Invité
est en ligne
Invité
Jusqu'ici, je n'avais subi qu'une seule et unique rechute. Et ça m'avait déjà assez traumatisé comme ça. On dit qu'une rechute signifie la réapparition du cancer après une période de rémission complète. Mais en réalité, la rechute peut se faire même quand la rémission n'est pas vraiment complète. Elle arrive parfois quand on est près du but, que la maladie est encore là, mais qu'elle nous laisse vivre presque aisément ; on se dit alors qu'on peut peut-être vivre avec son cancer. Pas forcément pour très longtemps, pas jusqu'à la retraite, mais pour le temps qui nous est estimé. Tous les cancéreux n'étant pas dans le stade de rémission plus que complète, ont un temps estimé. Ce dernier, change presque à chaque stade de la maladie, mais dans tous les cas, nous sommes condamnés à un nombre d'années. Pour ma part, j'ai toujours réussi à reporter l'échéance, du moins, jusqu'à maintenant. Combien de fois j'ai entendu ma mère me dire entre deux sanglots : tu peux partir et je ne t'en voudrais pas, tout ira bien pour toi. Combien de fois j'ai pu lire dans les regards de ma famille : il est encore là celui-là ? Combien de fois je me suis demandé : il y a quoi après échéance ? Parce que c'est vrai, personne ne sait ce qu'il y a après, et que quand on est un petit garçon de huit ans, c'est encore plus terrifiant que quand on en a 20. Et pourtant, j'ai beau être majeur depuis peu, j'ai beau avoir eu le temps de vivre des choses extraordinaires, j'ai toujours aussi peur que le gamin de huit ans. Quand j'étais gosse, j'avais une vision de la mort comme personnifiée. Je pensais qu'elle allait venir dans ses noirs habits me sortir du lit pour m'obliger à la suivre. Je remontais donc la couverture jusqu'à mon nez, faisais tout pour qu'aucun membre de mon corps ne dépasse de ma couette, espérant passer inaperçu sous les draps pour qu'elle passe son chemin. Si on a une vision poétique et enfantine des choses, on peut dire que ça a bien marché. Et si on est comme moi à présent, on se dit juste qu'elle nous montre les délices de la vie juste le temps qu'il faut, pour pouvoir violent nous retirer à ce monde plus tard. J'ai longtemps imaginé la mort sous les traits de ma maitresse de primaire, Mademoiselle Rowell, allez savoir pourquoi. D'ailleurs, on l'appelait « Mademoiselle », alors qu'elle entrait certainement dans la soixantaine. Ça me fait d'ailleurs penser à une rédaction qu'elle nous avait demandé de faire, avec comme sujet : que souhaitez-vous faire plus tard ? Évidemment, comme tous les autres enfants de mon âge, je souhaitais être super héros, pompier, ou encore être astronaute, mais ce n'est pourtant pas ce que j'ai répondu. J'ai répondu que je voulais être vivant et heureux. C'était primordial pour moi, le petit cancéreux sans cheveux. Et contre toute attente, Mademoiselle Rowell m'a envoyé voir le psychologue de l'école. Je n'avais pas grand-chose à lui dire, mais j'ai répondu à ses questions sans trop réfléchir. Même maintenant, je ne comprends toujours pas ce que ma réponse avait de particulière ou d'hors sujet, c'était simplement la réponse d'un gosse terrifié à l'idée de ne pas pouvoir grandir. Parce que, avouons-le, quand on est enfant, tout ce qu'on veut, c'est être grand et faire des trucs de grands.
Avant l'incident du bar à chat, j'étais justement en train de me dire que maintenant que je suis grand, je suis encore plus terrifié. Lors de ma première rechute, j'étais justement tétanisé de savoir que je n'allais certainement jamais devenir grand. Que jamais je ne pourrais monter dans ces attractions réservées au plus d'un mètre quarante et que jamais, au grand jamais, je ne pourrais conduire tout comme mon grand-père. Ce jour-là, j'étais sorti en douce de ma chambre, pour profiter du calme de la maison. Fiévreux depuis une semaine, j'étais coulé au lit par ma mère et son absence était comme une libération pour moi. Je me sentais si grand. Bon, il y avait bien mon arrière-grand-mère qui était là pour me surveiller, mais étrangement, ramasser les asperges et les poireaux prend énormément de temps ; je pouvais donc manger ce que je voulais, regarder la télé allongée sur le canapé ou encore, m'allonger sur le tapis et écouter en boucle des disques d'Elvis Presley, personne n'était là pour m'en empêcher. Le seul bruit était celui des chats ronronnant près de la fenêtre de la cuisine. Je crois que les rechutes diagnostiquées par des saignements spontanés, (provoqués par la diminution du taux de plaquettes) sont vraiment les plus horribles. Je me suis mis à tousser sans pouvoir m'arrêter pendant un certain temps. Sentant mon nez couler (je pensais à la base que c'était de la morve à cause du rhume) je l'ai donc essuyé avec le revers de ma main, découvrant donc une belle trainée de sang chaud et noirâtre. Puis au-delà de ma toux, je me suis mis à cracher du sang. Mes orifices faciaux permettaient l'écoulement de mon hémorragie interne, sans que je ne puisse y faire quelque chose. C'était frustrant et déroutant. J'étais comme pris au piège par mon propre corps, ne pouvant que pleurer au besoin et me tordre dans mon propre sang sur le tapis du salon, My way d'Elvis en fond sonore. Les paroles disaient tandis que je me contorsionnais : Et maintenant que la fin est proche/Et que je fais face au rideau final/Mon ami, je le dirai tout haut,/J'affirmerai mon cas, dont je suis certain./J'ai vécu une vie pleine./J'ai parcouru chaqu'une et l'ensemble des routes;/Mais plus encore, plus encore que ça,/Je l'ai fait à ma façon./Des regrets, j'en ai eu quelques uns;/Mais une fois encore, trop peu pour qu'ils soient mentionnés./J'ai fait ce que j'avais à faire/Et cela sans exception. Ce qui était plus qu'ironique vu la situation. Mon arrière-grand-mère est entrée sur la première phrase du refrain, surement interpellée par les aboiements stridents de ma chienne. Cette dernière, une vielle femelle border colley, était d'ailleurs complètement paniquée et ne savais plus où donner de la tête. Je pense d'ailleurs que la vision de son arrière-petit-fils de treize ans, baignant dans son sang sur le tapis du salon a traumatisé ma grand-maman, parce qu'elle n'a plus jamais marché sur ce tapis après ça.
Pour résumer les choses, lorsqu'un leucémique de mon type fait une rechute, il se met à saigner d'un seul coup, et il est très difficile d'arrêter l'hémorragie. Il saigne du nez, il crache un peu de sang, et des hématomes se forment sur ses membres inférieurs, ainsi que des points de sang. Son teint devient livide, et les extrémités comme les mains et les pieds, deviennent bleues (ainsi que les lèvres). Il se sent fiévreux et puis il a froid. Le monde tourne autour de lui. Et puis il débarque à l'hôpital sans même s'en rendre compte. Il se retrouve seul dans une chambre qui sent la mort et les produits de nettoyages, et en plus de ça, il se sent vaseux et flasque à cause des antidouleurs. Comme maintenant en somme. Je pense alors au fait que j'en suis peut-être à la fin. C'est vrai, sur tous les leucémiques qui font une rechute, combien s'en sortent ? Très peu. Alors ceux qui en font deux ? Surtout à mon âge ? On va simplement dire que je ne suis pas prêt de rouvrir complètement les yeux, pour la métaphore. Pas tout de suite du moins. Je me demande si des gens vont venir me voir. Certainement, mes cousines, surtout Kenny qui a assisté à la scène cette fois, et puis quelques proches comme Lyson ? Peut-être Lavender ? Enfin, après ce que je lui ai fait, même en vendant mon âme pour elle, elle ne reviendrait pas vers moi de sitôt ; et puis, elle déteste les hôpitaux. Je me demande aussi si Archie va venir me voir. Il ne va certainement pas être mis au courant, et puis, je ne suis que son demi-frère ; même si après tous, il y a le mot frère dans « demi-frère ». Et puis ma mère ? Elle n'a pas les moyens de se payer un billet d'avion pour les USA ; imaginer sa réaction en sachant que son fils est en rechute et qu'il est à l'hôpital à cause d'une trop grosse perte de sang, me donne envie de vomir l'infâme repas servi au centre médical de Cambridge. En parlant de repas, j'entends entrer dans ma chambre même si après tous, mais son intrusion ne me fait pas réagir, je garde donc les yeux fermés.
- Spoiler:
Ce tropic de groupe est ouvert à la suite de ce post : https://www.i-love-harvard.com/t35638p30-dear-family-i-miss-you-ps-i-luv-you?nid=19#1214523 et de ce sujet : https://www.i-love-harvard.com/t35650-if-i-die-young-bury-me-in-satin-kensey#1211038 Vous pouvez venir voir Casey quand bon vous semble, tel un tg, attendre dans le hall ou même parler avec ses autres amis dans la chambre ; ou bien même à la machine à café de l'hôpital, c'est comme bon vous semble ! Ce tropic est juste là si vous souhaitez prendre part à ce que vit Casey en ce moment ! Bon RP ! (Faites-moi rêver ! Couchez dans un cagibi, créez une œuvre aquatique avec des seringues, des tuyaux de perfusions et des bassines, prenez un verre en plastique et écrivez 'échantillon d'urine' dessus. Ensuite, versez un peu de jus de pomme et placez-le discrètement dans le bureau des infirmières. Des heures de divertissement sont garanties pendant qu'elles essaieront de comprendre, remplissez des gants d'hôpital avec de l'eau et de commencez une bataille ! Faites toutes les conneries que vous pouvez faire dans un hôpital, si l'idée d'aller voir simplement casey vous semble... Pas assez originale :P) Ps : Vous pouvez faire du court, je vous en prie
(Invité)