You never leave my mind (Caly)

Lorsque j’avais découvert l’article de CS, apprenant par la même occasion que mon ex avait passé la nuit avec l’ex d’Elia par vengeance, j’avais aussitôt été envahi par un immense sentiment de déception. Caly avait eu un été difficile, les choses ne se passaient pas comme elle le voulait avec son oncle en Russie, seulement cela ne pardonnait pas totalement son attitude et ses petites manigances puériles. Donc, quand elle m’avait convoqué pour venir clôturer notre compte commun, j’étais resté assez froid, ne cherchant pas à lui parler cette fois. Je sentais que d’évoquer son aventure avec Théo n’était pas une bonne idée, que les choses risquaient de dégénérer. J’avais signé docilement les papiers, restant plutôt silencieux, mais avant de partir du cabinet j’avais entendu une conversation entre la blonde et son avocat que je n’étais probablement pas censé entendre. Depuis, malgré ma consternation toujours présente par rapport à ce qu’elle avait fait endurer à Elia, je n’arrêtais pas de ressasser les autres problèmes que la blonde allait avoir à affronter et mon inquiétude avait resurgi, réduisant un peu ma rancune à son égard. J’avais décidé de faire abstraction de cette histoire de vengeance stupide que j’avais découvert grâce à CS, mettant de côté ma déception et la jalousie que j’avais ressenti alors, afin de me rendre chez la blondinette pour m’enquérir de son moral et m’assurer qu’elle allait bien malgré tout. Arrivé devant son appartement, j’hésitais un instant. Caly avait réagi plutôt mal la dernière fois que j’avais essayé de discuter avec elle. Les yeux rivés sur la porte, j’essayais de réfléchir à la meilleure façon d’expliquer ma présence ici puis je décidais de me lancer et j’appuyai sur la sonnette.

J’avais tellement de trucs à gérer que j’en perdais la tête, assise devant mon bureau je soupirais un bon coup. Mes problèmes personnels prenaient le dessus sur mes études, je n’avais pas eu le temps d’ouvrir un cahier depuis au moins deux semaines, et le pire, c'est que je n’allais même plus en cours. J'avais tout simplement pas le temps, et en plus de ça, la tête ailleurs. J’allais finir par redoubler avec toute cette histoire - plutôt ces histoires, parce que si c’était qu’une -. Entre mon mariage arrangé, ma soeur qui venait à Harvard, mon engueulade avec Elizabeth, tout allait très bien. Le pire c'est que personne savait que j'avais une soeur, comment est-ce que j'allais annoncer ça... La sonnette de la porte d'entrée venait me sortir de ma détresse, évidemment, personne n’allait se bousculer pour ouvrir, je me levais donc péniblement. Wade, endormi sur le canapé était bien trop perché pour se bouger, je soupirais à nouveau, levant les yeux au ciel. Ça sentait le joint dans toute la maison maintenant. Mais bon, c'était la même chose tous les jours, à force les murs étaient imprégnés. J’ouvrais brusquement, et là, nouveau choc, décidément c’était la mode de me faire peur comme ça. Hier c’était Elizabeth, aujourd’hui Priape. Priape… deuxième fois que je le voyais aujourd’hui, j’étais chanceuse. Tu t'es perdu ? demandai-je avec honnêteté en rigolant légèrement, c'est que j’étais surprise.

La sonnerie retentit et mon regard s’attarda un instant sur les noms inscrits à côté de celui de mon ex petite amie, tiquant en particuliers sur l’un d’eux : Charlie Wilcox. Waw, je savais que Caly avait déménagé, mais j’ignorais qu’elle avait choisi de se mettre en colocation avec ce type… Bon en pratique, je n’avais rien contre Charlie. Il avait couché avec la blonde après notre séparation, mais bizarrement j’avais du mal à digérer, et de savoir que les deux amants avaient aménagé ensemble raviva aussitôt ma jalousie endormie. Mais je n’eus pas le temps d’y réfléchir davantage, la porte s’ouvrit et par chance ce ne fut pas la tronche insuportable du winthrop qui m’accueillit mais le visage surpris de la jolie blonde que j’étais venu voir et elle me demanda même avec humour si je ne m’étais pas perdu. « Bah je me suis un peu posé la question, surtout en voyant les noms des habitants de cet appartement. Depuis quand tu habites avec Charlie ? » Ok, très mauvaise entrée en matière. J’étais pas venu là pour jouer les ex petits amis jaloux et commenter les mauvais choix de colocs de la jeune femme. Avec une telle attitude, je risquais de la braquer. Je me repris donc : « Excuse-moi… En fait, je voulais te parler… » commençai-je à expliquer avant de préciser : « Et certainement pas de ça. » fis-je en désignant les noms sur la sonnette histoire de classer le sujet et qu’elle ne se sente pas obligée de se justifier.

Je restais figée devant Priape, ne sachant pas trop quoi dire. À chaque fois que je me trouvais avec lui, j’étais gênée et le sentiment que j’éprouvais à cet instant m’était donc familier. Je regardais le sol lorsqu’il me demandait depuis quand j’habitais avec Charlie, je me mordais la lèvre inférieure. Je savais qu’il était au courant pour Théophyl grâce à mon très cher ami CS, et je ne voulais pas imaginer ce qu’il pouvait penser à cet instant même. Pour quoi me prenait-il ? Je ne voulais pas y penser, parce que au fond, j’étais pas fière. Depuis que j’ai plus les moyens de me payer un appartement dis-je. Au départ, j’étais ici parce que mes comptes étaient bloqués, mais à présent je me sentais bien et j’avais décidé de continuer cette colocation, puis j’avais perdu beaucoup d’argent pour payer ma « caution ». Apparemment,il voulait me parler, je m’écartais donc afin de le laisser entrer, sans me poser trop de questions. Et bien entre dis-je. Je jetais un coup d’oeil à Wade qui dormait, avec son herbe sur la table. Ok, c’était officiel, Priape allait vraiment se dire que j’étais folle, et que mes colocataires l’étaient également. Je pointais du doigt Wade en regardant Priape avant de mettre un doigt devant ma bouche afin de lui faire signe de ne pas parler. Puis je chuchotais. On va aller dans ma chambre, tu as qu’à me suivre. C’était pas l’idée du siècle mais je ne pouvais faire autrement. Ma chambre était un vrai foutoir en plus, des habits partout, des cahiers, faut dire que j'avais mieux à faire ces derniers temps. Mais Priape me connaissait, j'étais organisée normalement et l'état de cette chambre ne me ressemblait pas. Une fois de plus, je chassais cette idée de ma tête, me retournant vers le jeune homme. Qu'est-ce qu'il se passe ? demandai-je.

Je regrettais quasi instantanément ma question, parce que je n’avais en aucun cas le droit de juger la jeune femme concernant ses choix de vie mais je n’avais pas pu m’empêcher de demander, complètement agacé à l’idée de savoir que cet idiot de winthrop vivait au côté de Caly. La réaction de la jeune femme qui baissa instantanément le regard, ainsi que sa réponse, me confirmèrent que j’aurais du ravaler ma jalousie. Je n’étais plus son petit ami, depuis plusieurs mois à présent, je l’avais repoussée lorsqu’elle avait voulu m’avouer ses sentiments cet été, je n’avais plus le droit de me mêler de sa vie ainsi. Malgré ce départ un peu froid, elle me fit entrer chez elle. L’odeur qui régnait dans l’appartement parut aussitôt familière à mes narines d’ancien toxico. Mes yeux se posèrent alors sur l’un des autres habitants de l’endroit endormi sur le canapé avant de se reporter sur Calypso. Mais cette fois je pris sur moi et conservais pour moi mon avis sur ce deuxième colocataire, même si mon regard trahissait probablement le fond de ma pensée. Je la suivis dans sa chambre où régnait un certain capharnaüm. Ca et la conversation que j’avais intercepté tout à l’heure avec son avocat, cela ne fit qu’accentuer mon inquiétude. Quelque chose clochait, Caly n’allait pas bien… Je la regardais se tourner vers moi avec une certaine appréhension dans les yeux. Lorsqu’elle s’était confiée concernant ses ennuis avec la mafia, cette conversation avait été éprouvante. Je ne voulais pas qu’elle se sente comme dans un interrogatoire policier à nouveau. J’optais donc pour la franchise. « Tout à l’heure, chez ton avocat, j’ai entendu des brides de votre conversation… » lâchai-je sur un ton préoccupé.  Pas la peine de tourner autour du pot autant être honnête dès le début. « En fait j'ai tout entendu pour être exact… »

Priape se trouvait à présent dans ma chambre, je m’appuyais contre la chaise de mon bureau lorsqu’il décidait de me révéler la raison pour laquelle il se trouvait ici. Un réel choc. Aujourd’hui, on avait signé des papiers afin de clôturer notre compte commun, même s’il ne restait pas grand-chose dessus, il me semblait important de le faire. Je voulais rompre de toutes les manières possibles avec Priape. Il était synonyme de souffrance, parce que, au fond de moi je l’aimais encore. C’était dur de l’avouer, et même de l’imaginer mais à défaut de pouvoir me résigner, je devais m’éloigner. Or, qu’il sache tous les problèmes que je vivais actuellement ne concordait pas vraiment avec l’éloignement. Oui, j’avais parlé avec mon avocat de mon mariage arrangé aujourd’hui, quelles procédures je pouvais entamer pour éviter cela… Avait-il entendu pourquoi je ne pouvais pas refuser ? J’étais perdue, supportant mal l’idée qu’il pouvait savoir tout ça, c’était très personnel. Je restais donc sous le choc, mais comment lui expliquer ? Que savait-il exactement ? Comment ça, tu as tout entendu ? demandai-je. C’était déjà tellement dur de lui cacher tout ça alors qu’il essayait de se rapprocher de moi… J’attendais sa réponse, anxieuse. Je pouvais encore nier, mais je ne voulais pas mentir, pas encore, je mentais déjà à tout le monde, à mes amis même les plus proches, gardant tout pour moi.

Je sentais Caly complètement décontenancée par mon aveu. Je m’expliquai, m’excusant au passage : « Je suis désolé. Je ne voulais pas me montrer indiscret. J’ai compris le message la dernière fois, je sais que tu ne veux plus que je me mêle de ce qui ne me regarde pas. » Même si au final, je me sentirais toujours un peu concerné par le bien être de la jeune femme… Je la comprenais néanmoins et d’un certain côté je m’en voulais presque d’avoir entendu cette conversation personnelle entre elle et son avocat, car après notre dernière discussion, elle m’avait très bien fait comprendre que je n’avais plus à tenir cette place dans sa vie, à être celui qui s’inquiétait pour elle, qui était là pour l’épauler dans les épreuves de la vie et qui pouvait tacher de l’aider à les surmonter. Mais d’un autre côté, qui allait occuper cette place désormais ? Charlie ? Son coloc défoncé ? Théo ? Non je ne pouvais pas supporter ces hypothèses. Alors, oui d’un tout autre côté, j’étais presque content du hasard qui m’avait fait revenir sur mes pas et qui m’avait permis d’intercepter une partie de son entretien avec l’homme de loi. « J’avais oublié des documents au cabinet, j’ai du faire demi tour et y revenir et c’est là que je t’ai entendu parler des projets de ton oncle. » avouai-je alors. M’approchant d’elle, je pris doucement ses mains dans les miennes et poursuivis en tachant de garder mon calme malgré la révolte que toute cette histoire provoquait en moi. « Caly, on est plus au moyen âge. Tu ne peux pas le laisser t’organiser un mariage arrangé ainsi. Il n’en a pas le droit. » J’avais déjà des a priori très négatifs à l’égard de son oncle. Elle avait passé l’été à ses côtés et s’était retrouvée en taule, et à présent ça ?!? J’avais vraiment du mal à comprendre l’attachement de Caly pour cet homme, même si c’était l’un des derniers membres vivants de sa famille… « Tu ne dois pas te laisser faire. »

J’étais crispée, je ne savais pas exactement ce qu’il avait entendu. Je continuais à me mordre la lèvre, ne sachant quoi faire afin de dissiper mon inquiétude. Il me rappelait mes choix ainsi que mes paroles lors du housing day. En effet, je ne voulais plus qu’il se mêle de ma vie, je voulais tracer mon chemin sans lui, apprendre à vivre sans penser « Priape ». Malheureusement, j’avais beau essayer, lui dire et me le dire, dans les faits, ça restait compliqué. Je restais donc silencieuse lorsqu’il me disait ça, en attente de la suite. Il commençait à me décrire comment il était tombé sur ma discussion avec mon avocat, j’avais envie de partir en courant, de crier, de faire quelque chose. Il savait tout et je me sentais impuissante. Je sais, je sais Priape… dis-je en prenant ma tête dans mes mains avant qu’il décide, comme il l’avait fait la dernière fois, de prendre mes mains dans les siennes. Je le regardais un instant, puis sans réfléchir, je plongeais dans ses bras, le serrant sûrement un peu trop fort. Mais qu'importe, je savais qu'il n'allait pas me rejeter, surtout s'il savait. Je m’accrochais à Priape comme si ma vie en dépendait, comme si… nous étions encore ensemble, mais j’en avais besoin. J'aimerais dire non Priape, refuser, comme ça, mais c'est vraiment très compliqué... dis-je d’une voix à peine audible, j’étais déjà bouleversée, et cette conversation n’arrangeait rien. C’était si dur de se confier, de ne plus jouer la forte.

J’avais pris sur moi pour parler calmement malgré toute l’indignation que provoquait en moi cette situation. Mais pour une fois, ce n’était pas contre la petite blonde que j’étais en colère mais bel et bien contre son oncle qui semblait avoir oublier qu’au 21ème siècle, on ne mariait plus les gens de force. Le regard de mon interlocutrice croisa le mien un court instant, suffisant longtemps néanmoins pour faire surgir ce trouble que seule Caly savait faire naitre en moi. Il se dégageait de ses yeux un mélange de détresse, de vulnérabilité mais également de force et de volonté qui ne pouvait pas me laisser indifférent. Puis elle se blottit soudain contre moi dans une étreinte pressante, me prenant quelque peu au dépourvu. Ses yeux suffisaient déjà à me troubler alors sentir la jeune femme si proche de moi eut aussitôt l’effet de faire s'emballer mon rythme cardiaque. Je la serrai finalement tendrement contre moi tout en respirant une bouffée de son parfum. C’était presque comme si ces derniers mois ne s’étaient pas écoulés. Presque simplement, car bien vite elle reprit la parole et l’ombre de sa future union arrangée surgit à nouveau dans mon esprit. « Il doit bien y avoir une solution… » fis-je en essayant de réfléchir de manière cohérente avant de demander d’une voix empreinte de jalousie : « Déjà qui c’est ce type que ton oncle veut que tu épouses ? » A part un nouveau mec à haïr pour moi. « Tu le connais ? »

Toujours dans les bras de Priape, il me disait qu’il devait bien y avoir une solution… Je souriais pendant un instant devant son optimisme. Bien évidemment, il existait une solution mais pour moi elle s’appelait prison et pour l’instant je préférais l’éviter. Je l’espère… dis-je. Mais comment lui avouer que mon oncle était derrière mon passage en prison, et qu’il menaçait de m’y remettre si je ne disais pas amen à toutes ses exigences ? Le pire dans cette situation, c’est qu’au fond, j’éprouvais de l’affection pour mon oncle. Il était ma famille, seulement il avait décidé de choisir le mauvais chemin et je ne pouvais pas lui en vouloir complètement. Priape me demandait qui était l’heureux élu, je déglutissais avant de me reculer légèrement afin de voir son visage. Il s’appelle Elio, il est à Havard, je suis allée le voir il y a deux jours expliquai-je. Elio était comme moi, contre cette union, seulement il ne pouvait refuser non plus, néanmoins depuis notre conversation j’étais rassurée de savoir que ce mariage n’était pas le rêve de sa vie. Il ne veut pas de moi non plus… enfin j’veux dire, il ne veut pas se marier avec moi. Je ne pouvais imaginer ce que Priape ressentait à cet instant, j’avais toujours pensé que c’était lui, l’homme qui un jour, allait me demander en mariage, l'homme qui me passerait la bague au doigt et qui me dirait « oui », seulement à présent, tout était différent. Je ne voulais pas me confier mais c’était si dur, surtout lorsqu'il était là, devant moi. Alors pour cette fois-ci, je décidais de faire une exception et de me laisser aller afin de parler ouvertement de mes problèmes.