AGYLA → this is what it takes

De savoir que ma soeur allait si mal qu'elle avait dû retourner en Suisse, alors que j'aurais dû l'aider, être là pour elle... Je sais pas ça me faisait mal. Pourtant nous n'avions jamais été particulièrement proche elle et moi mais malgré tout ce rôle me revenait pour toutes les fois où elle avait essayer. Enfin ces choses, je ne devais pas les laisser paraître, parce que ce n'était pas mon genre. Puis cacher mes émotions c'était facile. Je me plongeais à fond dans mes études faisant genre que c'était uniquement pour le bien de mes notes alors qu'une fois de plus ce n'était qu'une excuse qui couvrait un plus grand manque. Au fond, y avait-il encore des gens qui voulaient connaître la vérité ? Comme tous les jeudis j'étais là, dans la cafétéria d'Harvard, à manger mon mcdo toute seule à ma table en attendant que le temps passe avant pour me rendre à mon prochain cour. J'aimais cette solitude qui était mienne et où je n'avais pas un rôle à jouer. Je ne prenais même pas le temps de regarder qui se trouvait aux alentours et pourtant ce n'était pas n'importe qui qui s'approchait.

Manger à la cafétéria d'Harvard ce n'est vraiment pas mon style. Mais Dante venait d'annuler notre repas de midi. C'est donc avec un sachet de chez McDonalds que je me dirigeais vers l'université et la cafétéria. Je déteste manger seule et me retrouver face à un mur au fast food était pire que tout pour moi. Je trouverais bien quelqu'un avec qui parler, quelqu'un à qui faire tourner la tête ou à qui raconter ma vie. Plus vraiment mon style mais bon, je pourrais faire un effort si ça me permettait de me sentir moins seule. Tout est dans le profit avec moi. Je pousse la porte de la cafétéria et glisse mes yeux sur cette dernière. C'est plein de geek et d'intellos. Quelques intellos de mon cours de multimédia me font des signes et je préfère les ignorer. Me faire voir avec ces rats de laboratoires ? Non merci. Et puis, je n'aurais rien à leur raconter franchement. Je continue de traverser la cafétéria et reconnaît Agathe de profil. Agathe, ma douce Agathe... Elle m'avait terriblement plu l'année dernière mais je m'étais retrouvée face à un mur. Comme avec beaucoup de monde après tout. Non pas que j'avais essayé de me glisser dans les culottes et caleçons de tout Harvard mais bon, quand même... " Je peux m'asseoir ? " Demandais-je en souriant à la magnifique blonde. Je ne sais pas si elle s'est ce qui s'est passé pour moi pendant ces quatre derniers mois. J'en doute. Et ça sera pas plus mal. Ça fait du bien de trouver des gens qui ne vont pas ronchonner parce qu'on a disparu - placée sous programme de protection des témoins après avoir été déclarée morte - sans rien dire.

La solitude avait quelque chose de très plaisant selon moi, ça permettait de se retrouver en phase avec soi-même. Si je mangeais toujours toute seule ce n'était pas par manque de compagnie, juste parce que je la détestais cette compagnie. Je n'avais pas besoin de quelqu'un qui m'observe pendant que je m'empiffre de sandwich. Cependant ce n'est pas non plus pour autant que j'envoi balader toute personne qui prend la peine de s'approcher et de m'adresser la parole. Comme cette douce voix qui venait de se faire entendre. Je fus surprise de croiser le regard de la belle Kyla en levant les yeux, cette petite je la connaissais plutôt bien. « Je ne refuse jamais d'aussi charmante compagnie, princesse. » Je lui rendis son magnifique sourire, sincère. Il faut dire que j'étais surprise qu'elle vienne me voir après la façon dont les choses c'était brusquement terminée lors de nos derniers échanges. Pourtant je n'avais aucune envie de la repousser cette fois car malgré tout elle me plaisait bien, elle avait un certain charme et surtout elle savait dans quoi elle s'aventurait avec moi. J'avais été claire sur mes intentions.

La Kyla que j'avais été n'aurait jamais adressé la parole à Agathe. Elle aurait continué son chemin, son petit coeur brisé en mille morceaux. Mais je ne suis plus comme ça. Et ce qui s'est passé ne m'atteint plus. Si je devais ronchonner et éviter toutes les personnes qui m'ont fait du mal, je n'aurais vraiment aucun amis. Alors ok, j'ai dévoilé ma flamme à Agathe, je lui ai dis qu'elle me plaisait énormément et je me suis pris le vent de ma vie mais ce n'est pas bien grave. Elle est toujours très belle à regarder et si je ne peux pas la toucher, je trouverais bien quelqu'un d'autre. Il existe des tas de jolies blondes qui ne me repousseront pas comme elle l'a fait. Ouvrir son coeur, c'est la fin du bonheur. Je viens de le comprendre, c'est comme ça. Il m'aura fallu vingt-deux ans et un nombre de coups incalculables pour s'en rendre compte. Parce qu'avec les abus physiques de Dimitri, je pensais toujours que l'amour était la clé du bonheur. Foutaise. Je ris légèrement à sa remarque. " Commence pas à flatter mon égo Agathe.. " Soufflais-je avec un léger sourire. Je m'en fiche, qu'elle le fasse, qu'elle m'appelle princesse, beauté, moi ça me fait kiffer.. J'éventre mon sac de chez mcdo et dispose mes différents achats sur la table. Le sandwich à droite, la boisson au milieu, les frittes et le petit wrap à gauche. " Ça va beauté ? " Soufflais-je en commençant à manger mes frittes, les trempant dans la mayonnaise. Du gras, du gras, du graaaaaas !

M'attacher, j'en étais incapable, il y avait un bunker infranchissable qui recouvrait mon coeur. Je trouvais ça tellement banal de voir ses gens main dans la main qui s'embrasse et qui s'aime. Je n'arrivais même pas au moins à comprendre comment ils pouvaient en arriver là, alors qu'il est si facile d'avoir une vie entière de plaisir. Cependant mon incapacité à aimer ne m'empêchait pas de charmer les jolies demoiselles qui s'installent à ma table en toute connaissance de notre passé plutôt infructueux. « Crois moi je peux flatter bien plus que ton égo. » Si la brunette me semble beaucoup plus à l'aise et ouverte que la dernière fois où je l'avais côtoyer, moi je n'avais absolument changer. Je la trouvais toujours aussi mignonne et je n'avais aucune intention de prendre des gants blancs pour éviter de la brusquer. Elle connaissait le chemin si elle désirait partir. Pourtant au contraire la petite Kyla installa son plateau bien déterminée à attaquer son gouter et j'en fis de même : le burger faisant rapidement connaissance avec ma bouche. « À merveille, et toi donc ? » lui dis-je d'un ton charmeur une fois la bouchée terminée. Je ne saurais dire mais elle dégageait tellement d'assurance comparativement à la dernière fois. Ça ne pouvait que me plaire vraiment, espérant qu'elle sache qu'elle venait de signer son contrat pour l'enfer.

Le plaisir est dans le changement. Je n'y ai jamais cru, trop fragile, faiblarde pour penser qu'on peut trouver son plaisir en changeant d'hommes, de corps, de temps en temps. Sainte Kyla. Voilà qui j'étais quand j'ai rencontré Agathe, quand je lui ai dis qu'elle me plaisait et qu'elle m'a, gentiment, remballé. Mais là, c'est différent. Elle me remballe et je fonce encore plus. Je suis prête à me battre pour avoir ce que je veux maintenant. Et il se peut très bien qu'Agathe soit mon nouvel objet d'envie. Je souris légèrement en m'installant. " Ah. Aujourd'hui j'ai le droit à un peu plus d'attention que l'année dernière ? " Soufflais-je, taquine comme jamais. Pas que j'ai besoin d'attention mais ça fait toujours plaisir, on ne va pas se voiler la face... Je mange une fritte et la regarde. " Oui ça va.. Un peu fatiguée mais je suis en bonne compagnie donc... " Je souris largement. Oui, très bonne compagnie même. Agathe est toujours aussi belle et son caractère toujours aussi brute... " Bon alors, qu'est-ce que tu deviens ? Toujours un coeur à prendre ? " Demandais-je en portant mon attention sur mes frittes. Bien plus intéressant voyons...

Pervertir les âmes pures n'était pas une mission que je m'étais donnée dans ma vie, ni maintenant, ni jamais. Ce qui me plait ce sont les esprits tordus et déchirés. Toutefois si ma compagne du midi s'est découvert un intérêt pour les aventures compliquées, moi j'essaie d'atteindre une possible stabilité dans mes relations et l'ayant déjà à peu près fréquenter alors je crois que cette fois ça pourrait être différent. « T'es toujours vexée pas vrai ? » Petit clin d'oeil qui se veut tout à fait inoffensif. Si elle voulait jouer à ce petit jeu, je n'y voyais absolument aucun inconvénient à condition de se rappeler qu'il est facile de s'y brûler en un rien de temps. Tant que ça reste dans le jeu moi je suis prête à donner toute l'attention nécessaire mais au delà de ça je peux me montrer très blessante si on s'attache. Kyla en avait connaissance de cause. Pourtant elle continuait de me draguer sans gêne et ce n'était que pour me faire plaisir car j'étais prête à lui présenter le septième ciel dès qu'elle y était prête. « Tout à fait, je ne voudrais pas décevoir mon fan club en les abonnant. » Allez je rigole, il n'y a personne d'indispensable et je suis bien la première à le savoir ça. Je suis douée au lit, d'accord, mais comme beaucoup d'autres je ne m'en prends pas la tête. C'est juste que j'essaie d'impressionner la brunette qui semble pas mal intéressée par ses frites.

Moi ? Vexée ? Noooon, jamais. Bon, un peu. Si à l'époque, j'ai ruminé toute seule dans ma chambre, c'est bien différent maintenant... J'hausse les épaules pour tenter de montrer que je suis indifférente à tout ça alors que ce n'est pas vrai. " Je dirais pas vexée mais on va dire que j'ai la rancune facile " Encore plus depuis que ma vie tombe en petit morceau. Parce que l'Europe c'est quelque chose mais alors depuis mon retour, n'en parlons pas ! Kyla, miss poisse et malchance 2016. Et c'est que le deuxième mois de l'année. Je l'écoute, prônant avoir un fan club et ça me fait légèrement rire. Un fan club et un égo surdimensionné alors ! Je lui fais mon plus beau sourire. " Ce serait dommage d'avoir des suicides c'est vrai " Si elle joue à la nouille, je vais faire pareil. J'avale mes frittes à une allure folle et ça me dégoûte presque quand je vois le gras que j'ai sur les doigts. " Mais t'as raison, le célibat y a rien de mieux. Profiter de la vie, du plaisir de la chair sans se soucier de ce que demain nous emmène... C'est vraiment génial " Et oui, je suis une ancienne amoureuse de l'Amour convertie en célibataire volage... Elle n'y croira pas, à ce changement... Et pourtant ! Kyla la petite niaise n'est plus. Et dieu merci, moi je vous le dis !

Pour être franche je n'avais jamais totalement compris la belle Kyla et ce n'était toujours pas le cas aujourd'hui. Faut se dire les vrais choses, elle était non seulement tellement jolie mais elle me semblait aussi être une personne avec un grand coeur et une belle personnalité. Pas mon genre de fille à première vue, certes, mais celui de beaucoup d'autres pourtant. Si j'étais pas aussi égoïste je lui ferais un beau discours comme quoi elle méritait mieux et tout et tout. Sauf que j'étais pas comme ça hein. « Je peux vivre avec ça. » Puisqu'apparemment la rancune de nous empêche pas d'avoir une conversation toutes les deux. Ce n'est pas obligatoirement un sentiment désagréable, il suffit juste de l'apprivoiser. Pendant qu'elle bouffait ses frittes je ne me gênais pas de l'observer dans chacun de ses mouvements, alors qu'elle enlevait de ses petits doigts le gras et la mayo. Si vraiment j'avais un fanclub quelque part j'espérais qu'elle en fasse partie. La suite de ses propos me laissa légèrement perplexe. « Tu te moques de moi Kyla ? » Il faut dire que la dernière fois elle n'avait pas du tout ce discours là.

Bien sûr que je l'ai en travers de la gorge, bien sûr que je me souviens bien de la façon dont elle m'a remballé l'année dernière mais est-ce que c'est une raison pour être haineuse aujourd'hui ? J'ai changé, j'ai grandis et puis, j'ai compris que les sentiments, l'amour, c'est du vent, du pipi de chat et que ça fait mal. Mon histoire avec Dimitri m'a détruite, m'a fait voir que même les gens que l'on pense aimer, avec qui on pense pouvoir être heureuse ne sont pas ceux qu'on croit. Demandez donc ça à mon visage tuméfié après ses coups, après les coups de ses collègues. Demandez ça au corps meurtri qu'ils ont laissé dans ces hôtels, violée, battue. J'avais vécu l'enfer pour l'amour d'un homme qui me faisait peur à l'heure actuel, d'un homme dont je savais n'oublierais pas ma lâcheté, mon départ d'Europe sans aucune explication. Un mot et pouf, disparue dans la nature. " Du tout Agathe. Pourquoi est-ce que je me moquerais de toi ? L'amour, les sentiments, c'est surfait. Alors autant profiter non ? " Je dois la choquer à dire ça, je m'en rends compte. " J'ai un peu changé en Europe comme tu peux le voir. La suisse est un très joli pays d'ailleurs " Pays, état, principauté, je sais plus trop. La Suisse, on l'a traversé plutôt rapidement avec Dim alors bon... " Si tu t'attendais à tomber sur Kyla l'amoureuse de l'Amour, désolée mais elle s'est perdue en chemin " Soufflais-je avant de hausser les épaules et de manger quelques frittes, une nouvelle fois. Quelle manie j'avais là d'avaler toutes mes frittes avant de me pencher sur le sandwich..