Face à sa moue honteuse, Charlie rit doucement.
« Mais non, je sais que tu n'as pas dit ça. » dit-elle avec un sourire. Emrys répondit alors à sa question. Qu'il lui dise qu'elle lui avait manqué aurait pu passer pour une simple gentillesse mais l'écrivain la serra dans ses bras et l'embrassa à la commissure de ses lèvres. Charlie ne s'y attendait pas. Si ce n'avait pas été Emrys, elle n'aurait eu aucun problème à réagir, aurait passé ses mains dans son dos puis se serait détachée avec un grand sourire. Mais elle était paralysée. Pourquoi fallait-il qu'elle soit sociable ordinairement et si... Si effrayée quand il s'agissait d'Emrys ? Pourquoi ne parvenait-elle pas à faire comme tout le monde, à montrer quand elle aimait quelqu'un ? Son comportement était absolument illogique. Elle-même se trouvait stupide. Malgré tout, son corps restait figé. Elle avait beau apprécier l'étreinte du Winthrop, elle ne parvenait pas à bouger. Mais si elle ne faisait rien, Emrys allait croire qu'elle n'appréciait pas son geste – voire lui-même. Et si elle continuait comme ça, il allait finir par se lasser de son incapacité à agir avec lui et finirait certainement par aller voir ailleurs – il aurait certainement raison. Sauf qu'elle se rendait compte que cette perspective ne l'enchantait absolument pas. Charlie parvint à se mettre en action, mais elle se dégagea doucement des bras du Winthrop. Elle baissa les yeux, gênée par elle-même. Il fallait qu'elle fasse quelque chose. Qu'elle montre à Emrys que ça ne la dérangeait pas. Au moins qu'elle cesse d'être muette et bêtement immobile.
« Quand j'étais petite, mon frère... » Elle s'arrêta une seconde et jeta un coup d'œil à l'écrivain. Il ne devait même pas savoir qu'elle avait un frère, elle n'en parlait jamais - pire, elle en avait deux !
« ... Mon frère me disait que si quelqu'un... Enfin... Qu'on ne tomberait pas amoureux de moi, mais qu'on s'envolerait. Ça me faisait rire. » dit-elle avec un sourire nostalgique. Les idiots jeux de mots d'Alban.
« Je crois qu'il n'avait pas prévu que je ne parvienne pas à suivre le mouvement. » Elle restait comme une idiote, pétrifiée, accrochée au sol, incapable de bouger comme si elle était enracinée. Alors qu'en temps normal elle était si vivante. Mais elle devait absolument trouver la force de se désancrer. D'être... Naturelle, voilà tout. Elle cessa de fuir le regard de son ami, portant le sien dans ses yeux.
« Emrys... » Elle aurait voulu dire quelque chose, continuer, mais elle n'y parvenait pas. Elle abandonna, changea de ton.
« Je dois être la pire cavalière que tu aies jamais eue. » dit-elle dans un rire gêné, l'air désolé. Elle décida de faire quelque chose de gentil qu'elle savait bien faire, pour se rattraper. Elle attira à son tour Emrys dans ses bras et le serra contre elle. Les câlins, ça, au moins, quand elle n'était pas paralysée du moins, elle réussissait. Elle n'avait pas besoin de dire « Désolée de ne pas parvenir à te rendre la pareille, ce n'est pas que je ne veux pas, c'est que je ne suis pas habituée à ce genre de sentiments et que je n'arrive pas à dépasser mon stress. Mais t'inquiètes pas, hein, moi aussi je t'aime bien. Vraiment bien, même. », c'était intrinsèque. Le meilleur moyen pour consoler/exprimer qu'on était désolé/signifier qu'on tenait à quelqu'un. Exactement ce qu'il lui fallait.