Qui a dit qu'il fallait revenir à la routine?

Le retour à la réalité. Non. Pas tout de suite. Pas tant que tu n'étais pas bien prête. Pas tant que tu n'avais pas envie de remettre les pieds dans le monde réel. Tu flottais, tu flottais dans un nuage de bien-être presque romanesque et insensé. Du moins, insensé quant à la situation dans laquelle tu vivais depuis plusieurs mois. Et tant que les cours n'étaient pas officiellement recommencés, alors te plairait, et ce jusqu'à la dernière seconde, à flotter sur ce même nuage de bonheur et d'illusions, pour ne pas retomber face première sur le sol luisant de réalité. Comme tu t'emmerdes en ce dimanche ensoleillé - ce qui est très chiant, puisque lorsque la température est plus que clémente, personne n'a envie de garder ses fesses dans le creux du canapé, tu parcoures ta liste de contacts de portable, portant ton attention sur les noms qui s'affichent sur l'écran un à un. Une idée géniale te vient à l'esprit : celle d'inviter Priape à passer un peu de temps avec toi. Après tout, tu lui as bien annoncé ton retour, et tu l'avais croisé à la soirée que t'as organisé lors de ton arrivée nouvelle sur Cambridge, sans pour autant passer quelques instants avec lui. Il t'manquait, le Dunster. Bah quoi? Tu t'étais sauvée d'Harvard pendant plusieurs mois, il y avait de quoi s'ennuyer de ses amis, après tout. Tu n'as pas spécialement envie de le contacter par SMS, alors tu composes son numéro de téléphone pour lui parler de vive voix. Hey bonhomme! Ça t'dit d'me rejoindre au Pinkberry, prendre un yaourt glacé? J'ai l'ventre qui grogne , et j'ai hyper chaud! Tu viens? Tu souris lorsqu'il accepte, puis tu raccroches. T'es patiente en cette belle journée, et n'ayant rien de mieux à faire, tu t'assois sur un banc de parc tout près du Pinkberry et observe avec une attention particulière la nature qui t'entoure. Qu'est-ce que c'est beau, bien, bon, l'été!

Je reçus son texto et je me mis à sourire. Alors oui, j’avais mille choses à faire : ranger mon appart, filer à la néonat voir ma petite préma de fille, rendre visite à sa mère accessoirement… Mille choses à faire aussi pour les cours : les potasser pour m’y remettre, aller récupérer mon planning sur le site internet de la fac, et puis il fallait aussi que je me renseigne sur les ass mat et les crèches de la ville… Mille choses à faire mais la motivation n’y était pas. J’avais besoin d’un bol d’air et c’est pourquoi le message de Dixie me fit sourire. Comme si, de là où elle était, mon amie avait saisi le besoin urgent que j’avais de faire un break. Je pris donc le chemin du Pinkberry pour l’y rejoindre, comme elle m'y invitait dans son texto. Je la repérais vite près du bâtiment, assise sur un banc, l'air un peu rêveur et je fus aussitôt gagné par l'envie de l'embêter un peu. Je m’approchais d’elle, arrivant par derrière je vins lui souffler à l’oreille avec humour : « On m’a dit qu’il y avait une mather affamée et en chaleur dans le coin, tu sais pas où je peux la trouver ? »

Si tu avais changé au cours des mois qu'avaient duré ton absence loin de Boston, tu n'en demeurais pas moins fidèle à toi-même lorsqu'il s'agissait de tes amis et des tes proches. Priape, ami de longue date, t'avait manqué, mine de rien. Tu avais vécu de longs moins éloignée de toute réalité, et de te retrouver tête première dans celle-ci maintenant te faisait réaliser à quel point les gens qui comptent à tes yeux sont importants dans ta vie. Si tu ne fais maintenant plus que des ennemis, tu chercheras toutefois à préserver les amitiés qui te sont chères, et le Dunster en fait partie. Tu t'ennuyais. Fermement. Autant de lassitude que du cher bonhomme qu'il est. Son p'tit minois de médecin beau gosse inaccessible - sisi, t'y as déjà goûté à c'beau gosse, mais tu préfères admirer de loin, les potes c'est pas touche, c'est sacré, bah c'est simple : tu voulais le revoir, et pas attendre vingt ans avant qu'les retrouvailles se produisent. Vous aviez tant de choses à vous raconter. Comment tu l'savais? Car de ton côté, c'était indéniable, et du sien.. s'il est resté à Harvard, alors il est clair qu'il y aura toujours des trucs à raconter. T'as vécu assez longtemps ici pour le savoir. « On m’a dit qu’il y avait une mather affamée et en chaleur dans le coin, tu sais pas où je peux la trouver ? » Tu sursautes et te retournes, un sourire niais aux lèvres, le regard d'une sauvageonne prête à sauter sur son attaquant. Après tant de temps éloignés, il savait néanmoins si bien te décrire, en cette belle et chaude journée. Une mather affamée - de quoi? De glace? Et... en chaleur. Ça, oui. Ton sourire s'élargit rien qu'à cette pensée. Baaaah, quoi? Tu t'es bien renseigné, j'pense qu'elle est pas bien loin.. Tu te lèves alors, pour presque lui sauter dans les bras. En fait, tu l'attrapes par le col et l'attires vers toi pour un long câlin qui t'fait du bien. Qui t'assure que t'as bien les deux pieds sur terre et que t'es pas encore dans ton cauchemar. Ce cauchemar permanent qui t'pourri l'existence depuis déjà des lustres. Aaaaaah, Pripriiii! J'suis si contente d'te voir! Tu l'serres tellement fort que tu pourrais presque l'étouffer. T'as pris des couleurs, tiens! T'es en pleine forme. Putain, j'rêve, t'as pris des muscles? Tu veux impressionner qui? Ah maiiiis, t'es échevelé! C'est permis pour un doc', ça? Bien sûr, tu l'taquines. T'agis en vraie maman poule - ou amie écervelée qui est juste trop contente de retrouver ses amis. À part Gwen et Marshall, t'avais revu personne encore!

Je la tirai de ses pensées, la faisant presque sursauter et mon sourire s’agrandit. Ses lèvres ne tardèrent pas à s’étirer également, une expression amusée remplaçant celle rêveuse qui se peignait encore il y avait quelques secondes de cela sur son visage. Je la vis se lever, contourner le banc pour venir me prendre dans ses bras, m’attrapant par le col avec une certaine fougue qui m’arracha un petit rire. « En chaleur à ce point Dix ? Je pensais pas que cette invitation pour une glace cachait autre chose… » Je plaisantais. Je me le permettais parce qu’au final, à présent, notre aventure remontait à bien longtemps alors la mather ne se vexerait pas pour si peu. Mes bras s’enroulèrent autour d’elle pour venir l’enlacer amicalement, content de la retrouver également. « Plaisir partagé ma belle. Mais si tu pouvais ne pas me broyer les côtes je te serais reconnaissant. » ajoutai-je sur un ton toujours taquin avant de relâcher mon étreinte et de faire un petit pas en arrière. « Désolé de pas être resté très longtemps à ta soirée patinage, j’avais l’esprit ailleurs… » Je l’observais alors qu’elle même se lançait dans une description plutôt flatteuse de moi, avant de nuancer le tout en critiquant mes cheveux en désordre. « C’est le look jeune papa tu connais pas ? » Petit sourire… J’aimais pas annoncer la naissance de manière classique moi, mais je repris quand même : « Je suis papa ça y est. » Je crois bien que j'avais peut être même pas eu l'occasion de lui raconter les derniers évènements, ma mise en couple avec Talya, sa tromperie, sa grossesse ensuite... Alors sauter directement à l'étape naissance risquait de faire un choc à mon interlocutrice.

Laisse-moi te surprendre un peu, tiens donc.. Bonne idée? Nah! Enfin, c'que tu savais pas, c'est que c'est lui qui te surprendrait, et dans le temps de cligner des yeux, quoi. Tu étais si contente de retrouver un ami dans son genre que tu n'avais pu t'empêcher de lui sauter au cou pour t'assurer qu'il s'agissait bien de lui. C'était peut-être aussi pour tenter de te convaincre toi-même que plus jamais tu ne partirais, que plus jamais tu ne t'éloignerais de ce monde, de cette vie à laquelle tu t'étais habituée au point d'en être attristée une fois partie. Tu le serres si fort que tu ne te rends pas compte de la force que tu y mets, alors tu t'éloignes prestement lorsqu'il te demande - gentiment, de ne pas te broyer les côtes. J'suis pas assez forte pour ça. Tu lui souris, puis rigole à ton tour en l'observant de haut en bas. Il n'avait pas changé... physiquement, tout du moins. Néanmoins, quelque chose le rendait.. différent. Quelque chose le rendait.. encore plus mature qu'il ne l'étais déjà. Était-ce possible? T'en fais pas, j'suis pas restée très longtemps moi-même.. Parce que t'étais allée t'amuser à faire des cochonneries avec le beau Roméo dans les toilettes, plutôt que de danser sur la piste. Au moins, la courtoisie avec les invités, ça te connaissait... Si bien que tu faisais la courtoisie même jusque dans les culottes. Tu réfléchis à cette soirée, la tête ailleurs également, lorsque tu entends les mots jeune papa. Tu fronces les sourcils un moment, puis écarquilles rapidement les yeux. Quoi?! Et comme s'il avait compris que tu ne saisirais pas tout, tout de suite, il répète en d'autres termes. « Je suis papa ça y est. » Tu mets les mains devant ta bouche, toute excitée. Non... j'y crois pas! T'es sérieux, là? Toiiiiiii? Papa?! C'est une fille ou un p'tit gars? Vraiment, t'es toute excitée. Et pourtant, au fond de toi, y'a une lueur de jalousie qui nait en toi, même si tu n'aurais pu être plus contente pour lui, même si tu étais toute excitée de cette nouvelle, et heureuse de son bonheur, si petit dans les mains, et si grand pour le coeur. Avec Talya? Raconte-moi tout! On va s'chercher une glace et... tu me dis tout, tout, tout! Tu souris faiblement, bien que tu rayonnes de bonheur à l'entente de cette nouvelle. Au fond d'toi, t'étais toute triste de te rendre compte que même si t'avais tant voulu avoir un enfant, au lieu de te retrouver avec un bébé dans les bras, tu t'étais retrouvée en pleine dépression y'a quelques mois de cela, sans copain, et avec une grossesse nerveuse en plus de tout ça. Mais ça, tu l'avais dit à personne. Sauf à Gwen, sauf à tes parents et à ton frère. Sauf à ta meilleure amie. Tu voulais pas l'dire, non plus. T'avais bien trop honte, t'étais bien trop jalouse, t'avais bien trop peur des "qu'en-dira-t'on" et de tout ce qui vient avec..

« Tu m’as déjà bien surpris avec ton retour… » Je souris en repensant à son texto de cet été et l’étonnement que ça avait provoqué chez moi. « Mais une bonne surprise hein, je te rassure. » Parce que oui, même si elle m’étouffait avec sa force de mouche en me serrant contre elle, j’étais content de la retrouver. Disons qu’avec Dixie, on était un peu passé par tous les stades. De plan cul à en froid, en passant par complices pour garder le secret de notre aventure puis confidents pour les révélations sur la liaison de son coup de cœur de l’époque avec mon ex Caly, et puis amis finalement. Oui une belle amitié était née de tout cela, son retour allait être l’occasion de passer du temps ensemble. « T’es pas restée longtemps y’a eu un soucis ? » m’inquiétai-je quand elle me confia n’avoir fait qu’un passage express elle même à sa propre soirée de retour. Enfin, j’annonçais la couleur, mon nouveau statut, une petite lueur fière dans les yeux. Quand même. J’étais papa quoi, ça en jetait ! La révélation la stupéfia un peu. Un instant, il se passa quelque chose dans son regard, une lueur de je-ne-sais-quoi que je ne sus pas interpréter, car très vite elle reprit avec enthousiasme et excitation la parole pour me demander le sexe. « Une petite fille. » annonçai-je donc avant que la mather ne m’entraine vers le marchant de glaces tout en m’invitant à lui dire tout, tout, tout. J’eus un petit rire tout en avançant vers le glacier, réfléchissant aux parfums que j’allais prendre tout en hochant la tête : « On essaie de te refroidir avec un sorbet, parce qu’avec tout ça tu vas surchauffer. » Une vraie pile électrique. « Et après promis je te raconte tout. » Je regardais la carte des crèmes glacées proposées en attendant que Dixie choisisse la sienne. « Tu prends quoi ? »

J'espère que c't'une belle surprise! Sinon, tu lui cries des noms d'oiseaux par-dessus la tête et tu t'en vas, hein! Mais Priape était bien trop sympathique pour que tu te retournes contre lui de la sorte, et bien trop poli et amical pour ne pas être content de te revoir, en fait. Avait-il des défauts? Ah si : Calypso. Le seul truc que t'aimais pas chez lui, c'était cette pauvre vache qui n'avait aucun bon sens de vivre et que tu détestais plus que tout. Jamais cette haine envers cette idiote ne se dissiperait. Jamais. Mais envers Priape, ce manque de jugement ne t'affectait pas sur l'opinion que tu avais de lui, bien au contraire. Tu l'adorais! Tu souris à la question qu'il te pose. C'était l'appel du corps... Sans lui donner de détails, tu lui annonces simplement que la raison du pourquoi t'es disparue à ta propre soirée se résume à un mot : sexe. Point final. T'es devenue plus sauvage avec les mois, tiens.. Tu t'éclates presque de joie lorsqu'il t'annonce que son bébé... son petit bébé, bah c'est une fille. Une p'tite fille, quoi! Tu l'envies. Terriblement. De pouvoir prendre dans ses bras ce petit être si fragile et en besoin d'amour, dépendant et qui n'attend que de se faire cajoler, aimer.. T'auras pas droit à ça, toi. Mais bon, tu zappes le chapitre, t'essaies de passer à l'autre. J'avoue! La température elle grimpe, j'dois vraiment m'prendre une glace. Et c'est promis, hein? Parce que sinon j'te tape. Ou pas, hein. Tu lui fais la grimace, puis retrouves ton sourire rayonnant. Pâte à biscuits, chocolat et ferrero rocher! Et toi? Mmh.. tu salivais déjà devant ce que tu prendrais. Vous arrivez à la caisse, et tu commandes ta glace. J'te paie la tienne. Tu vas t'appauvrir avec une gosse sur les bras! Tu rigoles et paie le tout, attendant qu'il ait reçu ses glaces. Tu prends alors une première bouchée avec la petite cuillère que tu dégustes lentement et savoureusement.. Delicioso! Ton portugais te revenait parfois quand il s'agissait de bouffe. En allant chez moi à Lisbonne, ma maman m'a appris quelques nouvelles recettes du pays! J'suis enfin une bonne candidate au mariage, t'aurais pas un mec à m'présenter?, demandes-tu à la blague. Si t'en avais marre d'être seule, ça ne te dérangeait pas pour autant, enfin.. T'étais une trop grande contradiction, toi-même..

« Tu ne changes pas en fait… » rigolai-je à sa réponse chargée de sous entendus. « Il s’appelle comment ? » Parce que l’appel du corps, ça voulait bien dire qu’il y avait un homme là dessous, qui expliquait le peu de temps passé sur ses patins.Puis Dixie, elle était attirante, ça ne m’étonnait même pas qu’elle ait mis le grappin sur un étudiant dès son come back. Elle sembla ravie pour moi pour la petite, un peu touchée peut être, y’avait définitivement quelque chose d’autre dans ses yeux, je ne me doutais pas un instant qu’il pouvait s’agir de jalousie. J’étais pas capable d’imaginer qu’on puisse envier ma situation : le mec cocu, séparé de sa copine, qui découvre qu’il la mise enceinte accidentellement avant leur rupture… Non, je ne pensais pas une minute qu’on pouvait vouloir ça, du moins qu’on pouvait voir au delà de ça, parce que cette lueur de jalousie qui brillait dans son regard, c’était pour la petite, le lien de filiation unique qui nous liait, pas pour tout le contexte merdique autour…. Enfin, du frais allait nous faire du bien. « Déjà que t’as tenté de m’étouffer, alors oui oui c’est promis, je te dirais tout ce que tu veux savoir. » Mais mangeons d’abord. Elle fit un choix de folie. « Mais où tu mets tout ça Dix ? » demandai-je mon regard s’attardant un instant sur son corps aux courbes parfaites. « Moi je vais juste prendre un sorbet citron… » Genre light. J’étais célibataire quoi, fallait que je fasse attention à ma ligne, surtout avec toutes les cuites que je m’étais prises, un jour ou l’autre ça se paierait sur la balance. Enfin, les nuits blanches avec le baby allaient peut être compenser et me faire perdre ? On verrait… Elle paya pour moi, je la remerciai : « Mon compte en banque aurait surement pas supporté l’achat de cette glace merci. » Puis j’ajoutai, plus sérieusement : « Tu sais que je peux t’inviter aussi hein, j’ai bossé tout l’été. J’ai ce qu’il faut de côté pour assurer mon rôle de papa du coup. » On s’installa ensuite, nos glaces en main et je l’écoutais me confier qu’elle avait désormais plus d’une corde à son arc : elle maitrisait la cuisine et elle ajouta qu’elle était bonne à marier. « Je t’aurais bien présenté Valou, mais t’as déjà testé apparemment. » Je la taquinai sur son aventure avec mon meilleur pote. A vrai dire, des amis j’en avais pas mal, mais avec qui imaginer la mather ? Je ne m’étais jamais trop posé la question.

Roméooooo! Oh, mon beau Roméo. C'est comme ça qu'il s'appelle, dis-tu en te mettant à rire. Tu as toujours aimé le charnel, la puissance de la tension sexuelle, les besoins du corps à combler.. Sans être nympho, t'étais pourtant bien à fond, et surtout présentement, dans le sport de lit. À bien y penser, t'avais toujours eu des partenaires pas trop prudes.. peut-être un peu de changement dans la routine te ferait du bien? Et aussi pathétique cela puisse paraître, si tu couchais à gauche et à droite, c'était seulement pour ne pas te sentir seule. Complètement seule. La grande romantique qui recherchait l'amour avec un grand A se trouvait prise au dépourvu, lorsque le silence est son seul compagnon.. Priape te fait rigoler de plus belle en te demandant où t'arrive à mettre tout ça. Toute cette "malbouffe". Tu tapotes ton ventre bien ferme - que t'aurais espéré plus gros, par une certaine grossesse.. et tes fesses bien rebondies, puis tu t'exclames : C'est le sport, mon ami! Le sport fait des miracles. Et puis faut croire que Dieu m'a bien foutue. Tu lui souris en payant le tout, appréciant alors le goût de ta glace à multiples saveurs. Délicieux! Quant à ton ami, il n'avait pris qu'une saveur. Faut savoir profiter de la vie, Pripri. T'aurais au moins pu prendre autre chose que juste citron. Tu lui tires la langue et vous allez vous installer sur un banc non loin du Pinkberry. Hum... vraiment, vraiment délicieux tout ça. T'es pas allé au Summer Camp? Comment ça? Tu fronces les sourcils, et t'ajoute en haussant les épaules : Pour dire vrai, t'as pas à t'inquiète non plus, j'me suis fait un budget pour la crème glacée, cet été.. J'ai mangé que ça, tellement je déprimais comme une merde. Et comme on dit, manger la glace directement dans le pot est le meilleur moyen pour n'importe quelle fille de se consoler. Et de prendre du poids, maiiiiis... C'est une autre chose. De nouveau, tu lui tires la langue lorsqu'il te taquine sur ta courte aventure passée avec Valentin, son meilleur pote. Shhhhh. Rappelle-moi pas l'époque où j'étais stupide. Stupide, et idiote, car t'avais eu plusieurs relations en l'espace de très peu de temps, avec des mecs qui méritaient bien mieux que toi, mais que t'avais presque tous détesté sans raison par la suite. Et puis j'plaisantais! J'ai essayé les sites de rencontre, et tellement je vaux rien, ils m'ont trouvé aucun match. Tu te mets à rire. Eeeeh, t'avais jamais fait les sites de rencontre, mais c'était pour dire que.. voilà. Toi, avec Talya ça se passe comment? Parce que t'avais pas suivi les "actualités" depuis plusieurs mois. T'avais même pas été au bal, alors tu savais pas s'ils avaient pu passer au travers de l'infidélité de Talya, ou si ça allait de pire en pire..

Mon rire accompagna le sien, suite à sa révélation un peu, shakespearienne…  Je connaissais Dixie depuis suffisamment longtemps pour savoir que s’adonner aux aventures d’une nuit ne l’effrayait pas. Je savais aussi qu’elle recherchait davantage au fond d’elle… Pour l’avoir vu déçue suite à ses échecs, avec Val, avec Charlie.  Les besoins charnels se comblaient plus facilement que ceux du cœur… On commanda nos crèmes glacées, le choix gourmand de la demoiselle me laissa perplexe sur l’endroit où se logeait tout ce sucre. Sa réponse m’arracha un nouveau rire. « Le sport avec Roméo… J’ai compris. » Pour le côté bien foutue, je ne contestais pas. Le fait qu’elle ait fini dans mon lit quelques années auparavant suffisait à prouver que j’étais pleinement d’accord avec cette affirmation. Elle me sermonna ensuite, je ne profitais pas assez de la vie, j’aurais du prendre plus que cette simple boule citronnée. J’haussais les épaules. « Ecoute tout le monde ne pratique pas le sport activement ces derniers temps… » Et par sport, je faisais là encore référence aux ébats des corps. Oui, de mon côté et depuis ma rupture, c’était plutôt la disette de ce côté là. Ma faute surement. A ne faire que picoler plutôt que sortir et rencontrer des gens. Peut être qu’une belle inconnue dans mes draps aurait été plus efficace pour oublier mon ex qu’une bouteille de vodka. Mais j’avais pas eu le cœur à renfiler le costume du Priape dragueur et volage. Ce n’était plus moi, à quoi bon le prétendre ? « Je suis resté sur Cambridge, bosser à l’hôpital. J’vais avoir un budget serré cette année. J’ai juste passé 5 jours en Arizona. » Pas l’été le plus fun de ma vie, mais il fallait que je sois sérieux désormais. Dixie reconnut alors que son été avait finalement été du même genre que le mien, la glace remplaçant la bouteille. « Qu’est-ce qui s’est passé ? » demandai-je avec inquiétude, retrouvant un peu de sérieux pour le coup.  Apparemment, c’était peut être la vie sentimentale de la demoiselle qui la déprimait puisqu’elle me signifia un peu son désespoir à ce propos. « Tu parles pas à la bonne personne pour te conseiller là. » Avec mes deux échecs à mon actif, je n’étais même plus sur de savoir comment m’y prendre pour qu’une histoire marche. « Mais je désespère pas pour nous ma petite Dix’, on trouvera quelqu’un un jour. » Fallait y croire. Mon bras libre se passa autour de son épaule amicalement un instant. Puis mon interlocutrice chercha alors à en savoir plus sur Talya. « On oscille entre le ça va bien et le tout va mal. Je sais pas si on réussira un jour à trouver un équilibre. » Mais il le fallait pour Mila. Pour cela, il fallait peut être surement que j’arrive à tourner la page, à oublier mes sentiments pour elle. Ca ne se faisait pas du jour au lendemain ce genre de choses….