(AMLIE) + Alors... c'était comment ?

J'avais passé la journée le cul vissé dans le canapé, mes cours éparpillés sur la table basse, un saladier plein de chips sur les genoux, mon ipod coincé entre deux coussins, le regard rivé sur la télévision où je regardais toujours les même vidéos, des même chirurgies en boucle. De quoi rendre fou n'importe qui. J'avais finis par mettre pause sur l'abdomen ouvert d'un pauvre homme qui subissait une greffe de cœur, avant de me replonger, non pas dans mes cours mais dans mon saladier de chips. J'y avais vidé plusieurs paquets aux goûts différents: des chips barbecues, des chips crème-oignons et des chips natures. L'effet de surprise avait duré envions 2 minutes, puis j'avais finis par me faire un tableau de probabilité, sur le coin d'un copie, qui me permettait de prévoir, avec plus ou moins de précision, qu'elle chips j'allais piocher... Bref: vous l'aurez compris, je m'emmerdais et j'avais la flemme de réviser d'avantage. Je m'étais levé à 9 heure, et depuis j'étais là, encore en pyjama, à faire semblant de relire mes cours. La rouille totale. L'appartement était, évidemment, vide (sinon je serais aller embêter quelqu'un au lieu de m'ennuyer là). Kol devait être au boulot et Amen quelque part. En faite cette dernière n'était pas rentré hier soir ! Chose assez rare. Je lui avais envoyer un ou deux textos, un peu inquiète, qui étaient rester sans réponse. J'avais finis par me rassurer en me disant qu'elle avait fait la fête et que, trop bourrée, elle avait préféré dormir sur place.

A peine levée, j'attrape mon téléphone dont la led clignote, me notifiant de messages reçu hier. Ils viennent de Charlie, l'un de mes colocataires avec qui j'ai noué une amitié toute particulière à mes yeux, qui s'inquiète du fait que je ne sois pas rentrée. Un large sourire s'affiche sur mon visage. Le fait qu'elle soit inquiète me fait plaisir, même si je culpabilise un peu de ne pas l'avoir prévenu du fait que je ne passerais pas la nuit à la maison, mais pour ma défense, rien de tout cela n'était pas prévu. Je file sous la douche, enfile un slim et un pull, dit au revoir à Isaac avec qui j'ai passé la nuit et fonce direction l'appartement. Dans la logique des choses, Charlie devrait s'y trouver parce qu'elle n'a pas cours aujourd'hui, ce qui me réjouis. Charlie, c'est la seule personne que j'ai besoin de voir, là, tout de suite, pour discuter en long, en large et en travers de la nuit que je viens de passer avec Isaac. Le trajet est rapide, la circulation étant dégagée, ce qui ne me permet pas vraiment de réfléchir à la façon dont je vais lui expliquer les choses. Une fois arrivée, j'ouvre la porte du logement et hurle à pleins poumons. CHAAAAAAAAARLIE, ON A UN NOUVEAU CHAPITRE DE LA BIBLE A ECRIRE ! tout en lâchant un léger rire. La bible, si mes parents étaient là, ils crieraient au blasphème. Je fais mon chemin, arrivant dans le salon. J'ai tellement de choses à te.. mon dieu chacha, éteint moi cette vidéo, pitié ! Le large sourire que j'affichais a totalement disparu face à l'image d'un homme, le torse grand ouvert. Je déteste les foutu vidéo qu'elle se passe en boucle pour ne louper aucun détail, mon coeur est bien trop fragile pour ça.

 « CHAAAAAAAAARLIE, ON A UN NOUVEAU CHAPITRE DE LA BIBLE A ECRIRE ! » Je manquais de m’étouffer avec mes chips en entendant ça. Amen venait de rentrer tout en discrétion, comme ça son habitude.  « C'est à cette heure là que tu rentres ?! » Râlais-je en reposant mon saladier sur la table base, écrasant mes cours déjà bien froissés. À m'entendre on aurait cru une mère inquiète, et à me voir... une grosse vache qui avait des morceaux de chips aux coins des lèvres et qui avait passer la mâtiné en pyjama. Je me retournais vers l'entrée pour la voir, essuyant d'un revers de main les miettes rester coller sur mes jours, preuve que je n'avais fais que m'empiffrer. J’aperçus un jolie sourire sur ses lèvres qui disparu presque aussitôt lorsqu'elle posa ses yeux sur la télévision. J'éclatais de rire avant d'attraper la télécommande pour l'éteindre. Qu'est ce qu'elle pouvait être sensible celle là !  « Prend pas cet air dégoté ! C'est qu'une greffe du cœur... C'est pas comme si c'était un porno ! »  dis-je en pouffant de rire, en me levant pour récupérer mon dvd. (oui oui j'avais gravé un dvd avec toute c'est superbes chirurgies ! pour le plus grand plaisir d'Amen !)« J'ai pas eu de vie sociale aujourd’hui.... » soupirais-je en me laissant retomber dans le canapé. « Raconte moi ta soirée, contre une poignée de chips ? Pleeeaaasseeee ~ » Ajoutai-je en tapant rapidement les coussins du sofa, avant de lui faire signe de venir s’asseoir. J'avais pris un air presque mignon et suppliant, mais je savais bien que c'était inutile : elle allait tout me raconter de toute façon !

Lorsque je hurle après ma colocataire, sa réponse me fait penser à celle qu'aurait pu avoir ma mère. Enfin, pas tellement en fait, parce que ma mère aurait probablement alerté la police et tout le quartier après avoir fait un malaise d'angoisse. Non, je n'exagère absolument pas. Les peurs de ma mère se mettent toujours en scène de façon très théâtral. Je ne dis rien et me contente de rire tout en avançant dans le salon. Charlie, qui a d'habitude une classe folle et plutôt en piteuse état aujourd'hui, mais vraiment. C'est pire que pendant nos soirées filles. C'est rassurant de la voir comme cela au fond, ça me rappelle qu'elle n'est pas parfaite en tout point et me permet de me défaire de mon complexe quelques instants. Elle se déplace avec la grâce d'un hippopotame tout juste éveillé pour éteindre la vidéo, me balançant que ça aurait pu être pire, un porno. Je ricane doucement. Je pense que le porno me choquerai moins. Une fois la vidéo plus qu'immonde éteinte, je viens prendre place près d'elle, lui faisant un bisous sur la joue. Désolée maman de ne rentrer que maintenant, mais les choses ne se passent pas toujours comme prévu ! Je lui lance mon plus beau sourire et plonge ma main dans le saladier remplie de chips posé au-dessus de ses cours. La table basse et dans un état lamentable et si je n'avais pas tant de choses à lui raconter, je commencerai le ménage. Tu te souviens d'Issac, le garçon dont je t'ai parlé il y a quelque temps ? Ma voix trahie mon excitation et mon appréhension, parce que l'avis que Charlie portera sur mon récit a une grande importance pour moi, c'est un peu mon modèle et je n'ai pas la moindre envie de la "décevoir".

 « Je pense que le porno me choquerai moins.  » Me lâcha t-elle avec cet accent italien trop chou, en venant s'asseoir à coté de moi.  « J'ai peut-être une vidéo d'une ablation des testicules si tu veux voir !» Plaisantais-je en m'asseyant en tailleur. Je passais rapidement ma main dans mes cheveux, histoire de les recoiffés un peu et d'avoir l'air plus présentable. Mais vu le regard de Amen : c'était pas trop ça. Puis ça ne manqua pas : elle m'appela maman. Je fis mine de m'étouffer (pour de faux ce coup-ci!)  « Mon dieu, ne m'appelle pas comme ça, je me sens vieille ! » Râlais-je en lui tapant gentiment l'épaule. J'aurais dû m'en douter en même temps. Mes textos, plus ma remarque à son arriver : je lui avais tendu la perche ! Elle me fit son plus beau sourire avant de prendre la poignée de chips que je lui avais promise (une seule, attention je surveille!). Son regard s'arrêta quelques seconde sur mon bordel, puis alors que je m'attendais a une remarque désagréable, - puisque le salon était sans dessus-dessous par ma faute - elle me demanda si je me souvenais d'Isaac.  « Oui je m'en souviens. Le frenchy sur lequel tu craques ! » dis-je en tentant d'imiter son accent italien trop mignon. Elle m'avait parlé de lui plusieurs fois déjà. D'après ce que j'avais compris ils étaient amis, ce qui selon moi était un très bon début ! J'avais toujours pensé qu'il fallait être amis avant d'être vraiment amoureux. Malgré ça j'étais une adepte de la friend-zone.... ma technique était donc certainement à revoir. Pourtant l’excitation dans sa voix me laissait imaginer qu'Amen avait, par miracle, réussie à sortir de cette zone maudite...

Avec Charlie, ce qui est drôle c'est qu'on peut passer d'une greffe de coeur au porno et finir sur un sujet mixant les deux : l'ablation des testicules. Oh, l'ablation des testicule, c'est surement plus regardable qu'un torse grand ouvert. J'veux dire, ça ne fera pas grand chose, jusqu'à preuve du contraire on ne risque pas de pouvoir me retirer les testicules un jour ! Dis-je en rigolant. Il est vrai que j'ai un petit coeur, trop sensible, et que la vue d'images comme celle-ci me donne la nausée. Je ne comprendrais probablement jamais comment elle peut rester assise là des heures à regarder l'intérieur de l'être humain. Autant j'admire sa vocation qui permet de sauver bon nombre de vies humaines, autant la façon de faire me dégoûte au plus point. Elle tente de s'arranger un peu lorsque je pose mes fesses sur le canapé, ce qui n'est pas un franc succès, mais même dans cet état elle parvient à être jolie, s'en est presque exaspérant. Et enfin, elle finit par ronchonné parce que je l'appelle maman, ce qui ne me fait rire qu'à moitié, parce qu'au fond, elle agit réellement comme une petite mère poule par moment chose que je trouve, je dois l'avouer extrêmement mignonne. Cela flatte un peu mon égo, le fait qu'elle s'inquiète pour moi trahi la place que j'ai dans sa vie. Vu comme tu ronchonnes, je pense que tu ne te sens pas que vieille, mais que tu le deviens aussi.. vingt-trois ans et presque aigri, maman ! Lâchais-je en rigolant avant d'enfourner une chips dans ma bouche et d'afficher une mine de dégoût. Crème-oignon bordel, que c'est mauvais ! Si ma mère était là, elle me dirait que c'est la punission de dieu pour m'être moquer de Charlie. T'aurais pu me prévenir, eurk. dis-je, accompagnant mes paroles d'un coup de coussin dans sa figure. Elle sait pertinemment que je n'aime pas ça. Oui, le frenchy sur lequel je.. Eh ! mais arrête de te moquer de mon accent toi ! Hop, un nouveau coup de coussin, faudrait la discipliner celle-là. En plus, son accent est à mille lieu d'être réaliste et chou comme le miens. J'ai passée la nuit avec.. fini-je par dire, grand sourire sur le visage.

Je pouffais de rire en l'entendant. Elle n'avait pas tord : sur beaucoup de point, l'ablation des testicules était plus regardable qu'une opération du cœur. Il y avait beaucoup moins de sang, moins de risque de complication et puis, en tant que femme, on se sentait moins concernée. Ceci dit, une greffe du cœur était une opération extraordinaire, un geste presque divin, alors que l’ablation ...bref je vais pas rentrer dans les détails, mais voilà, c'était moins intéressant à regarder. Mais ça Amen avait bien du mal à le comprendre. Tout comme j'avais bien du mal à comprendre pourquoi elle étudiait la littérature. « J'suis pas aigrie...  »  ronchonnais-je avant de me prendre un coussin dans la tronche. Les chips crème-oignon ne lui plaisaient visiblement pas « D'après mes calcules, tu tomberas sur les crème-oignon près de 45 fois... sur 100 chips. » Dis-je en montrant du doigt le bout de papier sur lequel j'avais fait mes statistiques.  « Ouais …. j'avais rien de mieux à faire. » Ajoutais-je dans un soupire. J'eu à peine le temps de me recoiffer, suite au coup de coussin, que je m'en pris un autre.  « Pardon, je peux pas m'en empêcher... » Dis-je en lui arrachant le coussin des mains, histoire de ne pas me reprendre un coup. Je n'y pouvais rien si son accent était si mignon ! Et entre elle et son accent italien, Kol et son accent français, j'avais pris l'habitude de me moquer, gentiment, de leur façon de parler. C'était plus fort que moi. « J'ai passée la nuit avec... » Je lui balançais presque aussitôt le coussin au visage.  « T'es sérieuse ?! » Lâchais-je choquée. J'étais à la fois jalouse, excitée et inquiète. Jalouse parce qu'elle était plus jeune que moi et que je n'avais toujours pas eu le courage de franchir cette étape, du coup j'étais, une fois de plus, la vieille fille de la colocation. Excitée, parce qu'elle allait pouvoir tout me raconter dans le détail et inquiète parce que coucher avec quelqu'un n'était pas anodin, il fallait bien se protégé. Après tout, il suffisait d'une fois pour.... Merde, je fais encore la maman !  « Passer la nuit genre... dodo. Ou passer la nuit genre... pas dodo ? » Demandais-je quand même, histoire de ne pas m'emballer pour rien.

Charlie, elle est un peu comme moi. Nous ne sommes pas des copies conformes, mais nous nous rejoignons sur beaucoup de points, notamment sur la soif d'apprendre. Je suis souvent la tête dans les livres, je me passe des documentaires sur la vie de Shakespeare, Zola, Balzac, ou des documentaires qui retracent l'histoire de la littérature, des écrit de Homère à ceux de Houellebecq. Je peux passer des heures à tourner dans tous les sens des écrit de Flaubert pour découvrir si oui ou non il réussit son objectif avec Madame Bovary, juste parce que ça m'enrichie culturellement. C'est la même chose pour elle, même si c'est surtout des gestes méthodiques qu'elle apprend par coeur. Et qu'il est bien plus difficile de rester concentré sur un torse ouvert que sur les pages d'un livres, mais c'est son truc à elle. La trouver comme ça n'est donc pas très étonnent malgré sa dégradation physique. Son petit calcul de probabilité pour les chips n'est pas des plus étonnant non plus, mais il est vrai qu'elle a poussé la chose un peu loin.. Heureusement que je suis rentrée. Je me contente de souffler, pour qu'elle comprenne qu'elle est allé un peu loin, mais ça, c'est le truc des gens scientifiques, toujours à calculer tout et n'importe quoi. Je ne sais pas vraiment si c'est le fait d'avoir soufflé ou d'avoir dit que j'avais passé la nuit avec Isaac qui me vaut le coup de coussin qu'elle me met en pleine tête. Finalement, c'est plus agréable à donner qu'à recevoir. Lorsqu'elle ouvre la bouche, sa voix révèle un mélange d'excitation et d'inquiète. C'est décidé, ce n'est plus Charlie ou chacha, mais maman. Passer la nuit genre.. bah genre dodo, mais pas beaucoup tu vois. Mon excitation est un peu descendu, le doute commence à s’installer, je ne devrais peut-être pas lui dire toute la vérité. On a fait du sport, et on a dormi en fait. dis-je la regardant droit dans les yeux.

Un soupire. Mes statistiques la faisait soupirer ! Bon en soit je la comprenais, si moi je trouvais ça  simple et inutile alors elle, elle devait trouvé ça vraiment, mais vraiment, sans intérêt. « Passer la nuit genre.. bah genre dodo, mais pas beaucoup tu vois » Je me redressais comme pour mieux l'entendre. Puis d'un coup elle ajouta : « On a fait du sport, et on a dormi en fait  » Je fronçais un peu les sourcils, l'air blasé. Elle prenait cet air sérieux et me regardait droit dans les yeux. J'étais naïve mais pas à ce point. Et puis coucher avec quelqu'un pouvait être considéré comme du sport, donc ça n'était pas vraiment un mensonge.  « Du sport de chambre ? » Demandais-je.   « Raconte ! Comment ça c'est passé ? Je veux pas de détails sur la taille ou ce genre de truc hein. Mais raconte ! » Ajoutais-je en la secouant gentiment. Elle tournait autour du pot alors que j'avais bien compris ce qu'elle avait fait la nuit dernière.

A peine ai-je terminé ma phrase, que son air change. Il devient presque désapprobateur, ou alors, elle est simplement perplexe. Non, juste du sport. On est allé courir, puis on est rentrés, douche et dodo. dis-je, gardant un air des plus sérieux, la regardant droit dans les yeux histoire de ne rien laisser passer. Charlie, elle est drôle quand elle est un peu perdue. Son sourcil arqué et ses grands yeux finissent par me faire perdre mon sérieux et j'explose de rire. Mais t'as vu ta tête ? Bah oui, du sport de chambre. Tu crois franchement que si ça n'avait pas été le cas je serais rentrée en hurlant comme ça ? C'est vrai que je suis du genre à m'emballer un peu rapidement, mais jamais à ce point là. Quoique, concernant Isaac, je suis capable d'avoir des réactions excessives sans même m'en rendre compte. Je me demande si ce n'est pas son petit accent français qui fait toute la différence. J'adore les accents et le siens.. bon dieu qu'il est mignon. Un large sourire refait surface. Bah.. c'était bien. Mais vraiment bien. Je n'ai pas vraiment de point de comparaison, c'est vrai, mais ce que j'ai vécu cette nuit n'était pas décevante du tout, c'était peut-être même au-delà de mes espérances.