baby's on fire • BIRD

C'était le matin, j'étais debout depuis peu, je n'avais pas encore émergé de cette nuit de sommeil malgré un café corsé pour me réveiller assez rapidement. Un débardeur large sur le dos et un boxer sur le cul pour seuls vêtements, je faisais le tour de la chambre à me demander ce que je devais faire à cet instant précis. Une douche, ouais, c'est bien une douche, ça réveille bien, et ça détend comme il faut. Je me jetais donc sous cette dernière et repensais à "putain mon rêve était trop chelouuuuu" ainsi qu'au sens de la vie, parce que la douche, t'as toujours l'impression que c'est le seul endroit où tu as des éclairs de lucidité philosophique, c'est un truc de fou. J'ai passé une bonne demi-heure là-dessous, et le café fait aussi son effet. Enfin parée pour une journée à trainer vu que j'bosse pas avant ce soir. Maintenant, place à la recherche de fringues. Débardeur large Iron Maiden, petit short en jeans, ouais, ça ira pour aujourd'hui. Passage à la case brosse à dents. J'étais tranquille avec ce truc dans la bouche, quand j'entendais quelqu'un derrière ma porte.

Je tourne comme un poisson rouge dans ma chambre, et je ne sais pas quoi penser. Déjà, je ne sais pas comment m’habiller alors j’opte pour un jean et un débardeur simple avant d’entourer ma taille d’une chemise à carreaux et d’enfiler mes baskets. Est-ce que je dois aller voir Gwen ? On a couché ensemble, et je sais qu’il ne fallait pas, il ne faut plus qu’on le fasse et il faut que je lui dise. Je suis amoureuse d’Alaska et je n’ai pas le droit de briser ça. Mais il est vrai que Gwen est vraiment attirante, pourtant je me répète inlassablement que je n’ai pas le droit. Je me regarde dans le miroir après m’être maquillé, et je me trouve plutôt jolie ce qui est rare dans mon cas. Mais pourquoi est-ce que je me fais jolie alors que je veux dire a Gwen qu’il ne faut plus que l’on soit aussi proche ? Attrapant ma bouteille d’eau, je prends mes pilules une par une, putain de traitement. Je sors de ma chambre avant de passer chez Paul pour me prendre un café à emporter pour me donner du courage et je me dirige jusque chez Gwen. Prenant une gorgée, je fronce les sourcils en entrant dans la Mather House, pourquoi est-ce que je suis ici ? Qu’est-ce qu’une Eliot fait chez les Mathers, je ne devrais pas être ici mais pourtant j’y suis. Je toque avant de briser le silence du couloir « Gwen c’est Bird ouvre-moi il faut qu’on parle. » J’espère qu’elle comprendra ce que je veux lui dire et qu’elle acceptera.

C'est dur le matin, putain. J'sais vraiment pas ce que j'ai, mais là je suis dans le gaz complet. J'ai rien pris hier soir, c'est surement pour ça que ce matin j'suis en descente totale de motivation. Pas d'alcool, pas de rail, pas de joint, la sobriété, c'est mal après quelques semaines à s'en mettre plein la tête et plein les narines, sans excès cependant. Pas de filles à qui demander de partir de la chambre, rien, la solitude. Et pourtant, j'sentais que j'devais bouger, me réveiller un bon coup, comme un présentiment, ou un sentiment de déjà vu. Alors que je me brossais les dents, me regardant comme une loque dans le miroir, j'entendais toquer à la porte de ma chambre. Ma brosse à dents en bouche, j'allais ouvrir, surtout quand j'ai su que c'était Bird là, derrière. Cependant, le "il faut qu'on parle" qu'elle annonçait avait une sale sonorité à mon oreille. Vas-y entres ma belle, j't'écoute lui dis-je sans quitter la tige de plastique de ma bouche. J'oubliai presque que c'était là, d'ailleurs. Inchtalle toi ch'arrive dis-je avant de filer rapidement dans la salle de bain pour cracher le surplus de mousse de dentifrice qui commençait à vouloir se sauver. Je revenais par la suite vers elle, la brosse encore en bouche, toujours. J'étais vraiment intriguée par ce qu'elle voulait me dire.

Il faut toujours que je règle mes problèmes rapidement, sinon cela ne va pas, et c'est pour cela que je suis en route pour aller tout stopper avec Gwen. Sauf que je sais que je n'ai aucune volonté et qu'elle est bien trop canon pour que je lui résiste. Aucune volonté Roth-Spiegelman. Ferme la Conscience aussi. Quand elle m'ouvre la porte avec sa brosse à dent dans la bouche, je me met à rire avant de lever les yeux au ciel « Alors toi ... » puis je me faufile dans sa chambre d'un pas léger. Lorsqu'elle parle avec sa brosse à dent dans la bouche, je me tape le front avant de rire, bon elle a le mérite de me changer les idées avant que je lui dise ce qu'il m'amène. Je ne sais même pas comment m'y prendre, est-ce que je tourne autour du pot, ou est-ce que je lâche la bombe directement. Je joue avec mes doigts quand elle revient dans la pièce et les images de notre nuit me reviennent en mémoire, nuit que je tente d'effacer en secouant la tête, comme si ça allait faire quelque chose. Oh et puis Bird Roth-Spiegelman ne tourne pas autour du pot, malheureusement « Il faut qu'on arrête de se voir Gwen... » Je soupire avant de passer une main dans mes cheveux « Cette nuit était une erreur, non pas que je n'ai pas aimé au contraire. C'était cool vraiment, mais je ne peux pas ... » Elle me perturbe avec sa brosse à dents, c'est pour cela que je garde mon regard rivé sur le sol, fixant un point inexistant, je ne suis même pas foutu e la regarder en face. Pauvre fille.

À chaque fois qu'on me dit le fameux "il faut qu'on parle", à mon oreille, ça sonne comme un glas, autant dire que j'ai toujours trouvé ça flippant. Alors quand ça vient d'une pote, avec qui j'ai couché qui plus est, je m'attend toujours au pire. Enfin non, j'ai jamais eu la faculté de mettre une fille enceinte, j'ai essayé plein de fois, mais je n'ejacule pas avec mes doigts comme Spider-Man, blague à part. Elle semble vraiment stressée, mais au moins avec ma brosse à dents dans la bouche, ça la déride un peu. Quoi moi ? lancais-je avec un sourire plein de dentifrice, avant de filer rapidement. En revenant, elle lâchait sa bombe, ce qui m'etonnait assez au fond. J'enlevais ma brosse à dent de ma bouche et la gardait à la main, avec un air interloquée. Attends attends attends... T'es en train de me dire que tu veux tirer un trait sur une amitié, qui a certes un peu dépassé le stade de l'amical ? je m'adossais contre le mur, abassourdie. T'as trompé la personne avec qui tu es ? Parce que dans ce cas, j'avais pas que t'avais quelqu'un, sinon j'serai pas allée jusque là avec toi. Je cherchais une explication de sa part, parce que j'comprenais vraiment pas.

Je n'ai jamais été rongée par le remord, mais la je ne sais pas. Je ne sais pas pourquoi je pense que c'était une erreur alors que j'étais consentante. Oui, je n'étais pas bourrée puisque je ne bois pas. Mais dans ma tête, ça sonne comme une erreur, un truc qui n'aurait pas dû se passer, le truc à ne pas faire. La voir avec sa brosse à dents dans la bouche me tire un sourire et me détend un peu, même si dans ma tête c'est un peu un bordel sans nom, quand je la vois, ça s'active en bas et pourtant, ça ne devrait pas. Lorsque je lâche la bombe, je sens dans l'intonation de sa voix qu'elle est choquée de mes propos. « Non non ! Je ne veux pas stopper notre amitié, ni rien. Je t'apprécie beaucoup ! Mais je veux dire il ne faut pas que ce qui est arrivé se reproduise tu vois ? » Je relève la tête pour la regarder avant de poursuivre « Je n'ai trompé personne, je te rassure, je suis libre comme l'air. Mais c'est juste que j'aime quelqu'un et j'ai peur de foutre tout en l'air à coucher comme ça aussi facilement. C'est tout. » J'espère qu'elle comprend, après tout je passe un peu pour une timbré quand même de refuser de prendre du plaisir pour une amourette que j'ai vécu il y a quelques années avant.

Alors ce coup là je crois bien que c'est la première fois que ça m'arrive. J'ai souvent couché avec des potes à moi, et je n'ai jamais eu autant l'impression que les choses étaient aussi bizarres qu'à ses yeux à elle. Pourtant, je ne vois pas le mal dans ce qu'il s'est passé. Ce qui s'est passé, c'était pas forcé. T'étais aussi sobre que d'habitude, je t'ai pas droguée à ton insu...pourtant t'as l'air de le regretter. Mais si tu veux pas que ça se reproduise, j'comprends, j'ai jamais forcé une fille à coucher avec moi et j'commencerai pas avec toi. Je marquais un petit temps d'arrêt avant de reprendre. La personne pour qui t'as des sentiments n'apprendra jamais de ma bouche qu'on a couché ensemble, j'ai jamais parlé de mes conquêtes, mis à part des personnes envers qui j'ai une confiance aveugle, et c'était seulement parce que j'avais merdé que j'en parlais. Alors si la personne en question l'apprend, ça viendra pas de moi. Puis si t'es célibataire, t'as pas de comptes à rendre. Imagine deux secondes si j'devais rendre des comptes à toutes les filles qui sont passées sous mes doigts ! J'voulais mettre une touche d'humour avec cette remarque, parce que beaucoup de gens sur le campus connaissent ma réputation. Te prends pas la tête. Et c'est pas parce qu'on a couché ensemble que t'es une fille facile, t'as vu depuis combien de temps j'te veux dans mon lit ? Je lachais un léger rire avant de me rincer définitivement la bouche, parce que le dentifrice c'est degueu quand tu l'avale.

Un jour j’arrêterais de faire des conneries. Enfin des conneries que je regrette. Quand on me propose une cigarette c’est une connerie mais je ne regrette pas, quand je prends une pilule pour m’amuser pour remplacer l’alcool, c’est une connerie mais je m’en fous. Coucher avec Gwen était une connerie et je regrette même s’il ne faudrait pas. Après tout j’étais consentante, elle a pas foutu une merde dans mon verre pour qu’on couche ensemble. « Je sais que tu ne me forceras pas Gwen j’le sais et je sais qu’Alaska ne sera pas au courant. Mais j’sais pas, c’est bizarre, j’ai l’impression de faire une connerie en couchant avec toi… Mais j’aime beaucoup l’effet que tu me fais, et ça tu le sais, sinon je ne me prendrais pas la tête pour ça.. » Oui Gwen me fait de l’effet, je n’arrive pas à lui résister la plupart du temps. Même aujourd’hui si elle voulait coucher avec moi, je crois que je ne résisterais pas. Lorsqu’elle va se rincer la bouche et je cherche quoi lui répondre pendant ce laps de temps. « Oui c’est sûr ça fait un petit moment quand même… » Je lui souris en me jetant sur le lit, avant de la regarder « Mais je ne regrette pas, au contraire, j’aime beaucoup passer sous tes doigts. » Je lui tire la langue avant de me redresser pour lui laisser une place. C’est censée être ma meilleure amie, mais on a passé un cap le jour où nous avons fini nues toutes les deux dans cette chambre.

Qui n'a jamais fait de conneries ? Qu'il me jette la première pierre, et encore j'aurai du mal à y croire. J'en ai moi-même fait, et pas qu'une. Si je devais lister toutes les choses que j'ai faites, je crois qu'il me faudrait des mois pour terminer, et encore, je crois même que ça serait le travail de toute une vie. Mélanger alcool et médocs, première connerie qui m'a valut une overdose. Non, deux. Coucher avec la copine de ma mère, en trompant ma copine de l'époque. Grosse connerie, aussi. Aller chez les Eliots pendant deux ans ? Une connerie que je regrette surement plus que les autres vu l'accueil que j'ai eu tout ce temps. Mais je ne pense pas que coucher avec Bird, de façon aussi naturelle que ça s'est fait, était une connerie. Elle pensait que c'en était une, malgré l'effet que je fais sur elle. Elle raisonne bizarrement parfois, mais c'est ma meilleure amie, j'peux pas lui en vouloir de toute façon. T'as pas à te prendre la tête pour ça, c'est arrivé parce que ça devait arriver, parce qu'on avait envie que ça arrive. Ca arrive que parfois on fasse des choses et on sait pas pourquoi, comme j'sais pas, acheter une paire de chaussures en étant défoncé et une fois que tu les vois les lendemain, tu sais pas pourquoi vu que tu les mettras jamais... Ne jamais forcer les choses, les laisser se faire seules, c'est ce que je sais faire de mieux. Pendant que j'me rinçais la bouche, elle avouait que ça faisait un moment que je lui courais après. En revenant, je la voyais allongée sur le lit, ce qui m'arrachait un sourire. J'me jetais à côté d'elle et posais ma tête sur mon bras. Alors si tu regrettes pas, pourquoi tu te prends la tête, sérieux ? On a qu'une seule vie, autant en profiter ! Et j'aime bien te sentir sous mes doigts, en plus. Je posais ma main libre sur son ventre, par dessus son t-shirt avec un sourire, accompagné d'un clin d'oeil. Certes notre amitié a légèrement muté depuis la fois où on a couché ensemble, mais pourquoi se priver de petits plaisirs sporadiques ?

En même temps comment résister à Gwen ? Gwen qui sourit tout le temps, Gwen qui ne prend pas la vie au sérieux ? Gwen, c'est le genre de pile électrique qu'il faut dans ta vie, toujours une phrase, un mot pour te faire sourire. Encore mieux quand elle t'ouvre la porte avec une brosse à dent dans la bouche. Il n'y a qu'elle pour faire ça. Même quand j'essaye d'avoir une conversation sérieuse avec elle, je n'y arrive pas. C'est fou. De base, j'étais venue pour lui dire qu'il fallait qu'on arrête tout ce qu'on avait entrepris et qu'il fallait qu'on en reste au stade de l'amitié, mais je me retrouve allongée sur son lit, à lui dire qu'elle me voulait depuis longtemps et que j'aime passer sous ses doigts. « Tu connais Bird Roth-Spiegelman, toujours a stresser pour rien. » Je ris en me tournant vers elle « Ah oui ? Tu aimes vraiment me sentir sous tes doigts ? C'est vraiment intéressant ça ... » Je ris en embrassant sa joue, et en passant une main dans ses cheveux pour lui dégager le regard, plongeant mes yeux dans les siens. « Tu sais, j'aime vraiment Alaska, mais je sais pas, j'ai peur que ça ne fonctionne pas. Me demande pas pourquoi, j'ai un mauvais feeling. » Il faut que je lui parle d'Alaska, après tout, je lui ai demandé que l'on arrête nos conneries, et c'est ma meilleure amie, il faut bien que je lui en parle.