WTF ? • JAEY

Les larmes ne cessent de couler sur mon visage. J'ai passé la journée à y penser, à ressasser ce qu'il s'est passé le matin même, je ne comprends pas, je ne sais pas ce qu'il est passé dans la tête de Priam, comment il a pu nous faire ça en fait... Trop de jalousie surement. Je n'y croyais pas mais en voyant mon portable resté silencieux toute la journée en sortant je réalise. Il est sérieux. Mes larmes finissent donc par rouler le long de mes joues, je finis par me laisser aller et mes jambes me conduisent chez la seule personne qui me passe par la tête, chez celle qui saura être là, chez la seule personne que j'ai envie de voir en ce moment même : Jasper. C'est une bêtise ? Peut être mais bon, impossible de le contrôler. Je frappe à la porte de chez lui, je ne sais même pas ce que je fais là et ce que je vais lui dire, je sais juste que c'est surement une très mauvaise idée.

Il devait être quoi, 17h ? Un truc comme ça. Jasper n'avait pas vraiment la notion du temps quand il travaillait, surtout quand c'était de chez lui. Enfin, chez lui, c'est une grande idée. Pour l'instant, c'était surtout un appart meublé qu'il louait en urgence pour arrêter de squatter chez sa sœur. Et puisqu'il n'avait plus de chambre à la Dunster.. le voilà. A se lever de son canapé pour aller ouvrir la porte de l'endroit, porte qui révèle Joey.. dans un sale état. Ses billes s'ouvrent d'avantage, surprit. « Joey.. ? Qu'est-ce qui se passe ? » Phrase typique. « Enfin vas-y rentre, reste pas là. » Histoire qu'elle se sente soutenue tout de suite. Immédiatement, il pense à une mauvaise nouvelle liée à son état de santé, et son ventre se serre. Referme la porte juste derrière elle, prenant une inspiration difficile.

Je rentre sans rien dire, j'essaye de me calmer. J'ai l'air ridicule. Je suis ridicule je pense. Qu'est ce que je fais là sans Jasper ? Il ne me connait pas cette tête ? Non il ne la connait pas parce que les larmes que j'ai versé pour lui, c'est mon coussin qui les a recueilli, ce n'est pas son épaule, c'était mieux comme ça à l'époque. C'était mieux pour lui, et plus facile pour moi d'affronter la maladie seule, en sachant que mon départ ferait du mal à moins de monde. Parce que oui il avait dû me détester de le quitter ainsi, c'était logique. « Priam... » Seul ce nom sort de ma bouche et je me rends compte à quel point il doit s'en foutre de tout ce qui touche à mon mec. « Il t'a vu sortir de la chambre ce matin, il a pété un cable et... » Silence de suspense ou juste pour reprendre ma respiration en fait :« ...m'a largué... » Comme ça comme une malpropre...

Okay, le Jasper est largué. Il est là, passif, attendant juste que la mauvaise nouvelle sorte de la bouche de la demoiselle. Allez, balance. « Priam... » Ah, okay. Egoistement, le malaise qui imprégnait son corps se dissipe immédiatement. J'm'en fous de Priam. A la limite, d'apprendre que c'est un con, c'est pas vraiment un scoop. Je le juge vite ? Peut-être. Surement. Je l'aime pas trop. Surtout parce que j'ai bien senti que l'inimitié était partagée, lors de notre bref entrevue à la dunster. Priam, donc. « Il t'a vu sortir de la chambre ce matin, il a pété un cable et... » Et ? « ...m'a largué... » Con, donc, je disais. « Quoi ?! » Trop fort, tu parles trop fort Jasper. « Il a fait quoi ? Je lui avais dis de pas se comporter comme un abruti.. j'vais le.. » Serre le poing, mais se ressaisit en posant à nouveau son regard sur Joey. Allez Jasper, on est mature, adulte. Respire, essaye de virer l'énervé de sa tête. « Je vais lui expliquer. Je me suis endormi, c'est de ma faute, j'aurai du partir avant. » Soupire, passant sa main sur ses traits. Sa main qui se glisse derrière la nuque féminine, l'attirant contre lui. « Je vais lui expliquer Joey, t'inquiètes pas. » Ca ira.

Je me doute que Jasper se fiche de Priam comme de l'an quarante mais qu'il se fout moins de me voir comme ça. Ca ne le fait pas arrêter de vivre de me voir pleurer mais ça lui fait surement au moins un petit truc. Il babole quelques mots, il est énervé contre Priam, je comprends qu'ils ont parlé tous les deux, qu'il lui en veut de me mettre dans un état pareil. Ca me fait un pincement au coeur de le voir comme ça et quand je sens sa main dans ma nuque, je ne résiste pas longtemps à venir me blottir dans ses bras, ma tête dans le creux de son épaule, mes mains en bas de son dos pour l'enlacer et rester contre lui. « T'énerves pas contre lui. Je savais qu'il était jaloux. C'était à moi de faire attention. » Enfin attention à quoi ? Est ce que j'aurais dû ou pu agir autrement ? Non, il n'y avait rien eu entre nous cette nuit là, juste des mots, des paroles, des conversations, entre amis. Voilà tout. « Je lui ai expliqué, il veut rien entendre. Je passe mon temps à toujours tout lui expliqué mais quand ça te concerne c'est pas la peine. » Je relève les yeux vers lui. Oui quand ça le concerne c'est différent pour Priam mais aussi pour moi. C'est compliqué. Est ce que c'est possible d'oublier vraiment son premier amour un jour ?

Quand les gens comprendront que la jalousie est le premier fléaux contre les couples, peut-être arrêteront-ils de se comporter comme des enfants. Il ne s'était rien passé entre les deux exs ce soir là, à l’hôpital. Et cette foutue jalousie ruinait une union qui semblait marcher jusqu'à lors. Pour rien. Pour une conversation, un repas partagé un peu trop tard, et deux personnes fatiguées. Pas de quoi remettre en cause une relation. « Faire attention ? Mais faire attention à quoi ? J'vois pas comment on peut faire moins que juste manger ensemble et parler. » Ne plus se voir après le coucher du soleil, un truc comme ça ? Ne plus se  voir du tout ? Je pense qu'il a comprit que ça n'arriverait jamais. La serrant d'avantage contre lui, Jasper soupire. « Il est idiot. » Ouais, c'est plus fort que moi. Baisse son regard sur la demoiselle. « Désolé. C'est un idiot que t'aimes. » Allez, on essaye de faire des efforts. « Je suppose qu'il ne me croira de toute façon pas ? J'ai cru comprendre qu'on allait pas devenir meilleurs amis. » Ma parole ne doit pas valoir grand chose à ses yeux.

Je secoue la tête, je ne sais pas ce que j'aurais pu faire pour faire plus attention, je sais juste que Priam ne croira pas Jasper s'il va lui dire qu'il n'y a rien entre nous. Son regard se pose dans le mien et là, parfois, dans ce genre de moment là je me demande s'il n'y a vraiment rien entre nous, si c'est juste ce truc d'ex grand premier amour qui fait surface quand il me regarde avec ces yeux là. « Il ne t'écoutera même pas... Je lui ai dit qu'on s'était embrassé au Spring Break il s'est servi de ça pour me dire qu'on se voilait la face que si on s'était embrassé à ce moment là c'est bien qu'il restait quelque chose. Il ne veut pas en démordre. » Et c'est à cause de cette conclusion de son imagination, à cause de cette persuasion qu'il m'a laissé comme une malpropre disant qu'il ne peut plus le supporter, que c'est trop dur. Mais trop dur de quoi ? De voir Jasper simplement partager ma vie comme un ami très proche ? « C'est ma faute... J'aurais dû lui dire pour la maladie... Mais quand il l'a découvert il voulait que je rentre, ça a pourri toute la fin des vacances, c'était tout ce que je ne voulais pas... » Jasper sait tout ça puisqu'il sait que c'est pour ça que je suis venue le trouver lui l'un des premiers soirs en Arizona.

La tête se penche en arrière, tandis qu'il soupire. « Fallait pas lui diiiiire. » Bon, c'est trop tard pour lui faire remarquer, désormais. « Ils comprennent pas que ça va vraiment pas les aider de rappeler des trucs comme ça. C'est presque comme s'ils voulaient raviver des trucs. » Ils. Je pense à Jude, évidemment. On a vu ce que ça avait donné. S'il n'avait rien dit, ils seraient surement encore ensemble avec Leandra, et elle et moi ne nous serions pas rendu compte qu'il n'y avait rien de normal dans notre relation. « Faut juste.. pas en parler. C'est ce qu'on fait, et c'est très bien comme ça. »Nous, toi et moi, on en a pas reparlé de notre baiser au Spring Break. Parce qu'on sait qu'il ne faut pas. Comme ne pas te forcer à te faire soigner si tu ne le veux pas. Ses billes bleues se posent, encore, sur la demoiselle, relâchant légèrement son étreinte pour mieux lui faire face. « Il sait pas.. Il te connait pas. » Pas comme moi. Et ça paraît flagrant.

« Fallait qu'il sache... Toi même le disait la dernière fois qu'on en a parlé ! » Oui il m'avait dit que Priam devrait savoir pour que rien ne soit caché. Mais maintenant qu'il savait il déformait tout. C'était bien un mec jaloux et amoureux. Quand il parla des petits amis qui ravivent des trucs en en parlant je ne sus pas trop quoi répondre. Mon regard et le sien se croisant... Oui c'était mieux de ne rien dire de ne pas en parler. « Il ne peut pas me connaitre en quelques mois comme tu me connais alors qu'on grandit ensemble depuis la naissance... » On grandit, on se rapproche, on se cherche, et la encore. Mes larmes se sont calmées mais la peine dans mon coeur est toujours la même, sauf que cette proximité me dérange et quand Jasper se détache un peu de moi pour qu'on puisse mieux se voir mes lèvres sont irrémédiablement attirée par les siennes. C'est comme si elles étaient aimantées. Elles se rapprochent de sa bouche et je m'arrête avant de franchir les dernières barrières pour dire : « La solution c'est de ne pas en parler oui... » Ne pas en parler, ne pas se poser de question, c'est surement mieux !

« C'était avant de le voir. » De voir qu'il avait cette jalousie latente, que j'avais senti sous chacun des mots qu'il m'avait adressé. Que forcément, il interpréterait de la manière la plus paranoïaque qui soit. C'est que le Jasper s'en voudrait presque de n'avoir fait aucun effort de politesse quand il l'a vu. Peut-être que s'il avait apprécié l'ancien président sur l'instant, ses craintes se seraient dissipées. Qu'il n'aurait pas brisé le cœur de la brune, qu'il voit là, ébranlée par les mots qu'il a pu avoir. « Certes. Mais.. il devrait. Il doit pas te faire du mal. » Sinon, c'est moi qui risque de lui en faire. Y a personne qui a le droit de te heurter Joey. Même pas moi. Ce que je vais finir par faire si tu continues dans ta quête. T'es trop proche. Tu le sais ça. Si j'arrive à sentir ton souffle contre mes lèvres, c'est que t'es trop proche. Et on a jamais vu deux âmes esseulées et attirées avoir une bonne idée. Les billes dévient des lèvres féminines au regard d'en face. « Joey.. » Qu'il murmure. C'est son moyen de te donner un laps de temps pour te raisonner. Un sursis. J'te préviens que c'est une mauvaise idée, et que j'excelle pour m'enfoncer dans les pires choix. Que je me laisse facilement berner par les réminiscences du passé, surtout avec le cœur blessé.