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Les jours étaient passés depuis le soir de notre agression et il m'était de plus en plus difficile de les supporter. À genoux près de ma baignoire, je regardais depuis bientôt une heure une goutte s'échapper régulièrement du robinet et s'écraser à la surface de l'eau que j'avais fait couler et qui était désormais gelée. J'avais passé deux jours à l'hôpital et j'étais rentrée hier. Je n'avais repris contact avec personne ; de toutes façons, j'avais perdu mon téléphone dans le square le soir de l'agression et il était absolument hors de question que je retourne un jour là-bas. À l'hôpital, on m'avait conseillé d'entamer une thérapie afin de m'aider à remonter la pente et surtout pour m'aider à me vider la tête de toutes les images horribles qui s'y mêlaient jour et nuit. J'avais refusé ; le médecin m'avait regardée avec un air sceptique mais après le regard que je lui avais lancé, il avait tourné les talons et avait ordonné à l'infirmière de me faire remplir les papiers de sortie. Ça faisait trois jours que je n'avais pas eu de nouvelles de Roxanna et c'était certainement la chose qui me faisait le plus mal dans cette histoire. J'avais la certitude qu'elle m'en voulait et qu'elle ne me pardonnerait jamais ce que je l'avais obligée à traverser quelques nuits plus tôt. Je tremblais de culpabilité dès que je me retrouvais seule et la nuit, c'étaient les cauchemars dans lesquels se rejouait en boucle la scène de l'agression qui prenaient le relai. Grimaçant de douleur, je me relevai enfin et abandonnai l'idée du bain.
J'allais pour sortir lorsque mon reflet dans l'un des miroirs m'interpella. Je fis un quart de tour et me plantai face à lui, le visage complètement vide d'expression. Je me mis à observer en détails mes blessures, chose que je ne m'étais pas autorisée à faire jusque là. J'avais une large entaille sur le tibia pour laquelle j'avais eu des points de suture et dont il fallait que je refasse le pansement expressément. Mes yeux montèrent un peu et tombèrent sur ma main droite qui était bandée. Puis sur mon cou, où se trouvaient de larges marques de doigts violacées, là où Hannigan s'était amusé à me faire suffoquer plusieurs fois. Enfin, je regardais mon visage. J'avais un gros hématome sur la tempe droite, là où il m'avait assommée avec son revolver et sur la joue gauche, une large éraflure qui marquait la fois où il m'avait jetée au sol et que mon visage avait embrassé le bitume le premier. Je restai stoïque durant plusieurs minutes, fixant mon propre regard puis attrapai ma serviette de bain et la coinçai au-dessus pour cacher le miroir. Je fis de même avec celui au-dessus du lavabo et je sortis.
Tandis que je rejoignais mon salon, j'entendis que l'on frappait à ma porte. J'ignorai le bruit ; la seule personne dont j'espérais la visite était Rox et elle possédait un double de mes clés donc j'étais persuadée que ce n'était pas elle. J'allai m'allonger sur mon lit et je me roulai en boule, serrant mon oreiller contre ma poitrine et me coupant de tous bruits extérieurs, les larmes coulant sur mes joues. Ça allait encore être une très longue nuit.
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