Radio d'Harvard
l'actualité
L’animateur de la radio, de son anglais cassé, un anglais canadien, laisse la parole à un nouvel auditeur. Le prix à gagner, un voyage dans les Caraïbes, semble fort alléchant pour qui veut passer de belles petites vacances en amoureux. Oui? À qui parle-t-on? Derrière le combiné téléphonique, c’est le silence plat. Silence radio, comme on dit. On n’entend même pas le souffle de la personne le tenant derrière. Allô? Toujours rien. L’animateur rit. Je crois que c’est votre jour de chance. La prochaine personne qui téléphone recevra le prix. Une voix, faible, tremblotante et pourtant assez forte s’élève enfin. Attendez. Je… j’ai quelque chose à dire. Cette voix, étrange, semblait cacher de terribles secrets, de lourdes souffrances, et pourtant elle semblait si puissante que l'animateur ne pouvait que se taire. Du moins... Une annonce? Je crois que vous vous êtes trompés de numéro, ma chère... La voix de la jeune femme se fait de nouveau entendre : Non! C'est une annonce importante. Elle s'adresse à... tous les étudiants d'Harvard en voyage, ici. Je... je suis vraiment désolée, c'est difficile, pour moi. Cette fois, l'on entend sa gorge se serrer, l'émotion, la douleur se faisant ressentir aux oreilles de tous les auditeurs. Depuis quelques temps, nous entendons que des étudiantes se font agresser, que ce soit dans les couloirs du campus, ou bien dans les rues, à la sortie des bars... Nous sommes en voyage, et l'agresseur rôde toujours. Je le sais, et vous devez me croire... On sait qu'elle tente de rester forte, qu'elle veut garder la tête haute et ne pas pleurer, et pourtant ça semble lui être une tâche maintenant presque impossible. L'animateur, mal à l'aise, et incertaine, toussote, sans rien dire. Ce malade, il... il m'attendait. Il était prêt. Il était préparé. C'est un fou, il ne pouvait pas se contenir. Il disait vouloir être doux, il me... Il me touchait tout le corps, puis il m'a frappé dès que j'ai tenté de le dissuader. Royce. Royce Magyar, les filles. Je suis incapable de vous le décrire.. Je croyais bien le connaître, je sais de quoi il est capable. Je ne lui parlais plus depuis un bon moment et... Il s'en est prit à moi. Il est bipolaire, il est dangereux, il s'en est prit à moi, et je sais qu'il s'en est prit à d'autres. S'iiiil vous plaît, respectez le couvre-feu, verrouillez les portes, tenez-vous en groupe, car s'il s'en est pris à une supposée amie, il peut s'en prendre à n'importe qui. Je-j'ai.. Et ça se termina là. Incapable de poursuivre, on entendit ses sanglots au travers du combiné. Elle ne raccrochait pas, et pourtant, le frisson de peur qu'elle ressentait depuis des jours devait certainement se ressentir chez tous les auditeurs qui l'écoutaient à présent pleurer.