'étais rentrée pour me reposer un peu, histoire de ne pas faire un malaise dans la rue, avant de partir pour mon boulot à mi-temps vers dix-sept heures. Je venais principalement pour remplacé une collègue qui était tombée malade. Evidemment elle avait les horaires que personne ne voulait, de la fin d'après-midi jusqu'à la fermeture, et j'avais été la seule assez gentille pour accepté de la remplacer. C'est donc derrière le comptoir que je finissais mon après-midi et entamais ma soirée, servant café sur café à tout plein d'étudiant affamés qui sortaient de cours. Puis vint dix-neuf heur et je pu enfin me poser et jouer sur mon portable. A cette heure-ci c'était vraiment très calme, puisque l'on s'approchait de la fermeture. Je verrouillais rapidement mon iphone lorsqu'un beau brun rentra dans le café. Il observa un moment les affiches sur lesquels figuraient les différentes commandes avant de s'approcher, de me saluer, et de commander un latte crème brûlée. « Quel taille votre latte ? Grand ? petit ? » demandais-je tout en appuyant sur l'écran tactile de la caisse.

Il m'indiqua qu'il voulait un grand latte, j'ajoutais donc l'information à sa commande sur mon écran alors qu'il observait la vitrine. Il ajouta ensuite un cinnamon roll et je hochais la tête en tapant sur l'écran tactile de la caisse. « ça sera tout ? »  demandais-je alors qu'un groupe d'étudiants franchissaient la porte du café et s’avançaient à leur tour au comptoir. « ça vous fera 6,57$. » déclarais-je. « Votre prénom ? » demandais-je machinalement, le notant sur le ticket de caisse que je gardais jusqu'à ce que la commande soit prête. « Je vous appellerais quand ça sera près. » ajoutais-je en lui souriant, avant de m’atteler à la préparation de sa commande. Je pris en même temps en charge les nouveaux arrivant, étant seule pour les accueillir puisque pour le moment l'autre collègue qui faisait la fermeture avec moi était entrain de nettoyer les tables un peu plus loin. Après quelques minutes la commande du beau brun fut enfin prête et je sortais mon marqueur noir pour écrire son prénom sur son gobelet. Neko ? Neycko ? Néco ? aucune idée en faite. Je finis par écrire Neykko, en esquissant un sourire amusé. C'était peu courant comme prénom, il ne pouvais pas m'en vouloir si ?

Une fois le latte crème brûlé près, j'attrapais à l'aide d'une pince un cinamon roll et le glissais dans un petit emballage en papier. Je posais le tout sur une serviette à coté du café et du ticket de caisse avant d'appeler le fameux Nequo, Néko, rooh qu'importe, d'appeler le beau brun qui avait passé cette commande ! C'étant installé tout près, il se leva rapidement pour rejoindre le comptoir et récupéré sa commande que j'avais laissé là. On prépare, on appel la personne, puis on passe au client suivant, d'où l'utilité d'écrire le prénom sur la commande, afin que les clients qui viennent pour chercher la leur soit sûr de la trouver. C'était supposé être utile, et pourtant : j'adorais écrire n'importe comment le prénom des gens sur leur commande. Ce n'était pas pour qu'ils prennent le mauvais café, non. C'était simplement ma façon à moi de leur dire : "Oui je vous prépare votre café, mais ne me prenez pas trop de haut." Mal écrire le prénom de quelqu'un c'était un bon moyen de le faire redescendre sur terre et de lui foutre un petit coup dans son ego surdimensionné. Je n'étais pas pour autant totalement mauvaise non. Parfois je me laissais même aller à des mots doux ou des compliments, histoire d'illuminer la journée des clients. Bon ce soir, il était trop tard pour illuminé la journée de qui que ce soit, et il fallait bien avoué que, que je le veuille ou non, je ne savais pas écrire le prénom de ce jeune homme. Je ne l'avais jamais entendu avant en faite. Autant, écrire Jessica : "Jesika". La oui c'était juste pour embêter le monde. Mais son prénom à lui, c'était un véritable mystère. J'avais donc laissé parler mon imagination et ce côté artistique que je n'avais pas et écrit "Neykko". Je me remis au boulot servant le groupe d'étudiant et me lançant dans la préparation de leur café alors que le fameux Neykko revenait me voir. Il me demanda pourquoi j'avais écris ça sur son gobelet et j'en conclu qu'il était vexé que j'ai mal orthographié son prénom. « C'est votre prénom... enfin je me doute que je l'ai écris n'importe comment.» dis-je en pouffant de rire, avant de reprendre mon sérieux et d'ajouter: « désolée. Ne m'en voulez pas la journée à été longue, je m'amuse avec ce que je peux. » J'esquissais un petit sourire, innocent, en espérant qu'il me pardonne.

Un ''y'' en moins et remplacé le second ''k' par un ''h'' ? Du coup c'était… Nekho ? Je n'aurais jamais deviné qu'il pouvait y avoir un ''h'', je me coucherais moins bête. Puis rapidement vint une question étrange : A quoi ça sert d'écrire le prénom ? Je haussais les sourcils, étonnée d'entendre ça, et surtout, étonnée qu'il précise que c'était le premier café qu'il voyait fonctionner ainsi. « 90% des cafés et chaînes de restaurations rapides fonctionnent comme ça... » dis-je perplexe tout en faisant couler le latte caramel qu'avait commandé l'une des étudiantes du groupe. « Vous n'êtes pas d'ici ? » Une ville comme celle ci, et un campus comme celui-ci regorgeait d'étranger, c'est vrai. Mais pourtant beaucoup de personne avec un fort accent se trouvaient être du coin. J'avais donc appris à ne pas juger les gens par rapport à leurs accents ou leur anglais hésitant. Je mis rapidement le couvercle sur le gobelet du latte caramel avant de le poser sur le comptoir. « On écrit le nom sur la commande pour éviter le temps d'attente. Si vous voulez un café et que vous attendez à la caisse qu'on vous le serve : les autres clients vont  devoir attendre derrière vous. Alors que si vous passez commande et partez attendre plus loin : on peut continuer à prendre les commandes des suivants et à les préparer. » je marquais un courte pose, prenant un donut à l'aide d'une pince, avant de le joindre au reste de la commande de l'étudiante. « On écrit le nom dessus comme ça quand votre commande être prête …. » J'indiquais du bout du doigt le prénom que j'avais écris un peu plus tôt à l'encre noir, sur le gobelet du latte : ''Tiffany''. «  … on l'appel. Et il ne vous reste plus qu'à venir la chercher, pendant que nous, on passe au client suivant. » Je joins l'explication à la pratique, en appelant la fameuse Tiffany, avant de passer à la commande d'un de ses amis. Je ne savais pas si cette explication était très clair, en faite, c'était bien la première fois que je me retrouvais à expliquer ce genre de chose à quelqu'un, mais bon... j'aurais essayé.

Un égyptien ! C'était la première fois que j'en rencontrais un, l'idée qu'il vienne d'un pays si chargé d'histoire me fascinait. « J'avais jamais rencontré d’Égyptien avant ! » Il m'avoua qu'il n'était là que depuis un mois et qu'il n'y avait pas toute ces enseignes dans son pays. Je hochais simplement la tête, comprenant du coup tout ces questions qu'il me posait. Je lui expliquais donc rapidement le système, en espérant être assez clair, puisque la chose me semblait tellement évidente que j'avais un eu de mal à la justifier. Je finis de préparer la commande d'une jeune femme avant de préparer la suivante, lorsque Nekho fit une remarque qui me fit immédiatement pouffer de rire. « Oui, prendre en photo sa commande c'est presque une tradition j'ai l'impression. » admettais-je. « Quand la boisson est bien préparée, quand le prénom est écrit bizarrement ou quand le serveur laisse un petit mot... bref tout est prétexte à le mettre sur instagram. » Et étant serveuse ici, je pouvais le constater, bon nombre de ceux qui venait récupéré leur commande avait leur portable à la main, près à immortalisé ce moment pourtant devenu si banale.