HAYLENA ∆ please come back to me

Cela faisait un peu plus d'une semaine que j'avais quitté Cambridge. Je n'avais d'ailleurs pas encore eu le temps de régler tout ce qui tournait autour de mes études et d'Harvard. Il fallait d'ailleurs que je leur envoie un mail avec tout ce qu'ils demandent pour une désinscription. Mais on va dire que je suis plus que débordée par mon déménagement. Il a fallu que je trouve une crèche pour Robyn et ça ne fut pas facile. Sans compter sur tous les détails qu'un déménagement engendre. Mais aujourd'hui, je vais enfin pouvoir voir la scène de Broadway. Les répétitions ne commencent que dans quelques jours, mais il faut que je me familiarise avec ce lieu mythique. Après avoir déposé ma fille, j'avais filé direction le quartier de Broadway qui n'était pas si loin de mon nouvel appartement, heureusement. Je restais quelque peu figée devant l'entrée plutôt impressionnante. Jamais je n'aurai qu'une telle chose m'arriverait un jour dans ma vie et pourtant. Sourire aux lèvres, je me décidais enfin à rentrer. J'étais encore nostalgique de ma vie d'étudiante, mes amis me manquaient, ma famille me manquait, tout me manquait mais il faut bien saisir les opportunités qui se présentent. Je fis rapidement la connaissance de l'équipe. J'avais encore du mal à croire que tout ça était vrai, il va me falloir sûrement encore un certain temps. L'heure passait et je me rendais compte qu'il était temps d'aller récupérer Robyn. Une fois dans la rue, j'attendais qu'un taxi se manifeste.

Haylena

Please come back to me.

Je suis là, à scruter mon portable en pleine rue, me faisant bousculer comme une vulgaire poupée de chiffon, les gens se foutent de tout apparemment ici. Aucun New-yorkais n’a trouvé étrange qu’un type comme moi sorti de nulle part les interroge à propos d’une jeune blonde ayant récemment emménagé près de Broadway, blonde talentueuse ayant décroché un second rôle. Bordel mais qu’est-ce que je faisais ici, dans cette ville ? Mon regard sur mon écran, je regarde une photo de moi avec Robyn, Milena a pris cette photo, immortalisant notre dernier moment avant que je ne parte, non avant que je ne fuis car oui, j’ai déserté comme un lâche. Revenu à Harvard après la fusillade, je suis resté dans l’ombre, regardant Milena, Poppy et Salomée faire leur vie sans moi, au final, je ne suis pas si indispensable, c’est tout ce que j’ai pu retenir. Je décide d’avancer vers la salle où la jeune blonde doit se produire prochainement et alors que je m’approche dangereusement du bâtiment, je vois une silhouette que je connais bien s’arrêter sur le trottoir et appeler un taxi. Je m’immobilise et pose mon regard sur elle, elle a l’air en forme alors pourquoi je suis ici, pourquoi je veux à nouveau entrer dans sa vie pour tout foutre en l’air ? J’avale ma salive alors que les larmes me montent aux yeux. Je passe une main sur mon crâne quasiment rasé ainsi que sur mon visage dur, puis j’avance. Un pas, deux pas, trois pas et je comble la distance qui nous sépare rapidement. Je m’arrête alors devant elle en même temps que le taxi s’arrête. « Permettez. » J’ouvre alors la porte du taxi en baissant la tête puis lui adresse un regard penaud.

Trouver un taxi à NYC au moment des heures de pointes c'est un peu la guerre pour tout vous dire. Je n'espérais pas en avoir un avant de longues minutes. J'aurai bien été à pieds faire un tour si je n'avais pas eu à récupérer Robyn à la crèche. J'ai déjà tellement galéré à lui en trouver une que je ne prendrais pas le risque de perdre sa place en arrivant trop en retard. Je me dis que si le spectacle marche bien, j'aurai peut-être une petite renommée qui me donnera une place dans une crèche nettement supérieure. Certes, je pourrai utiliser mon statut de comtesse mais c'est pas mon genre, je préfère réussir les choses par moi-même c'est comme ça. Et d'ailleurs en parlant de ça, j'ai vraiment échoué comme c'est pas permis avec Haym. J'ai réussi à faire fuir le seul véritable ami que j'avais et quand Lomée m'a dit qu'il était back pile quand j'étais partie, je me suis bien dis que ça n'était pas du hasard. En même temps, je le comprends. Mais ça n'empêche pas que je sois fâchée contre lui parce qu'il n'était pas là quand il y a eu ces histoires de viol, puis la prise d'otages. Je ne demandais pas forcément une présence physique mais au moins qu'il prenne des nouvelles, je sais pas. C'est pas faute de lui avoir envoyer des sms. Bref, emmitouflée dans mon écharpe, j'attendais toujours un taxi lorsque enfin, une voiture s'arrêta. Je m'apprêtais à y rentrer mais quelqu'un me barra la route, pas n'importe qui, Haytam. Je fronce les sourcils ne comprenant pas du tout pourquoi. Pourquoi est ce qu'il est là ? Et surtout comment ? Salomée a forcément du lui en parler c'est pas possible autrement. J'étais tellement choquée que je ne prenais même pas le temps de répondre à son permettez et rentrais directement dans le véhicule, rapidement suivie par le dunster. Je donnais l'adresse au chauffeur avant de me tourner vers lui. Qu'est ce que tu fais ici Haym ?

Haylena

Please come back to me.

Il faut que tu ailles Haytam, elle a besoin de toi. Ces mots résonnent encore dans ma tête, comment est-ce que je pourrais les oublier ? J’ai abandonné Milena alors qu’elle avait terriblement besoin de moi, comme Poppy, comme Salomée, j’avais abandonné tout le monde parce que je n’avais pas réussi à me gérer après la mort de père. J’avale ma salive et les mains tremblantes je décide d’y aller, de sauter le pas, après tout j’ai pris le premier vol pour New York après ma soirée macabre en compagnie de ma sœur. J’hésite mais lorsque je pose mon regard sur elle je comprends que je ne peux pas résister. Ce qui s’est passé entre nous hante encore mes pensées et mon cœur est meurtri de l’avoir abandonné. Mais comment me faire pardonner après tout ce que j’ai fait ? Ou plutôt pas fait. Je tente, je m’avance et tient la portière et penaud je l’observe. Elle est désemparée. Reprends-toi Haytam elle n’a pas besoin de ton manque d’assurance. Elle monte dans le taxi et je décide de monter avec elle, après tout c’est pour elle que je suis ici non ? « Je… je suis venu pour toi, quelle question. » J’essaye de lui offrir un petit sourire qu’elle affectionne tant mais rien à faire, mon visage de gamin a disparu. J’ai perdu en innocence et en gras, j’ai gagné en muscles et en dureté et ma nouvelle coupe de cheveux n’aide pas. J’ai l’air plus vieux, plus homme plus… comme quelqu’un que je ne connais pas. « Où est Robyn ? » Oh tu peux me gifler Milena, tu peux me hurler dessus, tu as le droit tu sais je le mérite amplement, je t’ai abandonné après notre baiser, je t’ai abandonné après tout ce que tu as vécu et pourquoi ? Parce que je suis un lâche incapable de se gérer…

Je… je suis venu pour toi, quelle question. Un soupir mélangé à un rire entre énervement et décontenance sortit de ma bouche. Il répondait à ma question d'un naturel presque insolant, comme si c'était normal, comme si j'avais posé une question stupide. Je ne sais pas si je suis supposée prendre ça bien. Après tout il m'est difficile de le croire, j'aurai aimé pourtant, mais revenir comme une fleur après deux mois et me sortir ça, c'est bien trop facile à mon goût. Je ne demandais pas grand chose, on n'était pas obligé de devenir un couple ou je sais pas, des meilleurs amis qui s'embrassent il y en a des tonnes et ça ne change rien pour autant. Quelle question en effet .. J'avais même pas envie de débattre avec lui, je suis trop lassée, blasée pour ça. Je ne voulais pas être méchante avec lui, comment le pourrais-je de toute manière ? Mais je suis rancunière, même avec les gens qui comptent et il comptait beaucoup, il compte toujours beaucoup. Je prends enfin le temps de m'attarder sur lui, mes yeux le dévisageant presque de haut en bas. Il a changé, trop à mon goût pas qu'il soit laid, non, il est juste différent. A la crèche, mais ça n'est pas comme si ça t'intéressait vraiment de le savoir. Je voyais que le chauffeur nous regardait depuis son rétroviseur intérieur et je lui lançais un regard noir qui fit changea aussitôt de direction ses yeux. Croisant les bras sur ma poitrine, je m'énervais toute seule. D'abord contre moi. J'étais énervée d'être énervée contre Haym d'une part. Et d'autre part, blasée de tout ça. Si je suis venue à nyc, c'est bien pour éviter ce genre de situations.

Haylena

Please come back to me.

Je ne suis plus un gamin, c’est ce que je peux constater quand je pose mon regard sur mon reflet offert par le miroir. Je n’aime pas ce que je vois, je me préférais avant, probablement puisque j’en suis à un point où je n’ai même pas d’avis sur moi- même. J’ai juste changé… complètement. Je m’enfonce un peu plus dans mon siège tout en détachant mon regard du rétroviseur, le reportant sur New York, ville dans laquelle je suis passé quelques fois sans vraiment m’y attarder. Faut dire que j’en avais vu des paysages ces deux derniers moi, entre le Danemark et Boston qui avait changé, beaucoup plus que je ne l’aurais pensé. Elle est énervée, elle est en droit. Ça ne me fait même pas mal parce qu'à sa place, je me hurlerais dessus. C’est dingue de voir à quel point elle semble apaisée d’être ici, d’avoir démarré une nouvelle vie. J’ai peut-être fait le con en me pointant comme si de rien n’était après deux mois… Oui j’ai fait le con, j’en suis certain. « Arrête, tu sais très bien que ce qui vous concerne toutes les deux m’intéresse. » Je me pince les lèvres, je sais déjà ce qu’elle va répondre, que je n’étais pas là lors de son agression, que je n’étais pas là lors de la prise d’otage, si elle savait que mon cœur s’était arrêté de battre quand j’avais vu ça aux infos, si elle savait que j’avais pris le premier vol pour Harvard après ça, si elle savait que j’avais longuement posé mon regard sur elle en toute discrétion pour vérifier si elle allait bien…

Je sais que je suis trop sèche, froide et qu'au lieu de l'engueuler, je devrais plutôt le prendre dans mes bras et lui dire à quel point il m'a manqué. Parce que c'est le cas. Deux mois, ça m'a paru une éternité. J'avais l'impression de ne plus savoir qui j'étais sans lui dans ma vie. Le fait est qu'il est et a toujours été une partie de moi, jamais je ne pourrai totalement arrêter de lui parler ni même de penser à lui. C'est Haytam, je le connais depuis tellement longtemps que je n'ai pas l'impression d'avoir déjà vécu des moments sans lui à mes côtés. Si ce n'est ces deux derniers mois. Il m'a abandonné alors que j'avais besoin de lui. Je ne peux pas totalement le blâmer mais j'ai un goût amer dans la bouche. Je l'incrimine de tous les tords du monde mais je sais que j'en ai aussi. Ne serait-ce que le fait de l'avoir embrassé, c'était de trop. Je pensais le savoir, mais j'ai l'impression de ne plus te connaître. Je marquais une pause. Le Haytam que je connais ne serait pas parti sans prévenir, il n'aurait pas préféré faire je ne sais quoi avec je ne sais qui au lieu d'être là pour épauler ceux qui avaient besoin de lui, et je ne parle pas que de moi, mais aussi de Salomée et de tous les gens qui tiennent à toi en général. Comme si je n'avais pas assez souffert en perdant Calvin, puis en croyant perdre Robyn à son enlèvement, j'ai perdu plusieurs personnes chères mais jamais je n'aurai cru qu'il puisse en faire parti et pourtant. Nous arrivions à destination, enfin. Et n'essaye pas de cacher ton malaise par rapport au baiser, j'ai compris, je suis grande je ne t'aurai pas blâmer pour ça. dis je avant de payer le chauffeur et de sortir du taxi pour aller chercher Robyn à la crèche. Quand je parlais de ça, j'évoquais bien sur le fait qu'il ne m'ait pas rendu ce fameux baiser, à vrai dire j'aurai pu comprendre, s'il n'avait pas pris la poudre d'escampette pendant deux mois.

Haylena

Please come back to me.

Elle est énervée, je le sens bien et je ne peux pas la blâmer pour ça. Je me serai certainement foutu une gifle avec toute la puissance disponible si j’avais été à sa place. Je contemple New York qui défile sous mes yeux, m’enfonçant un peu plus dans la banquette du taxi, portant une main à mes lèvres. Je l’écoute attentivement, ancrant chacun de ces mots à l’intérieur de mon crâne, sachant pertinemment que je fais ça pour me punir, pour ne pas les oublier et que ces paroles viennent me hanter encore et encore. « S’il a bien une chose dont je ne te permets pas de douter, c’est bien celle-ci. » Je reporte mon regard sur elle, il est froid et pourtant il essaye de transmettre tant de choses. J’aimerais lui montrer à quel point je suis chamboulé par tout ça, lui dire combien elle m’a manqué et que je n’imagine pas ma vie sans elle. « Tu veux que je te dise quoi ? Je sais que j’ai été lâche, je sais que je vous ai abandonné parce que je n’arrivais plus à rien. J’aurais dû être là pour toi et Robyn, pour Salomée, pour Poppy, pour Brynn, pour Némésis et la liste est longue. Mais j’ai fui Milena, oui je suis resté au Danemark et à Boston parce que je ne pouvais plus rien faire à part me laisser couler. Je… je suis désolé. » Je suis aussi paumé qu’elle et pourtant je n’en ai pas le droit. J’ai juste failli à ma tâche, encore une fois. Elle sort du taxi et je la suis alors que ses paroles dérivent sur le baiser. Je sors mon retour et la rattrape, me plantant devant elle, en plein milieu des parents venant chercher leurs enfants. « Arrête, tu n’es pas dans ma tête, tu ignores tout à propos de ce baiser. Il représente beaucoup plus que tu ne le crois pour moi mais quand tu as posé tes lèvres sur les miennes j’ai senti que je n’allais pas être à la hauteur pour toi et Robyn, que je ne pourrais pas vous rendre heureuse. Et pourtant une partie de moi ne voulait pas y croire… parce que… » Je me fais interrompre par une jeune femme, visiblement la personne s’occupant de Robyn. Je me racle alors la gorge et viens me poster près de la jeune maman.

J'écoutais ses justifications mais ça ne faisait qu'entrer par une oreille et sortir par une autre. Il avait ses raisons, je n'en doute pas. Je sais à quel point la mort de son père l'a perturbé. Je le sais parce qu'il est venu me voir après qu'il ait appris la nouvelle. Je pensais qu'il savait que j'étais là pour lui. Je l'aurais aidé, épaulé s'il n'était pas parti, s'il était resté et qu'il m'avait tout simplement parlé. Je suis supposée être sa meilleure amie bordel, il devrait pouvoir me parler et si ça n'est pas le cas alors je ne sais pas ce que nous sommes devenus l'un pour l'autre. Non, c'est moi qui suis désolée pour toi. dis je en guise de réponse à ses explications. J'étais vraiment dure avec lui mais une colère que je ne soupçonnais pas montait en moi et j'avais du mal à la canaliser. Finalement, nous arrivions à l'adresse que je désirais et je me contentais de lui balancer quelques mots sur le fameux baiser avant de sortir et de claquer la porte, me dépêchant d'aller en direction de la crèche. Alors que je venais d'y entrer, Haytam se planta devant moi et je croisais les bras sur ma poitrine affichant une moue d'exaspération. Pas à la hauteur ? Je ne pense pas être quelqu'un de plus importante que lui, j'aurai pu imaginé tous les scénarios mais certainement pas celui là. J'attendais avec impatience la suite de ses propos mais ma curiosité fut coupée net lorsqu'une des employés arriva avec Robyn dans ses bras. Un sourire se greffant automatiquement sur mes lèvres. Mais regardez donc qui est là ? C'est mon bébééé ! dis je en la prenant dans mes bras avant de déposer un baiser sur son front. Je discutais quelques minutes avec la personne en question afin de savoir si tout c'était bien passé. Ce n'est que lorsqu'elle fut partie et que je me retrouvais de nouveau seule avec le dunster que je vis ma fille tendre les bras vers ce dernier. Il ne manquait plus que ça. Tu veux la porter ?

Haylena

Please come back to me.

Tenter de m’expliquer mais pourquoi ? C’était bien trop tôt ou surement trop tard. Les mains dans les poches je tente de rester calme alors que mes paroles glissent sur la peau de la jeune blonde sans avoir un quelconque impacte. Dépité, je souffle longuement en entendant des pas se rapprocher de nous. Milena lâche sa phrase sanglante et arrête toute conversation, en même temps est-ce que je peux vraiment lui en vouloir ? Bien sûr que non. Je me tourne et la regarde avec un large sourire alors qu’elle prend Robyn. Tu vois Haytam, elles sont ta famille et tu les as abandonnées comme un lâche. Aussitôt un poignard se plante dans mon cœur et je baisse la tête, regardant soudainement ailleurs, les autres enfants, les autres parents s’enlaçant, est-ce que j’aurais le droit à ça un jour ? J’en doute. Pourtant lorsque je repose mes yeux sur les deux petites blondes de ma vie, je ne fais qu’envier ce qu’elles m’apportent en temps réel. J’avale ma salive et me sens soudainement pas à ma place, bordel qu’est-ce que je fous ici, je vois bien qu’elles sont bien mieux sans moi. Je ferme un instant les yeux et tente de dessiner un sourire sur mes lèvres alors que je vois la petite me tendre les bras. « Hey Honey ! » Je lui tends la main en profitant de sa joie de vivre, qu’est-ce qu’elle a grandi c’est tout simplement fou. Je repose alors mon regard sur sa mère qui semble ne pas être tout à fait d’accord avec la suggestion de ses paroles. « Je peux ? » Je chuchote alors que la petite regarde ailleurs, bien sûr que j’en meurs d’envie et pourtant je me retiendrais si ça ne plaît pas à Milena. Je n’ai aucun contrôle sur cette situation et je n’en veux aucun, je veux simplement faire ce qu’elle demande, ce qu’elle désire, rien de plus. Être à ses pieds ? Si cela peut l’aider à me pardonner…