Even the strongest wind ever could not destroy a friendship ▲ Elisandra & Dwight

Mon amie s’était exclamée tout en soupirant doucement que les parents donnaient parfois l’impression d’avoir des siècles de retard, j’étais on ne peut plus d’accord avec ses dires. D’ailleurs, je lui répondais d’une voix calme : « Pas qu’un peu… Sais-tu qu’à la maison, je ne peux tutoyer les personnes plus âgées que moi comme par exemple, mon grand frère. Etant donné qu’il est l’aîné, il est l’héritier en titre de la famille donc je me dois d’être des plus respectueux avec lui… ». En effet lorsqu’on était à la maison et que lors d’une réception familiale, je me devais de vouvoyer mon grand frère et ma petite sœur devait nous vouvoyer en marque de respect des droits d’aînesse… Si l’un de nous avait le malheur d’oublier ce protocole, il se faisait grandement sermonner par notre mère ! Enfin bref, elle me disait qu’elle espérait que j’arrive à déjouer les plans de mes parents et je me surpris à rire légèrement par rapport à son langage qui aurait pu en choquer plus d’un mais j’en étais si habitué que je m’en offusquais à peine. Je venais par la suite lui tenir la main par rapport au fait que cela la tuait presque de savoir qu’elle avait loupé quatre années de la vie de son fils. Je tâchais de mon mieux à la rassurer mais ce qu’elle disait, je comprenais parfaitement. « Ne sois pas trop dure avec toi-même, Eli… Archie est un enfant plein de gaieté comme l’était sa mère à son âge et je suis sur que son premier mot c’était maman…. »

Elisandra écarquilla deux grands yeux surpris aux propos de Dwight, même si elle avait déjà entendu dire dans les environnements royaux que les cadets vouvoyaient souvent leurs aînés. « Waw… alors là, c’est pas qu’un siècle qu’ils ont de retard ! Moi, je ne vouvoie mes parents qu’en public, lors de réceptions officielles, jamais mon frère ni ma sœur » expliqua-t-elle. L’inverse était tout aussi vrai, on la tutoyait la majeure partie du temps, on ne la vouvoyait pas – en dehors des domestiques et autres membres hors du cercle familial royal, évidemment. « Tu te révoltes jamais contre ça ? » lui demanda-t-elle, trouvant que les préceptes de bonne conduite avaient leurs limites et qu’il ne fallait quand même pas déconner dans la choucroute. Là, c’était limite limite ! « Tu sais, j’ai même pas osé demander à Hippo c’était quoi son premier mot. J’ai regardé plein de photos de quand il était bébé bien sûr, mais j’ai pas demandé de détails… je sais pas pourquoi, la réponse me fiche la trouille. Tu t’en inquièterais à ma place ou ça te foutrait les jetons ? »

A la façon dont elle écarquillait les yeux, je voyais bien qu’elle était plus que surprise d’apprendre que je devais vouvoyer mon frère ainsi que mes parents en privé tout autant qu’en public. D’ailleurs, elle me répondit que mes parents avaient plus d’un siècle de retard et qu’elle ne vouvoyait ses parents qu’en public mais jamais son frère ni sa sœur. « En fait, c’est surtout ma mère… Ayant une fierté farouche d’être une digne descendante de Thomas Jefferson qui fut l’un des plus grands parmi les Pères fondateurs des Etats-Unis, elle nous avait toujours inculqués le fait qu’on devait garder une certaine hiérarchie même dans la famille… » expliquais-je lentement tandis qu’elle enchainait sur une question à laquelle je me demandais toujours comment répondre. J’avais donc inspiré avant de répondre d’une voix que je voulais posée : « Jamais… Connaissant ma mère, je risque de perdre beaucoup de chose… ». La vie était ainsi faite et je savais que mes parents seraient toujours derrière mon dos de cette façon parce que j’étais un enfant prodige selon eux, bien qu’ils se fichaient royalement de ce que je pouvais faire tant que je respectais leurs putains de volontés…  Qu’importe, j’essayais de faire de mon mieux pour rassurer la mère de mon filleul par rapport à ses craintes actuelles… Elle me disait des choses que je n’arrivais certainement pas à comprendre pour le moment puisque je n’avais pas d’enfant pour ma part, néanmoins pour Elisandra, je ferais vraiment tout pour qu’elle retrouve son sourire d’antan : « Je pense qu’il n’y a que toi qui puisse savoir si tu te sens prête à le demander à Hippolyte. Moi je te dirais que tu devrais le faire un jour mais tu n’es pas obligée de le faire si cela t’effraie… Je pense que ça me foutrait les jetons de ne pas savoir… Mais je ne sais pas pourquoi… Je crois que je comprends ce que tu dois ressentir en fin de compte, je ne sais pas si je supporterais cela. »

« Quand je pense que même parmi les membres de la famille royale de Norvège on est pas aussi à cheval avec les traditions du genre que ta famille… c’est hallucinant, tu trouves pas ? » Elisandra ne pourrait pas vouvoyer sans arrêt les membres de son clan, elle finirait par péter une durite. Déjà que ses relations avec ses parents n’étaient pas forcément au beau fixe depuis son réveil de coma, autant ne pas rajouter une séparation sentimentale supplémentaire en usant d’un vouvoiement n’ayant pas lieu d’être dans la sphère personnelle. « Beaucoup de choses, c'est-à-dire ? Elle serait capable de te renier ? » Wow mais c’était pire que le Moyen-âge son histoire ! Elie resserra autant que possible son étreinte contre la main de Dwight comme pour lui témoigner tout son soutien face à une famille autant ancrée dans des traditions… n’ayant même plus lieu d’être à l’heure actuelle à moins de vouloir à tout prix donner dans l’esbroufe. « Le pire dans tout ça, c’est que j’en dors plus la nuit. Dès que j’ai le malheur de fermer l’œil, je revis mon agression, j’ai des cauchemars atroces, et je me réveille en hurlant… quand je suis pas obnubilée par le fait d’être enceinte et d’accoucher normalement… en bref, je suis une insomniaque très calme comme tu peux le voir ! Bah, je me dis que ça finira bien par passer mais j’ai pas envie qu’Hippo me prenne pour une tarée… »

Parler de ma famille me déprimerait toujours et en plus avec mon mal de tête actuel, c’était encore pire mais je faisais mine de rien ressentir. J’étais connu pour toujours masquer mes émotions bien que je craquais de plus en plus souvent en ce moment. Néanmoins je ne voulais pas craquer en compagnie de mon amie Elisandra parce que je me trouvais chez elle afin de profiter de sa présence vu qu’elle m’avait énormément manqué durant son coma… « Oui mais je ne peux pas vraiment y faire grand-chose vu que c’est tellement ancré dans les traditions familiales que si jamais l’un de nous ne respecte guère le protocole, il ne mange pas en compagnie des autres membres de la famille mais avec les domestiques… Quoique j’avoue que je préfère manger ceux-là, ils sont bien plus drôles mais malheureusement s’ils faisaient trop ami-amis avec nous, ils se faisaient virer… ». Plus je parlais de ma famille, plus j’avais envie de craquer parce que ça commençait sérieusement à me gaver toute cette histoire mais je ne le ferais pas, du moins pas devant mon amie d’enfance. Elle me demandait si ma mère était capable de me renier, j’hochais simplement la tête en signe d’approbation. Qu’importe je tenais toujours sa main en guise de réconfort alors que je l’écoutais attentivement me dire qu’elle ne dormait plus la nuit parce qu’elle ne cessait de faire des cauchemars de son agression… Lorsque j’avais appris ce qui lui était arrivée, j’avais eu l’envie de tuer la ou les personnes qui avaient osé lui faire cela. « Non tu n’es pas tarée, Eli… Il est normal que tu aies du mal à dormir… Après ce que tu as vécu… Moi-même je n’arrive pas à dormir la nuit, parce que je vois le jour de l’attentat à Harvard en janvier dernier où j’ai perdu mon amie Kenzy… Elle est morte dans mes bras avant que je ne tombe dans le coma… ». C’était toujours aussi frais dans mon esprit, ce qui m’arrachait des larmes.

Autant dire qu’Elisandra tombait de l’armoire à chaque nouvelle phrase de Dwight. Il était tombé dans une famille dépourvue de cœur ou quoi ?! Non seulement il pouvait se faire renier à n’importe quelle petite bourde mais en prime, en cas de copinage avec des domestiques, chose que l’on pouvait tout de même considérer comme normale vu qu’il s’agissait tout de même d’être humains, ces derniers risquaient le renvoi… pas étonnant qu’il soit plus heureux à Harvard dans le genre ! « Comment tu fais pour pas les détester alors qu’ils te traitent comme un chien ? C’est pas pour t’influencer que je dis ça hein, mais merde c’est ta vie, ton caractère, tes réflexes, t’as bien le droit d’agir comme tu l’entends crotte ! Sinon on croirait que t’es en direction pour Guantanamo quoi… » souffla-t-elle d’indignation, constatant qu’une famille d’une lignée n’étant même pas royale se permettait des choses que la plupart des têtes couronnées n’imagineraient même pas dans leurs pires cauchemars ! Toutefois, l’indignation d’Elie ne l’empêcha aucunement de se rapprocher de son ami d’enfance afin de le prendre dans ses bras. Son discours l’avait touché, certes, mais son émotion et ses larmes plus encore. « On a tous des casseroles qu’on trimballe, mais toi et moi particulièrement… raison de plus de se serrer les coudes ! Je suis sûre que Kenzy est fière de toi là où elle est, et qu’elle veille sur toi jalousement. Si tu veux, un jour on ira sur sa tombe tous les deux ? »

Parler de ma famille me déprimait à chaque fois mais comme il s’agissait d’Eli, je ne pouvais pas me taire et éviter de parler tout cela. La jeune femme me comprenait beaucoup mieux que certaines personnes qui m’étaient pourtant très proches… Non Elisandra était mon amie depuis pratiquement depuis toujours et aujourd’hui, j’étais le parrain de son fils à elle, Archie. Je faisais de mon mieux pour que mon filleul soit le plus jovial et heureux possible. Je me l’étais promis lorsque ma petite Eli d’amour était entrée dans le coma qui l’avait tenue endormie pendant près de quatre longues années durant lesquelles j’avais fait tout ce que je pouvais pour évacuer mon chagrin qui s’était renforcé quand Kenzy avait perdu la vie… Qu’importe la réaction d’Eli concernant le comportement de mes parents était tout à fait compréhensible. Je ris légèrement lorsqu’elle compara ma vie à Guantanamo. « Je les déteste mais je n’ai guère les moyens de me rebeller pour le moment… Je cherche à trouver ce que je pourrais leur faire ! Je me vois bien dire non le jour du Mariage mais ce n’est pas très original ! Qu’importe, je voudrais que tu sois présente… Accepterais-tu ? Je veux qu’Archie soit là avec Hippo aussi ! ». Nous étions passés sur nos problèmes maintenant et je lui avais expliquée que moi-même, je ne parvenais plus à dormir depuis quelques temps… Je lui disais que je ne me sentais pas bien depuis la mort de Kenzy et inconsciemment, mes larmes avaient fait surface sur mon visage… Elle me prit dans ses bras afin de me dire quelques mots de réconforts… Elle me disait qu’un jour on irait voir la tombe de Kenzy… « Depuis son enterrement, je n’arrive plus à me rendre à sa tombe… C’est impossible, je craque à chaque fois… »

Elisandra ne voulait pas déprimer Dwight, mais elle partait tout de même du principe que ce n’était pas en gardant ses sentiments et ses souvenirs enfouis qu’il risquait d’aller mieux. Parole de scout, et il s’agissait largement d’une histoire de vécu, à vrai dire ! Elle était tellement habituée à sourire pour ne pas montrer ses failles que voir cela chez son ami d’enfance lui serrait le cœur… « Oh tu sais moi j’adore les scoops alors si tu dis non le jour de ton mariage, j’immortalise le truc en photographiant la tronche de tes parents ! Blague dans le groin je ne manquerai ça pour rien au monde, je ferai en sorte qu’Hippo se libère aussi et qu’Archie soit tout beau et tout fier de son parrain » fit-elle en affichant un grand sourire on ne peut plus encourageant. Quoi qu’il advienne, Elie ne serait jamais loin pour le soutenir, c’était une certitude certaine. « Peut-être que tu as besoin de craquer, justement… tu sais, ce n’est pas parce que tu le pleures que c’est une catastrophe, ça prouve ton amitié et je trouve ça beau au contraire. Si un jour tu te sens prêt à y aller, je veux bien t’accompagner avec plaisir, tu sais » fit-elle en serrant subitement sa main.

Mon état était sans précédent mais je ne pouvais craquer face à mon amie d’enfance donc j’essayais d’ignorer l’envie de pleurer en luttant intérieurement. Personne ne savait exactement ce que je ressentais par rapport à toutes ces histoires et je ne voulais en aucun cas le raconter… C’était mon problème et je n’avais besoin de personne mais je savais parfaitement qu’Elie ne me laisserait jamais seul. Comme moi lorsqu’elle était dans le coma : elle était une partie de moi, elle était plus importante qu’une meilleure amie en fin de compte, elle était comme une grande sœur que je n’aurais jamais ! Je l’aimais énormément ! Enfin voilà, je lui avais dit ce que je prévoyais pour mon futur mariage avec la fille des Kennedy et je lui avais assuré que j’aimerais beaucoup qu’elle soit présente ce jour-là. Elle parvint à m’arracher un sourire lorsqu’elle me dit qu’elle adorait les scoops et que si jamais je disais non le jour-j, elle immortaliserait la scène en prenant des photos de la tronche de mes parents. « Ils vont être choqués à mort, j’en suis sûr ! » dis-je légèrement avant de la laisser continuer. Elle ferait en sorte que son Hippo soit présent, ce qui me fit plaisir et Archie serait tout beau et tout fier de moi, son parrain. « Merci… Il sera tout mignon dans son futur costume… Je serais le plus heureux des mariés, si je voyais ma petite famille préférée : vous trois ensemble ! ». J’étais des plus sincères ! On arrivait maintenant à la conversation que j’évitais toujours mais je ne pouvais pas le faire face à Eli… Je l’écoutais essayer de me remonter le moral et au final, elle me dit que si un jour je me sentais prêt à y aller, elle m’accompagnerait avec plaisir… Elle me serra fort la main, poigne que je rendis luttant toujours contre mes larmes. « Je devrais y aller… Avant le départ pour le Summer Camp… »

« En même temps, les parents, si tu les choque pas à mort c’est pas du jeu ! » reprit-elle en ironisant de plus belle, naviguant entre diverses expressions au niveau du visage pour tenter de le détendre en lui faisant oublier tous les soucis pouvant être les siens à l’heure actuelle. D’aucun dirait : mission impossible, mais Elisandra aimait se compliquer la vie, alors elle s’en moquait bien à vrai dire… « Archie sera un vrai petit prince… oh t’es trop mignon tu sais ? Je crois que je n’aurais pas grand-chose à faire pour faire venir Hippo, après tout il t’apprécie beaucoup tu sais. Ce n’est pas pour rien s’il a accepté tout de suite que tu sois le parrain quand je le lui ai proposé ! » ajouta-t-elle pour mieux sentir d’ici l’émotion traversant actuellement le regard de Dwight, et qui la poussa à l’entourer doucement de ses bras. S’il ne voulait pas craquer, tant pis, mais il aurait au moins davantage conscience de son implication à elle dans son bien-être. « Tu sais, j’y vais aussi au Summer Camp, donc si tu as besoin de quoi que ce soit… surtout tu n’hésites pas hein ? Même tard dans la nuit je m’en fous, plus insomniaque que moi en ce moment, ça n’existe pas je crois ! »