Essai réussi ou raté ?

Mon estomac était noué cependant je n'avais rien pu avaler en partant de l'hôtel. Je me dirigeais donc vers un stand, demandant à Priape s'il voulait quelque chose. Je pris une petite barre chocolatée pour plus tard et une bouteille d'oasis au cassis cela me ferait largement le match, il ne fallait pas trop que je boive j'avais la facheuse tendance à avoir souvent envie d'aller aux toilettes. Une fois que j'eus payé ma commande je me dirigeais vers Priape qui avait trouvé nos places. « On est plutôt bien placé non ? » J'avais pris les places un peu au dernier moment même si c'était il y a quelques jours et pourtant nous voyions assez bien... Et puis il fallait bien faire la conversation, parce que malgré les cris des supporters qui s'échauffaient surement pour soutenir leur équipe et bien l'atmosphère était tendue entre lui et moi. J'étais tellement mal à l'aise d'être là à côté de lui sans pouvoir tenter de faire quelque chose dans son sens... Ben oui à quoi bon le faire en sachant que je ne le récupèrerais jamais et sachant surtout qu'il me repousserait... Le silence était fort présent entre nous, je ne pus donc m'empêcher de dire. « J'espère que le match va vite commencer même si je n'y connaissais rien avant hier... J'ai hâte de voir un vrai match de rugby. »

Oh, que la soirée allait être longue. Je m’étais faufilé entre les rangées de sièges jusqu’aux notres, mais cette pause sans Talya fut de courte durée. La blonde réapparut rapidement à mes côtés, ses snacks en main. J’hochais positivement la tête lorsqu’elle souligna qu’on était bien placé. On avait une bonne vision du jeu d’ici en effet. Elle s’était probablement sentie obligée de briser le silence entre nous avec sa question, et en me contentant de secouer la tête, je nous y replongeais aussi sec. La tension se réinstalla. Mon regard quitta un instant le terrain pour aller se poser sur la jeune femme. Sa deuxième tentative pour alléger l’ambiance entre nous me toucha un peu… J’avais pas le courage de la laisser ramer toute la soirée. Après tout, c’était moi qui lui avais dit de me suivre dans le stade. « C’était un vrai match hier attends… Je suis sûr que des chasseurs de tête nous ont repéré, si ça marche pas médecine pour nous on va pouvoir rejoindre les all blacks. » rétorquai-je avec ironie, un petit sourire aux lèvres.  

« Si t'enlèves le fait que personne ne savait joué et que Tate m'a foutu sur son épaule comme un sac à patate pour ne pas que j'ai la balle, oui c'était surement un vrai match ! » Je détachais mes yeux du gazon pour venir les poser sur lui en souriant. il était imperturbable et ce côté là me perturbait moi. Comment pouvait il rester de glace de la sorte. J'espérais que mon calvaire serait vite terminé ou que cela allait vite passer. Enfin le début du match était lancé déjà alors nous allions pouvoir garder le silence tous les deux sans trop que cela ne se remarque. Je me contentais donc de crier comme le faisait les autres autour de moi, d'encourager l'équipe et de frapper dans les mains lorsqu'ils marquaient. J'avais l'impression d'être une plante verte et c'était bien le cas mais au moins je ne pourrais pas dire que je ne m'étais pas amusée. L'ambiance monta et je finis par monter sur mon siège comme tout le monde et sauter lorsqu'un essai décisif permettant de donner à l'équipe une longueur d'avance fut marqué. Mais mon pied ripa sur le bord du siège et boum. Une jambe pliée sur le côté, mes fesses sur le béton descendues d'un étage. Tout le monde se stoppa autour de moi. J'étais la reine de la gamelle en public. Je ne tardais pas de me relever, ou du moins d'essayer, mes jambes étant endolories par le choc. « Ca va, ca va. »

« Je t’avais dit de pas participer au match… » ronchonnai-je en l’écoutant me raconter le porté de Tate pendant notre partie de la veille. Enfin pas le temps de grogner davantage, le vrai match débutait. L’ambiance dans le stade était bien plus chaude que le froid glacial qui régnait entre nous. Talya finit par se laisser gagner également par la fièvre des spectateurs. J’applaudissais un essai lorsque je vis la jeune femme se mettre à jouer les équilibristes sur sa chaise pour imiter les plus fervents supporters. « Atten… » Trop tard. Talya se retrouva les fesses par terre. Je me penchais aussitôt vers elle, m’inquiétant quand même, surtout qu’elle était enceinte, mais elle se dépêcha de me rassurer, anticipant ma question en m’affirmant que ça allait avant même que je n’aie le temps de prononcer le moindre mot. Un petit sourire amusé finit par se dessiner sur mes lèvres alors que je secouais la tête. « T’es pas possible Talya… » Ma main se glissa dans la sienne pour l’aider à se relever. Dans son élan pour se remettre debout, elle se retrouva face à moi, une mèche de cheveux dans les yeux. Je la saisis instinctivement, la faisant glisser entre mes doigts pour dégager son visage. « Y’en a pas deux comme toi… » fis-je sur un ton où perçait plus de tendresse que d’amusement. Les hurlements des supporters retentirent à nouveau, me faisant prendre conscience du terrain glissant sur lequel je m’aventurais. Reprenant mon masque froid, je m’écartais rapidement de la jeune femme.

Si j'avais voulu le faire exprès je n'aurais surement pas réussi à attirer l'attention de Priape. Mais voilà, enceinte et les fesses par terre il laissait enfin tomber son masque glacial pour laisser apparaitre de l'inquiétude et un petit amusement. Il n'y en avait pas deux comme moi, ça je le savais, et en même temps heureusement, deux petits boulets dans mon genre ça devait être encombrant à la longue. Priape s'était laissé aller, quelques secondes, mais tout le boucan autour de nous qui reprenait l'avait tiré de sa bêtise et il était redevenu le mec froid qui faisait comme si je n'existais pas en un rien de temps. « Merci quand même hein.. De m'avait aidée à me relever. » J'avais lancé cela sur un ton désinvolte. J'avais juste une envie : le secouer mais impossible il était trop costaud et puis en regardant mon bras je vis une tâche rouge se dessiner. J'avais dû m’érafler. « Je vais aux toilettes nettoyer ça, je reviens. Si le match termine entre temps... T'obliges pas à m'attendre... » Oui il pouvait bien rentrer à l'hôtel je n'allais pas l'engueuler.

Les hurlements des supporters avait fait disparaître aussi vite qu’il était apparu mon élan de tendresse à l’égard de la jeune femme qui remarqua aussitôt mon changement de comportement en me remerciant sèchement. « De rien. » répondis-je alors sur le même ton, le regard de nouveau tourné vers le match qui se déroulait toujours sous nos yeux. Mais je ne pus pas jouer au petit manège de l’indifférence bien longtemps, car Talya parla de nouveau. Je tournais la tête vers elle et remarquais qu’elle s’était blessée. Elle m’informa qu’elle allait nettoyer la plaie et que je n’étais pas obligé de l’attendre ensuite… « Talya attend… » Mais la jeune femme avait déjà disparu en direction des toilettes. Je poussais un soupir, j’aurais du rester là, ou peut être même rentrer à l’hôtel, mais je ne fis rien de tout cela. Je me faufilais à mon tour parmi les supporters pour la suivre. M’avançant vers la porte des toilettes des femmes, une dame qui en sortait me jeta un regard réprobateur : « Ma petite amie est à l’intérieur et ne se sent pas bien… » me justifiai-je machinalement avant d’entrer dans les sanitaires. « Talya ça va ? Tu veux que je jette un œil à ton bras ? » lui demandai-je alors. « J’espère que t’as emmené l’armoire à pharmacie avec toi pour le voyage… D’ailleurs ça va mieux ton pied ? » Je me rappelais qu’elle s’était coupée quelques jours auparavant, lorsqu’elle m’avait croisé avec Leanne sur la plage.

Non non je n'attendais pas et je pouvais me débrouiller toute seule comme une grande sans qu'il veille sur moi. J'avais filé avant d'en entendre plus et j'avais pris la direction des toilettes des filles. J'avais cru m'être débarrassée de Priape et cette ambiance pesante mais non, je l'entendis derrière la porte dire que sa petite amie était à l'intérieur et il entra. Je ne pus m'empêcher de rire en le voyant. « Ta petite amie ? T'as pas trouvé mieux je suppose parce que tu te serais bien gardé de m'appeler comme ça pas vrai ? » Je ne disais pas cela méchamment mais plus sur le ton de la taquinerie, au point où nous en étions hein... « C'est bon ça va aller t'en fais pas. J'ai l'habitude d'être une catastrophe. » Sentir le contact de sa peau contre la mienne ? Non merci, cela ne ferait que réveiller des envies que je tentais d'enfouir au plus profond de moi en me rappelant les mots qu'il avait tenu. Je ne voulais pas craquer une nouvelle fois, pas devant lui, je voulais me montrer forte et décidée maintenant et ce n'était pas en le laissant me toucher et m'approcher toutes les cinq minutes que j'allais parvenir à le faire. « La pharmacie doit prendre à peu près la moitié de ma valise si tu veux savoir... Et mon pied va bien, merci de t'en inquiéter. »

Je déboulais dans les toilettes pour femme, histoire de m’assurer que la blessure de Talya n’était pas méchante et uniquement superficielle. Mon ex petite amie ne manqua pas l’explication que j’avais servie machinalement à la bonne femme qui m’avait jeté un regard noir. Oui, j’avais répondu qu’elle était ma petite amie, et cela eut le don de lui arracher un petit rire. « C’est l’habitude surement… » me justifiai-je alors. « J’aurais pu répondre que tu étais ma sœur, mais ça aurait été franchement bizarre… Parce qu’elle s’appelait Thalya tu sais… » Ou plutôt non elle ne le savait pas. Je ne parlais pas beaucoup de ma petite sœur décédée. Je savais même pas pourquoi je venais de lui lâcher cette info. Bref, je m’inquiétais ensuite de l’état de son bras. Elle se dépêcha de me rassurer, que ce soit sur sa plaie autant que pour l’armada médical qu’elle avait emmené dans sa valise. « Ok alors… J’imagine que je vais te laisser… » fis-je en reculant d’un petit pas vers la porte. « Merci pour le match Talya… »

Nous n'étions qu'à trois mois de relation lorsque la fin avait été prononcée alors oui j'avais encore bien des choses à apprendre sur Priape comme le fait que sa soeur s'appelait comme moi mais pas écrit de la même manière. Je ne le savais pas mais finalement c'était peut être le destin... Enfin je 'en savais rien, dans tous les cas Priape ne voulait plus entendre parler de moi enceinte de Matthéo alors bon, même si il y avait une part du destin, il s'arrêtait là à première vue. « Tu peux rentrer oui ne t'inquiètes pas. Et de rien pour le match, on aura au moins partagé un pas trop mauvais moment ensemble pendant ce Spring Break. » Je lui adressais un sourire et il ressortit des toilettes pendant que je m'étais un peu d'eau et de papier sur mon coude écorché afin de ne pas salir tous mes vêtements puis je me dirigeais à mon tour vers la sortie pour rentrer à l'hôtel.