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Ce n'était pas parce que tu n'allais pas bien que tu n'allais pas embêter William, bien au contraire. Comme c'était ton point d'ancrage pour ne pas t'enfoncer encore plus, tu avais besoin de lui faire sentir que tu étais toujours là pour lui, même pour ce genre de petits détails, pour lui prétendre que tout n'allais pas si mal alors que c'était faux. Naïvement, tu te disais que si ton comportement restait identique, ton petit-ami n'y verrait que du feu et tu pourrais éviter les questions gênantes. C'était cependant sans compter tes courbatures et tes multiples bleus qui se faisaient ressentir lors des légères poussées sur ton épaule. Si tu avais su que William ferait son apparition, tu aurais tâché de te couvrir un peu plus, histoire d'avoir plus de protection et de ne pas avoir ces piques de douleur lorsqu'il te touchait un peu trop rudement. Tu savais cependant, si tu voulais bien t'y pencher un peu, que ton idée ne marcherait absolument pas : déjà, William te donnait raison sur l'un de tes défauts, c'était bien une preuve du fait qu'il sentait que quelque chose n'allait pas, non ? En temps normal, il aurait réagi pour ne pas avoir son tort, il n'aurait pas cédé... et toi, tu aurais répliqué et te serais amusé à le narguer s'il avait osé avouer que tu avais raison comme maintenant. Au lieu de cela, tu étais resté relativement silencieux, confirmant juste son propos tout en ne lâchant pas du regard ton album photo. Tu l'avais senti se déplacer à tes côtés, et tu avais eu le malheur de croiser son regard de tes yeux fatigués, tristes et tourmentés. Si j'étais sûr que cela allait ? Bien sûr que non, rien n'allait bien, sauf nous deux. Tu tentas donc la technique de la fuite, à savoir simplement détourner du regard et ne rien dire, même si ta déglutition difficile gâchait un peu l'air serein que tu avais voulu afficher. Tu ne savais déjà pas tellement mentir en temps normal alors face à lui... C'était quasiment mission impossible. Tu étais presque plus serein à parler de tes parents, c'était dire à quel point tout ceci te mettait mal à l'aise. Tu tentas cette technique cependant, te disant de parler de cela sortirait cette idée de la tête de ton cher anglais Il n'y avait certes rien de joyeux à parler de ton passé, de cet oubli latent qui progressait petit à petit, d'année en année, mais peut-être mettrait-il ton état sur cette situation. Blotti contre lui, tu aurais voulu que ce petit moment en sa compagnie soit parfait, détendu et heureux, mais tu savais déjà que ce ne serait pas le cas. J'ai ça en effet... mais plus le temps passe et moins cela me suffit. Tu crois que je suis trop exigeant envers moi-même ? Souvent, tu savais que tu t'en demandais trop, à toujours vouloir tout savoir ou tout réussir même si cela était totalement impossible et que cela t'épuisait. Tu avais déjà un album photo, l'appareil photo, et si ton esprit ne voulait pas t'aider à faire plus, comment pourrais-tu y arriver ? C'est un combat totalement déséquilibré, et tu n'étais pas très doué pour créer la surprise dans la lutte. Tu lui jetas cependant un regard surpris, voire même un peu adouci lorsqu'il s'excusa de ne pas pouvoir t'aider. Tu n'y es pour rien William, je le sais bien. Je ne suis pas énervé contre toi. C'était même l'une des rares personnes dont tu pouvais rechercher la compagnie en ce moment, sisi... Tu l'avais certes fui malgré tout, mais c'était plus pour lui éviter de s'inquiéter que parce que tu ne voulais pas du tout le voir. Le sentir contre toi, main dans la main, te détendait doucement, mais tu sentais tout de même son inquiétude et son léger manque de concentration par rapport à d'habitude, et tu sentais bien que tu allais devoir passer aux aveux. Mais tu as raison, je ne vais pas vraiment bien en ce moment. Cela faisait bizarre de le dire à voix haute, toi qui aurais voulu le lui cacher au maximum. Cela sonnait plus... véridique de le prononcer devant lui, comme si tu te l'avouais définitivement à toi-même également. Retournant à l'assaut de tes propres lèvres avec tes dents, tu restas silencieux quelques instants avant de reprendre la parole. Les cours et le club me prennent énormément de temps, mais j'aime cela, le problème n'est pas là. Tu te rappelles de la pièce dont je t'ai parlé une fois, où j'avais été au casting et que cela s'était bien passé ? J'ai eu le rôle principal masculin. En temps normal, tu aurais été heureux de décrocher un tel ticket, c'était juste ton rôle après tout, et décrocher un rôle principal à Harvard pouvait réellement ouvrir des portes, et pas qu'un peu. Cela aurait été parfait... si tu n'étais pas aussi peu sûr de ne pas te ridiculiser au final. J'ai l'impression que ce n'était pas qu'un piège. Alors qu'il n'en a jamais été question, il s'avère qu'il y a énormément de danse... et je suis le seul non-danseur de la troupe. Du coup, je dois forcer et tout apprendre avant décembre ou sinon... Je vais être ridicule et tout mon travail de ces dernières années va s'écrouler. C'était surtout cela qui te faisait peur : que la danse te porte même préjudice sur tes talents de scène pour lesquels tu t'étais engagé corps et âme. J'ai bien pensé me désengager du projet à cause de cela... mais je ne peux pas. Si je pars, la productrice m'a bien faite comprendre qu'elle n'hésiterait pas à ruiner tout mon dossier scolaire en soulignant que je n'arrivais pas à m'engager dans un projet... et je ne peux pas lutter face à elle. En plus, elle ne se prive pas de me souligner qu'elle me trouve... ignoble de par ma... sexualité. Tu avais hésité avant de lui dire cette dernière phrase, mais les mots s'écoulaient de ta bouche comme un torrent, et tu ne pouvais guère les retenir, maintenant que tu avais commencé. Du coup, dès que j'ai un moment de libre, je m'entraîne, même seul. J'ai juste mal à cause de quelques courbatures et quelques chutes m'ayant causé des bleus, rien de grave tu sais. Tu ne t'étais pas fait de graves blessures non plus, qu'il se rassure un peu.
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