Jour 5 - Mode cupidon on

« Non la médecine c’est plus mon truc… » répondis-je avec sérieux comme si la question de Léo l’était. « Mais bon peut être qu’ils vont penser à moi si ils reprennent le tournage de Grey’s anatomy… » plaisantai-je. Finalement, après avoir souligné mes talents d’acteurs, mon interlocuteur reprit place sur son transat et je me laissais à mon tour tomber sur celui adjacent au sien. Il ne m’avait pas invité à lui tenir compagnie, un détail que mon cerveau alcoolisé ne semblait pas avoir remarqué. Je fis signe au serveur de nous ramener deux nouveaux mojitos en me promettant de ne pas aller à la pêche à la menthe dans le verre du mather cette fois. Il sembla écouter mes propos sur Caly et mes soupçons sur ce qu’elle ressentait de plus pour lui, puis me refila un conseil pour –récupérer ma meuf- Un rire jaune s’échappa de mes lèvres. « J’crois qu’il y a rien à récupérer. Et puis quand une histoire est finie, c’est terminé, je suis pas du genre à faire dans le recyclage. » Petit message subliminal pour lui faire savoir que j’avais en aucun cas l’intention de remettre le couvert avec Caly également. Malgré mon attitude de petit ami jaloux, j’allais pas essayé de m’interposer si ils décidaient de construire quelque chose ensemble.

Le jeune homme se voyait déjà dans Grey's Anatomy, sans trop s'avancer, Leo avait en effet l'impression que Priape était doué dans le mélange médecine et drama. D'ailleurs quand celui-ci lui annonça que la médecine ce n'était pas son truc, le Mather fronça les sourcils, pour un étudiant en médecine c'est quand même sacrément con. Ah l'alcool et ses ravages ! « Oui c'est clair que vu la scène que j'ai eu l'occasion de voir, ils voient ça ils te prennent directe ! » dit-il un peu séchement, c'est bon il n'allait pas non plus lui lancer des fleurs pour l'action dont il avait été spectateur – et acteur oui c'est bon il savait qu'il avait tapé aussi. Leo s'était rassit, ce que le Dunster prit comme une invitation, ma foi, vu son état il ne devait pas être trop dangereux même s'il n'allait pas le supporter tout l'après-midi, Halberstam le sentait, sa patience avait des limites, il allait vite péter un plomb face aux jérémiades de l'autre. « J'ai pas à me mêler mais peut-être qu'il y a quelque chose à sauver avec ta copine là. Mais sinon et bien reste plus qu'à te trouver une autre copine et arrêter l'alcool éventuellement, je me chargerai de ton verre si t'en veux pas. »

Léo parla sèchement, il avait surement encore mon coup de poing en travers de la gorge, ou plutôt en travers du nez. D’ailleurs c’était l’excès de mojitos ou bien il avait encore le nez un peu tordu ? Je me posais la question en l’observant attentivement, plissant les yeux, avant de finalement conclure que non, c’était surement du aux trop de cocktails. Mais j’ralentissais pas pour autant, nous commandant deux nouveaux mojitos qui arrivèrent. Léo s’était réinstallé et je l’avais imité, prenant place sur le transat à côté du sien. J’écoutais sagement les conseils dispensés par le mather ensuite. Après tout, si ce type arrivait à refiler la syphilis avec une fille, et qui plus est Caly, sans qu’elle ne se mette à le fuir comme la peste, c’est qu’il devait savoir y faire avec les filles. « Quelque chose à sauver ? J’suis pas sûr que ça en vaille le coup tu vois… » J’avais l’impression d’avoir été pris pour un con dans toute cette histoire entre Talya et Matthéo alors je pouvais pas m’empêcher que je serais surement le dernier des crétins si je retournais dans les bras de la jeune femme… Quant à ses paroles suivantes, elles m’arrachèrent un petit rire : « T’en fais pas pour moi… » commençai-je en levant mon verre pour en reprendre une gorgée. « Je tiens très bien la route… Hic ! » Ou du moins, j’voulais m’en convaincre. Pitoyable ? Surement un peu mais j’étais trop saoul pour m’en rendre compte.

Dans quoi il s'était lancé au juste ? La vie sentimentale de Priape, il en avait pas grand chose à faire en réalité, en plus il se connaissait, même s'il ne l'aimait pas de base, il allait finir par se prendre de pitié pour le jeune homme. En fait c'était déjà fait, Leo restait là assis à l'écouter trouvant même triste qu'il abuse comme ça de la bouteille pour noyer son chagrin ou un truc dans le genre. « Ouais enfin faire un coma éthylique ça va rien arranger. » dit-il en fronçant les sourcils, même pas méchamment, si ça se passait maintenant encore il se ferait accusé par X ou Y d'être à l'origine de tout ça, non, c'est bon il avait donné dans le conflit pour quelques temps. Oh que Priape ne s'inquiète pas, Leo ne s'en faisait pas pour lui, en fait, le Spring Break c'était le moment parfait pour rompre, tout le monde est tellement plus ouvert qu'il est facile de se consoler. « Que dalle, t'es complètement mort. » Finalement, le Mather éclata de rire avant de secouer la tête, c'était n'importe quoi.

J’étais persuadé de pas être saoul, c’est ça qui est bon avec l’ivresse aussi, la perte totale de conscience de soit. Je ne pouvais décemment pas laisser Léo convaincu que j’étais complètement mort. « Attention à ce que tu dis mon petit père… Moi qui commençais presque à te trouver sympa. » Je voulais prouver au mather de quoi un dunster se chauffe. Je posais mon verre, me levai du transat, chancelant un instant à cause de mes gestes trop rapides, et je repris la parole : « Tu crois que je pourrais faire ça si j’étais vraiment raide ? » Et je levai alors mon pied droit du sol puis je passais mon bras droit sous mon genou en l’air, mon autre bras s'écartant de mon corps pour essayer de maintenir un certain équilibre, tout en me penchant pour venir me pincer le nez avec ma main droite : la position test pour mesurer un degré d’alcoolémie. J’avais du tenir deux secondes à peine avant de me retrouver les fesses sur le sable, pouffant de rire. « C’est le sol, c’est pas stable… » fis-je en toute mauvaise foi avant de me relever difficilement. Je frottais mon short de bain pour en retirer les grains de sable avant de reconnaître : « J’ai peut être un peu trop bu ouais… Tu sais quoi ? T’as gagné un mojito. » Je lui cédai finalement mon verre. Un peu de soda et une bonne sieste me ferait pas de mal, j’avais aucune envie de visiter les urgences de l’hôpital le plus proche pour coma éthylique…

C'est bien ce qu'il disait, Priape était complètement saoul. Après leur première rencontre assez musclée, et tout simplement car Leo l'avait mauvaise, il ne s'était pas préparée mentalement à ce qu'il l'apprécie ne serait qu'un quart de seconde. « Arrête de dire des conneries et arrête l'alcool ! » dit-il en riant à moitié même s'il n'en pensait pas moins. Il ne voulait pas énerver le jeune homme, c'était les vacances, le Spring Break, il était soigné, son nez ne lui faisait plus mal, il voulait continuer dans cette lancée. Le Mather regarda son rival se lancer dans un numéro d'équilibriste dans l'unique but de lui prouver qu'il gérait la situation et que non, l'alcool n'avait aucun effet sur lui, très bien s'il le disait ! Il le regarda en fronçant les sourcils avant d'exploser de rire en le voyant s'écrouler lamentablement sur le sol. Oh ce nul ! Il récupéra le verre que lui offrait le brun. « Merci bien, tu sais boire c'est quelque chose qui se travaille tu devrais pas faire ça tout seul. Enfin pas avec moi, ça me semble plutôt logique mais trouve toi quelqu'un avec qui boire, tu verras c'est moins triste. »

Très bien, je savais pas si c’était mon pas chancelant ou mon hoquet incessant qui me discréditaient mais Léo ne semblait pas me croire quand je lui assurais qu’il en fallait plus pour me coucher. Il me conseillait même d’arrêter l’alcool. Me lançant alors dans une démonstration de mon grand sens de l’équilibre, je finis le cul dans le sable, ce qui me fit réaliser que oui, peut être, j’y étais allé un peu fort. Je finis par lui offrir mon cocktail avant de me laisser tomber sur le transat : une bonne sieste, voilà ce qu’il me fallait. J’écoutais les conseils avisés du mather. « Tu m’as fait peur, j’ai cru que t’aller m’inviter à boire un coup quelque part ou un truc dans le genre… » fis-je en ricanant. Le gars qui copinait avec le nouveau mec, ou nouveau plan cul, ou nouveau je-ne-sais-quoi, de son ex grand amour, c’était franchement bizarre non ? Pourtant, passée la première envie de lui coller mon poing dans le pif, je commençais presque à le trouver sympathique ce Léo… « Bah t’en fais pas pour moi, tu sais ce qu’on dit : faut mieux être seul que mal accompagné. Ca doit être valable pour les barathons aussi non ? »

Ben tiens, quelle belle idée ça aurait été d'inviter Priape à boire un verre en mode verre de l'amitié, oublions les querelles passées, devenons potes, on a pas de bonnes raisons de se détester. C'était l'idée la plus ridicule qu'il ait pu avoir. Ah ça se sentait qu'il avait bu le petit Dunster, celui là même qui donnait des leçons de vie à Leo quelques semaines plus tôt. D'ailleurs le jeune homme ricana devant cette idée farfelu, c'était déjà pas mal qu'il soit toujours là sur ce transat à boire dans le verre de Priape. Bon ok ils avaient déjà embrassé la même fille ça revenait au même non ? Ouais quand même pas, il préférait autant partager un verre que Caly. « Non aucun risque, détends-toi je vais pas te forcer à être sympa avec moi, de toute façon ça va que tu es bourré, je veux pas te vexer, mais t'es vraiment chiant sobre. » Et violent. Pas logique ça par contre. Leo s'était senti obligé de glisser un mot, qu'il ne fallait pas que le brun fasse la tournée des bars tout seul. Il hocha la tête à sa réponse. « Si probablement, au moins si tu vois une fille qui serait éventuellement dispo tu seras pas obligé de partager, très bonne idée. »

« J’étais sobre et énervé… » corrigeai-je. « Mais sache que je ne compte plus l’être… » Ni sobre, ni énervé. J’avais promis à Caly de ne plus m’en mêler et je m’y tiendrais… Quoique en chipotant un peu : en venant discutailler avec le mather sur cette plage, j’étais peut être déjà un peu en train de trahir ma promesse en quelque sorte… « C’est une très bonne remarque ça mon cher Léo… Je ne partage plus moi, c’est fini. » Ma prochaine copine, si un jour j’arrivais à me rengager dans une relation, elle allait probablement drôlement ramer pour gagner ma confiance. « Bon d’ailleurs, en bon mather, tu dois en avoir testé déjà plein toi depuis le début du séjour ? T’as des recommandations à me faire ? » questionnai-je ensuite le jeune homme. « Je parle des bars hein, pas des filles… Ou peut être que t’as essayé les deux en fait. » ricanai-je finalement. D’après la description de leur étrange lien que m’avait faite Caly, c’était une relation plutôt basée sur le sexe qu'ils avaient, probablement le genre qui n'impliquait pas l'exclusivité, et puis si il avait chopé la syphilis y’a quelques temps de cela, ce n’était probablement pas en faisant une partie de cartes.

En effet, ils ne s'étaient pas rencontrés sous les meilleurs auspices, mais le mal était fait, malgré la bonne volonté de Leo, il en subsisterait toujours une petite rancœur, un rien de méfiance aussi. Certes Priape comme Caly lui avait affirmé que c'était fini entre eux, néanmoins il avait encore en travers des dents le coup du mensonge sur la nature de leur relation de la part du jeune homme. Il se méfiait de la façon dont Priape pourrait tourner la situation à son avantage. Après tout il était l'ancien petit copain 'très important' et il n'était que l'amant occasionnel, étant donné qu'il souhaitait profiter de cette situation longtemps, il allait se méfier du Dunster. « Je suis content qu'on soit sur la même longueur d'ondes. » Puis il manqua s'étouffer lorsqu'il crut que le jeune homme lui parlait de filles, heureusement il se rattrapa ensuite. À vrai dire ça le gênait un peu d'évoquer le sujet avec lui, il se doutait qu'il était au courant de pas mal de choses et il n'avait pas envie d'être jugé une nouvelle fois. « Euh oui il y en a pas mal … des bars je veux dire, en bord de plage c'est les meilleurs pour les soirées, en ville c'est plus guindé. »