Je mords dans mon muffin à la myrtille. De la fenêtre du box, je guette impatiemment l'arrivée d'Emrys . Ce con (et encore, c'est affectueux) a disparu de la circulation sans laisser de traces, et le voilà qui réapparaît en me proposant par sms de le rejoindre au Starbucks. Je ne lui en veux pas, mais disons que j'ai hâte de l'entendre me raconter tout ce qui s'est passé dans sa vie et dans sa tête jusqu'a présent. J'avoue m'être inquiété pour lui, et il l'a certainement compris vu les nombreux messages que j'ai laissés sur sa boite vocale. Tournant mon gobelet de café Latte entre mes doigts, je remarque que l'employé qui s'est chargé d'écrire mon nom a perpétué la tradition qui est de mal orthographié les noms des clients. Me voilà donc : Caz-hey ; je ne peux m'empêcher de rire tellement c'est ridicule. Je me suis toujours demandé s'ils le faisaient vraiment exprès où s'ils n'engageaient que des dyslexiques pour le fun ; Car ils partent vraiment loin dans leurs délires. Et tout en pensant à cela, je bois une gorgée de café, resserre mon bonnet sur ma tête et observe à travers la vitre Emrys qui arrive à grandes enjambées. Lui faisant signe de ma main libre (enfin, de celle qui tient le muffin), je lui indique ma position. Je n'ai pas commandé, ne sachant ce qu'il voudrait.
C'est tellement étrange de se balader à nouveau dans ses rues, c'est si étrange ! Pourtant, je me sens réellement heureux de retrouver mon univers, mon Amérique, celle qui m'a conquise et m'a laissé avoir une vie meilleure, celle compromise plus tôt par mon père. Doucement, je me lève avec un peu de mal quand meme ; incapable, je suis ! J'ouvre les volets, fais mon lit avant que j’entrouvre ma fenêtre pour renouveler l'air. Un peu d'eau froide sur le visage, je me dirige en boxer vers la cuisine type américaine pour même servir un jus de fruit. Je n'ai pas besoin de plus car ce matin, je retrouve mon brother Casey, qui est tout comme évidemment, pour un déjeuner au starbuck alors évitons de se goinfrer dès le départ. Je passe à la douche pour le petit rituel toilette avant de foncer pour attraper une tenue adéquate mais toujours tendance quoi. Je pars alors pile à l'heure fixe, mes affaires de cours dans mon sac en bandoulière et retrouve ma tendre moto pour foncer au café. Quand j'arrive sur le campus, je vois que je ne suis pas le seule lève tôt et bien que je ne sois pas bien heureux de ma situation, parce que clairement je suis fatigué et je fais mon grand retour y comprit en cours, où je suis surement pommé, bah je suis heureux de retrouver ce monde là. Je pénètre dans le starbuck, sourire aux lèvres me dirigeant vers Casey et arrivant, je vais le checker en disant : Salut frère ... ça m'fait vraiment plaisir de te voir ! Je m'assoie face à lui en lâchant mon sac vulgairement sur le sol d'un air assez nonchalant.
Salut frère ... ça m'fait vraiment plaisir de te voir ! Croisant les bras sur la table, je lui rends son salut par un sourire et attends qu'il s'installe bien pour engager la conversation : Moi aussi ça me fait plaisir ! Jetant un coup d'œil dehors sans raison particulière, j'observe les passants quelques secondes et reviens vers Emrys en disant : Va falloir que je t'apprenne un truc mon vieux, ça ce fait par trop de disparaître comme ça, sans laisser de traces. Ce n'est pas super poli, tu vois. Surtout que nous, tes frères, on a bien flippé no'te race, mais genre : VRAIMENT. Donc maintenant que t'as ton joli petit cul posé en face de moi, j'te laisser juste le temps de commander et tu vas pourvoir me raconter tout ce que tu as à me raconter, dis-je en optant pour un ton détaché et ironique, préférant y aller avec de l'humour, le sermonnant comme si j'étais sa mère. Il commande donc, comme je lui ai conseillé, et pendant ce temps, j'observe ses traits, cherchant ce qui a pu changer en lui. Mais j'ai beau passer au peigne fin les moindres centimètres de son visage, j'ai toujours le même gars en face de moi. C'est à la fois toujours le même Emrys, et pourtant j'ai l'impression qu'il a changé, qu'il est différent d'avant.
Je m'installais calmement face à mon ami sentant les distances surprenantes qu'il mettait entre nous rien que par son salut assez froid, juste un sourire, pas de vrais accolades comme avant; Je le sentais pas cool là, il m'annonça néanmoins qu'il était heureux de me voir ce qui interrompu avec plaisir mon apnée. Je respirais à nouveau en comprenant à son visage qu'il allait vouloir des explications ce que je ne pouvais lui reprocher. Le jeune homme inversait les rôles pour me faire quelques reproches, comme une leçon de moral et je soupirais, posant ma tete sur mon poing. Je montrais la lassitude de ces reproches après le voyage à la neige ; ça se poursuivait et ça me saoulait mais je savais que je devais garder mon calme et les comprendre, Roxanna me l'avait bien fait comprendre. Un sourire attristé, je m'absentais pour aller commander pour nous et quelques longues minutes plus tard, je revenais avec nos boissons prenant une gorgée avant de prendre la parole, gêné ; Je partais en vacances une semaine pour avoir de l'inspiration et j'ai eu u accident, j'étais dans le coma, j'ai perdu la mémoire alors je pouvais pas revenir, je ne savais pas qui j'étais ... dis-je version courte, énervé des questions et saoulé de la situation. Je frappais de es longs doigts sur la table montrant mo anxiété palpable. Je repensais à comment je l'avais laissé et rouge de honte, je demandais : Mais au lieu de se prendre le chou, ou d’imaginer que je peux faire ce genre de truc, vous abandonner, dis moi où tu en es avec tta ... santé ? Je grimaçais et tourner mes pouces, apeuré de sa réponse.
J'écoute les explications d'Emrys d'une oreille attentive. Coma, Amnésie... Je vois bien qu'il n'a pas envie d'en parler plus, et ça me convient, je n'insiste pas. Il m'en parlera en temps voulu, s'il en éprouve le besoin. Lui souriant, je lui fais comprendre que je suis à disposition s'il en a envie un jour. Après tout, je sais ce que c'est de ne pas avoir envie de parler d'une chose sur le moment ; et sur ce, je bois une gorgée de café. Mais au lieu de se prendre le chou, ou d'imaginer que je peux faire ce genre de truc, vous abandonner, dis moi où tu en es avec tta ... Santé ? Et sur le moment, je m'étouffe avec le liquide brûlant. Petit retournement de situation, sur ce coup, c'est effectivement moi qui n'ai pas envie de m'attarder sur les détails du sujet. Mais c'est logique qu'il me pose cette question, il n'était pas là lors de ma rechute et de mon long séjour à l'hôpital. En soit, je trouve ça touchant qu'il se préoccupe de ça. Posant mon gobelet, je dis : hum.... Pour résumer, je me suis déjà porté mieux qu'en ce moment, mais pire également. J'essaie de ne surtout pas l'inquiéter. Je suis sous chimio et tout le bordel pour le moment, mais je vais bien. Je change en vain de sujet, même si je sais qu'il va certainement vouloir en savoir plus : et sinon ton inspiration ? Tes livres ? Tu sais que je suis un grand fan en plus !
Je ne suis pas forcément heureux de parler de toutes ces merdes qui me sont arrivés et j'en ai vraiment ras le cul de m'entendre toujours poser cette question avec un putain d'air accusateur comme ça. Enfin bref, il semble comprendre, ne renchérissant aucunement et digérant doucement l'information. Là, je le casse un peu en le lançant sur sa maladie mais il doit bien savoir que ça n'a rien de méchant mais j'ai toujours pris le dessus, toujours été celui qui le protégè et non le contraire alors je fais tourner la roue. Là, il manque de s’étouffer alors je lève un mono sourcil, inquiet. Il me dit qu'en gros, c'est stable dans la mesure où y'a eu de pires phases mais des meilleurs, je me mord la lèvre, inquiet de nature mais de nature aussi à le cacher. Je me racle la gorge, je veux qu'il accouche et il me dit qu'il est en chimio. Je grimace et je vais prendre sa main : tu tiens le coup ... je veux dire moralement ? Je serre sa main signe de soutien mais il change de sujet parlant de mes livres et je fais quelques mouvements de tete montrant que je n’apprécie que peu qu'il ne veuille pas tant que ça m'en parler sachant que je m'inquiète pourtant a fond pour lui. Je prend alors la parole, résigné : Ouais, ça va ... depuis que la suite est sortie ... ça fonctionne! tu as du le lire toute manière mais là, je pars sur tout autre chose mais ce sera une surprise ... Je ris doucement montrant enfin de la joie de lui parler.
Tu tiens le coup ... je veux dire moralement ? Justement, non, je ne tiens pas vraiment le coup. La chimio me fatigue, mais je ne dors plus, elle me rend certain jours aussi exécrable que possible ou bien aussi guimauve qu'un bisounours. Elle me rend tellement émotif que j'ai pleuré au supermarché en voyant du fromage venant d'Irlande. La chimio me prend mes cheveux, même si je me refuse à les raser définitivement. Elle m'oblige à passer un temps fou à l'hôpital, et à mentir à mes amis pour ne pas qu'ils s'inquiètent. Ouais, ça va... depuis que la suite est sortie... ça fonctionne! tu as du le lire toute manière mais là, je pars sur tout autre chose mais ce sera une surprise... Je souris, content de cette nouvelle, je vois trés bien à son expression que mon changement de sujet n'était pas la réponse qu'il attendait. Je me décide donc à lui confier mes angoisses, sachant qu'il me comprendra et qu'il saura encaisser le coup. Hum, désolé. J'vois bien que tu t'inquiètes pour moi et tout... Mais si j'ai voulu changer aussi vite de sujet, c'est parce que, j'ai plus envie de voir mes proches s'inquiéter pour moi. Donc, je suis sous chimio, je commence un peu à perdre mes cheveux, j'suis souvent fatigué et je change d'humeur comme de chemise. Je ne dors plus beaucoup, une à deux heures par nuit et j'ai du réduire mes entraînements dans l'équipe... La seule bonne nouvelle, c'est que j'ai plus de temps pour bosser les nuits où je ne dors pas. Voilà, c'est dit. Désolé.
Inquiet, c'est clairement la pensée que j'ai envers mon ami mais ce n'est pas de la lamentation, c'est juste que je connais ce que sais d'avoir un proche malade, d'avoir la tristesse de la perte et surtout que je n'ai pas pu vraiment me montrer présent pour ma soeur et j'aime tellement fraternellement ce petit gars que je refuse de pas me trouver à ces cotés tant je l'apprécie. Souriant, j'écoute sa joie de m'entendre parler de mes projets mais clairement, si je le vois mal en point et attristé, lui, comprend que je n'attend aucunement de parler de moi mais d'entendre ces maux, qu'il me parle, communique ce qu'il a besoin et n'hésite pas à tout confesser car un ami, un frère est là pour ça. Alors quand il commence à parler en disant qu'il veut pas inquiéter ces amis, je grimace et le stoppe net en disant ; Ouais, bah je ne suis pas un vulgaire ami je crois ... tu m'as dit je suis ton frère, je t'ai dit un jour que tu étais mon petit frère, que tu me faisais penser à Denys car tu es fort et adorable ... alors je veux te protéger, alors je suis en droit de savoir, de t'écouter et que tu ne juges pas pour moi ou tes autres proches d’ailleurs si j'ai à m'inquiéter ou non... j'avais posé ma main sur son avant bras presque protecteur et tendre alors que je l'écoutais poursuivre d'un œil avisé. Il m'apprend comment il se sent, les effets de tous ce qui lui arrive sur sa personnalité et bien sur, qu'il a raison et qu'intérieurement, je balise mais au moins, je sais que je dois être présent. Je lui souris ne voulant montrer l'inquiétude en moi et je lui dis presque joyeux ; bah on va se serrer les coudes et puis, les chimios on ira ensemble poulet ... Je le lirais des extraits de mon nouveau manuscrit pendant qu'ils injecteront ton machin ... avais-je dit exprès avec une certaine nonchalance comme pour dire "on s'en bat de cette maladie parce qu’on la tuera.". Je lui adresse alors un clin d'oeil bienveillant.
bah on va se serrer les coudes et puis, les chimios on ira ensemble poulet ... Je le lirais des extraits de mon nouveau manuscrit pendant qu'ils injecteront ton machin ... Je souris à cette idée, au fait qu'il parle de ma maladie sans trop lui donner d'importance, utilisant des mots comme "machin". Je prends une grande inspiration et bois un peu de mon café. Me frottant ensuite les yeux, fatigué rien qu'a l'idée de devoir encore et encore subir des chimios, je lui dis : personnellement, je ne suis pas contre, ça me ferrait certainement du bien en plus de voir du monde, le temps est tellement plus long là-bas. Avec tous ces malades, ces bébés qui pleurent dans les bras de leurs mères, ces autres cancéreux plus ou moins jeunes... L'autre jour, une mère de famille était là en même temps que moi. Elle était plutôt belle, mais très maigre, avec un beau turban bleu et or, sur sa tête chauve. Elle m'a donné un regard si bienveillant et doux quand elle est entrée, que j'ai cru y voir ma mère. Puis des enfants sont entrés à sa suite. Ses enfants. Il y en avait environ cinq, la plus jeune avait environ quatre ans tandis que le plus vieux devait avoir dans les 11 ans. J'en ai eu mal pour elle. On voyait bien qu'elle n'allait pas gagner sa lutte... T'aurais dû voir son corps, celui d'une enfant et non d'une femme ! Pourtant même avec la maladie, elle prenait le temps et la patience de lire une histoire à ses enfants, de les aider pour certains à faire leurs devoir... Elle était si faible et si forte à la fois ! Je soupire. Et même si avec le temps, j'aurais certainement dû m'habituer à rencontrer ce genre d'injustice, je ne m'y fait toujours pas... Quand je vois des gens comme cette femme, à chaque fois, j'ai le cœur qui se serre si fort que j'ai l'impression qu'il va se briser en pleins de morceaux trop petits pour qu'on puisse reformer le tout tel quel, comme on peut le faire avec un puzzle... Baissant la tête pour regarder mes mains, je lui dis : je suis certain que tu comprends ça toi !
Je tentais au maximum de cacher mon inquiétude et surtout, le fait que j'étais apeuré et trop attristé de son état. Navré, je restais pourtant fou et rigolo comme il adorait cela face à lui. Je le regardais boire dans son café, le suivant de peu en aspirant avec gourmandise le liquide bien chaud qui aidait ma gorge à ne pas bruler à cause du froid et des épidémies de grippes encore présentes bien que sur la fin surement. Je vis que ma façon de parler, de faire lui plaisait mais je ne pus contenir ma tristesse et l'effet que tout ça me faisait quand il commença un douloureux monologue et d'une sombre histoire à laquelle, il avait, malheureusement, du assister très récemment. Je manquais de m'étouffer tant j'étais choqué par l'émotion de sa voix mais aussi, son histoire tout simplement. J'ouvrais encore plus grand les yeux d'étonnement à chaque phrase alors qu'il me disait que je devais surement comprendre. Je secouais ma tete comme pour lui répondre positivement, assez timide et repensant à ce que j'avais pu vivre, le malheur de voir une sœur mourir, mal en point aussi, un frère disparaitre, un autre mourir, l'imaginer simplement et ne plus jamais le voir. J'en avais vécu des choses alors oui, je savais ce que toutes ces choses faisaient. Je bus, intimidé, dans ma boisson, pensif et incapable de réagir toute de suite et soupirant de lassitude de toujours me retrouver dans un esprit, je ne serais dire, triste, mal en point. Oui, je comprend ... avis-je tenté timidement. J'ai vu a sœur vraiment mal quelques jours avant de mourir, c'était qu'une enfant, une petite enfant et quand elle est morte ... j'ai cru qu'on m'avait arraché le coeur ainsi que pendant les jours précédents où mes frères, ma mère et moi étions en apnée ... Je baissais le regard, les yeux brilants de la tristesse qui tentait de s'évacuer mais battant, je refusais décidant de poursuivre sur une note nonchalante, pleine d'humour qu'il apprécierait, n'aimant pas la pitié : Et puis, hummm... fis-je érotiquement. T'es déjà canon ... le crane rasé tu vas déchiré mon gars ! Je souriais en lui faisant un clin d'oeil.