Little conversations

Tu savais bien que c'était tôt, peut-être bien trop tôt pour lui demander cela. Tu n'étais même pas certain de pouvoir réussir à garder la tête froide si tu étais toi-même dans ce genre de situation. Tu serais complétement perdu, désemparé, avec ce putain d'espoir désespéré qui s'accrocherait à toi comme à une boue de sauvetage, et peut-être après quelques semaines, et peut-être après quelques mois, tu laisserais place à la lassitude ou au contraire, à la rage et à la frustration d'avoir perdu tout ce temps pour quelqu'un qui se foutait de toi. C'était peut-être justement parce que tu n'étais pas celui dans cette relation, car tu étais en dehors de cela et que tu pouvais prendre du recul, que tu essayais de lui montrer les choses en espérant qu'il ne gâche pas des mois de sa vie pour rien à cause d'un sentiment pas tout à fait certain, à cause d'une illusion qui lui fera plus mal. Tu soupirais doucement en l'entendant dire, passant un bras autour de ses épaules en signe de réconfort. « Qu'il revienne ou pas, tu finiras par aller mieux. » Tu disais, parce que ça au moins, t'en était certain. Avec le temps, les sentiments s'affaissent, et la douleur s'éclipse peu à peu lorsque l'autre ne partage plus notre vie. Et même s'il sentait comme si la fin du monde était arrivée, ça irait. C'était un mec fort avec de l'ambition, et tous les William du monde ne pourraient pas lui enlever ça. Tu hochais doucement la tête, avant de rire un peu. « Objectif j'sais pas, mais si un jour tu le revois, tu pourras lui lancer ton bonheur à la gueule. » Ça faisait toujours plus mal que de lui montrer le côté dépressif qui n'a toujours pas tourné la page depuis dix ans.

Vous tentiez tout de même de chercher plus loin, de trouver si derrière ce départ précipité une vrai raison se cachait. Tu soupirais un peu, devant ces agissements si incompréhensibles et silencieux. Ils étaient censés ne pas avoir trop de mal à s'assumer, ils ne se cachaient pas, ne vivaient pas leur amour derrière des portes closes, et ça semblait si bizarre, mais pas impossible s'il avait fini par avoir des problèmes avec cela. Tu l'écoutais une nouvelle fois parler, et tu finissais par froncer tes sourcils, le regardant. « Pourquoi t'aurais pas dû ? Même avec ce qu'il s'est passé là, c'est une bonne chose que tu aies enfin réussi à faire le premier pas. Faut pas regretter ça. » Au contraire. Les gens se mettent ensemble, puis rompent, mais ça l'aidera toujours d'avoir réussi à franchir ce cap. Le prochain sera peut-être le bon.

« S'accrocher à quelqu'un et se lier avec lui fait souvent bien plus de mal que de bien. » C'était vrai. Tout le monde le savait et pourtant, pratiquement tout le monde se laissaient aller au jeu. A tenter l'expérience. Les humains étaient assurément un genre masochiste qui se complaisaient dans le mal, pour le peu de bonheur que cela pouvait leur apporter. Parce qu'il ne fallait pas oublier ça, pas oublier tous les bons souvenirs qui sur le coup vous rendent si heureux que vous croyiez que plus rien ne pourrait jamais vous arrêter ou vous faire sentir comme une merde à nouveau. Que même si on fini par rompre, on a passé des mois tellement merveilleux que l'on voudrait que ça recommence avec quelqu'un d'autre, qui serait peut-être cette fois-ci la bonne personne. Et on retombe, brisé. « Ouais c'est vrai. Mais c'est le but de la vie apparemment. Trouver l'amour, s'attacher à quelqu'un si fort et lui donner toute notre confiance. Lui laisser notre bonheur entre ses mains, et le pouvoir de nous détruire tout autant. Ça craint. » Tu disais en soupirant, te rendant compte à quel point la vie était bizarre. T'aimais l'amour, et pourtant parfois, tu te disais que t'étais bien content de ne pas être en couple – pas vraiment – car tout pouvait arriver et faire tellement de mal. Et il était difficile après de se relever. Tu réfléchissais à ses questions, avant de tenter de répondre. « Ça n'a pas été facile au début, mais après ouais. Je m'étais tellement persuadé qu'il m'avait de toute manière oublié que je n'avais pas le choix que d'apprendre à tourner la page, pensant que je ne le reverrais jamais. » Tu avouais, et peut-être que t'avais vraiment des problèmes de confiance en toi à cette époque-là. « Après j'ai juste commencé à me découvrir. A m'amuser, que ce soit avec des filles ou des garçons. Et si je faisais le premier pas et qu'on me remballait, c'était pas grave. » Tout semblait plus facile lorsque le mot d'ordre était de simplement s'amuser.