MARLEY & ME • Marley

Mer 28 Jan 2015 - 22:26

Marley & Graham

❛marley & me❜

« Ne t'excuses plus, t'inquiètes pas, tout va bien. » J’acquiesce d’un simple hochement de tête en souriant. Peut-être trouverez-vous cela stupide mais je suis gêné, en temps normal je suis le mec qui reste très concentré. Pas du genre à me prendre les pieds dans le tapis en plein milieu d’une pièce ou à trébucher n’importe quand et plusieurs fois par semaine. Je n’ai pas le profil de Mister Bean mais bon, il semblerait qu’aujourd’hui je m’en rapproche. Toujours est-il que cette petite mésaventure aura aidé à détendre l’atmosphère, si bien que je me sens bien plus à l’aise à présent et je découvre donc la très jolie Marley sous un angle nouveau. Bon, on ne peut pas dire que j’en connaissais énormément à son propos avant aujourd’hui mais ce n’est pas la première fois qu’elle retient mon attention. Une fille comme ça on ne peut pas ne pas se retourner sur son passage, c’est comme ça, la vie est injuste, certaines personnes sont plus gâtées que d’autres. Parmi mes découvertes du jour, sa curiosité qui aurait tendance à me repousser dans mes retranchements. J’ai soigneusement évité de trop me confier sur ce qu’il m’est arrivé ces dernières années jusqu’à maintenant, ce n’est pas pour soudainement me délier la langue. Je lui offre donc quelques informations sans pour autant entrer dans les détails, dans le vif d’un sujet encore douloureux qui risquerait, qui plus est, de la faire fuir. « Je t'avoue que j'ai beaucoup de mal à comprendre. Je veux dire, je vois pas pourquoi elles auraient peur de toi. T'as pas la tête d'un psychopathe hein ! » Elle hausse les épaules et j’esquisse un sourire mutin, elle n’a pas idée. Je suis loin de rentrer dans le profil du parfait psychopathe mais je peux être considéré comme tel, ne suis-je pas un assassin ? N’ai-je pas poignardé mon père ? Sur le papier tout colle, excepté qu’il y a beaucoup à prendre en compte autour de cet événement tragique et que personne, excepté Leandra, Jacey et moi-même, ne connait l’intégralité des détails. Elle m’intrigue avec son histoire, elle aussi, et je décide de me mettre en danger, de trahir tout ce que je me suis promis de garder enfoui bien profondément. « Je savais que t'avais un secret ! J'en étais sûre ! Je suis trop forte ! » Elle saute de joie, frappe dans ses mains comme si je venais de lui offrir le plus beau des cadeaux, la plus grande des satisfactions et je ris bêtement. Un peu de fraicheur ça ne me fait pas de mal, des gens comme elle ça ne court pas les rues et c’est bien dommage. « Pardon.. » Je ne lui laisse pas le temps de se confondre en excuses, dans un hochement de tête horizontal je prends immédiatement la parole et l’interrompt. « Non, ne t’excuse pas, je t’en prie. » Je suis à deux doigts de lui dire que j’aime lorsqu’elle se comporte ainsi mais… Ne risquerais-je pas d’être pris pour un fou ? On ne se connait pas suffisamment pour que je permette de telles réflexions après tout. « Marché conclu. Je t'écoute. » Ah parce que c’est à moi de commencer ? Merde, pris à mon propre jeu. « D’accord ! » Je réponds nerveusement, me replonger dans tout ce qui m’a mis à terre et entrainé dans un cercle infernal, dans la décadence la plus profonde n’est pas agréable mais, comme on le dit, il faut soigner le mal par le mal. Dans un raclement de gorge, pour me donner le courage nécessaire, je démarre. Peu sûr de mes mots. « Je sors tout juste de prison. » Je balance, je manque cruellement de tact mais il n’y a pas vraiment de guides pour annoncer de telles choses. « J’ai été enfermé pendant un peu plus de trois ans. J’ai été libéré parce que mon dossier a été réexaminé et que la légitime défense a pu être prouvée. » Je n’ose même plus la regarder, je me concentre sur mon gobelet de café en carton avec lequel mes doigts flirtent maladroitement. Je serais bien trop embêté si son regard venait à changer à cause de mes révélations.

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Sam 31 Jan 2015 - 19:04

J'étais contente, parce que j'allais enfin savoir ce que ce mec cachait. Le soucis, c'est que j'allais devoir être honnête moi aussi après et lui dire le mien. Bon, ça ne me gênait pas cela dit, j'avais pris l'habitude du regard des gens, mais j'appréhendais quand même toujours les réactions. Mais du coup, maintenant, j'étais impatiente de savoir. Il a l'air un peu stressé, ce qui me stresse aussi du coup. Et si ma curiosité allait me faire regretter de l'avoir finalement demandé ? Allez Marley, pas de regrets, fallait assumer maintenant. Et bam. La prison. Ca expliquait sa phrase de tout à l'heure sur le fait que les filles avaient peur de lui. Je m'attendais pas à ça. En fait, je ne savais pas vraiment à quoi je m'attendais pour être honnête. « Trois ans ? » m'exclamais-je surprise. Merde, je voulais pas réagir comme ça. « Excuse-moi, c'est juste que c'est super long ! Pourquoi autant de temps ? J'veux dire, pourquoi ton dossier a pas été réexaminé avant ? » demandais-je doucement, plus calmement. Mais maintenant, je n'avais plus qu'une question en tête : Pourquoi est-ce qu'il avait fait de la prison ? Pourquoi avait-il était enfermé aussi longtemps ? Il avait.. tué quelqu'un ? Oh god, ça m'foutait des frissons. Mais en même temps, j'avais pas vraiment peur pour le coup. J'veux dire, on avait parlé normalement, il avait pas la tête d'un psychopathe qui allait recommencer.. « Ce serait trop indiscret de te demander ce que t'as fait ? Enfin qui tu as.. T'as compris quoi ? » demandais-je légèrement gêné. Putain, j'étais trop curieuse, ça se faisait clairement pas de demander. Il était déjà assez mal à l'aise comme ça. D'ailleurs, il était bien trop mal à l'aise, il devait croire que j'avais envie de m'enfuir en courant, de ne plus le regarder, mais c'était pas le cas pourtant. « Stresse pas hein, je vais pas me barrer. On a tous des secrets, t'as été libéré, c'était de la légitime défense, alors j'ai aucune raison de changer avec toi. Même si j'reste.. Surprise. » rajoutais-je doucement, lui souriant pour essayer de le rassurer. Mon secret à côté de ça, ce n'était rien. Mais en même temps, je pouvais pas me douter qu'il me sortirait ça..

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Marley & Graham

❛marley & me❜

Parler de ce pan de mon histoire n’est jamais très agréable, je dirais même qu’il m’est toujours très difficile de parvenir à trouver les mots sans avoir l’impression de subir une nouvelle fois ce qu’il m’est arrivé. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir espéré pouvoir tourner la page à ma sortie de prison, commencer une nouvelle vie, un nouveau chapitre et parvenir à mettre les barrières nécessaires pour ne plus jamais repenser à ce passage bien sombre de ma vie. Je me suis trompé, on ne tourne jamais totalement le dos à son passé, il revient te hanter en permanence, il fait de toi ce que tu es. Il me faudra encore du temps pour accepter, pour faire le deuil d’une vie qui a été détruite par tout ce qu’il y a de plus mauvais dans ce monde, par le vice, la violence qu’elle soit physique ou morale. Quand j’y repense, j’étais tellement naïf avant ce soir-là, quand tout a dérapé. Je pensais que mon père allait ouvrir les yeux, avoir un éclat de lucidité et enfin se rendre compte de tout ce qu’il nous faisait subir à ma mère, ma sœur et moi-même, je pensais que nous aurions droit à un happy ending. Nous ne vivons pas dans un conte de fées et je l’ai compris trop tard, lorsque mes mains se sont retrouvées couvertes du sang de mon patriarche. Je me suis imaginé tous les scénarios possibles et imaginables, les cas de figures si tout ceci n’était pas arrivé. La conclusion est toujours la même, je ne serais plus de ce monde, c’est moi qui reposerait au cimetière. Cette nuit-là je m’en suis sorti de justesse, il m’a poignardé, tabassé et je l’ai repoussé alors que la pointe du couteau s’enfonçait en moi à nouveau. Le corps humain parait tellement solide et pourtant, mis en péril par une lame, il apparait aussi tendre que du beurre. Rien que d’en reparler et je sens la cicatrice au niveau de mon biceps gauche se réveiller, elle me démange, comme un amer rappel de tout ce qu’il s’est passé pendant des années, chaque coup que j’ai reçu en serrant les dents, chacune de mes cotes qu’il a défoncé en me tapant sur la gueule toujours plus fort. A l’époque je n’étais pas aussi imposant, en prison le sport m’est apparu comme étant le parfait échappatoire, le moyen idéal pour canaliser mes émotions sans offrir mes faiblesses sur un plateau aux autres prisonniers, qui, eux, ont déjà bien assez savouré de sauter sur la viande fraiche que je représentais à mon arrivée. Je me suis reconstruit de ruines, les viols, la violence, j’ai été la pute de ces enculés de prisonniers, ceux qui crèveront en taule, qui ont l’âme aussi noire que la mort puis j’ai décidé de dire stop. Vingt kilos de muscles plus tard, me voilà. Marley ne tarde pas à réagir, je ne suis pas étonné par sa réaction, comment lui en vouloir d’être plus… Méfiante ? Je suis un assassin, je sors de prison, elle devrait probablement avoir peur. N’est-ce pas la logique des choses ? « Trois ans ? » Un sourire amusé se dessine lentement sur mes lèvres, j’ai appris à apprécier les réactions des rares personnes à qui je confie mon « secret ». « Excuse-moi, c'est juste que c'est super long ! Pourquoi autant de temps ? J'veux dire, pourquoi ton dossier a pas été réexaminé avant ? » Marley est curieuse, logique non ? J’ignore ce qu’elle me cache mais je serais probablement tout aussi précis dans mes questions, je voudrais en savoir le plus possible et je le sais. Je prends donc sur moi, l’effort est douloureux mais utile, enfin je crois. « Personne ne s’est battu pour moi tu sais. Pas avant que Leandra puisse se lancer. Leandra c’est, c’est mon premier amour, elle est en droit à Harvard et… Une fois qu’elle a pu avoir la parole elle m’est venue en aide, elle a guidé mon imbécile d’avocat dans le processus en amenant les preuves nécessaires. Elle a été la seule à me soutenir, ma propre mère m’a tourné le dos et a témoigné contre moi à mon procès. » Je serre les dents, pas décidé à montrer la moindre trace d’émotion. Mon discours est précis mais dépourvu de la moindre intensité, enfin c’est l’objectif. En prison j’ai appris la neutralité, à ne jamais montrer mes sentiments, à toujours paraitre froid, distant… Animal en quelque sorte. Difficile de ne plus me comporter de la sorte alors que ma sécurité reposait essentiellement là-dessus pendant trois ans. Si j’ai survécu, si j’ai pu me faire une « place » en prison c’est pour cette raison. Je n’ai pourtant envie que d’une chose, de crier, d’exploser… Peut-être bien que ça me libérerait d’un poids qui m’étouffe depuis une éternité mais… Mais je ne peux pas, je n’y arrive pas, alors je serre les dents, je déglutis et je tâche d’être le plus neutre possible. « Ce serait trop indiscret de te demander ce que t'as fait ? Enfin qui tu as.. T'as compris quoi ? » Je l’interromps et lui réponds du tac au tac. « Qui j’ai assassiné ? » Appelons un chat, un chat. « Mon père ! » Je n’en dis pas plus, je pense que Marley va encore prendre un petit coup sur la tête, avoir arraché la vie à quelqu’un ce n’est déjà pas facile à entendre, à comprendre, à accepter mais quand c’est en plus un membre de sa famille… « Voilà, tu sais tout maintenant, ou presque ! » Je lui confie en soupirant, je n’ose même plus affronter son regard, je ne sais pas pourquoi mais… Lire la déception dans son regard me ferait chier, ça m’embêterait ! « Stresse pas hein, je vais pas me barrer. On a tous des secrets, t'as été libéré, c'était de la légitime défense, alors j'ai aucune raison de changer avec toi. Même si j'reste.. Surprise. » J’acquiesce, quelque peu rassuré par ce qu’elle me dit. « Et toi alors ? Quel est ton secret ? »

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Bon. Il avait fait de la prison parce qu'il avait tué quelqu'un. Il avait passé trois ans en prison, après avoir assassiné une personne. C'est dur. Ca avait dû être tellement horrible pour lui. Surtout qu'au final, il n'avait fait que se défendre ! C'était trois ans injustes en quelques sortes, le jugement avait été mal fait dès le début. Et je pensais que je n'avais pas intérêt de faire ce genre d'erreurs quand je serais avocate, plus tard. Mais du coup, j'étais partagée entre le fait que je devrais sûrement avoir peur de lui, si j'étais une personne normalement constituée, mais aussi le fait que je veux en savoir plus. Que je veux savoir les détails. Je ne changerais donc jamais et je chercherais toujours à chercher les moindres recoins d'une personne, d'un secret, de la vérité. Leandra ? C'était Leandra qui l'avait aidé ? La Leandra qui m'avait laissé tomber quand elle avait appris mon secret ? J'hallucinais totalement. Cette fille qui était ma meilleure amie ne m'avait pas soutenue, mais son premier amour de jeunesse qui a tué quelqu'un, pas de souuuucis. Putain, ça m'énervait, mais j'essayais de faire abstraction. « Oh mon dieu.. Je suis vraiment désolée. Je ne peux pas imaginer ce que tu as vécu, je ne peux pas te dire que je comprends mais.. Je suis juste désolée de te faire revivre ça avec mes questions. » disais-je doucement, baissant les yeux pour fixer mon gobelet. Sa propre mère l'avait laissé tomber. Comment est-ce que l'on pouvait laisser tomber son enfant, sérieusement ? Ca, c'était sûrement quelque chose que je ne comprendrais jamais. Puis, j'essayais de lui faire comprendre que je voulais savoir qui il avait tué et il me l'avait clairement dit. L'air de rien, comme si c'était normal. Son père. D'accord, mon coeur allait exploser. Sa mère l'abandonne pendant le procès, il tue son père, mais tout va bien. Marley, tu te calmes, tout va bien. « Je.. Bah.. J'imagine que tu avais tes raisons de le tuer donc.. » Et non, je ne te demanderais pas les raisons. Ce serait dépassé les limites et en plus, je n'étais suis pas sûre de vouloir les détails. Du moins, pas maintenant, car j'avais déjà beaucoup à encaisser en peu de temps et ça me suffisait. Mon coeur allait me lâcher sinon hein. Mon secret ? Putain, j'avais presque honte de lui dire, car c'était rien comparait à lui. « Oh, je suis une ancienne prostituée. » m'exclamais-je simplement, haussant les épaules avant de boire une gorgée de ma boisson. « En sachant que j'ai fait ça parce que j'avais plus d'argent et qu'Harvard coûte cher alors ça a été la seule solution que j'avais trouvé sur le moment. Ce que certaines personnes ont particulièrement de mal à comprendre, vois-tu. » rajoutais-je en lui lançant un petit sourire. Je m'arrêtais pour l'instant, je dirais peut-être la petite suite après.

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Marley & Graham

❛marley & me❜

La réaction de Marley est particulière, différente et je l’analyse sous toutes les coutures sans trop savoir quoi en penser. A première vue je dirais qu’elle prend plutôt bien la nouvelle, entendez par là qu’elle n’a pas l’air de vouloir prendre la fuite à la première chance qu’elle aura de le faire. Je me contenterais de cela, je ne suis pas gourmand et je pense que c’est l’attente maximum que l’on peut avoir d’une personne quand on annonce avoir assassiné quelqu’un. De plus, Marley n’est pas encore au bout de ses surprises, elle ne sait pas encore que j’ai assassiné mon père par exemple, lorsqu’elle le saura elle prendra surement un nouveau coup sur la tête. De telles informations ce doit toujours être difficile à encaisser, la pilule est dur à avaler mais imaginez la difficulté accrue pour moi ? Pour l’heure, j’évite le sujet pour me concentrer sur la prison, sur tout ce que j’ai vécu, sur Leandra qui m’a sauvé la vie. Sans cette dernière je croupirais encore en prison, pour quoi, dix, quinze ans supplémentaires ? Autant vous dire que je lui dois une fière chandelle, d’autant plus qu’elle compte vraiment beaucoup pour moi. Plus qu’elle ne l’imagine en tout cas. « Oh mon dieu.. Je suis vraiment désolée. Je ne peux pas imaginer ce que tu as vécu, je ne peux pas te dire que je comprends mais.. Je suis juste désolée de te faire revivre ça avec mes questions. » Aborder cette période de ma vie demeure douloureux, mais à chaque fois un peu moins, peut-être suis-je sur le chemin de la rédemption ? J’ai du mal à y croire, il y a bien longtemps que j’ai arrêté de croire en moi qui plus est. « Ne t’inquiètes pas pour moi ! » Et puis, je me suis mis dans ce pétrin en premier lieu en lui proposant d’échanger sur nos secrets. Il se trouve que j’ai été le premier à me lancer, à mouiller le maillot mais son tour viendra et elle doit également avoir un secret d’importance pour faire fuir les autres. Nous pourrons être marginaux à deux ! Avant cela, Marley pose la fameuse question que j’attendais et je confie du tac au tac qu’il s’agit de mon père, c’est lui la victime. « Je.. Bah.. J'imagine que tu avais tes raisons de le tuer donc.. » Enfin une réaction habituelle, la pauvre a beaucoup à accepter et elle devient légèrement plus méfiante, plus renfermée. Je le vois dans son regard, elle ne m’affronte plus directement. « Je doute qu’il existe de véritables bonnes raisons pour arracher la vie à quelqu’un mais… Oui, même si ça n’a jamais été mon intention. » Je n’ai jamais prévu de le tuer, je n’y ai jamais ne serait-ce que penser et… Et pourtant c’est ce qu’il s’est produit lorsque le couteau s’est introduit dans sa chair. Bon okay, cette fois le sujet devient vraiment douloureux, je m’enfonce plus loin, je me confie de manière inédite sur des choses que je n’ai jamais dites à personne. Passons à son secret ! Puisque nous sommes partis pour un petit moment j’ai pris la liberté de taper dans mon budget de la semaine, c’est-à-dire dans les trois derniers dollars que j’ai pour le mois entier, pour me prendre un nouveau café. Il est encore bouillant, je souffle donc légèrement pour atténuer la température et en avaler une gorgée. « Oh, je suis une ancienne prostituée. » Me répond-elle avec une spontanéité qui me surprend. Je manque de m’étouffer et de recracher mon café, je ne m’attendais pas à ça… Et moi qui pensais ne pas avoir eu de tact en abordant mon père… « En sachant que j'ai fait ça parce que j'avais plus d'argent et qu'Harvard coûte cher alors ça a été la seule solution que j'avais trouvé sur le moment. Ce que certaines personnes ont particulièrement de mal à comprendre, vois-tu. » J’acquiesce en souriant, oh oui, je sais ce que c’est. « Tu n’as pas à te justifier, de plus… Je comprends tout à fait, pour payer mes frais de scolarité à Harvard en sortant de prison je me suis endetté… Je suis maitre-nageur à côté des cours et il me faudra encore sept ou huit mois pour en finir avec mes dettes. En attendant je squatte chez des potes, je dors dehors lorsque je n’ai pas d’autres options… » Je marque une pause, ne reprenant pas la parole… Non, j’ai envie d’en savoir plus, j’attends donc qu’elle se lance dans la suite de son récit. Lorsque je l’observe j’ai du mal à croire qu’elle soit tombée aussi bas que moi, ou presque, et qu’elle se soit retrouvée en plein milieu du monde de la nuit, se prostituant pour vingt dollars… Comme quoi, il ne faut pas s’arrêter sur l’apparence.

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Je savais qu'il avait un secret. Il était bien trop mystérieux pour être un mec sans secrets, c'était clair. Mais je n'aurais jamais imaginé ça. Je n'aurais jamais pu deviner toute seule qu'il avait fait de la prison. C'était quand même dingue ! Il avait tué quelqu'un, il fallait pas l'oublier. Alors je devrais flipper, oui. Mais j'ai appris par moi-même que parfois, les gens faisaient des erreurs. On en fait tous. Alors même si celle-ci était bien plus grave que les autres, tant pis. J'étais encore surprise, j'avais l'esprit perturbé, mais je savais d'avance que ce n'était pas ça qui allait me faire arrêter de lui parler. Certainement pas. Il me disait alors de ne pas m'inquiéter pour lui. Mais j'avais des raisons de m'inquiéter quand même. Surtout que les rumeurs allaient très vite à Harvard et j'étais bien placée pour le savoir malheureusement.. Je soupirais légèrement quand il m'avait dit qu'il n'y avait sûrement pas de bonnes raisons pour arracher la vie à quelqu'un. « J'imagine. Mais de toute façon, maintenant c'est fait, alors faut juste avancer. » disais-je en haussant les épaules. Après tout, il allait pas s'en vouloir toute sa vie ou y penser tout le temps, non ? Car sinon, il n'avancerait jamais et ce n'était pas le mieux pour moi. Mais le sujet avait changé, maintenant, c'était moi. Moi et mes histoires de prostitutions. Je me souvenais comme les élèves avaient commencé à me regarder différemment quand la nouvelle était arrivée. Mais bon, j'avais appris à faire avec, puis après presque trois ans maintenant, on ne me regardait plus trop comme ça. Enfin, presque plus. Je me retiens de rire face à sa réaction, alors qu'il manquait de recracher son café. Il fallait dire que je l'avais dit tellement normalement aussi.. « Oh.. Si jamais un jour tu sais pas où dormir, tu peux venir chez moi. Ma colocataire sera pas contre j'imagine et même si ce n'est qu'un canapé que j'peux te proposer, c'est mieux que rien ! » disais-je en lui souriant, avant de reprendre. « Si jamais ça arrive, tu demanderas mon adresse à Leandra, elle sait où je vis. » rajoutais-je avant de réfléchir si je lui disais plus ou pas.. Et finalement, je décidais de me lancer. Après tout, avec ce qu'il m'avait dit, je n'allais pas me taire, non ? « En parlant de dettes, je paye toujours cette erreur. Mon ancien mac me traque, depuis trois ans, il ne veut pas me lâcher. Il m'avait retrouvé cet été et j'ai réussi de nouveau à disparaître mais je vis avec la peur de le retrouver en bas de chez moi en rentrant des cours ou de mon boulot un jour.. » avouais-je en me mordant la lèvre inférieure, légèrement gêné.

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