valentine w/ katarina aleksovski

« Regardez moi ça ! Deux gouinasses qui s'emballent .. Tu me la prêtes ta copine ? » Derechef, je me tournais dans la direction d’où provenait la voix. J'étais toujours aussi sensible à ce genre d'insultes, à cette animosité que certains éprouvaient envers l'homosexualité et la condescendance qui en découlait m'énervait toujours autant, je prenais cela trop à cœur. Se tournant vers la joyeuse bande, l'inconnue leur faisait face, leur parlant avec une autorité qui me surpris. Elle semblait être familière avec ce genre de situations et je l'imaginais déjà, en habituée, dégainer son spray au poivre, pourquoi pas une bombe lacrymogène et dans un excès de folie; un couteau. A vrai dire, je l'imaginais plutôt comme ça et elle n'en était que plus attirante à mes yeux. Jetant ce qui me semblait être sa cigarette à leur pied, je soupirais. Aimait-elle se foutre dans les ennuis ? Était-elle toujours aussi provocatrice ? Me lançant un regard complice, je l'attrapais par le bras pour lui chuchoter à l'oreille : « Ne les cherche pas, on se tire... » Je la suppliais du regard, peu confiante à l'idée de tenir tête à un groupe de crétins visiblement bien abreuvés. « Bon alors, tu nous la prête ta copine ? » Répéta le grand dadet qui, bien que maigrichon faisait bien deux têtes de plus que moi. « Une autre fois. » Répondis-je dans un sourire forcé qui se voulait poli, ne voulant pas m'embourber dans les problèmes. Certes je ne fuyais d'habitude pas les problèmes mais la source de celui-ci était bien différente à mes yeux des autres soucis que je pouvais avoir. Je n'acceptais que récemment mon homosexualité et la dernière chose que je souhaitais provoquer était une altercation homophobe. Je ne voulais pas être forcée de raconter ça à l'hôpital ou je serais probablement si les choses se déroulaient comme je l'imaginais. Encore pire, que cet incident soit relaté dans le journal. Ne sait-on jamais, à la sortie d'un bar, les nouvelles vont vite. « Tranquille, la soirée fait que commencer ma belle... » Laissait entendre l'un des autres garçons, nous adressant un clin d’œil qui se voulait charmeur mais qui n'eut pour effet que me dégoûter encore plus de la gente masculine. « Sérieux les mecs, une autre fois. » Répondis-je en tirant sur le bras de l'inconnue pour l'inciter à sortir de la ruelle.

Je n'avais pas spécialement envie de chercher les ennuis ce soir, mais il est vrai qu'il était facile de qualifier mon attitude de provocatrice. Après tout c'était quelque chose d'encré dans mon caractère, je ne pouvais m'empêcher de chercher les problèmes. « Ne les cherche pas, on se tire .. » L'inconnue du bar ne se sentait pas à l'aise avec la situation dans laquelle je ne l'avais mise, et c'était aisément compréhensible. Si j'avais été seule, à ce moment même nous en serions déjà venus aux mains. Mais là je ne pouvais pas prendre le risque de blesser une jeune femme que je ne connaissais pas, uniquement parce que je suis impétueuse et plutôt inconsciente. J'acquiesçai, lâcher l'affaire était certainement ce qu'il y avait de mieux à faire. Mais les sombres idiots continuaient leur petit jeu en insistant. La jeune femme m'accompagnant leur répondit poliment. Elle faisait preuve de diplomatie avec eux, chose que je me crois incapable de faire. Mais il ne fallait pas croire qu'eux, ils lâcheraient l'affaire de si tôt. « Tranquille, la soirée fait que commencer ma belle .. » Arrh, ce genre de réflexion m'exaspérait au plus au point. Encore une fois ce fut avec calme et humilité que l'inconne du bar s'adressa à eux. Elle me tenait encore par le bras et je décida alors de contourner la masse pour accéder à la sortie de la ruelle. Je pris alors sa main, essayant de progresser le long du mur, tout en maitrisant au maximum le mépris que je ressentais pour cette bande de crétin. Ce ne fut pas si simple que j'aurais pu le penser, un des abrutis me poussa sur l'épaule, me plaquant contre le mur. « Tu fais quoi la ? On avait pas fini de parler .. » Le repoussant à mon tour, il recula dans la masse. « Si si, on avait fini. » J'attirai l'inconnue encore plus près de moi pour sortir de cette atmosphère assez tendue. Alors que nous avions à peine dépasser le groupe, je me suis dis que, ça y est, on pourrait partir tranquillement ailleurs pour finir la soirée. Je sentis soudainement une main posée sur mon épaule. Je soupira bruyamment, il fallait vraiment pas qu'ils commencent à chercher les ennuis, car je faisais des efforts pour rester calme, et il ne me rendait vraiment pas la tâche facile. « Qu'est ce que tu as fait là ? Tu l'as poussé ? Tu nous provoques ? C'est vraiment pas cool ça .. » J'enlevai la main de mon épaule, tachant de rester calme le plus longtemps possible. « Tu veux te battre c'est ça ? » Je commençai à perdre patience. « Ecoute, lâche nous ok ? Si tu cherches quelqu'un sur qui te défouler, va voir ailleurs. Parce que là tu commences sérieusement à me prendre la tête .. » Je le fixais droit dans les yeux, attendant qu'il se décide. Il avait deux choix, soit il débutait les hostilités en s'en prenant à moi, soit lui et sa petite bande de crétins finis s'en allaient.

« Qu'est ce que tu as fait là ? Tu l'as poussé ? Tu nous provoques ? C'est vraiment pas cool ça .. » « Je crois qu'il y a un malentendu là... » Dis-je lorsque la tension grimpait au sein de notre petit groupe. « Personne ne veut se battre les gars... » S'il vous plait, pas ça... je n'avais rien contre le fait de me défendre moi et mon honneur mais je sentais qu'on appréciait pas vraiment l'homosexualité et même si j'assumais le fait de l'être pleinement, je n'acceptais pas encore vraiment le regard des autres. « Ouh... » Riant à gorges déployées, le groupe fit mine d'avoir peur, plaisantant entre eux puis s'avançant vers nous dans la foulée comme pour nous défier de commencer les hostilités. « Et ben ma belle, je t'en prie. » Ajouta l'un des garçons, agitant sa bière devant lui comme s'il pensait que ça lui donnait l'air cool. « Sérieux les gars... il y a un malentendu. Une autre fois... » Dis-je en essayant de nous sortir de cette situation alors que la belle inconnue m'avait attirée près d'elle, comme pour me protéger. J'appréciais sa fougue et sa nonchalance mais il était prétentieux de croire qu'elle pouvait à elle-seule calmer le jeu avec tous ses imbéciles. « Ah... on fait la farouche maintenant... t'avais pas l'air coincée dans l'bar. On allume et puis après on fait rien... toutes des salopes hein Jake. » M'avançant soudainement et sans réfléchir, je passais devant la jeune femme pour faire face à mon tour au groupe de garçons qui riaient si fort qu'ils m'en donnaient mal au crâne. « Alors la différence doit être qu'avec toi, j'ai rien envie de faire. » Se moquant ouvertement de moi, je sentis la tension monter alors que l'un d'entre eux, cet impétueux, s'avança vers moi pour me toucher la joue. Je le chassais rapidement, le giflant au passage sans avoir ne serait-ce qu'une seconde réfléchi à ce que je venais de déclencher. Bouche ouverte, je me retournais vers l'inconnue comme pour lui dire : hum, j’espère que tu peux courir parce que...
Ne me reculant néanmoins pas d'un centimètre, je sentis dans l'atmosphère que tous allaient agir en même temps, attendant probablement un signal, même imperceptible de ce qui semblait être le leader du joyeux groupe. Hésitant à prendre mes jambes à mon cou, j'eus la curieuse impression que le temps s'était arrêté et que nous fonctionnons au ralenti. Il me semblait s'être passé une éternité entre le moment ou j'avais ouvert la bouche et celui ou je m'étais tournée vers l'inconnue. Rien qu'un moment, aussi court soit-il qui me donnait l'impression d'avoir laissé passer toute ma vie...